En 2004, la collection Selected Shorts, éditée par le Festival du court métrage de Louvain (IKL), voyait le jour avec le but de publier chaque année un DVD reprenant une anthologie de films courts primés ou simplement sélectionnés au Festival. Florilège de 5 films.
The Bloody Olive de Vincent Bal
Werner, Mylène et Sam, le mari, la femme et l’amant s’affrontent et se trompent allègrement dans cette comédie rocambolesque en noir et blanc, pastiche parodique du cinéma américain des années 50. Vincent Bal se joue de la trame classique d’un bonheur (presque) parfait pour démasquer avec humour la vénalité de l’âme humaine. Image d’Épinal qui se brise en éclats, quand le mari et l’amant semblent être de mèche pour se débarrasser de la femme, c’est sans compter la perfidie féminine qui flirte naturellement avec l’amant en question. Dans ce trio infernal et criminel, chacun y met son grain de sel sur l’olive noire qui se montre bien amère. Rebondissements et coups de théâtre tourbillonnent dans cette mise en scène en poupées russes, pour le plaisir du spectateur qui apparaît en définitive comme le clin d’œil ultime de cette savoureuse farce de Noël.
Carlo de Michael R. Roskam
« Carlo » de Michael R. Roskam, Prix du Public et Mention spéciale du Jury en 2004, expose la théorie de la chance et de la malchance avec dextérité et frénésie dans une histoire accrocheuse rappelant le merveilleux monde de Tarantino. A la frontière entre le Limbourg et Liège, Carlo dépèce le bétail au fond d’un abattoir insignifiant. Sa vie monotone prend soudain une autre tournure le jour où son cousin Nick, amateur de football, se retrouve les deux pieds dans le plâtre. L’infirme lui demande de le remplacer le temps du match qu’il doit disputer à Seraing, en terrain francophone. Après tout, la langue du foot n’est-elle pas comme celle de l’amour, universelle ? Jouant sur la notion de frontière, linguistique et culturelle, comique et tragique, Roskam, aime aussi contraster le lyrisme des paysages flamands avec l’excitation ardente de trois provinciaux francophones. Proche de « C’est arrivé près de chez vous », le film s’en différencie néanmoins par un montage dynamique, une bande son rythmée et une narration décalée qui tapissent l’espace narratif d’une tension croissante. Un pur produit blanc-bleu-belge dopé à l’humour noir!
Tanghi Argentini de Guido Thys
En période de Noël, on plonge inévitablement dans la magie et la féerie d’un monde qu’on voudrait beau, bon, et sans faille. Utopie à laquelle on ne croit vraiment avec ferveur que pendant la période des fêtes à l’exception d’André, un fonctionnaire bedonnant et triste comme la pierre. Amoureux d’une aficionada de tango, il a deux semaines pour apprendre cette danse fougueuse. Il trouve en Frans, un collègue à la souplesse d’esprit inexistante, le professeur idéal. Au fur et à mesure de leurs leçons, la tristesse et la rigidité apparentes des deux gratte-papiers se transforment en une parade harmonieuse et subtile digne des plus grandes âmes exaltées. A l’image de la danse argentine, chacun orchestre la passion de l’autre ce qui confirme l’adage, la fin justifie les moyens donnant à « Tanghi Argentini » une chute des plus surprenantes. Doté d’un scénario hors du commun et d’un duo d’acteurs exquis (Dirk Van Dijk et Koen Van Impe) qui fonctionne avant tout par contrastes, le deuxième court de Guido Thys a amplement mérité l’avalanche de prix reçus, le plaçant inéluctablement au panthéon du court métrage belge de ces dernières années.
La Leçon de natation de Danny De Vent
Danny De Vent explore le monde de l’enfance ou plus précisément, celui des peurs et des exploits qui participent à la construction de l’adulte que l’on devient en définitive. Laissé par la main maternelle à l’entrée d’un bain public pour sa première leçon de natation, le petit Jonas affronte le moindre événement avec effroi au milieu d’une jungle sauvage et dangereuse. C’est que l’eau est froide et profonde, que les éclaboussures et les cris sont des adversaires redoutables pour le petit homme qui doit plonger pour la première fois au fond de la piscine. L’auteur épluche le processus de l’apprentissage avec beaucoup de sensibilité. Et bien qu’étant un petit pas pour l’humanité, l’expérience du garçonnet se révèle en réalité un grand pas car petit à petit, il arrive à vaincre son angoisse transformant le cours de natation en une réelle leçon de vie.
Een kleine duw de Philippe Verkinderen
A l’approche des vacances d’été, lors d’un match de football crucial pour l’unité (sportive) du pays, un cachalot échoue sur la plage d’Ostende pendant que Robbie, 9 ans, est victime des railleries de ses camarades de classe. Les différents événements s’entrecroisent habilement dans ce court métrage qui a aussi bien gagné le cœur du public que celui des professionnels du cinéma dans les nombreux festivals où il a été sélectionné. De façon dramatique, Philippe Verkinderen livre le portrait d’un enfant qui doit affronter les coups de griffes de la vie. Un portrait en demi-teinte, nourri de moments hilarants que viennent affronter d’autres bien plus tragiques à travers lesquels se glisse une étrange et insidieuse mélancolie.