Tous les articles par Katia Bayer

On n’est pas sérieux quand on a 17 ans

Le Festival Silhouette, dont nous étions à nouveau partenaires cette année (dernière édition en date : 24 août-1er septembre), poursuit depuis plus de 17 ans son travail d’exploration du nouveau cinéma international, en misant encore et toujours sur le plein air, les concerts, la mixité et la gratuité. Après vous avoir proposé cet été une sélection de films visibles en ligne piochés dans différentes sections du festival, voici un aperçu plus large de quelques productions françaises valant le détour/ le coup d’œil/la grosse marque d’intérêt.

Élu à juste titre Grand Prix de la sélection internationale, Le Grand Calme de Thomas Petit est un film produit par la Fémis que nous avions repéré pour la première fois à Angers (et que nous avions diffusé en présence du réalisateur dans le cadre de nos Rencontres professionnelles). Le film démarre par une rencontre improbable entre un lamantin et un type en short, mais s’intéresse surtout au premier jour d’un stagiaire dans une boîte de graphisme dont l’un des employés tire sa révérence le lendemain même.

Le film, doté d’un bon scénario et d’un jeu d’acteurs assez touchant, raconte de manière très simple, par jolies touches et légers décalages, la solitude des uns et des autres dans le monde de l’entreprise, le regard d’un ado sur ses pairs plus âgés, la distance de mise entre les êtres, mais aussi leurs peurs et leurs pudeurs. Film d’école réussi, Le Grand Calme touche, de façon discrète et juste.

En complément, trois films et un clip nous intéressent particulièrement. En premier, La Bouche de Camilo Restrepo, un film sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs en 2017, repéré également par les sélectionneurs de Silhouette cette année, qui se démarque de bien d’autres productions par sa forme et son originalité. Le film aborde la question du deuil et de la vengeance à travers le personnage d’un homme venant de perdre sa fille assassinée par son mari violent.

Le résultat, une proposition étonnante de cinéma, mêlant réel et irréel, est « un film musical interprété par le maître percussionniste guinéen Mohamed Bangoura, alias Diable rouge, librement inspiré de sa propre histoire ». Doté d’un plan de fin dérangeant et nécessaire, il a été projeté le 7/10 dernier à notre après-midi de courts « Sunday Shorts » au Central Park (Paris), en présence de sa productrice, Helen Olive (5 à 7 Films).

Autre film passionnant, celui de Vergine Keaton, Le Tigre de Tasmanie, ayant fait ses premières pattes à la Berlinale cette année. Keaton qu’on a eu le plaisir de découvrir en son temps avec Je criais contre la vie. Ou pour elle (2009) revient, après un autre projet (Marzevan, 2015), avec ce très beau Tigre, film énigmatique porté par des ralentis et de la musique top comme on les aime. Synopsis ? « Un tigre de Tasmanie tourne en vain dans l’enclos d’un zoo. Un glacier fond lentement. Face à sa disparition annoncée, la nature déploie sa fureur, déborde l’image et résiste à l’extinction par la métamorphose ».

Le film, pas forcément hyper accessible au premier regard, a besoin d’écrans (géants), de temps (une deuxième vision, une disposition d’esprit) et d’une bonne acoustique. Sa réalisatrice, animatrice autodidacte, s’intéresse comme à ses débuts au cycle de la nature, au son, à la création/démolition, à l’espace, à l’expérience. On en sort bluffé et ravi de retrouver après un temps d’absence une réalisatrice repérée il y a 10 ans et déjà absorbée par de nouvelles recherches graphiques et narratives.

Autre animation, Love He Said d’Inès Sedan, illustre la lecture d’un poème (LOVE) de l’auteur américain controversé Charles Bukowski. Contribution-témoignage originale à l’oeuvre du poète sulfureux et underground, ce documentaire animé montre un autre visage de Bukowski, loin de la provocation et de la contestation auxquelles on l’associe bien souvent : celui d’un homme seul, fragilisé, en demande d’attention et d’amour.

Le film mêle l’enregistrement de la lecture originale du poème en 1973 à San Francisco, des images d’archives, de la peinture et de l’animation. Les bruits d’ambiance (la foule, les cris, les rots du poète, son désir d’alcool, ses silences) s’intègrent joliment aux couleurs et aux mouvements peints d’Inès Sedan. On déplorerait presque la durée trop courte du film (6 minutes), mais elle colle à la lecture du poème. On se rabat pour le coup au synopsis contextuel du film, disponible sur le site de la production, Lardux Films , sur le film en ligne (voir ci-dessus, merci Court Circuit) et sur les enregistrements d’époque disponibles sur YouTube.

Dernier projet découvert dans les tablettes de Silhouette, un clip pour changer, celui de Dreamers de Clément Froissart, réalisé par Guillaume Gagniard et Virgile Texier. Un film à voir seulement sur smartphone qu’on se permettra de reproduire ici dans son format d’origine. Le clip réalisé pour smartphone est un portrait d’ado (Zia, 15 ans) commentant son quotidien, le mec qui l’attire (Enzo), sa vie, sa best (Margaux). Le temps d’un dream, le clip, un brin téléphoné, s’offre messages et vidéos, images de fêtes et de beaux gosses, générique typographique et petite lucarne de réalisateurs. Désir, jalousie, messages vidéos et personnels, réel, fiction, notes estivales et images léchées s’entremêlent dans ce format décalé, à la verticale.

Tout comme Le Grand Calme, La Bouche, Le Tigre de Tasmanie et Love He Said, Dreamers participe à cette diversité de propositions et d’attention pour la jeune création recherchée par Silhouette d’année en année. En route pour les 18 ans, l’âge adulte du festival…

Katia Bayer

Short Screens #89: contes fantastiques

En cette fin d’octobre, Short Screens fête à sa manière les esprits, mystères, fantômes et étrangetés en tous genres avec une série de courts métrages à vous faire tressaillir et frissonner de peur et de plaisir !

Rendez-vous le jeudi 25 octobre à 19h30, au cinéma Aventure, Galerie du Centre, Rue des Fripiers 57, 1000 Bruxelles – PAF 6€

Visitez la page Facebook de l’événement ici !

PROGRAMMATION

Babysitting Story de Vincent Smitz, fiction, Belgique, 2014, 21′

Deux jeunes filles, Sarah et Julie, se rendent chez la tante d’un ami pour y faire du baby-sitting. Une fois seules dans la maison, et alors qu’un orage gronde, Sarah profite de la naïveté de Julie pour lui raconter une histoire terrifiante qui se serait réellement passée dans la région.

Vincent de Tim Burton, animation, Etats-Unis, 1982, 6’25”

Sous son apparence d’enfant bien élevé, Vincent, un petit garçon de 7 ans, rêve de transformer son chien en zombie, faire tremper sa tante dans une cuve de cire ou libérer son épouse, enterrée vivante…

De Vijver de Jeroen Dumoulein, fiction, Belgique, 2015, 17’

Début des années 1900, Christiane, une jeune fille de 12 ans, vit dans un grand château avec sa mère malade et une tante stricte mais dévouée. Derrière le château se trouve un étang dont la noirceur cache un secret. Christiane veut savoir lequel…

Les effaceurs de Gérald Frydman, animation, Belgique, 1991, 6’05”

Un homme fuit, le visage dans les mains. Il le cache, car celui-ci refuse de s’effacer.

Bételgeuse de Bruno Tracq, fiction, Belgique/Irlande/Etats-Unis, 2016, 31’30’’

Depuis que son compagnon Elliot est mort dans un accident de voiture, Sarah, astrophysicienne, est prise de crises de panique dès qu’elle passe sa porte. Elle vit enfermée chez elle et passe ses journées à refaire ses calculs. Betelgeuse va exploser et la supernova pourrait balayer la vie sur terre.

Jackie Berroyer continue de se demander ce qu’on lui trouve

Il a plus d’une corde à son arc. Trublion des plateaux de Canal +, tour-à-tour scénariste, écrivain, acteur, il est à lui tout seul l’élégance discrète et la nonchalance joviale. Vous avez deviné, c’est bien évidemment de Jackie Berroyer dont il est question. Entre deux projections de l’excellent Étrange Festival où il présentait une carte blanche en septembre, il a joyeusement accepté de répondre à quelques-unes de nos questions. À moins que ce ne soit le contraire. Ce qui est sûr c’est que l’on serait bien resté la journée à lui parler de cinéma et de bien d’autres choses…

© Les Julien

Ndlr : Jackie Berroyer sort tout juste du film La Vengeance est à moi de Shōhei Imamura et est encore habité par le film ainsi que par les autres séances récentes auxquelles il a assisté, il entame la discussion sans même que l’on ait besoin de poser de question.

Jackie Berroyer : Je trouve qu’il y a un grand vide aujourd’hui dans beaucoup de films affiliés au genre fantastique. Il y a des “poignards dans les yeux”, des gens qui marchent en tapinois dans l’ombre, il y a tout ce que l’on veut. La forme est parfois d’ailleurs assez bonne, mais cela ne raconte pas grand chose, et là c’est sidérant.

Parlons un peu de votre carte blanche, cette année, à l’Étrange Festival.

J.B. : J’ai accepté cette carte blanche, mais avec l’envie de prendre des risques sur certains films car je ne me souvenais pas forcément d’eux. J’avais surtout gardé une forte impression à la première vision. Par exemple, Exotica (Atom Egoyan, 1994), je ne l’avais pas revu depuis sa sortie. Quelqu’un de l’équipe du festival m’a dit : « Jetez-y quand même un coup d’œil, ça a pris un petit coup de vieux ». Esthétiquement, le film est peut-être ancré dans les années 90, mais le reste, le fond, l’ambiance, est bien là. On sait bien qu’au cinéma, c’est ringard vingt ans après, fantastique quarante ans plus tard. Parfois, effectivement, il y a des ratages esthétiques, un peu comme dans la musique, l’abus du vocoder (ou auto-tune) par exemple ; je ne suis pas sûr que l’on dise que ce sera extraordinaire dans cinquante ans. L’abus des gadgets, des dernières nouveautés technologiques, cela a tendance à mettre un coup de vieux aux films. Il y a aussi le cas des œuvres qui deviennent ringardes pour une génération particulière alors que pour les autres générations (avant ou après), ce n’est pas du tout le cas.

L’idée était donc de profiter de cette carte blanche pour revoir les films pour lesquels vous aviez eu un coup de cœur.

J.B. : J’ai joué là-dessus effectivement, ce n’est pas vraiment un pari que j’ai fait, plutôt une paresse (rires) ! Je me suis dit que le public du festival en savait au fond beaucoup plus que moi sur le genre. J’ai proposé un film, on m’a dit qu’il était passé l’année dernière, pour un autre, que c’était trop connu. Puis, je me suis rappelé deux films que j’avais vus à l’époque et qui m’avaient beaucoup frappé : Exotica et La Vengeance est à moi (Shōhei Imamura, 1979). Et pour compléter, je me suis dit que ce serait l’occasion de caser et de revoir des films chers auxquels j’ai participé, ceux de Jean-François Stévenin et Patrick Bouchitey. Et pour la dernière séance, j’ai réfléchi à quelque chose de proche de moi, avec des courts métrages, des formes courtes inédites. Je possédais des trucs divers dans de vieilles cassettes, des tentatives de sketches à moitié finis. J’ai eu envie de les numériser, sinon cela serait allé à la poubelle. Puis, j’ai eu l’idée de traiter toute cette matière sous la forme d’un faux documentaire, un mash-up d’images. J’ai appelé ça Tais-toi !, c’est une sorte de galop d’essai que j’améliorerai plus tard pour le proposer dans un circuit de courts métrages.

Quels sont les autres courts métrages présentés ?

J.B. : Il y a Mission Socrate (2009) et Clonk (2010). Et aussi deux chansons du Professeur Choron à l’Olympia, avec moi-même dans l’orchestre (rires). Edouard Baer m’avait conseillé à l’époque : « Tu devrais aller voir les mecs qui font le Cabaret de Philosophie ». J’y suis allé, ils occupaient un centre culturel du côté de Quai de Jemmapes ou pas loin, dans lequel ils jouaient à même l’entrée ou dans l’escalier. Et c’était quelque chose d’assez fou, drôle, intelligemment marrant. Ils étaient issus du circuit de la rbue et on ne les voyait jamais dans les médias. Et pourtant, on avait envie qu’il reste une trace de tout cela. Je me suis dit qu’il fallait qu’on les filme. Cela s’est recoupé avec le fait qu’ils avaient commencé à faire des petites choses sur internet avec Bertrand (ndlr : Lenclos, réalisateur de Clonk et co-réalisateur avec Jackie Berroyer de Mission Socrate).

On a tourné ces films vraiment vite fait, en trois à quatre jours. Il se trouvait qu’à un peu plus de cinquante bornes de Toulouse, un bled appelé Graulhet, réputé auparavant pour ses mégisseries (ndlr : tannages des peaux de bêtes) pouvait accueillir les tournages. Le secteur industriel s’étant effondré, l’endroit, devenu déshérité, contenait beaucoup de friches abandonnées et les artistes issus de la rue les ont investies. Ils pouvaient facilement répéter des spectacles et ranger leur matériel. Bertrand habite là-bas et connaissait du monde pour donner un coup de main sur le tournage. On a fait les deux films comme cela. Un peu vite, avec des scènes que l’on n’a pas pu tourner à cause de problèmes d’argent ou de lumière. Mais dans l’ensemble, malgré les défauts, il reste quelque chose, un esprit.

Il y a un ton enlevé que l’on retrouve aussi dans vos différents films (comme scénariste, réalisateur ou acteur), on sent une patte, un esprit. Qu’est-ce qui, selon vous, pourrait être le trait d’union entre tous vos projets ?

J.B. : C’est une complicité, comme il y en a eu avec Hara Kiri ou avec Les Nuls. Sauf qu’il n’y avait pas l’argent qui puisse permettre de travailler de façon plus confortable. Mais c’était déjà pas mal. J’ai regretté un peu que Mission Socrate (ndlr : pour ceux qui ne connaissent pas le film, il raconte l’histoire de trois hommes qui, lors d’une rencontre fortuite au hammam, décident de remonter le temps afin de détourner Socrate de la pratique de la philosophie – qui leur semble être à la source de la décadence croissante et inéluctable de notre société) ne prenne pas plus d’envergure. Je connais le destin des courts et des moyens métrages… Il suffit d’arriver à ce que le film fasse 3/4h ou une heure de plus et après, le film existe dans le circuit des festivals, il peut être programmé à la télévision, on y prête plus d’attention, il peut même devenir culte.

Mais ça c’est arrêté là… Puis chacun est reparti faire ses trucs dans son coin. Les trois acteurs du film ont un projet de long métrage, à leur façon, dans le même esprit. De mon côté, je dois jouer aussi dans un film. Vous vous rappelez de La Chanson du Dimanche ? Alex, l’un des deux barbus de La Chanson du Dimanche, celui avec les cheveux longs, est devenu réalisateur. Il a réalisé des longs métrages, plutôt des comédies, dont l’une dans laquelle je joue avec le fils Bedos (ndlr : Amour & turbulences d’Alexandre Castagnetti, 2013). Il a une nouvelle comédie qu’il devrait tourner en octobre et il m’a proposé un rôle. Il m’a dit qu’il tournerait avec les trois compères du Cabaret de Philosophie. Il va donc tourner avec eux le long métrage que l’on aurait pu faire ensemble, il y a quelques années, au moment de Mission Socrate

Comment choisissez-vous vos projets ? Est-ce que ce sont des coups de cœur ? Est-ce que vous aimez suivre des réalisateurs, comme par exemple Fabrice du Welz ?

J.B. : Ce sont avant tout des hasards. Pour Fabrice du Welz, c’est parce que je travaillais encore à Canal +, et son producteur aussi. À l’époque, ils préparaient ensemble un court métrage (ndlr : Quand on est amoureux, c’est merveilleux, 1999). Il y avait un acteur qui était tombé en panne en Tunisie et il ne pouvait plus venir sur le plateau. Le producteur a pensé à moi et a dit à Fabrice : « Demande à Berroyer ». J’étais en charge d’un gosse et ce n’était pas du tout le bon moment. Ils ont un peu insisté et j’ai fini par dire oui. J’ai embarqué le gosse qui est d’ailleurs revenu très content parce que du Welz lui avait filé un robot géant ! J’ai donc participé à ce court métrage que l’on trouve en bonus sur le DVD du film Calvaire. À la fin du tournage, du Welz m’a dit : « C’était cool. Quand j’aurai la chance de faire mon long, je penserai à toi ». Et il l’a vraiment fait, contrairement à la plupart qui oublient.

C’était assez drôle parce que quand le long métrage (Calvaire) se préparait, il m’a donné le scénario et m’a dit : « Tiens, il reste des rôles, s’il y a quelque chose qui t’intéresse… », sans me dire forcément lequel. J’ai mis le doigt sur le personnage de Bartel et il m’a dit : « C’est embêtant parce que ce rôle-là est prévu pour Philippe Nahon ». Puis il a réfléchi et m’a fait faire des essais avec Laurent Lucas. Et il s’est rendu compte d’un truc : avec Nahon, dès qu’il ouvre la porte, on sait sur son visage que ça va barder. Il a repéré sans doute chez moi comme une fragilité et l’a utilisé pour le film. Cela faisait gagner un peu de temps avant de filer une angoisse au spectateur.

Ce sont souvent des hasards qui m’amènent sur des projets. Il n’y a pas longtemps, j’ai joué sur un court métrage pour Claude Le Pape qui est principalement scénariste (ndlr : notamment de Petit Paysan, Cesar du meilleur acteur pour Swann Arlaud et Cesar du meilleur premier film). Son court métrage est pas mal, ça s’appelle Cajou. Je joue dedans un vieux qui perd un peu les pédales. Comme elle était contente et qu’elle écrit pour le réalisateur Thomas Lilti dont le film Hippocrate vient d’être décliné en série sur Canal +, elle a suggéré ma collaboration dans la série. Grâce à ça, j’ai joué un médecin en retraite qui vient donner un coup de main à l’équipe de jeunes qui a des problèmes et qui manque de personnel. Thomas Lilti m’a dit : « J’aime bien ton personnage, je l’aurai bien fait revenir dans la deuxième saison, mais il n’y a pas vraiment de raison, l’équipe s’est reconstituée, il n’ont plus vraiment besoin d’aide… ». Une fois chez moi, je lui envoie un mot et je lui dis que mon personnage pourrait revenir mais en tant que patient. Cela l’a intéressé, il m’a dit qu’il y penserait au moment de l’écriture. Je me suis peut-être trouvé du travail pour dans quelques mois… (rires) !

© Les Julien

Vous êtes aussi scénariste, pourriez-vous nous parler de cet autre métier qui est aussi le vôtre ?

J.B. : C’est-à-dire que, d’une certaine façon, je suis un peu touche-à-tout et quand on ne m’appelle pas, je ne m’angoisse pas comme le comédien qui ne fait que ça… Mais franchement, je n’aime pas le dire parce qu’après on va dire que je suis amer… Je trouve que l’on ne m’appelle pas beaucoup, on m’utilise très peu en général. En tant que scénariste, presque pas. C’est comme ça, on se fait oublier. Je suis quelqu’un de très replié, retiré. Je ne vais pas faire du charme chez les uns et les autres. De temps en temps, à l’occasion d’une intervention quelque part, les journalistes écrivent à mon sujet « un acteur trop rare ». On dirait que les réalisateurs tiennent à ce que je garde ce statut honorable. C’est peut-être une conspiration pour me préserver du mal que l’on peut dire des gens quand ils se mettent à avoir du succès (rires).

Je ne suis ni frustré ni insatisfait, mais je reste attentif et tout à fait disposé à jouer ou à écrire des choses. Je me dis parfois que j’aimerais bien jouer un bonhomme qui ne soit pas un vieux pittoresque qui perd les pédales. J’inspire cela, alors que je pourrais très bien jouer un directeur de banque avec une certaine mentalité. Pas forcément le grand-père dans une version attendue. Simplement, un homme qui a cet âge-là… J’ai fait un jour une plaisanterie à ce propos et je m’en suis ensuite inquiété. Je racontais un peu la même chose à un journaliste et il m’a demandé : « Qu’est-ce que vous aimeriez jouer ? ». J’ai répondu : « J’aimerais jouer un personnage qui serait un homme très intelligent mais on donne toujours ça à des types qui sont obligés de composer… » J’ai vu que ça ne l’a pas fait rire du tout alors je me suis dit : « Merde, il va croire que je suis prétentieux… » (rires) ! C’est l’heure ?

Ndlr : On nous fait signe que l’interview est finie, Jackie Berroyer repart vers une autre salle obscure, non sans nous avoir salués chaleureusement avant… Il ne voulait pas rater Mandy le nouveau film attendu de Panos Cosmatos, avec Nicolas Cage.

Propos recueillis par Julien Beaunay et Julien Savès

Remerciements à Estelle Lacaud, Antoine Herren et toute l’équipe de l’Étrange Festival

Jusqu’à la garde de Xavier Legrand

Dans le bureau d’une juge, le couple Besson se dispute la garde de leur fils Julien 12 ans. Le premier long-métrage de Xavier Legrand reprend le thème de la violence conjugale qu’il avait traité avec éclat dans son court métrage multiprimé Avant que de tout perdre (Cesar du Meilleur court métrage 2014 et Grand Prix National au Festival de Clermont-Ferrand 2013).

Jusqu’à la garde raconte le divorce d’un couple, où la mère, Miriam (Léa Drucker), accuse le père, Antoine (Denis Ménochet), de violences et demande la garde exclusive de leur fils mineur, pour le protéger. Leur fille aînée, elle, est presque majeure. La juge estimant que les droits du père sont bafoués, accorde une garde partagée.

Dès la première scène, le cadre du thriller est posé. Le malaise, la tension, le doute sur la parole des parents aussi. Et on se dit que non, ça ne peut pas être aussi facile, que les histoires de mari abusif et de père violent on en a entendu mille fois. Antoine a le physique, les épaules massives, la corpulence de la violence et le silence pesant qui oscille entre injustice et souffrance. On essaie de se convaincre que le film veut nous emmener autre part. Et si c’était Myriam, la mère prostrée et mutique, qui manipulait la parole des enfants ?

Mais non, le premier long-métrage de Xavier Legrand nous emmène bien là où on l’attend, dans la respiration coupée de la violence conjugale, dans l’étau d’un mari autour de sa femme, dans la peur et les non-dits. Car, plus le film avance, plus le doute se dissipe. C’est bien « l’autre » le danger. Pourtant, comme la juge, comme la femme, comme le fils, le spectateur est manipulé par ce personnage du père, puissant et touchant à la fois.

Jusqu’à la garde dépeint un manipulateur du point de vue de ses ennemis, un drame social et contemporain que Xavier Legrand choisit de traiter de manière innovante. Ici, la violence domestique est sortie du foyer, le lieu dans lequel elle s’exerce. Le réalisateur la met en scène dans l’espace public des routes et des parkings. Et c’est sans pathos ni sentimentalisme, que le film nous plonge dans l’enfer et la fuite d’une mère et ses enfants face au père ennemi. 1h30 durant, il parvient à tenir le spectateur dans un état de tension extrême.

Pour sa première réalisation longue, le réalisateur a choisi de conserver le casting qui avait fait le succès du court et c’est encore une réussite. Thomas Giora, la nouvelle recrue, est bouleversant dans ce premier rôle à fleur de peau. Pour sa première apparition au cinéma, le jeune garçon est une révélation.

Le réalisateur venu du théâtre nous montre une fois de plus que le cinéma est un terrain qui lui va bien. Jusqu’à la garde, sorti début 2018, a emporté les faveurs de Venise en remportant le Lion d’argent pour la meilleure mise en scène et le Lion du futur pour une première œuvre. Il a également raflé le prix du Jury au Festival international du film de Saint-Jean-de-Luz.

Un film nécessaire pour mettre en lumière des faits toujours tristement d’actualité, que le réalisateur qualifie d’« homicide ». Dans les sept premiers mois de 2018, 27 728 faits de violences sexuelles ont été recensés par les forces de l’ordre, contre 22 533 au cours de la même période en 2017. Soit une augmentation de plus de 23%.

L’oeuvre est sortie en juin en DVD et Blu-Ray chez l’éditeur Blaq Out, avec en bonus, le making-of du film, un entretien éclairant avec Edouard Durand, juge des enfants, le court-métrage Avant que de tout perdre et le commentaire audio du réalisateur.

Emilie Sok

Sunday Shorts : Projection Format Court, dimanche 7/10 au Central Park Paris !

Après avoir participé aux Séances au top cet été au Point Ephémère, Format Court vous donne rendez-vous dimanche 7/10 à 17h au Central Park (5 Rue du Jour, 75001 Paris) pour une toute nouvelle projection de courts, en présence de Agathe Riedinger (réalisatrice de J’attends Jupiter), Helen Olive (productrice de La Bouche de Camilo Restrepo, 5 à 7 Films) et Jan Sitta (réalisateur de Avaler des couleuvres).

Programmation

– J’attends Jupiter d’Agathe Riedinger, fiction, 22′, France, 2018, Germaine Films, présélectionné au César du meilleur court-métrage 2018, en présence de la réalisatrice

Synopsis : Liane, vingt-et-un ans, vient d’apprendre qu’elle était retenue pour participer à une émission de télé-réalité. Persuadée que sa vraie vie va enfin commencer, elle délite tout ce qui l’entoure pour embrasser avec radicalité ce grand chamboulement.

– Une tête disparaît de Franck Dion, animation, 9′, France, Canada, 2016, Papy3D Productions, Office national du film du Canada (ONF), Cristal du court métrage au Festival international du film d’animation d’Annecy en 2016

Synopsis : Jacqueline n’a plus toute sa tête mais qu’importe, pour son voyage au bord de la mer, elle a décidé de prendre le train toute seule, comme une grande !

Article associé : la critique du film

– La Bouche de Camilo Restrepo, fiction, 19′, France, Colombie, 2017, 5 à 7 films, sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs 2017, en présence de la productrice Helen Olive (5 à 7 films)

Synopsis : Un homme apprend la mort brutale de sa fille, assassinée par son mari. Temps suspendu pendant lequel oscillent besoin d’apaisement et désir de vengeance. Un film musical interprété par le maître percussionniste guinéen Mohamed Bangoura, alias Diable rouge, librement inspiré de sa propre histoire.

– Avaler des couleuvres de Jan Sitta, fiction, 19′, France, 2017, Takami Productions, présélectionné au César du meilleur court-métrage 2018, en présence du réalisateur

Synopsis : Son CAP tout juste en poche, Souad décroche un premier emploi dans un salon de beauté. La chance semble lui sourire.

– Wednesday with Goddard de Nicolas Ménard, animation, 4′, Royaume-Uni, 2016, Nexus Studios, Prix du Public et Prix Spécial du Jury aux Sommets du cinéma d’animation à Montréal en 2016

Synopsis : Une quête pour le développement spirituel mène à la romance et au désespoir.

Article associé : la critique du film

En pratique

Dimanche 7/10, 17h-19h : projection & rencontres. Entrée libre

Central Park Paris : 5 Rue du Jour, 75001 Paris (métro : Châtelet – Les Halles)

Event Facebook : https://www.facebook.com/events/285839362027343/

2 films sélectionnés aux César 2019, à voir en ligne

Il y a 10 jours, 36 nouveaux courts-métrages (24 fictions, 12 animations) sortaient du lot des productions françaises pour être éligibles aux prochains Cesar du meilleur film de court métrage et du meilleur court métrage d’animation.

Nous vous proposons d’en (re)découvrir 2 d’entre eux disponibles sur la Toile.

Les Indes galantes de Clément Cogitore (3e Scène, Les Films Pelléas, L’Opéra de Paris)

Féroce d’Izù Troin (Folimage Studio)

Le film de la semaine : Prends-moi de Anaïs Barbeau-Lavalette et André Turpin

Fiction, 10′, 2015, Québec, By-Pass Films

Amour, sexualité, tabou, handicap et milieu hospitalier. Film à quatre mains, celles de Anaïs Barbeau-Lavalette et André Turpin, Prends-moi (2015), s’illustre par le caractère intangible de son sujet, la complexité de ses enjeux, une très belle photo, des travellings parlants et un regard direct, sans fard sur la nudité filmée à l’écran.

Un jeune infirmier vient en aide quotidiennement à des handicapés vivant dans un centre spécialisé. Ils les accompagne aussi – cela fait partie de sa fonction – dans une « chambre d’intimité », un lieu permettant aux résidents d’avoir des relations sexuelles « encadrées » quand ils le souhaitent. Confronté à ses limites, au respect de l’intime,  il se retrouve désemparé face à l’intensité du désir de deux jeunes pensionnaires.

Filmé au plus près des corps et des visages, ce court déroutant et important a été vu à l’international (Sundance, Toronto, pour les plus gros festivals) avant de rejoindre la Toile cet été. On en profite pour lui ouvrir notre fenêtre.

Katia Bayer

Arrêt du festival Paris Courts Devant

Le festival Paris Courts Devant dont nous avons été partenaires en 2011 – à l’occasion duquel nous avions primé le très beau et très étrange The Origin Of Creatures de Floris Kaayk (visible ici) – a publié il y a quelques jours un communiqué annonçant la fin du festival, après 13 éditions, pour raisons budgétaires. Nous publions ce texte signé par Rémi Bernard, son Délégué Général, dans son intégralité, par solidarité avec le festival, ses dirigeants et ses équipes.

© William Lounsbury

Pourquoi il n’y aura pas d’édition 2018 de Paris Courts Devant ni de Ça tourne en Ile-de-France !

Malgré le dévouement, la détermination, l’ingéniosité et la passion de toute l’équipe de Paris Courts Devant, le constat, implacable, s’aggrave d’année en année : les moyens disponibles pour mettre en œuvre un festival international de courts métrages professionnel digne de ce nom à Paris et en Ile-de-France sont réellement insuffisants.

Qu’il provienne de la sphère publique ou de la sphère privée, des autorités dites de tutelles ou de sponsors privés, par essence extrêmement volatiles, le tour de table reste obstinément sous dimensionné.

On pourrait débattre sans fin des raisons de cet état de fait. De la tiédeur, du soutien juste « moral », du désengagement cordial et néanmoins explicite, de la défiance, des faibles retours sur investissement supposés, de la méconnaissance du court métrage, etc…

Mais, malgré le soutien des festivaliers et la fidélité sans faille de certains partenaires financiers, notamment des sociétés d’auteurs, de compositeurs et d’interprètes, ainsi que de la Région Ile-de-France, dans quelque sens qu’on prenne le problème, le résultat est toujours le même : financement insuffisant, impossibilité d’engager des collaborateurs, réduction de voilure in-extremis, épuisement des équipes « sous-staffées » et structurellement stressées, etc.

Déjà, en 2017, comme nous l’avons annoncé lors de la cérémonie de clôture, voyant notre budget réduit brutalement de moitié, nous n’avons réussi à boucler le festival que grâce à de nombreux sacrifices, notamment sur les salaires, le nombre de professionnels engagés dans l’équipe, le nombre de lieux et d’événements prévus puis annulés, etc.

Cet exploit n’est malheureusement pas possible chaque année, et, devant la réduction ininterrompue des finances disponibles, arrive fatalement le moment où, malgré toute l’envie qui nous anime, il n’est plus possible d’envisager d’embarquer toute une équipe dans une aventure par trop hasardeuse, de risquer ne pas honorer nos engagements et nos fournisseurs, de faire faux bond au dernier moment aux partenaires fidèles et aux institutions avec lesquelles nous tissons des relations de confiance depuis des années.

Ce point-limite est donc arrivé et nous considérons, après mûre réflexion, qu’il nous est impossible de mettre en œuvre sereinement une édition 2018 de Paris Courts Devant et de Ça tourne en Ile-de-France.

Nous le déplorons. Nous en sommes infiniment tristes. Nous sommes infiniment désolés pour tous les réalisateurs, les producteurs, les auteurs, les distributeurs, les comédiens, les étudiants, etc. qui trouvent à Paris Courts Devant une visibilité inespérée, un outil de travail performant, un rendez-vous utile, festif et pertinent… Désolés pour tous les amateurs de découvertes cinématographiques qui y trouvent année après année une sélection puissante et éclectique, riche de découvertes et d’œuvres atypiques.

Mais ce faisant, et à notre corps défendant, nous envoyons un signal aussi fort que possible : dans un contexte de financement de la culture non marchande de plus en plus tendu, un festival qui s’arrête est une perspective extrêmement inquiétante pour tous ceux qui s’échinent, contre vents et marées, à maintenir ce lien culturel dont il n’est pas un mystère qu’il est le meilleur garant du bonheur, de la paix civile, de l’exigence critique et du regard salutaire que nous portons sur le monde et sur nos vies.

Nous remercions infiniment tous ceux qui ont permis notre magnifique aventure, tous ceux qui nous soutiennent toujours aujourd’hui et tous ceux qui croient avec nous en cette merveilleuse idée et ce grand rêve d’un festival de courts métrages vivant et se réinventant sans cesse à Paris et en Ile-de-France.

Nous restons bien entendu ouverts à toute nouvelle solution viable, d’où qu’elle puisse venir, avec la plus grande ouverture d’esprit.

Si vous voulez réagir, écrivez-nous ici  : contact@courtsdevant.com

Sincèrement vôtre,

Rémi Bernard
Délégué Général de Paris Courts Devant

Revoir le discours de la cérémonie de clôture du festival 2017 :
https://www.facebook.com/courts.devant/videos/1360806467357658/

Les courts nommés aux Cesar 2019, côté fiction & animation

Ce lundi 17 septembre 2018, les comités de sélection de  l’Académie des Arts et Techniques du cinéma ont retenu les titres suivants des prochains courts-métrages en lice pour le César du meilleur film de court métrage et du meilleur court métrage d’animation.

Les 24 films de la Sélection Officielle Court Métrage César 2019 sont :

Acide de Just Philippot
L’âge des sirènes d’Héloïse Pelloquet
Allons enfants de Stéphane Demoustier
Ato San Nen de Pedro Collantes
Avaler des couleuvres de Jan Sitta
Boomerang de David Bouttin
Braguino de Clément Cogitore
Comment Fernando Pessoa sauva le Portugal d’Eugène Green
Grain de poussière de Léopold Kraus
Gros chagrin de Céline Devaux
Hanne et la fête nationale de Guillaume Brac
Les Indes galantes de Clément Cogitore
J’attends Jupiter d’Agathe Riedinger
J’mange froid de Romain Laguna
Kapitalistis de Pablo Muñoz Gomez
Laissez-moi danser de Valérie Leroy
Master of the Classe de Carine May et Hakim Zouhani
Ordalie de Sacha Barbin
Panique au Sénat d’Antonin Peretjatko
Parades de Sarah Arnold
Les petites mains de Rémi Allier
Pourquoi j’ai écrit la Bible d’Alexandre Steiger
Un peu après minuit de Jean-Raymond Garcia et Anne-Marie Puga
Les vies de Lenny Wilson d’Aurélien Vernhes-Lermusiaux

Les 12 films de la Sélection Officielle Animation (Court Métrage) César 2018 sont :

(Fool Time) JOB de Gilles Cuvelier
59 secondes de Mauro Carraro
Au cœur des ombres d’Alice Eça Guimarães et Mónica Santos
La chute de Boris Labbé
Étreintes de Justine Vuylsteker
Féroce d’Izù Troin
Il s’est passé quelque chose d’Anne Larricq
Le Mans 1955 de Quentin Baillieux
La Mort, père & fils de Denis Walgenwtiz et Winshluss
Raymonde ou l’évasion verticale de Sarah Van Den Boom
Reruns de Rosto
Vilaine fille d’Ayce Kartal

Les courts primés à Venise

Le 75ème festival de Venise a dévoilé ses lauréats. Du côté des courts, deux films ont été primés parmi les douze titres en lice dans la section Orizzonti.

Prix Orizzonti du Meilleur Court Métrage : Kado de Aditya Ahmad (Indonésie)

Syn : Isfi a le droit de porter son pantalon confortable parmi ses amis mais doit porter le hijab pour être acceptée dans la maison de Nita. Deux jours avant l’anniversaire de Nita, tout ce qu’Isfi désire, c’est préparer le meilleur cadeau possible dans la chambre de Nita.

Nomination pour le Meilleur Court Métrage Européen 2018 : Gli Anni de Sara Fgaier (Italie, France)

Syn. : Quelques fragments des Années d’Annie Ernaux et des images arrachées à la mémoire, rassemblés sur les rivages d’une Sardaigne éternelle.

Etrange festival, notre sélection de films en ligne

L’Etrange festival est de retour ! Pour sa 24ème édition, figurent pas moins de 7 sélections de courts métrages toutes les plus affolantes les unes que les autres. Parmi plus de 50 films, voici un aperçu de ce que vous pourrez découvrir au Forum des Images jusqu’au 14 septembre 2018.

Barbeque de Jenny Jokela – Grande-Bretagne – 5’45 » – Animation

Synopsis : Ce film passe en revue les moyens de faire face au stress post-traumatique, et analyse les sentiments de honte et de désincarnation.

Ape Sodom de Maxwell McCabe-Lokos – Canada – 14’15 » – Fiction

Synopsis : Sur une montagne de déchets, un homme cherche à se nourrir. Une satire dérangée et dérangeante de l’illumination post-consumériste.

Ugly de Nikita Diakur – Allemagne – 11’55 » – Animation

Synopsis : Expérimentation à base de pixels, de chats et d’un gourou.

Erodium Thunk de Winston Hacking – USA – 2’50 » – Animation/Expérimental

Synopsis : Jeux de collages aléatoires de vieilles réclames.

Pour découvrir l’ensemble de la programmation des courts métrages, cliquez ici.

Pour information, ne ratez pas dans la « séance monstrueuse » (n°1) Histoires De – Histoire de Supersonic de Vincent Paronnaud (alias Winshluss) !

Bon festival à tous !

Short Screens : les shorts d’été

Pour marquer la rentrée, Short Screens est fier de présenter son premier mini-festival d’été. Trois jours, trois séances, trois thématiques très variées pour plaire à tous les goûts et terminer les vacances en beauté !

Rendez-vous les 29, 30 et 31 août au Cinéma Aventure !

Consultez la page Facebook de l’événement ici.

#85 : KIDS (4-12 ANS) – MERCREDI 29 – 17h

Le petit chaperon rouge rural de Tex Avery, animation, Etats-Unis, 6’, 1949

L’adaptation version champêtre du Petit Chaperon Rouge.

Sientje de Christa Moesker, animation, Pays-Bas, 4’26’’, 1997

Une petite fille pique une crise de nerfs suite à une dispute avec ses parents. Mais que peut-elle faire pour se calmer ?

Laszlo de Nicolas Lemée, animation-fiction, France, 4’03’’, 2010

Laszlo est un homme sans racines qui aimerait juste vivre en paix, peu importe le lieu.

Lila de Carlos Lascano, animation-fiction, Argentine, 9’10’’, 2014

Lila utilise son imagination et ses talents de dessinatrice pour modifier la réalité.

Chromophobia de Raoul Servais, animation, Belgique, 10′, 1966

Des armées grises et uniformes ont envahi le monde dans l’intention d’imposer la domination totale du noir-gris-blanc. La résistance se manifestera sous la forme d’un bouffon écarlate.

Raconte-moi… Le petit Prince de Jad Makki, fiction-animation, Belgique, 14’45’’, 2015

Entre rêve et réalité, le Petit Prince, perdu dans un univers qui n’est pas le sien, devient pour un temps l’unique compagnon de l’aviateur. Court-métrage en trois chapitres où se déploient plusieurs procédés audiovisuels, proposant une nouvelle lecture du célèbre conte de Saint-Exupéry. Avec Igor Van Dessel et Christian Dalimier.

#86 : INDIE SHORTS / AUTO-PRODUCTIONS – JEUDI 30/8 – 19h30

Edgar et la douze demoiselle de Frederic Legrand, fiction, Belgique, 2014, 13’

Un jour Edgar, une créature étrange ignorée de tous, fait la rencontre de Douze, une automate désarticulée et rafistolée.

Syria de Nejm Michel Patoulatchi, expérimental, Belgique, 3’44’’, 2016

Via le langage du corps et de la danse, l’histoire d’un jeune, isolé, qui va se faire embrigadé dans une guerre au nom d’un dieu.

Tamam de Catherine Levêque, documentaire, Belgique, 9’08’’, 2017

Des jeunes réfugiés syriens racontent leur parcours et leurs espoirs et apportent un témoignage à contre-courant de la morosité ambiante.

Angle mort de Cédric Larcin, fiction, Belgique, 4’23’’, 2015

Atmosphère pleine de tension dans la rue, au lendemain d’un attentat.

Zeus de Quentin Van Roye, fiction, Belgique, 8’34’’, 2014

Isaac se rend à un entretien d’embauche pour un travail un peu particulier.

Selfportrait de Isobel Blank, expérimental, Italie, 2’54’’, 2009

L’autoportrait comme récréation de soi. Il y a la réalité et il y a le filtre qui rend surréaliste ce qui est réel.

Un minuto en la carretera de Carmen Barriuso Lajo, Espagne, 3’20’’

Un père et un fils confrontés à l’inéluctable.

Panneau de Gilles de Trazegnies, fiction, Belgique, 14’10’’, 2005

Lydia, non-voyante est accueillie par Gérard venu la conduire jusqu’au centre médical. Ils font un détour par un petit musée où Lydia se perd dans les couloirs.

L’émissaire de l’accélération de la normalisation ds choses de Haroun Zelakiev, fiction-expé, Belgique, 6’38’’

La normalisation universelle ou enfin comprendre comment le monde fonctionne… ou pas.

Adoption de Star Kim (aka Cho Mihee, aka Kimura Byol, aka Nathalie Lemoine), expérimental, Belgique, 7’35’’, 1988

Une adoptée coréenne écrit une lettre à sa mère biologique. Elle décrit ses sentiments dans son pays d’adoption. Grand Prix « Etre jeune aujourd’hui en Europe » – Festival International du Film Indépendant de Bruxelles 1988.

#87 : HOT SHORTS (18+) – VENDREDI 31/8 – 21H

O poetas das  coisas horriveis de Guy Charnaux, animation, Brésil, 5’16’’, 2017

Un fils annonce à son père qu’il veut devenir poète. Le père essaie d’aider son fils à s’accomplir, mais il échoue lamentablement. Adaptation d’un texte de Rafael Sperling, auteur sans concession et provocateur, pour public averti.

Ciné Palace de Séverine De Streyker Day, fiction, Belgique, 14’19’’, 2011

Dans un cinéma porno, une strip-teaseuse, des rencontres, des fantasmes et les surprises qui se cachent dans ce petit théâtre de la vie.

Vadātājs (The Evil One) de Janis Krivans et Armands Erglis, fiction, Lettonie, 5’24’’, 2010

Bon nombre de personnes se seraient égarés à cause du Vadātājs, démon de la mythologie lettone. Il peut être visible ou invisible. Dans ce court métrage coquin, nous dépassons la forme invisible du démon.

Tampa de Kyle Henry, fiction, Etats-Unis, 17’, 2011

A Tampa, un homme en proie à une crise de confiance personnelle cherche satisfaction dans les toilettes d’un centre commercial. Comédie extraite de Fourplay, anthologie de 4 courts métrages délirants.

Un chant d’amour de Jean Genet, fiction, France, 25’, 1950

Depuis leurs cellules, deux prisonniers arrivent à communiquer grâce à un trou percé dans le mur qui les sépare. Avec la complicité silencieuse du gardien qui les observe par le judas, ils vont établir un contact amoureux et érotique. Unique film de Jean Genet, censuré pendant plus de 25 ans.

Le plombier de Xavier Seron et Méryl Fortunat-Rossi, fiction, Belgique/France, 13’54’’, 2016

Tom, un comédien flamand, remplace au pied levé un ami sur l’enregistrement d’un doublage. Une fois dans le studio, il s’aperçoit qu’il s’agit d’un porno à doubler en français. Magritte 2017 du meilleur court métrage.

Nouvelle carte blanche Format Court au Point Ephémère, jeudi 13 septembre 2018 !

Les Séances au top Format Court, organisées tout l’été  sur le rooftop du Point Ephémère (Paris 10ème), touchent à leur fin. Notre cinquième et dernière soirée de projection aura lieu le jeudi 13 septembre de 21h à 22h30. 4 films repérés cette année, pour la plupart chroniqués sur notre site, seront projetés sur le toit du Point, en présence de Yohan Levy (Format Court) Nicolas Boone (Las Cruces) et de Charline Bourgeois-Tacquet (Pauline asservie). Soyez de la partie !

Programmation

Las Cruces de Nicolas Boone, Fiction, 29′, 2018, France. Prod. : Noodles Production, Tournage 3000, Imaginaria cine. Sélection à la Quinzaine des Réalisateurs 2018. En présence du réalisateur

Syn. : Las Cruces est un quartier défavorisé de Bogotá. En suivant certains de ces habitants, on plonge avec eux dans un monde intense où la violence côtoie l’espoir et la joie.

Article associé : la critique du film

Le Paon de Wenqian Gao, Xue Bing et Son Jixiang, animation, expérimental, 3’50 », 2016, France, Chine. Prod. : Ecole Nationale Supérieure des Beaux-arts de Paris. Sélectionné au Festival Chalon Tout Court 2018

Syn. : Les Taoïstes pensent que la vie est une scène de rêve éveillé. Les gens sont manipulés par leurs rêves et l’idéal qu’ils se font de la vie. Mais la vie est un rêve absurde.

Article associé : notre reportage sur le festival Chalon Tout Court 2018

Pauline asservie de Charline Bourgeois-Tacquet. Fiction, 24′, 2017, France. Prod : Année Zéro. Sélectionné à la Semaine de la Critique 2018. En présence de la réalisatrice

Syn. : Pauline n’a aucune nouvelle de Bruce, l’homme marié avec lequel elle a une histoire. En vacances à la campagne avec son amie Violette, elle va passer tout le séjour à attendre… un texto. En expérimentant les mille et une phases de l’obsession amoureuse.

Impossible Figures And Other Stories III de Marta Pajek. Animation, 12′, 2018. Prod : Animoon Sp. z o.o. En compétition officielle, Cannes 2018

Syn. : Un homme et une femme se rencontrent dans une salle d’attente. Ils se rapprochent petit à petit. Leur face-à-face vire au jeu de séduction réciproque, et la violence va crescendo.

Article associé : notre reportage sur le festival de Cannes 2018

En pratique

Le Point Éphémère : 200 Quai de Valmy – 75010 Paris
Métro Jaurès (lignes 5, 2 et 7 bis), Louis Blanc (ligne 7), Bus 26, 46, 48 : Goncourt, Couronnes, Parmentier)
Projection de 21h à 22h30. Accueil, billetterie : 20h30
5 € sur place
Event Facebook

Silhouette, notre sélection de films en ligne

Le Festival Silhouette, dont nous sommes partenaires, a débuté ce vendredi 24 août 2018. En guise d’avant-goût, voici 6 films (dont 3 auto-productions) programmés au festival, visibles en ligne, repérés dans plusieurs sections officielles et parallèles. Enjoy !

Everything de David O’Really – Double Fine Productions  – Royaume-Uni, 2017, 11’, animation (compétition internationale)

Syn. : Everything est à la fois une expérience interactive et un jeu en réalité virtuelle transformé en court métrage par la voix d’Alan Watts, brillant philosophe anglais.

Legacy de David Pagaille – Auto-production, France, 2017, 6’, pop folk. Musique : Anton Oak feat Loïc Fleury (Isaac Delusion) – Label : XVIIIIEMEPENINSULE (compétition clips)

Vers le silence de Stéphane Bron – Opéra National de Paris, Les Films Pelléas, France, 2018, 9′, documentaire (compétition documentaire)

Syn. : Au plus près du travail de création de Philippe Jordan, directeur musical de l’Opéra national de Paris, nous suivons les répétitions de la Symphonie n°9 de Gustav Mahler.

RGB+ Roberto d’Alessandro – Auto-production – France, Italie, 2017, 6’, expérimental (complétion hybride)

Syn. : Figée sur un support numérique et mue par les variations d’un son analogique, la danse produite par les abstractions colorées d’un vieil écran à tube cathodique révèle de nouvelles formes visuelles.

Corpo Líquido de Ana Lúcia Diniz et Alan Tonello – Auto-production – Brésil, 2011, 7’, expérimental, Focus Pernambuco)

Syn. : Figée sur un support numérique et mue par les variations d’un son analogique, la danse produite par les abstractions colorées d’un vieil écran à tube cathodique révèle de nouvelles formes visuelles.

Contact de Katy Wang – Kingston University – Royaume-Uni, 2017, 7’, animation (section Passages, dès 13 ans)

Syn. : Bloqué sur une lointaine planète, un astronaute envoie un signal à travers l’espace dans l’espoir de nouer un contact humain.

Le film de la semaine : Prematur de Gunhild Enger

Prematur, le cinquième court-métrage de la réalisatrice norvégienne Gunhild Enger met en scène Martin, norvégien, et sa petite-amie espagnole, Lucia, dans l’espace confiné et clos d’une voiture, 17 minutes durant. Pour la jeune femme enceinte, c’est un premier contact avec la Norvège et ses beaux-parents.

Et quoi de mieux pour briser la glace que d’échanger des banalités et des clichés éculés sur la culture de l’autre? Dans l’ordre, le temps : « Brrr brrr (« ffff ffff » en norvégien), il y a du vent dehors! ». Le voyage : « Le vol s’est bien passé ? Pas de turbulences? Vous avez récupéré tous vos bagages? » La jeune Lucia ose même un « tusen takk » (« merci beaucoup » en norvégien). Petits rires satisfaits. Enfin, les stéréotypes sur les deux cultures : « Ahh! L’Espagne! Les tapas! Le flamenco! La sangria! Julius Inglesias! Comment ça il s’appelle Julio? Quoi, Martin?! Tu ne lui a pas parlé des vikings?? Enfin! C’est important! Ce peuple de braves conquérants qui a combattu jusqu’en Espagne! Si si. » Blanc.

Chacun a sorti sa petite formule d’usage mais la conversation n’a pas pris. Alors, c’est la maman de Martin qui se charge de combler le vide en animant -seule- la conversation. Sauf qu’à trop vouloir jouer les chefs d’orchestre, c’est elle qui finit par faire monter le malaise crescendo. 17 minutes, c’est peu et pourtant une éternité pour ce trajet en voiture plein de tensions, de malentendus et d’incompréhensions.

C’est que, petit à petit, la connivence et les sourires s’effacent sous l’accumulation de quiproquos. Ils disparaissent totalement lorsque la mère offre son cadeau à Lucia : une « negro doll » qui ne semble pas faire l’unanimité. Décidément, les goûts et les couleurs … Le point de non-retour est atteint quand la mère, toujours elle, sous couvert de complicité femme-femme, évoque et insiste sur l’éventualité d’un enfant prématuré. Dérapage calculé ou maladresse involontaire? Le film nous laisse le soin de décider.

Fidèle à son dispositif radical (peu de décor, pas de musique, pas d’effets) et à son obsession du cadre, Gunhild Enger, la réalisatrice diplômée de Göteborg (Suède) qui a fait ses premières armes en Ecosse, croque avec finesse et humour cette rencontre entre générations et cultures différentes. Elle exploite ici son concept favori, celui du tableau et du plan unique, dans le cadre étroit d’une voiture. Elle choisit d’épingler une fois de plus la nature humaine et ses petits travers. Et montre avec justesse une situation où l’incapacité à communiquer mène à l’impasse. Les personnages, sans jamais se faire face, vivent pourtant une rencontre très frontale dans l’environnement fermé du véhicule en marche qui créé un huis-clos efficace.

Prix Format Court au Festival de Brest 2012, Prematur est une brillante confrontation des cultures et des générations qui réussit, en un seul plan à mettre le spectateur dans l’inconfort de la scène. C’est drôle sans être grotesque, réaliste, réussi. On se dit seulement qu’à la place de Lucia, on aurait feint (ou pas) la nausée, pour sortir au plus vite de l’habitacle.

Emilie Sok

Articles associés : la critique du film, l’interview de la réalisatrice, notre reportage sur les films de Gunhild Enger

Carte blanche Format Court/Short Screens, spécial Belgique / Point Éphémère, mercredi 8/8 !

Les séances estivales sur le toit du Point Éphémère se poursuivent ce mercredi 8 août 2018, de 21h30 à 23h, avec une sélection de films belges mettant à l’honneur l’humour caractéristique du plat pays. Une programmation éclectique de films d’hier et d’aujourd’hui, sélectionnée et présentée par Adi Chesson (Format Court, Short Screens) et Luc Vanden Eede (Short Screens).

Programmation

Welkom de Pablo Munoz Gomez, fiction, Belgique, 2013, 17′ (Institut des Arts de Diffusion), Magritte du meilleur court métrage 2014

Jorge aime son père. Son père aime une poule. Jorge n’aime pas la poule, il veut la mettre dans un poulailler. Avant de construire ce poulailler, Jorge doit se procurer un permis de bâtir. Mais difficile d’obtenir quelque chose quand son jardin est en Flandre et qu’on ne parle pas le flamand.

May Day d’Olivier Magis et Fedrik De Beul, fiction, Belgique, 2017, 22′ (Eklektik Productions). Prix du Meilleur Court Métrage, Festival de Varsovie 2017

Dans le salon de Thierry, plusieurs personnes qui ne se connaissent pas sont venues nourrir le même rêve : trouver un travail, et vite. Mais comme nous sommes à Bruxelles, rien ne se passe comme prévu.

La Dame dans le tram de Jean-Philippe Laroche, fiction, Belgique, 1993, 7’45’’ (Nota bene)

Une rencontre forcée entre une dame acariâtre et un jeune homme noir dans le tram bruxellois.

Alice et moi de Micha Wald, fiction, Belgique, 2006, 19’ (Versus production). Sélectionné à la Semaine de la Critique 2007

Simon, trente ans, est peu sûr de lui. Aujourd’hui, il doit conduire sa vieille tante Mala à la mer, en compagnie de Lydia et Colette, deux amies de Mala. Pendant le trajet, Alice, sa petite amie, lui téléphone et ils se disputent. En bonnes grand-mères juives, les trois femmes s’immiscent petit à petit dans l’histoire de Simon ce qui, bien sûr, n’arrange rien à la situation.

Article associé : la critique du film

Tanghi Argentini de Guido Thys, fiction, Belgique, 2006, 14’ (Another Dimension Of An Idea). Nominé pour le meilleur court métrage aux Oscar 2007

Via Internet, André fait connaissance de Suzanne. Il lui fait croire qu’il est un danseur de tango émérite et le couple convient donc de se rendre ensemble à une soirée dansante. Mais André n’est en réalité qu’un piètre danseur et il demande à son collègue Frans, plus à l’aise dans la discipline, de le préparer à son rendez-vous.

Article associé : la critique du film

En pratique

Mercredi 8 août 2018, de 21h30 à 23h
Le Point Éphémère : 200 Quai de Valmy – 75010 Paris
Métro Jaurès (lignes 5, 2 et 7 bis), Louis Blanc (ligne 7), Bus 26, 46, 48 : Goncourt, Couronnes, Parmentier)
Projection de 22h à 23h30
5 € sur place, accueil : 21h
Event Facebook
Prochaine & dernière carte blanche Format Court au Point Éphémère : jeudi 19/9

Le film de la semaine : The Aftermath Of The Inauguration Of The Public Toilet at Kilometer 375 de Omar El Zohairy

C’est un grand jour pour le peuple égyptien : au kilomètre 375, là-bas dans le désert, on inaugure les nouvelles toilettes publiques. Du sable à perte de vue, une chaleur écrasante, cinq hommes en grande pompe et un âne, tout le monde est en place, la voiture du grand chef arrive, silence. Jamais a-t-on vu pareille solennité. Armé de sa truelle, le maître scelle la dernière brique. Applaudissements, silence. Oui mais voilà, un petit fonctionnaire vient d’éternuer, trois fois. Pourra-t-il un jour réparer sa faute et réussir à dormir sur ses deux oreilles ?

Fraichement diplômé de l’Academy of Arts High Cinema Institute, le jeune réalisateur égyptien Omar El Zohairy ̶ ayant travaillé comme assistant réalisateur auprès de Yusri Nasrallah, puis de Tamer El Said sur Les derniers jours d’une ville ̶ présentait en 2014 à la Cinéfondation son film de fin d’études The Aftermath Of The Inauguration Of The Public Toilet at Kilometer 375. Un très long titre saugrenu pour raconter l’histoire toute aussi absurde d’un éternuement devenu affaire d’Etat.

L’absurde y est politique. L’ Égypte de 2014 a vu ses espoirs révolutionnaires dissolus dans de malheureuses promesses. À travers l’histoire de cet homme qui, ayant passé sa vie à se faire petit – aussi grand qu’il puisse être – est terrifié par l’idée d’avoir dérangé un éminent homme d’état en éternuant, El Zohairy porte le message d’une jeunesse qui refuse ce retour forcé à la crainte devant l’ordre. Mais l’absurde est aussi poétique. Le désert regarde la mer sur un poste de télévision, les personnages grands, minces et silencieux rêvent d’eau dans de grands espaces vides, quand un énorme poisson se retrouve, lui, bien à l’étroit dans son bocal rempli d’eau.

Les plans fixes à la fois épurés et très composés, la désolation de cet employé et de sa femme résignés, et le seul souffle du vent comme bande sonore donneraient presque à cette adaptation de la nouvelle La mort d’un fonctionnaire de l’écrivain russe Anton Tchekhov, des airs de western moderne, où les employés administratifs soumis à de désuètes lois hiérarchiques seraient les cowboys peu fringants d’une Égypte en costume noir désertée par la raison.

L’espoir est pourtant là. L’eau arrive jusque dans le désert au kilomètre 375 pour faire fonctionner les toilettes, et El Zohairy, loin d’avoir asséché les ressources de l’absurde, poursuit son geste libérateur des craintes de l’asservissement dans un premier long-métrage en préparation, Feathers of a father, sélectionné en résidence à la Cinéfondation.

Noémie Moutonnet

Short Screens #84: « Un monde (encore) meilleur »

Notre dernière séance du 28 juin sur le beau thème « Un monde meilleur » a malheureusement dû être interrompue suite à un problème technique. Pour ce mois de juillet, voici donc la suite de la programmation complétée de quelques nouveaux titres.

Une sélection de courts métrages engagés qui questionnent la place qu’occupe l’être humain au sein de son environnement, et énoncent tantôt des constats alarmants tantôt des rayons d’espoir pour un monde et un mode de vie plus durables, plus justes, plus en phase avec la Nature.

Rendez-vous le jeudi 26 juillet à 19h30, au cinéma Aventure, Galerie du Centre, Rue des Fripiers 57, 1000 Bruxelles – PAF 6€

Visitez la page Facebook de l’événement ici !

PROGRAMMATION

Il était une fois Marc et Lotti..;et leur âne de Çiva de Gandillac, documentaire, France, 2002, 25’

A l’heure où le pétrole flambe, voici un bel exemple d’écocitoyenneté et d’autonomie…Marc et Lotti vivent leur idéal, à 100 kilomètres des Pyrénées, et nous offrent un bol d’air salvateur.

The Cow Who Wanted To Be A Hamburger de Bill Plympton, animation, Etats-Unis, 2010, 5’50” (Plymptoons Studio)

Hypnotisé par un panneau publicitaire, un veau rêve de devenir un hamburger et est prêt à tout pour y parvenir.

Article associé : la critique du film

Burkinabè Bounty de Iara Lee, documentaire, Burkina Faso/Etats-Unis/Bulgarie, 36’37 », 2018 (Cultures of Resistance Films)

Chronique de la résistance agricole au Burkina Faso contre l’agriculture d’entreprise et des compagnies comme Monsanto, par des agriculteurs engagés, étudiants, femmes gagnant leur indépendance économique, artistes et dirigeants du mouvement local Slow Food International, Tous créent des initiatives pour reprendre le contrôle de leur nourriture, leurs graines et leur avenir.

Copier-Cloner de Louis Rigaud, animation, France, 2009, 3’16 » (Autoproduction)

Un programme informatique qui se mêle d’élevage de vaches se transforme en mauvais plan incontrôlable.

Ensemble! (Together!) de Güldem Durmaz, Belgique, 2017, 21’49 » (Altitude 100)

Réalisé dans le prolongement de l’exposition « Energie, les nouveaux rêves » au PASS (Parc d’aventures scientifiques), Ensemble ! est un film résolument positif, qui donne à voir une mosaïque d’initiatives innovantes, créatives et durables, loin du fatalisme ambiant.

Carte blanche Format Court, spécial Finlande / Point Éphémère, jeudi 26.7 !

Cet été, les séances au top sur toit du Point Éphémère se poursuivent et apportent ce jeudi 26 juillet 2018, de 21h30 à 23h, un peu de fraîcheur nordique. Format Court vous présente en effet une série de courts-métrages venus de Finlande, sélectionnés par Clément Beraud.

La Finlande, petit pays du nord de l’Europe, où vivent 5 millions d’habitants, se démarque par un cinéma souvent expérimental, toujours poétique. À l’occasion de cette nouvelle projection, 6 films issus du catalogue de AV-Arkki, centre national de distribution de l’art vidéo finlandais, seront projeté sur le toit du Point Éphémère, permettant ainsi de découvrir plusieurs films de pointures du cinéma finlandais ainsi qu’une valeur montante, Azar Saiyar, déjà évoquée sur notre site. Clément Beraud (Format Court) et Lauri Astala (réalisateur programmé) présenteront cette nouvelle carte blanche. Soyez de la partie !

Programmation

Birds in the earth (​Eatnanvuloš lottit) de Marja Helander. Expérimental, danse, 10′,40 », Finlande, 2018. Grand prix et Prix Risto Jarva au Tampere Film Festival 

Synopsis : Deux jeunes danseuses de ballet, d’origine ​Sámi : Birit et Katja Haarla racontent à travers leur danses, une histoire douce et mélancolique sur la nature et l’histoire des jeunes Sámi. Mais le film soulève aussi la question plus profonde de ce territoire et l’identité Sámi (Peuple originel de Laponie et de la péninsule de Kola et l’un des derniers peuples indigènes d’Europe), son histoire et leurs droits dans la Finlande d’aujourd’hui. La contradiction entre la Nature et le mode de vie moderne se confond alors avec un humour pinçant.

The Committee (Le comité) de Jenni Toivoniemi & Gunhild Enger. Fiction, 14′, 2016, Finlande,  Norvège, Suède. Sélectionné au Festival de Clermont-Ferrand 2017

Synopsis : Trois représentants de la Suède, la Norvège et la Finlande se réunissent en Laponie pour choisir une œuvre d’art qui sera installée à la jonction des trois frontières. Mais le comité est perplexe lorsque l’artiste leur présente son projet : la « danse nordique ».

The World de Mika Taanila. Expérimental, 7′, Finlande, 2018. Sélectionné au Festival de Rotterdam 2017

Synopsis : L’homme qui venait d’ailleurs (The man who fell to the earth – 1976) (réal. Nicolas Roeg) retourné et réétudié. Des paysages abandonnés, des animaux, des meubles et des véhicules sont laissés là, prêt pour le désastre. “We must have died alone, a long time ago” (Nous avons dû mourir seuls, il y a très longtemps) (David Bowie.)

Helsinki-Tehran de Azar Saiyar. Documentaire, 22′, 2009, Ecole des arts et design d’Helsinki.

Synopsis : Helsinki-Tehran est un essai cinématographique sur l’immigration et sa mémoire. A travers les gestes, les paroles et les émotions qui en découlent et qui traversent les générations années après années.

Article associé : la critique du film

Zoo de Salla Tykkä. Experimental, 11′, 2006, Finlande. Sélectionné au Festival de Locarno 2007

Synopsis : Une femme photographie dans un zoo. Les animaux la regardent, la suivent des yeux. Les rôles s’inversent. La femme plonge dans une eau profonde où a lieu un violent match de rugby. Elle revient à la surface, respire, mais le viseur de son appareil photo la bloque sans aucune échappatoire. Dans le désespoir, elle prend une décision extrême.

Transit de Lauri Astala. Expérimental, 9’30 », 2014, Finlande, USA. En présence du réalisateur

Synopsis : Point de vue documentaire de New-York altéré par des mouvements de caméra, d’angles et de cadres. Un nouvel espace urbain fictif se construit, où le visuel devient l’histoire du film. Le thème de Transit tourne autour de l’idée de cinématographie et des notions d’environnement urbain.

En pratique

Le Point Éphémère : 200 Quai de Valmy – 75010 Paris
Métro Jaurès (lignes 5, 2 et 7 bis), Louis Blanc (ligne 7), Bus 26, 46, 48 : Goncourt, Couronnes, Parmentier)
Projection de 22h à 23h30
5 € sur place, accueil : 21h
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Prochains rendez-vous Format Court au Point Ephémère : le mercredi 8 août (spécial Belgique) et jeudi 13 septembre (programme hybride).

Biciklisti de Veljko Popović

Il y a peu, la France et la Croatie s’affrontaient en finale de la coupe du monde. À cette occasion, Format Court vous propose de découvrir un court métrage d’animation franco-croate : Biciklisti (Cyclistes).

Veljko Popović, le réalisateur, nous fait voyager dans son pays natal, la Croatie, en nous dépeignant une de ses petites villes de bords de mer. Les couleurs vives et chaudes, le mouvement hypnotisant de la mer et le bruit incessant des cigales : tout y est. En un rien de temps, nous voila transportés ailleurs, on sentirait presque l’air iodé sur notre visage.

Les couleurs bleue et rouge s’affrontent ici dans une compétition de vélo. Il s’agit de l’attraction principale du village et tous les habitants suivent avec attention le périple des athlètes. Nous aussi.

Ces derniers doivent braver les côtes et la chaleur du littoral croate. Heureusement, les sportifs ont de quoi se motiver : en plus du trophée, ils comptent tout deux sur la victoire pour obtenir les faveurs d’une femme. À moitié dénudée, celle-ci les observe depuis sa fenêtre. Le vent marin fait voler ses rideaux et sa robe blanche. C’est une figure simple et efficace de l’érotisme qui fait naitre des fantasmes chez nos cyclistes.

Avec une impressionnante fluidité, ce court-métrage nous fait circuler de leurs songes à la course en jouant sur plusieurs techniques d’animation, de séquences au crayon très épurées à d’autres bien plus chargées. L’univers visuel est d’ailleurs très différent de celui des autres films de Veljko Popović, habituellement beaucoup plus froids, triste et saccadés.

Ses autres travaux abordent en effet des thématiques plus pesantes et sociales comme la société de consommation dans She who measures en 2008, la routine dans Dove sei Amor Moi en 2011 ou la difficile paternité via sa contribution à Father en 2012. Avec Biciklisti, directement inspiré du travail de Vasko Lipovac, artiste pluridisciplinaire croate qui a bercé son enfance, Veljko Popović nous propose un film plus joyeux à l’animation plus lisse et colorée.

La limpidité du film est également rendue possible par la bande-son et la musique de Pablo Pico. Comme dans Dripped (2010) de Léo Verrier, le jazz envoûtant du compositeur donne corps au film, s’adaptant à ses moindres besoins. Ici, notes de jazz, souffles des athlètes, échos de la nature, du village et des ébats se confondent pour ne faire plus qu’un. Cet ensemble sonore capte et transmet particulièrement bien l’essence de ces villages du littoral méditerranéen.

Mention spéciale du jury au dernier Festival international du film d’Annecy, Biciklisti, ce très beau film reste avant tout léger et drôle, parfois absurde. C’est, en somme, une parfaite parenthèse de vacances, une respiration avec ses 7 délicieuses minutes d’été.

Juliette Lytovchenko

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