Créé et présenté dans le cadre du Festival International du Court Métrage de Louvain de 2007, « Domino » retrace, en moins de deux minutes, le mécanisme de l’animation et du cinématographe. Sous son aspect simple, se cache un jeu sémantique sophistiqué. La forme rectangulaire du domino sert de cadre pour une série de plans dessinés, tel un flip-book. À l’instar de l’effet domino et conformément au jeu de hasard, défile une succession bruyante de formes aléatoires (dominos, homme, ballon, arbre…) pour créer une animation quasi fantasmagorique.
Au-delà des images, « Domino » traite de l’artifice de la mise en scène, que la réalisatrice Sandy Claes met en évidence par le biais de l’espace et de la vitesse de son animation. Elle ne limite pas son cadre au bord des plans mais inclut les environs de l’installation, presqu’au même titre que les images dessinées. De la même manière, elle déclenche une certaine distanciation en choisissant une vitesse de défilement des images bien plus lente que ce qu’il faudrait pour assurer la persistance rétinienne. Par conséquent, le spectateur, bien conscient du défilement de chaque plan, se retrouve impliqué dans cette inédite partie de dominos animée. Outre la vitesse et l’espace, le médium (à savoir le téléphone portable) contribue lui aussi à brouiller les pistes en créant une ambiguïté entre le point de vue du spectateur et celui de la réalisatrice. À ce titre, « Domino » est une expérience de « Ciné-œil » et l’outil utilisé, le téléphone est vraiment conçu comme mobile.
La qualité du film tient aussi à une hybridité de registres (séquences filmées et dessins traditionnels) assez caractéristique du style de cette jeune animatrice, diplômée en arts audiovisuels de l’Académie Media & Design KHLim de Genk. À cet égard, « Domino » rappelle le travail de fin d’études de Sandy Claes, « On a Lead » (2005), traitant de la rencontre humoristique entre un chien en 3D et un homme en 2D, ou encore « Blauwblauw » (2007), une animation basée sur la poésie flamande contemporaine, dans laquelle une femme interagit avec un élastique animé.
« Domino » se présente moins comme un véritable film que comme une expérience technique utilisant à son avantage les limitations du matériel pour faire un modeste retour aux origines du cinéma. Son originalité et sa sobriété lui ont d’ailleurs permis de remporter le Grand Prix du jury au festival Cinépocket, cette année.
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