Twaaga de Cédric Ido

Lauréat du Bayard d’Or du meilleur court métrage à la dernière édition du Festival du Film francophone (FIFF) à Namur, « Twaaga » est un bel essai signé par Cédric Ido sur l’histoire du Burkina Faso naissant sous le régime anti-impérialiste de Thomas Sankara, perçue à travers les yeux innocents de son jeune protagoniste, Manu.

Burkino Faso, 1987. Le pays, comme bon nombre de ses voisins, cherche à se libérer du joug de son passé colonialiste. La formule choisie par son leader autoproclamé, Thomas Sankara : le marxisme radical. Dans un quartier modeste de la capitale, le jeune Manu suit avec ardeur les activités couvertes de son grand frère révolutionnaire et ne cesse de pointer son nez là où il n’est pas le bienvenu, au désespoir de sa mère angoissée. Pour mieux infiltrer ces mondes interdits, Manu laisse libre cours à son imagination féconde et se crée une échappatoire psychologique dans laquelle il incarne un personnage de super-héros tout puissant et omniprésent. Pour illustrer cet univers utopique, Cédric Ido effectue un travail d’animation remarquable qui complémente le lyrisme de ses images filmées. Le résultat est un film dont la dimension esthétique est pleinement en adéquation avec la justesse du contenu.

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Dans « Twaaga », les aventures de Manu l’emmènent dans des péripéties tantôt cocasses tantôt hasardeuses pour finir avec sa présence inopinée lors d’une confrontation entre la bande de son frère et un couple de commerçants libanais. Le nœud narratif complexe retrouve une résolution bien menée et prenante. Au-delà de l’éventuelle impression d’une chute exagérément dramatisée, avec le sacrifice ultime de la figure du rêveur trop éloigné de la réalité, il faut néanmoins reconnaître la finesse avec laquelle le réalisateur rend compte de la complexité du contexte social décrit. Une Afrique dans toute sa complexité, tiraillée entre traditions, superstitions et modernité ; un continent titanesque déchiqueté par les différentes parties venues piller ses richesses, des migrations économiques de petite échelle (comme l’Inde et le Moyen-Orient) qui font un écho aux exploitations écrasantes des superpuissances. À ce titre, le mélange de méfiance, dédain et désespoir ressenti par le commerçant libanais et sa femme envers leurs hôtes africains soulignent parfaitement cette subtilité dans la démarche du jeune cinéaste qui refuse de tomber dans des clichés dualistes.

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À travers le regard innocent d’un enfant, Cédric Ido parvient à toucher à toute la complexité socioculturelle qu’il montre avec aplomb. La limpidité de son scénario a beau frôler le prévisible pour les plus sceptiques d’entre nous, il n’en demeure pas moins efficace. Ajoutons à cela l’indéniable fraîcheur qui émane du jeu d’acteurs et qui nous emporte dans un voyage dans l’espace et le temps riche en émotions.

Adi Chesson

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