Le dernier court métrage du Suisse Anthony Vouardoux, sorti de l’Ecole cantonale d’art de Lausanne (ECAL) et vivant à Berlin, se base sur le genre de la science-fiction mais est plutôt un essai ironique sur l’incommunicabilité et la soi-disant suprématie de l’Homme par rapport à son environnement.
Un astronaute symboliquement nommé Yuri Lennon part en mission vers Alpha 46, satellite fictif de Jupiter. Lorsqu’une intervention de Dan, son interlocuteur d’Houston et télé-pilote échoue, Yuri prend les choses « en main » et provoque l’atterrissage de la fusée lui-même. En arrivant à destination, il remplit sa mission en récupérant une perle rare qui se met à fusionner avec la Terre et se détache du firmament nébuleux. Il ne reste plus qu’à Yuri de choisir entre deux solutions : abandonner la Terre-perle sur Alpha 46 ou la ramener à elle-même.
Hormis le travail esthétique fort réussi et digne du genre duquel il s’inspire, Yuri Lennon aborde, en coulisse de son récit de science-fiction, l’échec de la communication, tant littéral que figuratif. La voix de Dan se transmet en bribes et en craquements à travers des années lumières, et ne montre aucune sympathie envers le protagoniste, lui refusant un dernier contrôle technique et dénigrant sa solitude et ses frustrations sexuelles. Yuri, de son côté, se moque d’Houston en lui faisant un doigt d’honneur et en chantonnant « I’m a poor lonesome Cowboy and I’m far away from home » en guise de provocation. Le travail de la caméra confirme ce décalage entre le personnage et le monde extérieur : dans le vaisseau, l’unique plan est celui du visage rapproché de Yuri qui laisse percevoir l’hors champs dans le reflet de son casque d’astronaute, montrant progressivement le décollage, le voyage dans l’espace et le gigantesque Jupiter.
La deuxième thématique abordée par Vouardoux est plus audacieuse, c’est celle de l’interférence néfaste de l’Homme par rapport au monde et en l’occurrence à l’Univers. Cette fiction intelligente revisite avec ironie mordante un genre usé qui trouve ici une expression inédite. « Yuri Lennon’s Landing on Alpha 46 » ou l’Apocalypse selon St-Anthony.
Impeccable réalisation, one shot d’une élègance rare, idée poétique pleine d’humour -la combinaison des deux est goûteuse- excellent acteur, son à la hauteur (si je peux me permettre), en bref, c’était LE grand plaisir de la nuit du court métrage à Genève… avec Ultima donna, le film de Tristan Aymon. MERCI à Vouardoux et à son équipe pour cette PERLE!
fort fort bien!