Petite bouille affublée d’un bonnet, Alma, une petite fille aux grands yeux bleus, contemple la devanture d’un magasin de jouets. Mutine et en proie à la curiosité, elle pousse la porte de ce curieux négoce. Premiers instants d’un conte à l’âme plus fantastique que féerique.
Attirée par une poupée lui ressemblant mystérieusement, Alma (âme en espagnol) succombe à une tentation enfantine a priori innocente mais fatale, et passe dans un autre monde, celui des apparences et du double. Dans l’étrange magasin rempli de poupées, les miroirs de l’âme se multiplient à l’infini, offrant une place aux faux-semblants et à la représentation de l’horrible, si ce n’est de l’horreur.
Légitimement remarqué par la critique, lauréat de nombreux prix (dont une mention au Siggraph), et sélectionné aux Goyas (l’équivalent de nos Césars en Espagne), « Alma » s’impose comme un film d’animation bien à part. La force majeure de cette réalisation : convoquer l’imagination du spectateur en lui proposant un univers fait de contrastes, à la fois simple et terriblement efficace.
Habile dans l’imbrication et la manipulation des atmosphères, Rodrigo Blaas nous renvoie à nos propres névroses et à ses multiples visages, en misant sur plusieurs éléments : une histoire de poésie sombre, une ambiance musicale et des effets sonores réalisés et mixés par Tom Myers, un sound designer ayant travaillé sur de nombreux projets dont « Star Wars », et un décor mi-métaphysique, mi-symbolique rappelant le travail de Gaudi.
Le résultat est à la hauteur du film; bien qu’« Alma » reste catégorisé “tout public”, il n’en demeure pas moins que la magie opère assurément auprès des petits comme des grands, en passant allègrement de la légèreté à la profondeur, au monde de l’enfance à l’onirisme, et de la lumière à la noirceur, donnant ainsi au film un supplément d’âme.