Dialogue avec mon vlogger
« Because We Are Visual » d’Olivia Rochette et Gerard-Jan Claes, diplômés du KASK (Koninklijke Academie voor Schone Kunsten de Gand), porte un regard inédit sur la communauté des vloggers à travers le monde. Un essai documentaire d’exception sélectionné au Festival Hors Pistes.
Qu’on se le dise, le virtuel a envahi les chaumières même les plus réfractaires et a redéfini notre manière de voir et de donner à voir. Le vlogger ou vidéo blogger participe de cette révolution technologique. Exhibitionniste à souhait, il attise la pulsion voyeuriste de tout un chacun en se confessant sur la grande toile. Ainsi, on peut rentrer dans les secrets les plus intimes d’un parfait inconnu en suivant régulièrement ses vidéos postées sur l’espace cybérien. À la différence du blogger, le vlogger a un visage et il ne s’en cache pas, à la différence du journal intime traditionnel, le vlog peut être vu et commenté par le monde entier. Voilà qui pose question sur la notion d’intimité et de limite des espaces privés et publics.
Derrière les images, des vies sont tissées, des vies que l’on devine solitaires. À fleur de web, les âmes seules se dévoilent, se racontent, s’ouvrent au spectateur voyeur dans l’anonymat le plus abstrait relevant l’un des paradoxe de l’époque actuelle. Dans ce jeu de confessions, on soulève bien des non-dits, on révèle parfois des secrets sans jamais vraiment se rapprocher de la vérité car le vlogger se sait filmé alors il se permet quelques subtilités de mise en scène manipulant gentiment les répliques pour son seul en scène virtuel. C’est que le net offre un espace de liberté où tout semble possible.
Monté en évitant soigneusement de tomber dans les mailles du sensationnalisme, le film expérimente les possibilités d’un nouveau support médiatique (internet) tout en réussissant le tour de force de construire une narration captivante affichant le spectacle de la banalité comme preuve d’existence. Un récit inspiré évoquant la poétique du spleen baudelairien.