Festival Courtisane 2012 : le palmarès

La 11e édition de Courtisane, le Festiva gantois pour l’art cinématographique, vidéo et multimédia s’est clôturée ce dimanche 25 mars avec l’habituelle cérémonie de remise de prix suivie de la projection des films primés.

courtisane2012

Un jury de professionnels – Gabriel Abrantes, Marina Gioti et Jeremy Rigsby – a pu ainsi annoncer le gagnant et décerner également deux « Mention spéciale ».

Le gagnant est le cinéaste Nicolas Pereda avec “Entrevista con la Tierra” (MEX, 2010).

Dans une zone d’ombre entre la fiction et la réalité, Pereda montre comment Nico et Amelio réagissent à la mort de leur ami suite à un accident dans les montagnes.

Le Jury s’est exprimé en ces mots: « Nous avons décidé de choisir ce film pour sa proposition, qui est répandue dans l’ensemble de l’œuvre des cinéastes, qui cherchent à revigorer une fonction sociale dans le cinéma et dans l’art. Il cherche à utiliser la fiction et le documentaire pour construire et soutenir une communauté géographiquement condensé, l’exploration d’un mélange de leur vie quotidienne, leurs mythes et les fictions autour de leur avenir. C’est le cinéma qui cherche à lier un groupe de personnes dans la poursuite d’un avenir commun.

Mentions spéciales :

“Agatha” de Béatrice Gibson (Royaume-Uni, 2012)

Une histoire psycho-sexuelle de science-fiction autour d’une planète sans voix. Le narrateur – fonction et genre indéfinis – nous guide à travers un paysage mental et physique, un espace au-delà du mot. Basé sur un rêve du compositeur Cardew Corneille.

“I Will Forget This Day” d’Alina Rudnitskaya (RU, 2011)
Filmé en grisaille, “I Will Forget This Day” est un portrait poignant de jeunes femmes qui sont dans l’attente et dont les décisions ne sont pas dévoilées.” (Andrea Picard)

Autour du court. Prochaine soirée Format Court, le 12 avril aux Ursulines

Après le succès de notre première séance Format Court, nous sommes ravis de vous convier à notre prochain rendez-vous autour du court le 12 avril 2012 au Studio des Ursulines. Entre animation et fiction, entre coups de coeur et coups de poing, cette deuxième soirée consacrée au court métrage sera suivie d’une rencontre avec les équipes des films présentés.

Programmation

Sinner de Meni Philip (Fiction, 28′, 2009, Israël). Nominé aux European Film Awards – Festival de Venise, 2009

Synopsis : Yotam, un garçon de 13 ans dans une pension juive ultra-orthodoxe, essaie de lutter contre l’éveil de ses désirs sexuels. Confus et rongé par la culpabilité, il consulte son rabbin, qui abuse de sa position et de l’innocence de Yotam. Sans recours ni refuge, Yotam se retrouve piégé par le silence imposé dans sa communauté.

Dripped de Léo Verrier. Animation, 8′10″, 2010, France

Synopsis : New York, 1950. Passionné de peinture, Jack écume les musées à longueur de journée. Il y vole des tableaux qu’il cache ensuite chez lui pour…

Andong de Rommel Milo Tolentino (Fiction, 20′, 2008, Philippines). Prix du Public et de la Presse Internationale au Festival de Clermont-Ferrand 2009

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Synopsis : Hanté par une idée fixe, un garçon de six ans, pris entre sa mère et son petit frère, découvre la vraie valeur de vingt pesos durement gagnés.

Je vais à Disneyland d’Antoine Blandin (Animation, 3′03″, 2009, France)

Synopsis : Calvin, huit ans, témoigne d’un regard étrange sur sa vie quelque peu chaotique.

Suiker de Jeroen Annokkee (Fiction, 7′35”, 2010, Pays-Bas). Prix du Public au Festival de Brest 2011

Klaasje, la voisine de Bert, sonne à sa porte, légèrement vêtue, pour lui emprunter un pot de sucre. Elle échappe le pot, ils se penchent en même temps pour le rattraper et se cognent la tête : Klaasje dégringole les escaliers.

Infos pratiques

Projection en présence des équipes de films
Jeudi 12 avril, 20h30
Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris
PAF : 6 €

Accès :

BUS : 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon)
RER : Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Epée)
Métro le plus proche: Ligne 7 (Censier Daubenton), mais apprêtez-vous à marcher un peu…

Page Facebook consacrée à l’événement

Infos & réservations vivement souhaitées : info@formatcourt.com

Prochaine séance : le 10 mai 2012 !

Festival d’Aubagne, le palmarès court

Du 19 au 24 mars, a eu lieu le festival d’Aubagne, consacré à la musique de films en longs et en courts métrages. Dans quelques jours, ce festival atypique en France fera l’objet d’un focus sur notre site. En attendant de le découvrir, voici le palmarès relatif au court.

Grand Prix De La Meilleure Création Sonore : L’Histoire Du Petit Paolo Réalisé par Nicolas Liguori -­‐ musique composée par Marc Perrone

Prix Du Documentaire : Chaque Jour Et Demain Réalisé par Fabrice Main -­‐ musique composée par Fabrice Main

Mention Documentaire : Tons Of Passion Réalisé par Corina Schwingruber llic -­‐ musique composée par Priska Zemp

Prix De L’animation : La garde barrière Réalisé par Hugo Frassetto -­‐ musique composée par Falter Bramnk

Mention De L’animation : L’envolée Réalisé par Sophie Racine -­‐ musique composée par Anton Vodenitcharov

Prix De La Fiction : Badpakje 46 Réalisé par Wannes Destoop -­‐ musique composée par Inne Eysermans ****VIDEO

Mention pour le Prix De La Fiction : Nouvelle Cuisine Réalisé par Vincent Hazard -­‐ musique composée par Stuart Briner

Prix Beaumarchais : Fancy-­Fair réalisé par Chritophe Hermans – musique originale de Clare Louise, Thomas Vaquié et Sandra Campisi

Prix Délégués culturels : Chroniques de l’Afrique Sauvage réalisé par Isaam Mathlouti – musique originale de Denis Volte

Prix du public : L’attaque du montre géant suceur de cerveau de l’espace réalisé par Guillaume Rieu -­‐ musique composé par Mathieu Alvado

Mentions spéciales, coups de coeur : Vimala Pons et Bruno Podalydès (J’aurai pu être une pute), Dominique Bayens (Fancy Fair)

Ouverture des inscriptions du festival international du court métrage insolite et fantastique « Court métrange » de Rennes

Le festival international du court métrage insolite et fantastique « Court métrange » de Rennes vient d’ouvrir ses inscriptions pour sa 9ème édition qui se déroulera du 25 au 28 octobre 2012. Voici les conditions pour postuler :

Les courts métrages doivent correspondre aux thématiques du festival : Horreur, gore, fantastique, insolite, fantasy, science-fiction.

– Films produits après le 1er janvier 2010
– Genre : fiction
– Support de projections : 35mm, Béta numérique, Blu-ray, DCP
– Tous pays

Les films non francophone doivent être obligatoirement sous titrés en français si possible ou en anglais

Vous pouvez inscrire vos films via la plateforme d’inscription aux festivals internationaux : http://www.filmfestplatform.com

My Dad is 100 Years Old de Guy Maddin

Isabella Rossellini était déjà l’incarnation sublime des rêves barrés de David Lynch dans « Blue Velvet » et « Sailor et Lula ». Elle a tout naturellement été accueillie chez Maddin comme une amie longuement attendue et fantasmée, comme une muse à sa hauteur. C’est en 2003 avec « The Saddest Music in the World » que Maddin franchit le pas et fait de Rossellini une patronne de brasserie amputée des deux jambes dont les prothèses sont remplies de bière. Leur collaboration n’a depuis jamais cessé, Rossellini se retrouvant à nouveau cette année au cœur du dernier-né du cinéaste canadien, « Ulysse souviens-toi ! » (« Keyhole » en VO) encore à l’affiche de quelques bonnes salles obscures.

« My Dad is 100 Years Old » est un film de Guy Maddin certes, mais a été écrit par Isabella elle-même. Si la forme est purement madinnienne le récit, très narratif, mélancolique voire pédagogique a tout de son actrice légendaire. Le film est un hommage au père d’Isabella, Roberto, né 100 ans plus tôt (nous sommes alors en 2005). Comme dans « Des trous dans la tête », Rossellini est la narratrice du film. Le charme désarmant du film doit d’ailleurs beaucoup à sa voix inimitable et irrésistible faite d’un anglais teinté d’un fort accent italien.

Ce principe de narration sera également repris plus tard en 2008 dans la désormais fameuse série des « Green Porno » sur Sundance Channel où Isabella nous disait tout de la vie sexuelle des insectes et autres animaux à la libido débridée. Dans « My Dad is 100 Years Old », elle affirme d’ailleurs que son père aurait pu être un hippocampe s’il avait été un animal car « c’est le mâle qui tombe enceinte ». Petite, Isabella pensait en effet que son papa était « enceinte », à cause de son ventre si gros. C’est ce ventre « énorme, doux, rond, chaud, câlin » qui est au centre du film et qui représente le réalisateur italien. Autour de ce corps créateur et nu, viennent dialoguer de grandes figures du cinéma qui ont connu Rossellini père. Alfred Hitchcock, Federico Fellini, Charlie Chaplin et le producteur David O.Selznic font ainsi leur apparition fantomatique, et c’est Isabella qui les incarne tous. Elle excelle dans le travestissement, imitant jusqu’aux accents de chacun. Ils débattent sur le rôle du cinéma opposant le divertissement (Hitchcock) à la vérité et au savoir (Rossellini). C’est l’occasion de brillantes saillies où Hitchcock suggère à Rossellini qu’il aurait dû être un prête plutôt qu’un réalisateur, ce à quoi l’intéressé rétorque que le maître du suspense aurait été plus à sa place comme magicien.

Bien sûr, c’est l’apparition d’Ingrid Bergman drapée de blanc sur un écran de cinéma qui vient réveiller en nous une émotion assez inédite, Isabella Rossellini ressemblant traits pour traits à sa mère, son interprétation ramène à la vie une autre actrice légendaire. Plus que troublant, ce face à face entre la mère et la fille atteint des sommets de poésie. C’est à l’évidence le plus beau moment du film. Isabella revient sur la rencontre de ses parents et Bergman évoque Anna Magnani de façon très touchante alors que Rossellini a quitté cette dernière pour elle. L’occasion également de rétablir quelques vérités sur ce couple qui avait scandalisé les bien-pensants. « Certains disent que tu as détruit sa carrière » dit Isabella à sa mère. « Non, c’est moi qui ai détruit la sienne » confesse Bergman.

Roberto Rossellini meurt le 3 juin 1977. Profondément marquée par cette perte, comme mesure de l’impact la disparition de son père sur sa vie. Son calendrier à elle se divise entre « avant le 3 juin 1977 et après le 3 juin 1977 ». Elle clôt son film par ces mots, simplement sincères, à destination de son père : « Je ne sais pas si tu es un génie mais je t’aime ».

Amaury Augé

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M comme My Dad is 100 Years Old

Fiche technique

Synopsis : Un portrait de Roberto Rosselini, dans lequel il est dépeint comme un énorme coussin-ventre.

Genre : Expérimental

Durée : 16′

Pays : Canada

Année : 2005

Réalisation : Guy Maddin

Interprétation : Isabella Rossellini, Isaac Paz Sr.

Scénario : Isabella Rossellini

Musique : Christopher Dedrick

Chef décorateur : Rejean Labrie

Chef costumier : Meg McMillan

Chef monteur : John Gurdebeke

Chef opérateur : Lenka Peterson

Production : Spanky Productions Inc.

Article associé : la critique du film

Festival de Brive, la sélection européenne 2012

Le 9ème Festival de Brive, exclusivement consacré au moyen métrage, a sélectionné cette année 23 oeuvres de jeunes auteurs européens. Ces films sont à découvrir du 10 au 15 avril prochain.

ALPI de Armin Linke / Allemagne / 2011 / Documentaire expérimental / 60 min / Arsenal

BAGNI 66 de Luca et Diego Governatori / France / 2011 / Fiction / 55 mn / Les Films Hatari

BORO IN THE BOX de Bertrand Mandico / France / 2011 / Fiction expérimentale / 40 mn / Société Parisienne de Production – Coproduction Office

CE QU’IL RESTERA DE NOUS de Vincent Macaigne / France / 2011 / Fiction / 40 mn / Kazak Productions

COMPLET 6 PIÈCES de Pascale Bodet / France / 2012 / Fiction / 30 mn / Le G.R.E.C

DAYS OF GRASS (DAGEN VAN GRAS) de Tomas Kaan / Pays-Bas / 2011 / Fiction / 49 mn / Circe

ET ILS GRAVIRENT LA MONTAGNE de Jean-Sébastien Chauvin / France / 2011 / Fiction / 33 mn / Sedna Films

GANGSTER PROJECT de Teboho Edkins / Allemagne – Afrique du sud / 2011 / Documentaire / 55 mn / DFFB

GLORIOUS ACCIDENTS de Mauro Andrizzi et Marcus Lindeen / Suède – Danemark – Argentine / 2011 / Expérimental / 58 mn / DOX:LAB

LA GRÈVE DES VENTRES de Lucie Borleteau / France / 2012 / Fiction / 34 mn / Why not productions

LA MALADIE BLANCHE de Christelle Lheureux / France / 2011 / Fiction documentaire/ 42 mn / Les Films des Lucioles

LA VIE PARISIENNE de Vincent Dietschy / France / 2011 / Fiction / 37 mn / Sombrero Films

LES LLUNES DE GALILEU de Quimu Casalprim i Suárez / Allemagne / 2012 / Fiction expérimentale / 49 mn / KHM

MIDSUMMER NIGHT (MIDZOMERNACHT) de Hiba Vink / Pays-Bas / 2011 / Fiction / 49 mn / Ijswater

NOS FIANÇAILLES de Lila Pinell & Chloé Mahieu / France / 2011 / Documentaire / 55 mn / The Factory

PALACIOS DE PENA de Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt / Portugal / 2011 / Fiction expérimentale / 59 mn / Mutual Respect

PAPA de Umut Dag / Autriche / 2011 / Fiction / 40 mn / Six Pack Films

SNOW CANON de Mati Diop / France / 2011 / Fiction / 33 mn / Aurora Films

SUR LE DÉPART de Michaël Dacheux / France / 2011 / Fiction / 53 mn / Bathysphère Productions

SWEETNESS de Lisa Bierwith / Allemagne / 2011 / Fiction / 30 mn / DFFB

THE MEDIC (LEBENSRETTER KONSTANTIN) de Mark Gerstorfer / Autriche / 2011 / Fiction / 30 mn / Six Pack Films

VILAINE FILLE, MAUVAIS GARCON de Justine Triet / France / 2012 / Fiction / 30 mn / Ecce Films

WITHOUT SNOW (BEZ SNIEGU) de Magnus Von Horn / Pologne / 2011 / Fiction / 35 mn / PWSFTViT

35es Rencontres Henri Langlois à Poitiers, appel à films

La 35e édition du Festival international des écoles de cinéma se déroulera du 30 novembre au 9 décembre à Poitiers. Dès aujourd’hui, les jeunes réalisateurs peuvent tenter leur chance et concourir à la sélection pour la Compétition internationale des Rencontres Henri Langlois.

Pour s’inscrire, la démarche est simple : il suffit de remplir la fiche d’inscription sur le site du Festival et d’envoyer son film avant le 15 juillet prochain. Si aucun critère de genre ni de durée n’est requis, les films doivent avoir été réalisés dans une école, université ou institut de cinéma et/ou audiovisuel, et ce, depuis le 1er janvier 2011. Une fois inscrits, les films seront aux mains des 15 membres du Comité de sélection, rejoints par l’équipe en dernière instance, qui feront le choix des œuvres soumises aux Jurys et au public en décembre.

Rencontres Henri Langlois – Festival international des écoles de cinéma TAP – scène nationale / 1 boulevard de Verdun – 86000 POITIERS – FRANCE T. +33 (0)5 49 03 18 90 / F. +33 (0)5 49 03 18 99 Mél : festival.rihl@tap-poitiers.com / www.rihl.org

N comme Night Mayor

Fiche technique

Synopsis : Winnipeg, 1939, Nihad Ademi, un immigrant bosniaque devenu « maire de nuit » de la ville, charge sa famille de capter les ondes multicolores de l’aurore boréale et utilise l’énergie ainsi obtenue pour diffuser, d’un océan à l’autre, des images du pays d’adoption qu’il adore à ses concitoyens en mal d’identité. Ce truc miraculeux irrite le gouvernement, qui organise un raid au laboratoire de Nihad pour empêcher la diffusion d’images patriotiques échappant à son contrôle.

Genre : Expérimental

Année : 2009

Pays : Canada

Durée : 13’54 »

Réalisation : Guy Maddin

Scénario : Guy Maddin

Image : Benjamin Kasulke

Montage : John Gurdebeke

Musique : Jason Staczek

Interprétation : Nihad Ademi, Mike Bell, Timna Ben Ari, Shalini Sharma

Production : Office national du film du Canada

Article associé : la critique du film

Guy Maddin : « Les films perdus ont souvent eu une fin tragique, la plupart n’ont pas trouvé de lieu pour reposer en paix »

À l’occasion de sa venue à Paris en juin dernier pour une masterclass organisée par ED Distribution à l’Espace St-Michel, nous avons posé quelques questions à Guy Maddin sur son travail et le rapport étroit qu’il entretient avec la forme courte. Il nous a répondu avec la ferveur et la franchise qui le caractérisent et en a profité pour nous livrer les clés du grand projet de « Spiritismes » qu’il a mené ces derniers jours au Centre Pompidou.

Format Court : Pourriez-vous nous décrire votre vision du cinéma ?

Guy Maddin : Mon approche du cinéma a toujours été liée à l’intime. J’ai su, lorsque que j’ai commencé à faire des films, que je serais en décalage avec les autres réalisateurs. Je ne me voyais pas faire des films avec une image très léchée et sophistiquée, je me vois plutôt comme un artisan dans son établi. Je me suis dit que ma seule chance de me démarquer était de me consacrer à un cinéma plus primitif, presque enfantin, voire surréaliste. N’étant pas un réalisateur très expérimenté, je pensais qu’il fallait impérativement que mes films soient très personnels afin que ce côté surréaliste vienne de mon coeur, de mes rêves ou du plus profond de ma mémoire. Très tôt, j’ai décidé de faire un cinéma personnel aussi pour éviter d’être taxé de « arty » ou de « branleur ».

Qu’est-ce que représente le court métrage pour vous ?

G.M. : Pour beaucoup de réalisateurs, le court métrage est juste une étape, un passeport pour faire des longs métrages. C’est l’occasion de prouver à des investisseurs, à des producteurs et à eux-mêmes qu’ils peuvent faire un long métrage. Une fois le passage au long métrage réalisé, ils arrêtent le court métrage. Je trouve cette attitude assez irrespectueuse. Le court métrage devrait être perçu et reçu par le public comme le sont les nouvelles en littérature. Il est d’ailleurs communément admis que les écrivains alternent entre romans et nouvelles. Je ne sais pas pourquoi il en est ainsi, en tout cas je me sens proche de cette conception de l’histoire courte.

Pour moi, certaines histoires, certaines impressions que l’on veut faire passer ont seulement besoin de quelques minutes. Vouloir étirer artificiellement cette durée me paraît ridicule. De mon point de vue, le court métrage est un bon moyen pour garder la main entre deux longs métrages : après plusieurs années sans faire de films, je me sens un peu rouillé, j’oublie comment réaliser ou diriger mes acteurs. Sur un long métrage, l’ambiance est souvent électrique les premiers jours. Si je fais un court métrage, je peux retrouver mes marques dès les premiers instants du tournage. Parfois, il m’arrive aussi de faire des court métrages seulement parce que je me sens seul ou parce que je n’ai pas vu mes amis depuis longtemps. Quand j’ai dix bouteilles de tequila en stock, mille films en tête et la maison de ma mère pour le weekend, je me dis : “Faisons un film !”. J’espère personnellement ne jamais arrêter de faire des courts métrages.

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Vous avez réalisé une trentaine de courts métrages et vous continuez d’en faire en parallèle de vos longs métrages. Où en sont vos projets ?

G.M. :J’ai terminé mon dixième long métrage, “Keyhole (Ulysse, souviens-toi !)”. Mon projet actuel (“Spiritismes”) me permet de réaliser de nombreux courts métrages. J’ai fait beaucoup de recherches dans de vieux magazines du début du XXème siècle et en particulier les anecdotes concernant la multitude de films perdus, par exemple le premier film d’Alfred Hitchcock.

Je pensais récemment à tous ces films perdus, je lisais leurs titres et certains m’intriguaient beaucoup. Certains avaient mêmes été nominés à l’Académie des Oscars et pourtant, ils avaient disparu ! Et pourquoi ? Parce que les studios avaient jeté les bobines au feu pour allumer leur barbecue ou dans l’océan pour faire de la place aux prochains films dans les cinémas. C’est vraiment quelque chose de tragique. Quelques années après, les studios ont cessé de faire cela et ont laissé les films se désintégrer peu à peu pour devenir une sorte de vinaigre visqueux. Les films perdus ont donc souvent eu une fin tragique et la plupart n’ont pas trouvé de lieu pour reposer en paix. Cette pensée m’a hanté pendant longtemps et j’ai commencé à imaginer ces films comme des âmes égarées qui hantent le cinéma. J’ai compris alors que la seule façon pour moi de voir ces films serait de les refaire moi-même, d’en faire ma propre version. J’ai déjà réalisé certains films qui sont en fait des remakes secrets. Je reprends des éléments narratifs ou des personnages que j’arrange à ma sauce. Par exemple, mon film « The Heart of the World » est un remake secret d’un film que je croyais perdu, « La fin du monde » d’Abel Gance, mais qui l’était seulement en partie.

« Odilon Redon » est aussi un remake d’un autre film d’Abel Gance « La Roue ». Celui-là n’était pas du tout perdu mais tourner ce film a été un exercice très intéressant pour moi. Il existe maintenant seulement une version de 4 minutes du film de 4 heures d’Abel Gance. J’ai des centaines de titres de films perdus, j’aimerais pouvoir un jour réunir l’argent nécessaire pour pouvoir tourner un film par jour pendant un an puis les mettre sur internet pour organiser des sortes de « séances » à heures fixes. Lors de ces projections, les films se mêleraient les uns aux autres, les esprits errants contenus dans ces films perdus se mettraient alors à se parler.

Vous avez fait un film sur Odilon Redon. Quel est votre rapport à la poésie symbolique ?

G.M. : Odilon Redon est connu pour être un symboliste. J’ai toujours aimé les artistes symbolistes même si je n’ai jamais su à quoi cela était lié. La BBC m’a proposé de faire un film de 4 minutes sur un artiste de mon choix. J’ai su immédiatement que je voulais faire ce film sur Odilon Redon. J’ai repensé aux illustrations qu’il avait réalisées pour une édition d’Edgar Allan Poe. La plupart de ses dessins sont presque exclusivement faits en noir et blanc. Moi-même, j’ai travaillé aussi presque uniquement en noir et blanc. J’aime la magie qui entoure ce type d’image et je suis du genre à ne pas changer d’avis. Je n’avais pas fait beaucoup de recherches même si je connaissais le travail de Redon. J’avais lu quelque part qu’il aimait beaucoup les films d’Abel Gance. Je me suis servi de cela pour lâchement emprunter la structure du film « La Roue », à savoir un triangle amoureux : un père, son fils et au milieu une jeune orpheline recueillie après une catastrophe ferroviaire.

De quelle façon montez-vous vos films ?

G.M. : Lorsque je travaillais en 2002 sur « Et les lâches s’agenouillent », je pensais le monter comme tous mes films précédents. Le tournage a commencé, les prises se sont succédé mais inconsciemment, je cherchais autre chose.

Pour la première fois, j’ai « dérushé » avec mon monteur sur un ordinateur. Sur les vieux bancs de montage, lorsque l’on accélère la vitesse de lecture, les images s’enchaînent plus vite alors que sur les ordinateurs, on ne voit pas toutes les images, on saute d’images en images, entre chaque saute quelques secondes d’image sont enlevées. Du coup avec ce système, il nous est arrivé plusieurs fois de rater la prise que nous cherchions. Après plusieurs jours de multiples allers-retours à la recherche de la bonne séquence, je me suis rendu compte que j’aimais cette sensation. Cela m’a fait penser au fonctionnement de la mémoire et à la façon dont nous pouvons nous souvenir de certaines choses.

Souvent, lorsqu’on essaye de revivre un bon souvenir, on a envie d’aller au plus vite auprès de celui-ci. Mais on se rend compte qu’en allant trop vite vers ce souvenir, le plaisir s’amenuise. Alors on ralentit et on essaye à nouveau de se remémorer mais cette fois-ci, un peu plus doucement, jusqu’à trouver la bonne vitesse. Lorsque les conditions sont réunies, on a alors envie de s’y attarder, de rester un moment avant de repartir ensuite vers un autre souvenir.

En parcourant les rushes de mon film, je me suis rendu compte que je me remémorais mes souvenirs préférés un peu de la même façon. « Et les lâches s’agenouillent » est d’ailleurs basé entièrement sur des souvenirs personnels, c’était donc pour moi la meilleur approche possible pour monter le film. Nous avons intégré au montage notre recherche des rushes, en adaptant la vitesse de l’image. En quelque sorte, nous avons fait monter ce film comme on se remémore un souvenir.

Pensez-vous que le court métrage est le format le plus approprié pour raconter des histoires qui ne sont pas narratives ?

G.M. : Les réalisateurs de courts métrages peuvent développer dans leurs films des univers parfois plus subtils et moins narratifs que dans la plupart des longs métrages. La simple raison est que le public a besoin d’une narration pour pouvoir regarder un long métrage jusqu’au bout. Soyons réalistes, le public peut plus facilement supporter un film qui n’est pas narratif quand il est relativement court, mais je pense que l’esprit humain finit par trouver une structure au film d’une façon ou d’une autre, même lorsqu’il n’y en a pas. C’est comme si notre cerveau insistait pour trouver une voie logique à tout ce qui se présentait à lui. En tout cas, même si on ne comprend pas l’intrigue, au moins avec un court métrage, la frustration ne sera que de courte durée.

Lorsque j’ai commencé à faire des films, j’étais considéré par beaucoup comme étant un réalisateur expérimental et pourtant, je regardais beaucoup de films commerciaux, chose que je continue à faire d’ailleurs. J’aime aussi les films à l’intrigue bien ficelée, ce qui ne m’empêche pas de voir ensuite 8 heures de films expérimentaux.

Propos recueillis par Julien Savès et Julien Beaunay. Traduction : Julien Beaunay

Night Mayor de Guy Maddin

The truth of the false star

Repéré entre autres au festival de Clermont Ferrand en 2011, où il a emporté le Grand Prix Labo haut la main,  « Night Mayor » de Guy Maddin est un exercice dans le genre biographique, au sens le plus large du terme. Le dernier court métrage du réalisateur canadien est à la fois caractéristique et atypique de son style et vient couronner sa filmographie déjà bien singulière.

Nihad Ademi, photographe et Winnipegois comme Maddin lui-même, se met en scène pour jouer son propre rôle d’immigré bosniaque, sauf qu’il troque son appareil pour un tuba et transpose son histoire des années 90 post-guerre yougoslave vers les années 40 au Canada. Faiseur d’images en fiction comme en réalité, Ademi incarne un scientifique fou qui tire parti de l’énergie de l’Aurore boréale pour créer un appareil audiovisuel organique appelé « télémélodium ». Celui-ci capte et retransmet les images les plus intimes du pays, sorte de téléréalité avant la lettre, et Ademi se proclame Night Mayor (maire de nuit) de Winnipeg.

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Ceux qui s’aventurent à chercher dans l’œuvre de Maddin un message social manifeste pourront se féliciter de trouver dans ce film une thématique complexe derrière un sujet anecdotique, ce qui est inhabituel pour le cinéaste principalement formaliste. D’une part, se pose la question de l’identité, en l’occurrence canadienne : le film se présente comme une émission télévisuelle intitulée « Faces of Canada » et prend la forme d’un témoignage collectif de Ademi et de ses enfants sur l’immigration de leur famille et leur intégration dans la culture d’accueil. D’autre part, semble s’opérer en filigrane une dénonciation de l’invasion des images et du manque de respect de la vie privée, le côté Big Brother de la culture populaire d’aujourd’hui. Postmoderne jusqu’à la moelle, Maddin fait preuve d’un cynisme mordant sur ces deux coups. La volonté d’appartenir à tout prix à la société canadienne et la soif du pouvoir que celle-ci engendre chez le protagoniste deviennent le cauchemar (le mot nightmare retentit tout au long du récit comme homophone du titre) du peuple, du gouvernement et d’Ademi lui-même.

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Aucunement limité à une lecture unidimensionnelle, le court de Maddin s’interroge également sur le rapport entre la vérité et la fiction. Le film joue d’ailleurs sur l’ambiguïté fiction/documentaire en se présentant comme un reportage télévisuel. Par ailleurs, les images qui saturent les écrans des Canadiens et offusquent les autorités sont ironiquement elles-mêmes nées de l’illusion qu’est l’aurore polaire : « the peculiar truth that comes from the false dawn ».

Finalement, comme de nombreux courts métrages du génie du déjanté (notamment « Send Me to the ‘lectric Chair », coréalisé avec Isabelle Rossellini), « Night Mayor » est le portrait psychologique d’une manie, d’une obsession, dessiné avec une plume fantastique, surréaliste et grotesque. Sous cette couverture du bizarre, Maddin réussit à explorer des tabous avec aplomb, lorsque, par exemple, Ademi exprime son désir érotique par rapport à sa fille nue. Sur le plan formel, les habitués du cinéma de Maddin peuvent s’étonner une fois de plus devant une prépondérance de dialogue (cf. « Sombra dolorosa ») et un tel éloignement par rapport au muet, code primordial du cinéma des premiers temps cher au réalisateur. D’autres éléments plus familiers, tels les intertitres, l’image griffée, l’esthétique de science-fiction primitive et les bruitages perturbant, reviennent alors nous rassurer.

Adi Chesson

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Vincent Macaigne : « Ce que j’écris, ce ne sont pas des rôles, mais plutôt ce que j’ai envie de dire. J’ai une sorte de parole qui m’est personnelle »

Récemment, le MK2 Beaubourg semblait très attaché au format du moyen-métrage. Exercice de style extrêmement intéressant et surtout loin des exigences commerciales, le moyen-métrage est souvent trop peu visible sur les écrans, petits ou grands ou dans les festivals malheureusement. Ce cinéma permet par conséquent de (re)découvrir le double travail de Vincent Macaigne dans deux moyens-métrages. On le connaissait certes déjà comme comédien, on aura toujours le même plaisir à le voir ou à le revoir dans « Un monde sans femmes » de Guillaume Brac, récemment nominé aux César. Et depuis le mercredi 29 février, on a également l’occasion de noter ses talents de jeune réalisateur avec son premier film eletrochoc , « Ce qu’il restera de nous », fort remarqué au dernier Festival de Clermont-Ferrand : il y a remporté rien de moins que le Grand Prix, le Prix de la presse Télérama et une Mention Spéciale du Jury Jeunes National.

Nous en avons donc profité pour rencontrer celui qui fait couler beaucoup d’encre, aussi bien pour ses performances théâtrales que pour son premier film réalisé. Un moyen de prouver que, derrière le bonhomme aux airs timides mais barrés, Vincent Macaigne possède une réelle acuité qui fait de lui un artiste absolument unique, en constante recherche artistique et en totale recherche de liberté.

Format Court : « Ce qu’il restera de nous » est sorti le mercredi 29 février au MK2 Beaubourg, de manière un peu imprévue. Quelle a été ta réaction ?

Vincent Macaigne : Ce n’était pas prévu effectivement. On a été pris par surprise ! Et c’est plutôt une bonne nouvelle en fait. La seule chose un peu dommage est qu’on n’a pas eu vraiment le temps de préparer cette sortie en salle.

On note une certaine envie, apparemment, du MK2 Beaubourg de proposer une programmation de moyens-métrages, puisque sont également (ou ont été récemment) à l’affiche dans ce cinéma, le film de Guillaume Brac dans lequel tu joues, « Un monde sans femmes » et  « Le Marin masqué » de Sophie Letourneur.

V.M. : Oui, à vrai dire, je n’y ai pas vraiment fait attention, mais je sais que pour le film de Guillaume, c’est un peu particulier car c’est un programme avec deux de ses films autour du même personnage qu’est celui de Sylvain que j’interprète. Certes, il y a Un monde sans femmes, mais aussi Le naufragé. Par conséquent, c’est un peu comme un long-métrage qui doit durer à peu près 1h15.

Pour en revenir à ton film, d’où vient ce projet ?

V.M. : En réalité, je faisais un labo de théâtre à Orléans et lorsque j’ai eu fini mon travail pour le théâtre, j’avais encore environ deux semaines de résidence dans la maison où l’on était. D’ailleurs, c’est la maison qu’on voit dans le film. Du coup, j’avais une maison, les comédiens et j’ai emprunté une caméra pour filmer.

Tu connaissais déjà Laure Calamy pour avoir tourné avec elle dans « Un monde sans femmes » et pour l’avoir dirigée au dernier Festival d’Avignon dans ton adaptation d’Hamlet ? C’est la raison pour laquelle tu as eu envie de retravailler avec elle ?

V.M. : Laure, je la connais depuis le Conservatoire qu’on a fait ensemble. Et elle était disponible à l’époque du film. Je dis « à l’époque » car j’ai passé beaucoup de temps sur le montage. Le film a été tourné il y a environ deux ans si je me souviens bien. Disons que j’avais beaucoup de matière, beaucoup de rushs et j’aurais presque pu faire un film d’1h30. Et oui, j’ai choisi Laure parce que je la connais bien. Mais Thibault (ndlr : Lacroix, autre comédien du film) a aussi fait le Conservatoire avec nous.

Pour tes deux comédiens, Thibault Lacroix et Anthony Paliotti, c’était leur première fois au cinéma ?

V.M. : Pour Thibault, oui. Mais pas pour Anthony. Il avait dû travailler avec Étienne Chatiliez auparavant et d’autres pour des petits rôles.

Dès le début du projet, tu avais un texte, un scénario ?

V.M. : C’est compliqué en réalité car il y a des éléments qui étaient un peu improvisés et d’autres non. Au bout d’un moment, de deux, trois heures qu’on tournait sans raison, d’un coup dans la nuit, j’ai commencé à écrire l’histoire. J’avais quand même dans l’idée de raconter l’histoire d’un mec qui brûlait sa voiture. Et par hasard, j’avais vu une voiture brûlée dans les alentours de la maison qui nous servait de résidence. À partir de cette scène-là, on a alors reconstruit le film. Puis, on a commencé à tourner avec cette voiture. Malheureusement les flics sont arrivés et l’ont enlevée.

Si bien que la séquence de la fourrière a été tournée en temps réel ?

V.M. : Oui, on a profité que la dépanneuse retirait la voiture pour filmer.

C’était une volonté de départ de faire un film si violent où les personnages crient autant ?

V.M. : Oui, oui. De manière où je travaille au théâtre, bien évidemment, on est parti de ce qu’on faisait au théâtre. Par conséquent, je me suis dit que j’allais partir de ce que je connaissais. Disons que je n’avais jamais fait de cinéma et je n’avais donc pas la prétention de faire du cinéma dans le sens, « faire semblant » de savoir faire du cinéma. C’est la raison pour laquelle, par exemple, je n’ai pas beaucoup de gros plans dans mon film. Disons que c’était à la fois trop simple et trop instable.

À partir de quel moment as-tu contacté la société de production Kazak ?

V.M. : En réalité, lorsque j’avais dirigé l’Idiot au théâtre, Jean-Christophe Raymond m’a contacte en me disant que ça les intéressait de faire quelque chose ensemble et je n’étais pas contre cette idée. Il est vrai que j’avais très envie de faire du cinéma. Comme j’avais déjà ces rushs, je les ai rappelés et je leur ai demandé de l’aide car je ne savais pas trop comment faire. Par conséquent, ils sont arrivés un peu après sur le projet. Ils ont trouvé un monteur, mais comme ça ne convenait finalement pas très bien, j’ai décidé de monter seul.

Par conséquent, tu as réellement tout fait : le scénario, la réalisation, l’image et le montage.

V.M. : Oui, mais Kazak a tout de même su m’accompagner. Et très sincèrement, sans eux, je n’aurais pas abouti. J’aurais laissé les rushs tels quels.

Et tu avais déjà vu ce que Kazak produisait ?

V.M. : Non, pas vraiment, mais ça ne m’intéressait pas de voir. Disons que je valorise plus volontiers le côté humain des choses. Il est vrai qu’ils avaient pas mal d’énergie pour reprendre le film à un moment où j’en avais un peu marre. Leur rôle a donc été de m’accompagner pour terminer ce film.

Ça te donne tout de même l’envie de refaire un film ou pas ?

V.M. : Oui, oui, j’ai très envie. Avec Kazak, je dois justement faire un autre court-métrage en partant de leurs affections à eux, mais ce n’est pas encore vraiment décidé. Pourquoi pas en faire un autre. Après, j’écrirai un long. Mais pour le moment, il y a des tas de choses que je n’ai pas assez étudiées pour faire un truc bien.

Tu sembles en tout cas, assez autodidacte.

V.M. : Oui, j’aime bien apprendre par moi-même. J’ignore si j’apprends bien, mais oui, je pense que j’apprends vite.

Aujourd’hui, on entend beaucoup de comédiens qui, faute de se voir proposer les rôles dont ils ont envie, écrivent eux-mêmes leurs rôles et se mettent en scène. Tu n’as pas eu envie de jouer dans ton propre film ?

V.M. : J’aime beaucoup jouer, mais de toutes manières, c’était impossible que je joue dans mon film puisque c’était moi qui tenais la caméra. Et puis, ce que j’écris, ce ne sont pas des rôles. C’est plutôt ce que j’ai envie de dire. J’ai une sorte de parole qui m’est personnelle.

Au niveau de la direction d’acteurs, comme tu as été toi-même comédien auparavant avec d’autres réalisateurs, as-tu reproduit des schémas ou pas ?

V.M. : En réalité, je n’ai pas trop d’avis là-dessus puisque selon moi, chacun dirige à sa propre manière pour nous amener là où il veut afin d’obtenir le film qu’il souhaite.

Donc tu n’as pas emprunté de techniques ou pris exemple sur Guillaume Brac ou Louis Garrel avec qui, tu as tourné ?

V.M. : Non, pas vraiment. En réalité, j’ai joué dans leurs films car ce sont des amis. Après, ils m’ont emmené là où ils voulaient selon ce qu’ils attendaient et moi, j’ai aussi fait un peu comme j’imaginais les personnages.

Et as-tu ton mot à dire auprès des réalisateurs avec qui tu travailles puisque tu écris et mets en scène toi aussi ?

V.M. : Disons que je leur fais part de ce que je pense, mais après, ils en font ce qu’ils veulent. Ça dépend des moments aussi. Parfois, je peux être chiant. Par exemple, sur « Un monde sans femmes », j’avais l’impression que le personnage de Sylvain était beaucoup plus lent que moi, voire même trop lent. Par conséquent, les journées étaient assez dures, d’autant qu’elles me semblaient longues à cause de la lenteur du personnage. D’ailleurs, j’avais du mal à être hyper joyeux.

Tu te considères comme quelqu’un d’heureux ?

V.M. : Oui… enfin, je crois. Ça dépend des fois…

En tout cas, que ce soit chez Brac ou Garrel, ils t’ont proposé des personnages un peu « paumés », des rôles qu’on pourrait éventuellement cataloguer de « looser ». Ça ne te dérange pas d’accepter de jouer ce type de rôle justement ?

V.M. : Je ne pense pas que ce soit lié à moi. C’est plus volontiers dû à ce groupe de gens qui sont mes amis. On est assez proche et ils me connaissent. Et selon moi, les personnages qu’ils me proposent sont plutôt mélancoliques que « paumés », au même titre que les personnages de « Ce qu’il restera de nous ». La seule différence c’est que par exemple, chez Guillaume, cette mélancolie est traitée avec de la douceur, tandis que chez moi, elle est peut-être plus violente. Mais globalement et de toutes manières, j’accepte plus facilement des rôles des gens qui m’entourent.

Cela signifie que tu n’as pas vraiment de plan de carrière ou plus exactement, d’expectatives de rôles ou de travail avec tel ou tel metteur en scène ?

V.M. : Non, pas vraiment. Il y a peut-être des gens dont j’apprécie le travail, mais encore une fois, je travaille avec les gens qui m’entourent, donc je n’ai pas réellement de rêve, non. Je ne sais peut-être pas toujours exactement où je vais tout simplement parce que j’essaie d’agir librement, en faisant confiance à mon instinct et de faire ce que j’aime.

V.M. : As-tu des références cinématographiques ou autres ?

C’est compliqué. Je n’ai pas vraiment de références réelles quand je tourne. Il doit sûrement y en avoir, ou certains en verront, mais mon but c’est surtout d’arriver à dire, à faire passer ce que j’ai envie de dire.

Et si je te dis Michaël Haneke ?

V.M. : Ah oui, j’aime bien Haneke… mais je n’ai pas cherché à y faire référence.

Pour finir sur ton film, on a tout de même l’impression que tu es très attaché au travail d’improvisation et d’expérimentation ?

V.M. : Pourtant, je te promets qu’il y a très peu d’improvisation dans le film. À part la scène de Laure où là oui, elle improvise son monologue et c’est aussi pour ça qu’on ne l’a tourné qu’une seule fois car c’était assez intense. Il y a peut-être quelques petites autres scènes, mais sinon, pas vraiment en fait. Ce que j’ai monté n’était pas du tout improvisé. Quant au moment du tournage, la veille de filmer, je travaillais une scène et le lendemain, on les retravaillait pas mal tous ensemble. Parfois, on faisait même 25 prises !

Malgré le travail de longue haleine que tu décris, tu ne crains pas que les gens puissent y voir un exercice de style, cinématographiquement parlant ?

V.M. : Pour moi, il ne s’agit pas d’un travail expérimental, car même si pour beaucoup de gens, ça peut paraître étrange, c’est, selon moi, tout à fait normal et accessible. Je considère que ce film est grand public et j’espère que les gens le verront comme tel. Je conviens que le film peut paraître bizarre, mais dans l’absolu, je ne pense pas qu’il le soit autant. À partir du moment où on dit quelque chose aux gens ou que les gens sont curieux d’écouter ce qu’on a à leur dire, peu importe la forme. Après, de toutes manières, je suis peut-être un peu paradoxal puisque j’ai aussi fait des choses très commerciales. Mais finalement, ça ne me pose pas trop de problème et je veux me sentir libre de faire les choses quand je veux, sans avoir de règle. Je n’ai pas de problème à me mettre en danger car j’aime rencontrer des gens et des univers.

Propos recueillis par Camille Monin

Article associé : la critique de « Ce qu’il restera de nous »

Les Quatre saisons de Cinergie. Rencontre avec Jan Hammenecker le 16 mars 2012

Qu’est-ce un film sans comédiens ? Qu’est-ce un comédien sans personnages ? Au-delà des incarnations proposées, comment se traduit son charisme ? Où va-t-il puiser son essence pour habiller le costume qu’on lui prête ? Jan Hammenecker, comédien flamand, découvert au public francophone avec « Max et Bobo », un film de Frédéric Fonteyne, et qui ne cesse de percer tant dans le cinéma belge que français, se prêtera au jeu des confidences après la projection de courts métrages auxquels il a donné sa présence. Bientôt à nouveau présent sur grand écran avec la dernière réalisation de Frédéric Fonteyne, « Quartier libre », Jan Hammenecker sera entouré des réalisateurs et réalisatrice des films programmés. Ceux-ci s’exprimeront sur la tâche délicate qu’est le choix du casting ainsi que la direction d’acteurs.

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Au programme de la soirée, on pourra retracer l’évolution de Jan Hammenecker sur quasiment deux décennies avec « Ti amo » (1990) de Frank Van Passel (le réalisateur du « Madonna’s Pig »), « Une fameuse journée » (2005) de Jean-Marie Buchet (un non-sense à l’anglaise), « Les Habitants » (2006) de Raphaël Balboni, « Une issue » (2007) de Mireille Verboomen et la « Monique de Joseph » (2007) de Damien Chemin. Au vu de cette programmation, Jan serai-il un comédien de l’absurde ou tout simplement un comédien belge ? Nous lui poserons la question.

Les Quatre saisons de Cinergie – Printemps 2012
Vendredi 16/03 à 20h à Flagey, Studio 5
www.flagey.be, cinergie.be
Place Sainte Croix
1050 Bruxelles

Le Festival Millenium dévoile sa 4ème édition!

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Pour la 4ème année consécutive, le Festival International du Film Documentaire Millenium se déroulera à Bruxelles à partir du 17 avril 2012. Ce ne sont pas moins de 50 films qui y seront présentés avec des avant-premières belges ou internationales, dont 15 dans le cadre de la compétition. Un Jury international présidé par le réalisateur Stefano Savona ainsi qu’un Jury du Public auront la responsabilité de décerner les 6 prix en jeu. Au cours du Festival se tiendront également des conférences, des ateliers et un événement spécifique de 2 jours consacré au web-documentaire.

Le Festival Millenium est un événement international unique à Bruxelles, le rendez-vous incontournable des passionnés du film documentaire. C’est un lieu de rencontre multiculturel où se côtoient des réalisateurs du monde entier, des professionnels du cinéma et un public engagé, réunis autour d’une programmation qui interpelle sur les enjeux de l’humanité.

Cette 4ème édition accorde une place toute particulière à la jeunesse et aux défis de plus en plus globaux qu’elle doit relever. Sur les 5 continents, nous découvrons des jeunes qui s’interrogent et prennent position face aux changements majeurs de la société. En toile de fond, un sentiment d’urgence universelle à repenser les Objectifs du Millénaire pour soutenir un développement durable.

Le Jury 2012 sera présidé par le réalisateur italien Stefano Savona, dont les films documentaires ont été primés dans plusieurs grands Festivals internationaux. Un appel est lancé pour des candidatures à devenir membre du Jury du Public, qui sera composé de 30 volontaires.

Dates : du 17 avril au 05 mai 2012.
Lieux : Salles Vendôme, Flagey, CIVA et Senghor

Découvrez le programme du Festival ici !

Projection Format Court, ce jeudi au Studio des Ursulines

Envie de fuir la civilisation, de chercher l’inspiration dans un paquet de bonbons, d’occuper votre ancien lieu de travail, de vous mettre au nudisme ou de vous munir de votre plus belle cape de magicien ? Retrouvez-nous demain à l’occasion de la soirée Format Court, en présence des équipes de films. Merci de confirmer votre présence à : info@formatcourt.com

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Festival International du Documentaire de Création de La Rochelle, ouverture des inscriptions

Le Festival International du Documentaire de Création de La Rochelle vient d’ouvrir ses inscriptions pour sa 12ème édition qui se déroulera du 6 au 11 novembre 2012.

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Conditions pour postuler :

Support de projection DVCam ou Beta SP
Terminés après le 1er janvier 2011
Genre : Documentaire
Pays de production : Tous

Vous pouvez inscrire vos films via la plateforme d’inscription aux festivals internationaux : http://www.filmfestplatform.com

Le site du festival : www.carre-amelot.net/escalesdocumentaires

S comme Sombra dolorosa

Fiche technique

Synopsis : Au court d’un fantaisiste combat de catch, une veuve éplorée combat l’ange de la mort afin de sauver celui qu’elle aime.

Genre : Expérimental

Durée : 4’30 »

Pays : Canada

Année : 2004

Réalisation : Guy Maddin

Scénario : Guy Maddin

Cadre : Guy Maddin / Matthew Hannam

Montage : Guy Maddin

Interprétation : Talia Pura, Cindy Marie Small,  Johnny A. Wright

Production : IFC Productions, Manitoba Film & Sound, Bravo !FACT

Article associé : la critique du film

Sombra Dolorosa de Guy Maddin

Petit conte macabre fait de bric et de broc, mis en scène avec beaucoup d’humour noir, dans le sillage du long métrage « The Saddest Music In The World », « Sombra Dolorosa » est un savant mélange de genres que l’on doit au cinéaste canadien le plus fou de sa génération, Guy Maddin.

« Sombra Dolorosa » raconte l’histoire d’une mère de famille mexicaine, la veuve Paramo, qui doit affronter El Muerto (le mangeur d’âmes) au cours d’un combat de catch, pour sauver sa fille Dolores du suicide, car cette dernière est inconsolable après la mort de son père, Don Paramo. La mère va redoubler d’ingéniosité pour terrasser son adversaire avant que le soleil ne disparaisse au cours d’une éclipse totale, et ainsi profiter des vertus régénératrices d’El Muerto qui va littéralement avaler le corps du père pour lui permettre de se réincarner. Le fantôme du père élira alors domicile dans la mule de son futur « gendre », qui venait tout juste de porter secours à la belle Dolores.

Utilisant, tout en les détournant, les grandes figures de style du cinéma muet et primitif (intertitres, jeu hystérique, décors peints et effets spéciaux artisanaux, etc), et les confrontant au visuel tout en couleur des combats de catch et des fêtes mortuaires mexicaines (multiples symboles de mort dans les arrières-plans, chants funestes du public, cérémonie traditionnelle liée à la notion de résurrection), Guy Maddin arrive à créer un mélange rocambolesque qui fonctionne à plusieurs niveaux narratifs et esthétiques.

Tout en rupture de tons et avec un rythme très soutenu, le film alterne à la fois des séquences de pur délire, où l’absurdité et le surréalisme sont de mise, comme le combat entre une veuve toute de noir vêtue et « La Mort » personnifiée en catcheur de Lucha libre ; et des moments tragiques avec un suspense haletant, comme la scène où, pendant l’éclipse de soleil, El Muerto « avale » le corps du père, dans une ambiance pesante et lugubre.
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L’humour particulier du cinéaste lui permet de lier tous ces éléments a priori disparates et de trouver une cohérence générale au film. L’exemple type de cet équilibre étant la scène de préparation mortuaire du corps du père, pendant laquelle plusieurs mains de vieilles femmes viennent attendrir la chair, qui sera ingurgitée plus tard, à coups de rouleaux à patisserie.

La grande force de Guy Maddin est d’arriver à utiliser un dispositif formel et visuel très marqué et d’y imprimer ses propres obsessions sur la cellule familiale éclatée. En effet, la mort du père, ainsi que son absence qui pèse sur ceux qui restent et les empêche de continuer à vivre, est une thématique centrale de l’oeuvre du cinéaste canadien dont le premier court se nomme « The Dead Father ». Dans « Sombra Dolorosa », c’est la fille, Dolores, qui éprouve ce sentiment, au point de vouloir rejoindre son père dans la mort. Elle retrouve dans la mule de son sauveur le fantôme de son géniteur défunt et finit par quitter sa mère pour lui. Avec cette fin énigmatique, est-ce que le cinéaste cherche à montrer l’éclosion d’une jeune fille sortant du nid familial et continuant sa vie avec un homme qui remplace feu son père ? Ou alors, est-ce juste un pied de nez, un ultime recours au second degré, à une certaine malice d’un auteur plutôt insaisissable ?

Fruit inimitable du savoir-faire d’alchimiste de Guy Maddin, « Sombra Dolorosa » est une oeuvre unique, en dehors des époques, la partition déjantée et improvisée d’un cinéma mexicain pop et primitif, empreint de tragédie et de drôlerie poétique.

Julien Savès

Consultez la fiche technique du film.

Isabel Herguera : « Un bon court métrage d’animation devrait combiner désir de liberté et maîtrise de la technique »

Isabel Herguera, à l’origine du film « Ámár », était présente du côté de Flagey la semaine dernière. Membre du Jury des courts métrages internationaux du Festival Anima, la réalisatrice espagnole nous a fait l’honneur d’une petite discussion sur l’animation.

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Tu as décidé de te lancer dans le cinéma d’animation au milieu des années 80, à un moment où c’était plutôt rare. Pourquoi ?

Après avoir terminé les Beaux-Arts en Espagne, je suis allée poursuivre mon éducation artistique à l’Académie de Düsseldorf où j’ai eu Nam June Paik comme professeur. A l’époque, je faisais des installations et un ami m’a fait découvrir le monde de l’animation. J’ai réalisé que cet art nécessitait moins d’infrastructure et qu’une petite caméra et une feuille A4 suffisaient pour développer tout un univers. Je me suis retrouvée comme un enfant en face d’un nouveau jouet et j’ai surtout eu un sentiment de liberté que je n’avais jamais éprouvé auparavant.

Depuis tes débuts, le cinéma d’animation a beaucoup changé, on retrouve plus de festivals qui mettent ce genre en valeur, plus de producteurs, de réalisateurs qui en font leur marque de fabrique ainsi qu’un intérêt grandissant du public. Que penses-tu de cette évolution?

Je me suis vraiment rendu compte de l’importance du cinéma d’animation quand je suis partie vivre aux Etats-Unis, à Los Angeles, J’y ai constaté qu’en dehors de Disney, il existait une grande production composée d’auteurs indépendants. Mais c’est seulement depuis ces 15 dernières années que le changement s’est accentué grâce aux nouvelles technologies et à l’Internet. Aujourd’hui, on n’est pas obligé d’attendre un festival pour voir ce qui s’est fait et ce qui se fait en animation. Les facilités d’accès font que plus de gens s’y intéressent. C’est génial.

Dans ton travail, on constate un attachement pour le court métrage. Est-ce par choix ou par contrainte économique ou temporelle ?

C’est un choix. J’aime beaucoup cette forme, elle me permet de rester libre du début jusqu’à la fin et de garder le contrôle sur toutes les étapes. Je peux aussi trouver plus facilement des financements même si je ne sais pas comment les choses vont évoluer étant donné qu’on parle de couper les budgets de moitié. Sans doute qu’il y aura quelques concessions à faire…

A travers tes 8 films, on sent l’envie de changer de style, de varier les techniques et les supports. Te chercherais-tu encore ?

J’aime varier les techniques, c’est vrai. Je peux ressentir le besoin d’utiliser le sable, ou le collage ou le cristal selon les histoires. Chez moi, l’expérience visuelle prédomine, celle-ci est très vite mêlée à une technique et à une histoire que j’ai envie de raconter. Technique et histoire sont intimement liées et je ne peux pas vraiment dire ce qui vient en premier. La variété et le changement me permettent d’expérimenter et d’évoluer.

Ton film « La Gallina ciega » a été nominé aux Goyas en 2006. Cette nomination t’a-t-elle ouvert certaines portes ?

Ce serait mentir que d’affirmer le contraire. Je suis devenue plus crédible, on me faisait plus confiance. Mais on peut dire que ça m’a aussi aidée en termes d’expérience. Petit à petit, j’ai appris des choses sur la façon de mener à bien un projet de cette ampleur.

Tu as été directrice d’Animac (Muestra Internacional de cinéma de animación de Catalonia), un festival d’animation situé à Lleida, en Catalogne. Comment s’est déroulée cette expérience ?

Ça a été très enrichissant. J’ai pu constater l’explosion de l’animation en Espagne. Quand je vivais aux Etats-Unis, je suivais difficilement l’activité qu’il y avait dans mon propre pays. Animac m’a permis de me rendre compte de la richesse du panorama espagnol, surtout depuis ces dernières années. Quand avant, on peinait à obtenir une séance d’une heure avec des bons films, aujourd’hui, c’est plus facile tant le choix est grand. Surtout que l’Espagne n’est pas un pays possédant une longue tradition de cinéma d’animation, nous n’avons pas d’écoles réputées comme c’est le cas en Belgique, ou en France. D’autre part, j’ai davantage compris le rôle indispensable qu’ont les festivals : celui de promouvoir un genre qui est encore malgré tout en marge du paysage cinématographique, en général. C’est la raison pour laquelle j’apprécie beaucoup un festival comme Anima.

Cette année, tu es invitée au Festival Anima en tant que membre du Jury des courts métrages internationaux. A ce propos, que faut-il selon toi, pour qu’un court métrage soit bon ?

Je ne sais pas, ça dépend. Il faudrait d’une part que le créateur arrive à atteindre une certaine liberté grâce au moyen d’expression. Mais, l’animation a ses contraintes techniques qu’il faut arriver à dépasser. Donc dans l’idéal, un bon court métrage d’animation devrait combiner désir de liberté et maîtrise de la technique.

Le Festival a mis l’Espagne à l’honneur en présentant de nombreuses activités, dont les deux programmes « Cortos de España », une série de courts métrages montrant un panel varié de l’animation contemporaine. Comment s’est passée la sélection?

J’ai surtout proposé une série d’animations parmi lesquels Philippe Moins et Doris Cleven ont sélectionné un certain nombre de films. J’ai essayé de choisir des œuvres originaires de petites structures, mettant en avant le talent d’auteurs indépendants comme Maria Lorenzo, la réalisatrice de « La Flor Carnivora », qui a tout fait toute seule (ou presque) tout en n’ignorant pas les grosses productions derrière lesquelles se cachent les succès comme « La Dama y la muerte », par exemple.

« Ámár », ton dernier film, sélectionné au Festival l’an dernier, faisait partie de la sélection. Comment as-tu eu l’idée de réaliser cette histoire assez particulière ?

L’idée du film germait en moi depuis bien longtemps. Juste après « La Gallina ciega », je suis allée en Inde. C’est un pays qui m’a toujours fascinée et que j’avais envie de découvrir. Dès que je suis arrivée, j’ai senti les odeurs, contemplé les couleurs et beaucoup de choses ont traversé mon esprit. J’avais besoin de mettre cela sur papier. Comme j’ai l’habitude de réaliser des carnets de voyages, j’en ai fait un. Mais j’avais besoin d’aller plus loin. Ainsi est né le film.

On sent la prédominance du pays sur les personnages.

C’est vrai. L’Inde est un pays où l’on peut perdre la raison, les repères ne sont pas les mêmes. Il n’y a pas de réelles références auxquelles on peut se rattacher. Pour un Occidental, c’est une expérience étourdissante. J’ai voulu parler de cette douce folie, cette perte de contrôle qui nous touche quand on est là-bas.

Quels sont tes projets ?

J’ai un nouveau projet d’animation qui se passe encore en Inde. Ce serait un documentaire avec des enfants atteints du Sida. Cela fait trois ans que je vais là-bas et que je côtoie ces enfants. A chaque fois, ils dessinent ou peignent et c’est cela que j’ai eu envie d’assembler et de mettre en scène.

Propos recueillis et traduits par Marie Bergeret

Article associé : la critique de « Ámár »

D comme The Dead Father

Fiche technique

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Synopsis : Malgré sa mort, un père de famille continue à venir faire de brèves visites à son fils aîné. Cette situation finit par affecter le jeune homme…

Genre : expérimental

Durée : 24min

Pays : Canada

Année : 1986

Réalisation : Guy Maddin

Scénario : Guy Maddin

Image : Kathy Driscoll, Bob Russick, Stephen Snyder (as W. Steve Snyder)

Montage : Guy Maddin

Son : Wayne Finucan

Direction artistique : Jeff Solylo

Interprétation : D.P. Snidal, Margaret Anne MacLeod, John Harvie, Angela Heck, Rachel Toles, Jilian Maddin, Stephen Snyder

Production : Vincent Landay

Article associé : la critique du film