Ce rêve étrange et pénétrant
Au Court Métrange de Rennes, « Hope » de Pedro Pires est programmé dans une séance thématique Canada. Un deuxième film à l’accent terrible et sonore que l’on n’oublie pas de sitôt.
Pires n’est pas à son premier coup d’essai en matière d’étrangeté puisqu’il avait déjà développé un univers atypique en sublimant la Mort dans son très remarqué « Danse Macabre ». Avec « Hope », il associe à nouveau l’horreur, le sordide à la beauté. Si le premier parlait de suicide, le second aborde le conflit militaire. Dans un style plus prosaïque sans doute, le réalisateur, amoureux d’images construites, nourrit un onirisme fantasmagorique en mêlant des images de guerre et de souffrance et des images d’un coiffeur androgyne, dans un salon de coiffure des années 20.
Adapté de la pièce « Jimmy, créature de rêve » de Marie Brassard, « Hope » garde volontairement le mystère sur le comment et le pourquoi des évènements. Les images en sont d’autant plus fortes car le spectateur ne peut les décoder qu’en faisant des suppositions, en émettant des hypothèses. Pedro Pires interprète et représente à sa façon l’incroyable monde de l’artiste canadienne. On retrouve le goût du réalisateur français d’origine portugaise pour un montage d’images et de sons, fragmenté et fragmentaire, avec des images qui suscitent d’emblée une impression d’angoisse voluptueuse ou serait-ce plutôt de « réalisme hallucinatoire », celui-là même qu’on a reconnu au Prix Nobel de Littérature, le Chinois Mo Yan.
Quoi qu’il en soit, « Hope » met mal à l’aise car malgré son titre, il n’offre aucune échappatoire. Bien au contraire, il affiche un je-ne-sais-quoi de crû désenchantement et de froide lucidité sur une époque où l’avenir est celui d’un regard moribond, rivé sur un horizon inconnu et lointain dont l’intonation désespérée est celle de tous ceux qui se sont tus !