Sélectionné avec juste raison dans de nombreux festivals (quoique étonnamment peu primé), dont le dernier Brussels Short Film Festival, « Je vais à Disneyland » d’Antoine Blandin dresse un portrait déchirant de la violence parentale. Un film d’école d’une maturité admirable et qui sort du rang.
Calvin a une vie peu commune mais il s’y fait, voyant toujours le côté positif des choses : il apprécie les moments passés en compagnie de son père alcoolique qui regarde des films porno, le temps qu’il passe en tournant en rond, attaché à une chaine dans le jardin, les tentatives violentes de la part de son père de « réparer » son fils né à la suite d’une erreur… Un jour, un sac sur la tête, il croit embarquer pour le plus beau jour de sa petite vie : il va à Disneyland.
Pour parler d’un sujet aussi brutal, Antoine Blandin, sorti de l’EMCA (Angoulême), opte pour une forme simple et sans affectation. Un dessin léger et enfantin et un dialogue candide permettent de focaliser les trois petites minutes de film sur le psychologisme de l’enfant-protagoniste. Trois minutes bien poignantes qui paraissent après coup tellement bien façonnées que les prolonger serait diluer la force de ce court.
Par son recours au sous-titrage aux dépens de tout dialogue sonore, son utilisation d’une partition instrumentale fugace signée Ez3kiel, et sa représentation familière de la misère sociale, le film se dote d’un coté universel, encore plus que son camarade scandinave « Sinna Mann », vu dans à peu près tous les festivals mondiaux depuis sa sortie. Le mérite de « Je vais à Disneyland » réside dans le fait qu’il ne prend pas de gants pour traiter d’une thématique grave et tragique. Sous le couvert affable de l’animation, ce court en dit long, percutant et traumatisant son spectateur par son ironie incisive. Un voyage cauchemardesque dans le « pays des merveilles » à ne pas rater. Déconseillé aux âmes sensibles !