Les jours s’écoulent sur l’exploitation agricole d’Antoine et sa famille. Pour anticiper l’utilisation des différents prés et autres pâturages, Antoine doit savoir s’il va pleuvoir. C’est sur cette conversation banale, témoin d’un futur proche mais incertain que s’ouvre Les Météos d’Antoine, sixième court du réalisateur et scénariste Jules Follet.
Ce court-métrage documentaire qui a été présenté pour la première fois ce 23 mai à la Quinzaine des Cinéastes nous invite chez Antoine et Léandre, deux jeunes agriculteurs ardéchois qui viennent d’être rejoints sur leur exploitation par Élise, la compagne d’Antoine. Au cœur d’un été qui se profile sous le signe de la découverte, Élise va devoir trouver sa place, ou la créer.
C’est la présence de cette jeune femme, tant joviale que motivée, qui participe grandement à détourner l’attention de ce qu’on attendrait typiquement de la représentation du milieu rural au cinéma, et à l’attirer sur une expérience humaine universelle : la construction de la communauté, et son renouvellement. Le film ne s’attarde pas ou peu sur le lot de galères quotidien de la ferme, ces difficultés constituent seulement partiellement le cadre dans lequel évoluent Antoine, Léandre et Élise.
Ce cadre est soutenu par un grand respect mutuel entre les différents membres de la famille, respect qui transparaît lui aussi dans la forme du film, avec une répartition presque égalitaire de la parole qui rend le rythme du film très naturel. Les qualités humaines priment sur la torpeur de la comptabilité (assurée par la mère d’Antoine et Léandre) et sur les aléas de la météo. Humour et générosité toquent à chaque porte, s’immiscent dans chaque aspect de ce métrage à taille humaine. En effet, l’intégralité du film mêle événements personnels et professionnels, à l’image du rythme de vie de bien des agriculteurs, tout en se limitant à un rayon local, celui de la ferme que l’on ne quitte pas (on y fait même la fête). Ceci renforce l’intimité que le spectateur partage avec Antoine et sa famille. Cette intimité va crescendo au fil des jours : des discussions tout à fait banales se muent en évocation du futur d’Élise, les tâches à accomplir au quotidien deviennent la toile de fond de la métamorphose du couple en une véritable équipe.
On ne peut être que ravi d’assister au quotidien de cette famille, rendue attachante tant par la nature de leurs liens que par la représentation de ceux-ci par Follet. Le choix du cadre est primordial dans cette œuvre documentaire : si on nous montre de manière riche et élégante des espaces, on nous montre aussi et surtout les gens qui les habitent. Ainsi se constitue peu à peu une atmosphère visuelle et sonore qui enveloppe le spectateur, renforçant l’idée d’invitation à connaître un lieu autant qu’un groupe. A travers ce groupe est évoquée la place des femmes dans une exploitation agricole.
Élise doit se confronter aux hommes et aux femmes de ce groupe, à leurs idées parfois un peu dépassées, pour comprendre comment intégrer la mécanique familiale et fermière. Ce processus est montré comme joyeux, hésitant, toujours empreint d’une presque nostalgie estivale, et échappe aux stéréotypes sociaux qui touchent les personnes représentées grâce à une réalisation discrètement minutieuse.