Le Champs-Elysées Film Festival, connu pour la promotion du cinéma américain et français indépendant, a clos sa 11è édition fin juin. Le grand prix du meilleur court-métrage français, a été attribué à Geordy Couturiau pour son court-métrage La Flûte enchantée. Un duo de deux jeunes gens, en quête d’argent pour l’un, et d’amour pour l’autre, va tenter de parvenir à ses fins grâce à la… magie ! Le réalisateur parvient à nous transporter dans un univers merveilleux, sans aller plus loin que la Seine-Saint Denis Côté américain, le prix du public du meilleur court-métrage a été décerné à Emily May Jampel pour Lucky Fish, mettant à l’honneur une romance envoûtante entre deux adolescentes.
Dans La Flûte enchantée, alors qu’Arnaud est poursuivi par ses créanciers dans son quartier, il fait la rencontre de Momo, un jeune magicien capable de produire des tours rocambolesques. Celui-ci n’œuvre jamais pour l’argent ; sinon, dit-il, « c’est de la magie noire ». Par amour pour une femme dont il est amoureux depuis toujours, Momo changera néanmoins d’avis, dans l’espoir de pouvoir l’emmener dans les plus beaux restaurants. Le rêve prend une tournure de réalité lorsque Momo trouve une flûte enchantée qui a le pouvoir de paralyser les gens…
Le court-métrage de Geordy Couturiau qui se déroule en Seine-Saint-Denis se démarque des clichés habituels peignant une banlieue misérable. Certes, lors des premières scènes, on peut craindre un certain conformisme, en découvrant le protagoniste veillant sur sa mère mourante sur son lit d’hôpital, puis à peine sorti, être menacé par une connaissance de son quartier à qui il doit de l’argent. Le réalisateur surprend néanmoins par le ton comique et absurde de son court-métrage. Il insère de la fantaisie dans un univers qui n’en comporte que très rarement au cinéma. À travers des dialogues abracadabrants, une flûte enchantée paralysante ou encore Bernard, le lapin doté d’indépendance et d’autonomie, Geordy Couturiau ne manque pas de créativité pour faire éclater de rire les spectateurs.
Il créé un duo attachant où la magie fonctionne entre Arnaud, plein de ressource, d’énergie et de drôlerie et Momo le magicien (interprété par le musicien Muddy Monk), un peu simpliste au premier abord, qui nous épate finalement avec ses tours extravagants auxquels on ne s’attend pas.
Geordy Couturiau dresse une mise en scène efficace et rapide afin de maintenir son film dans une veine comique. De la musique à l’image, se dégage un charme particulier, évocateur des années 70-80. Les plans sont tournés en 16 mm, mais c’est surtout la mélodie entraînante jouée à la flûte qui rappelle une musique des comédies de ces années-là, dignes du compositeur Vladmir Cosma (Le grand blond avec une chaussure noire, Un éléphant ça trompe énormément, La chèvre, ..). Geordy Couturiau signe ici un court-métrage plein d’humour et d’espièglerie, nous transportant à une époque qui manque au cinéma français, pour ses grandes comédies.
À la sortie de Lucky fish de Emily May Jampel, lauréat du meilleur court-métrage américain au Champs-Elysées Film Festival, on assiste à une rencontre pure et sincère entre deux personnages.
Une adolescente, Maggie, s’ennuie fermement lors d’un repas de famille dans un restaurant chinois. Elle préfère observer sa voisine de table, plutôt que d’écouter les discussion sur l’avenir de son parcours scolaire. Par la suite, elle croise cette dernière dans les toilettes du restaurant. S’ensuit la naissance d’une romance autour d’un aquarium, dans une atmosphère presque surnaturelle.
La cinéaste américaine aborde la question de la pression qu’une famille asiatique peut infliger à son enfant adolescent. Ici, la question ne se pose même pas : Maggie doit entrer dans une des plus grandes universités américaines, avant d’épouser un homme et de fonder une famille. La rencontre de Maggie avec sa voisine lui permet de se libérer, d’écouter ses propres désirs, et peu importe s’ils vont à l’encontre des codes traditionnels de la société. Dans cette bulle hors du temps et de l’espace, les deux jeunes femmes peuvent enfin se permettre d’être elles-mêmes.
Le choix de l’aquarium en élément central du décor par la réalisatrice, participe à créer cette ambiance envoûtante et relaxante. La couleur bleue diffuse de l’aquarium, la danse des poissons-chats au milieu des jeunes filles, et le son de l’eau qui s’écoule, donnent cette impression que celles-ci, sont seules au monde, loin de la pression envahissante de leurs familles.
On ne peut s’empêcher de sourire, devant la romance émancipatrice des deux adolescentes, dans ce décor presque magique d’un restaurant asiatique. Emily May Jampel parvient à réaliser un court-métrage optimiste, symbole d’une liberté, pour notre bonheur à tous.
Laure Dion