Little Red Riding Hood de David Kaplan, fiction, Etats-Unis, 1997, 12’3” (Rocco Caruso, Jasmine Kosovic)
Synopsis : Une version aussi fascinante que sombre du “Petit chaperon rouge” avec Christina Ricci en jeune ingénue.
En raison de son intérêt dramatique et narratif, l’histoire du Petit Chaperon rouge a fait l’objet d’innombrables adaptations cinématographiques, la plupart des réinterprétations évoquant tour à tour le récit initiatique, le rite de passage à la maturité sexuelle, l’allégorie de la libération ou encore de la subjugation féminine… Pourtant, le réalisateur américain David Kaplan parvient à en faire une expérience formelle unique, à la fois agrémentée par une sensualité ardente et détournée par un humour noir à la limite du trash. Un véritable mélange envoûtant et saugrenu de cannibalisme, d’érotisme et de scatologie.
C’est en 1997 que Kaplan revisite ce conte pan-européen popularisé dans les écrits de Charles Perrault, des frères Grimm ou encore d’Italo Calvino. Son choix pour interpréter le rôle du protagoniste porte alors sur l’éternelle juvénile Christina Ricci, à l’époque âgée de 16 ans ; choix pour le moins interpelant au vu de la lecture hypersexualisée du sujet que le cinéaste offre ici. Ricci assume brillamment cette ambiguïté entre candeur et sensualisme. A ses côtés, le danseur de ballet moldave Timour Bourtasenkov incarne un loup androgyne qui balance aux accents énigmatiques du Prélude à l’après-midi d’un faune de Claude Debussy. Le film demeure résolument dans le royaume du conte stricto sensu, narré par la voix unique (et l’unique voix) de Quentin Crisp.
La mise en scène, signée Scott Ramsay, est onirique, théâtrale, réduite au noir et blanc et présente un décor sombre, rappelant le grand expressionnisme allemand. Elle permet en même temps de faire contrepoids à la dimension sexuelle, en nous épargnant notamment le rouge du sang de la grand-mère, du chaperon ou encore de la bouche du protagoniste.
La musique, quant à elle, nous plonge dans un impressionnisme fébrile, évoquant la rêverie et l’érotisme que Nijinsky traduisit de façon controversée (et onaniste) sur scène en 1912, sur fond du même morceau. Le résultat est une œuvre dotée d’un esthétisme envoûtant, qui dérange en même temps qu’elle fascine.