La compétition Sylvestre du festival IndieLisboa, actuellement en cours à Lisbonne, est destinée aux films libres qui ne suivent pas les chemins tracés et relèvent d’une forme originale. Le court-métrage croate « No wolf has a house » trouve bel et bien sa place dans cette compétition alternative.
En une journée ensoleillée, le jeune trentenaire Tihomir fête son anniversaire chez ses parents. Ces derniers, bouchers, lui prépare un grand barbecue qui dure jusqu’au soir, bien que les invités ne soient pas bien nombreux. Seuls sa femme Sandra, ses parents, sa sœur, son beau-frère et leurs deux enfants sont de la fête. Sandra, rêveuse et mollassonne, dont l’extrême timidité pourrait s’apparenter à un léger handicap social, essaie de s’intégrer tant bien que mal dans cette famille peu ouverte qui fait preuve d’un grand manque de compréhension à son égard. Elle voudrait bien aider à la préparation du repas mais sa belle-mère ne lui accorde pas plus de confiance qu’à un jeune enfant. Elle aimerait prendre part aux discussions pendant le repas mais ses réflexions, certes étranges, ne sont que peu écoutées et certainement pas prises au sérieux par les membres de sa belle-famille.
Plus la journée avance dans cette ambiance peu clémente, plus Sandra se sent mal à l’aise. Son angoisse grandissant lui fait perdre la tête, elle n’arrive plus vraiment à distinguer le vrai du faux et commence à avoir des hallucinations effrayantes. Elle essaie pourtant de se concentrer pour faire disparaître ces images absurdes comme celle du mari de sa belle-sœur la contemplant en petit maillot de bain rose par exemple.
La sensation de mal-être de Sandra est appuyée par de nombreux gros plans subjectifs insistant sur les comportements peu distingués de sa famille : la belle-sœur remet en place le bas de son maillot de bain sans aucune grâce, le beau-père ronge goulument les os de la viande, la belle-mère arrange les gâteaux qu’elle servira au dessert avec ses gros doigts sales… Cette manière de filmer très près des personnages renforce l’enfermement de Sandra dans sa bulle, ne lui laissant aucun échappatoire. Les scènes surréalistes du film et la froideur des images participent au malaise ambiant. Les images de « No wolf has a house » rappellent ainsi les films du réalisateur grec Yorgos Lanthimos, « Canine » et « Alps » qui présentent également des personnages en marge des conventions sociales dans une ambiance toute aussi froide et cinglante.
Dans ce court-métrage glaçant, Hana Jušić ne prend aucunement le parti de ménager son spectateur. Elle l’invite dans un monde amer où la tolérance envers autrui ne fait visiblement pas partie. La réalisatrice a commencé sa carrière en 2010 et a signé plusieurs courts depuis, avec comme point commun celui de filmer des relations humaines complexes.