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Nous de Alice Diop

Dernier film de la réalisatrice française Alice Diop, Nous dresse une observation profonde, tendre et bienveillante des banlieues qu’elle suit dans la plupart de ses films. Nous, produit par Athénaïse et distribué par New Story, sort ce mercredi 16 février. Format Court accompagne la sortie de ce film documentaire singulier et humaniste qui, 5 ans après Vers la tendresse, récompensé du César du meilleur court-métrage 2017, nous amène à nous éloigner de tout stéréotype et montre des réalités plurielles.

Les clichés sur les banlieues françaises ont la peau dure. La cinéma a d’ailleurs tendance à jouer avec une image vive, insaisissable et souvent tumultueuse. Alice Diop nous offre une vision opposée : lente, contemplative et intime à travers plusieurs personnages qu’elle suit dans le documentaire.

C’est l’histoire d’un garagiste sans-papiers. Ce sont quelques extraits vidéos – seules “traces” qu’il reste – de la mère d’Alice. C’est le récit de l’arrivée de son père en France, de la vie qu’il y a construite. Ce sont les histoires des personnes qui ont déposé leurs valises dans le 93, et dans tous les départements en périphérie de Paris, venant d’Afrique, d’Italie ou de Bretagne. C’est l’histoire d’un voyage qui ne s’arrête jamais vraiment et qui survit à travers le temps. C’est le portrait véritable d’un France simple, « normale » et altruiste; qui se démène autant qu’elle peut pour mener une vie correcte, malgré de nombreuses peines et aléas. C’est aussi le portrait d’une banlieue plus boisée, plus aisée, qui semble pourtant aussi paisible que cruelle.

Néanmoins, Alice Diop ne porte de jugement sur aucune de ces histoires. Elle raconte par l’intermédiaire de ces personnages son voyage personnel à travers cette banlieue qui l’a vue grandir, et qu’elle a – en reprenant ses mots – appris à aimer.

« Vers la tendresse »

Les procédés cinématographiques auxquels elle a recours sonnent comme un écho à son précédent moyen-métrage Vers la tendresse, dans lequel elle questionne des jeunes hommes des “banlieues” sur leurs rapports au sexe et à l’amour. Plans fixes et voix off qui laissent défiler l’histoire, alternance de gros plans et de plans larges font naître une certaine proximité. Dans ces deux films, elle semble vouloir à la fois montrer l’environnement de vie et s’en débarrasser, pour que le spectateur se concentre uniquement sur les individus et leurs histoires personnelles. Elle installe un cadre qui laisse place à l’empathie, la compréhension et à la justesse des propos.

La voix off s’inscrit dans une sorte de pudeur et d’intimité. Comme si l’on regardait un carnet de voyage ou un album de famille en présence de nos êtres chers. On partage des souvenirs, des lettres, des appels comme si nous étions avec eux et elles dans la salle, comme si ces personnes se confiaient à nous et que nous prenions totalement part à la scène que nous étions en train d’observer. Nous partageons leurs émotions, nous faisons le point sur notre propre vie et sur les personnes qui nous entourent. “Nous”, c’est finalement les confessions et les récits de vécus qui ne nous concernent pas forcément mais dont nous finissons par nous sentir irrémédiablement proches.

Dans Nous, Alice Diop laisse le temps aux silences et aux plans fixes vides d’action sur les paysages ferroviaires, les parcs, les parkings, les barres d’immeubles… Par ce temps long, la réalisatrice semble nous inviter à observer et à cultiver un regard nouveau. Il y a très peu de repères géographiques, très peu de repères temporels mentionnés dans son film. Ce sont bien souvent des clins d’œil. Comme si les villes et les quartiers n’avaient pas d’importance. Alice Diop s’attarde sur les vies qui les peuplent, les vies qui sont souvent invisibilisées. Son film s’articule autour de la même envie que celle de François Maspéro, l’auteur du livre “Les passagers du Roissy-Express » à qui elle dédie ce film : valoriser les êtres dans leur quotidien avec leurs rêves, leurs espoirs et surtout leur présent.

Avec beaucoup de douceur et de poésie, Nous nous amène à redécouvrir l’histoire de ces zones périurbaines, qui se sont beaucoup modifiées, par l’intermédiaire les témoignages poignants de leurs habitants. La caméra se rapproche d’eux comme pour laisser la trace de leurs vies et faire les faire perdurer au-delà de la périphérie. Ils deviennent centraux.

En sortant du visionnage de ce documentaire, il y a un questionnement constant qui s’installe sur le rapport à la vie, le questionnement de notre “réalité”. Si vous allez le voir en salles à sa sortie le mercredi 16 février, faites le test. Asseyez-vous seul à la terrasse d’un café, questionner la vie des gens qui vous entourent, aller au-delà de votre premier jugement. Qui sont-ils ? Quelle est leur histoire ? Que vivent-ils ? Vous verrez, c’est perturbant.

Et c’est sans doute pour cela qu’à Format Court on aime tellement les films d’Alice Diop. Grâce à une esthétique singulière et des partis-pris affirmés, elle nous amène là où ne nous nous n’attendons pas nous-même : proche des autres, dans l’espoir de fonder un avenir « véritablement » commun.

Anne-Sophie Bertrand

R comme Le Roi David

Fiche technique

Synopsis : Shana cherche du travail, elle a besoin d’argent pour quitter la France et ses mauvaises fréquentations. Mais le passé qu’elle cherche à oublier n’est jamais loin. Et d’ailleurs, veut-elle vraiment l’oublier ?

Genre : Fiction

Durée : 41′

Pays : France

Année : 2021

Réalisation : Lila Pinell

Scénario : Lila Pinell

Image : Victor Zebo

Son : Emma Augier

Montage : Emma Augier

Interprétation : Eva Huault, Jacky Abdillah, Sarah Djourou, Anaïs Hamache, Charlène Aline

Production : Ecce Films

Article associé : la critique du film

Le Roi David de Lila Pinell

Dans ce moyen-métrage, Lila Pinell, lauréate du Prix Jean Vigo 2021, du Prix étudiant et du Grand Prix national de Clermont 2022, dépeint le portrait d’une jeune femme en pleine émancipation face aux tumultes de la réalité. Dans les banlieues parisiennes, en proie à de mauvaises fréquentations et à une certaine inconscience du danger, Shana (Eva Huault) tente de trouver du travail et de prétendre à de plus grands projets.

Le cadrage et le montage intimistes du film de Lila Pinell (interviewée sur notre site en 2014 pour son film Boucle Piqué, co-réalisé avec Chloé Mahieu) permettent au spectateur de suivre les mésaventures de la protagoniste (interprétée par Eva Huault) avec proximité et empathie. Le réalisme brut de la vie en banlieue et les nombreux obstacles de la construction de soi sont mis en valeur un à un, à travers différents sujets de société.

L’image du corps par exemple, ironiquement abordé avec le thème de la chirurgie, soulève la question du rapport à l’apparence. Parallèlement, le sujet est poétiquement mis en image avec quelques plans sur des tableaux de corps dénudés. La question du réel réside également dans le contexte, le langage et les apparences des différents personnages.

Le parti pris de la réalisatrice est fascinant. Lila Pinell choisit de cadrer en majorité la jeune femme, souvent en gros plan, plutôt que ses interlocuteurs, témoignant d’une intéressante volonté de maintenir cette femme d’action au centre de l’image et de l’histoire.

Dans Le Roi David, Shana fait preuve d’une touchante humanité, malgré ses petits délits et ses montées d’agressivité. Elle reste une jeune femme, perdue et seule, en quête d’amour et de stabilité. La performance de l’actrice Eva Huault qui l’incarne est impressionnante. Seuls quelques regards et intonations de voix suffisent à faire transparaître ses émotions les plus profondes.

Le fil conducteur de la fiction de Lila Pinell, donnant d’ailleurs son titre à l’œuvre, est le mystérieux David. Un homme, apparemment peu fréquentable, qui fait faillir le cœur de la jeune femme et qui exerce un contrôle sur ses gestes et ses pensées. Entre quelques séquences, comme hors du temps, à la manière d’un tableau vivant, David apparait emblématiquement comme un sujet de représentation. Ces scènes permettent au spectateur de comprendre le rôle central de David dans la vie de Shana.

Il faut attendre la dernière partie du film pour émettre l’hypothèse que le sentiment de solitude de cette dernière et son manque de responsabilités, provient de la relation brisée avec sa mère. Shana tente maladroitement de se prendre en main et laisse couler quelques larmes, en constatant le détachement de sa mère à son égard. Durant cette séquence de détresse, le spectateur réalise qu’elle n’est encore qu’une jeune fille, désireuse d’être aimée et soutenue.

Le film se clôture, telle une boucle, sur le départ de David dans un autre univers, extérieur à celui de Shana : la prison. Comme un coup de massue ou une chance d’entamer quelque chose de nouveau, la jeune femme est en quelque sorte libérée de l’emprise de cette figure d’ombre.

Les différentes facettes de la jeunesse, dépeintes dans ce moyen-métrage, touchent le spectateur. La proximité de cadrage de Shana et sa spontanéité donnent l’occasion de se sentir physiquement et psychologiquement proche de ce qu’elle vit, ou du moins, de mieux la comprendre. La fin laisse libre cours à l’imagination du spectateur sur l’avenir incertain de la jeune femme.

Mathilde Semont

Consulter la fiche technique du film

Les courts en lice pour le Prix SFCC 2021

La 6ème cérémonie de remise des Prix du Syndicat Français de la Critique de Cinéma 2021 aura lieu à la Cinémathèque française le lundi 21 février 2022 à 18h30.

Le Jury du Prix court métrage élira à cette occasion le meilleur film de l’année 2021. Ce prix, créé en 1973, est décerné par un jury composé de membres du Syndicat Français de la Critique de Cinéma : Valérie Ganne, Pascal Le Duff, Francis Gavelle, Grégory Marouzé et Katia Bayer, Présidente du Jury, qui représentera Format Court.

Voici les 3 films sont en lice pour le Prix du Meilleur film de court métrage 2021 :

• L’homme silencieux de Nyima Cartier (Mabel Films)
• Nicolae de Mihai Grecu (Barberousse Films)
• Sainte Baume de Laetitia Spigarelli (Les Films de la nuit)

🏆 Verdict le 21 février !

Les courts récompensés aux Magritte 2022 !

Format Court ne regarde jamais loin de la Belgique. Les Magritte du Cinéma (les récompenses du cinéma belge) ont primé ce weekend Une vie démente d’Ann Sirot et Raphaël Balboni (interviewés sur notre site) et Un monde de Laura Wandel, deux premiers longs-métrages remarqués en festival, réalisés par des auteurs venus du court.

Côté courts, 3  super films ont été primés.

En fiction, Xavier Seron a reçu sa troisième statuette, après L’Ours Noir et Le Plombier, pour Sprötch, récompensé par ailleurs du Prix étudiant à notre Festival Format Court en novembre dernier. Le tout premier Magritte du meilleur court métrage documentaire a été décerné à un film d’école : Mother’s de Hippolyte Leibovici.

Lia Bertels (à qui nous avons consacré un focus en 2010) a reçu, de son côté, le Magritte du Meilleur court métrage d’animation pour On est pas près d’être des super héros.

De bas étage de Yassine Qnia

Ce mois-ci, on vous parle du DVD De bas étage, le premier long-métrage de Yassine Qnia (interviewé sur notre site en 2012). Passé par le court métrage (il était d’ailleurs cette année membre du jury du festival de Clermont-Ferrand), il est déjà auteur de deux courts-métrages signés en son nom : Fais croquer en 2011 et F430 en 2015 et d’un court-métrage co-écrit et co-réalisé avec Carine May, Hakim Zouhaini et Mourad Boudaoud : Molii en 2013.

Fais croquer racontait l’histoire d’un jeune réalisateur qui embarquait ses copains dans son premier film. Ses apprentis acteurs, non professionnels, tentaient tant bien que mal mais avec humour et générosité de transmettre ce que leur réalisateur voulait. Molii retraçait la première nuit d’un gardien de piscine qui se faisait surprendre par des enfants se laissant enfermer à l’intérieur de l’établissement. Avec quelques moments pouvant faire sourire, l’ambiance était parfois pesante. F430 annonçait déjà un virage vers la perte de l’innocence. Après un vol à l’arrachée, un jeune homme s’offrait une journée de location d’une Ferrari « F430 » (d’où le titre), avec laquelle il paradait dans la ville sous les yeux la fois surpris des habitants du quartier.

Dans De bas étage, on suit le personnage de Mehdi, un perceur de coffres d’une trentaine d’années faisant des coups avec ses complices. Les cambriolages n’étant plus aussi lucratifs qu’avant, ils ont dans l’idée de raccrocher et de se ranger, ce qui n’est pas forcément attrayant pour Mehdi (interprété par Soufiane Guerrab, excellent dans le rôle). Il se retrouve à la croisée des chemins de son parcours : « se ranger » ou continuer son activité. En parallèle, il tente de reconquérir Sarah (interprété par Souheila Yacoub déjà vu entre autres dans Le Sel des larmes de Philippe Garrel et Climax de Gaspar Noé ), son ex-compagne et mère de leur fils, qui s’est éloignée de lui, lassée de ses frasques.

Yassine Qnia explore ici un univers de truands à la petite semaine dans une atmosphère assez sombre, bien loin du ton plus léger qui pouvait exister dans ses courts métrages. Ces personnages de perceurs de coffres sont inspirés de personnes qu’il a pu réellement croiser dans le quartier Paul Bert d’Aubervilliers où il a grandi. Filmé entre autre dans ce même quartier, Yassine Qnia conserve une vraie fidélité avec cette partie de la ville d’Aubervilliers où il a vécu une grande partie de sa vie. On retrouve même parfois les mêmes couloirs, portes et façades d’immeubles dans De bas étage que dans Fais croquer ou « F430 ». En plus d’un lien aux décors, Yassine Qnia entretient une certaine fidélité avec les acteurs comme avec M’Barek Belkouk, personnage principal de Fais croquer que l’on retrouve dans le long-métrage dans un second rôle en complice des malfrats, pas vraiment à sa place.

Yassine Qnia, dans de De bas étage, filme le personnage de Mehdi dans ses ambiguïtés et ses contradictions, un personnage qui échoue, qui ne fait pas forcément les bons choix. C’est aussi le désir comme il le dira de filmer un personnage « qui a du charisme, quelqu’un qui est beau, quelqu’un qui sait parler, qui a de la répartie. Quelqu’un dont on imagine que, s’il avait évolué dans un autre milieu, n’aurait pas la place qu’il a actuellement ».

De son précédent métier de géomètre topographe, Yassine Qnia aura appris à tracer et à implanter les marques pour ceux qui viendront ensuite poser les murs pour que les bâtiments sortent de terre. L’analogie avec le cinéma peut être évidente. Ecrire et préparer le terrain pour raconter une histoire afin qu’un film existe.

Présenté à Cannes à la Quinzaine des Réalisateurs 2022, De bas étage veut raconter simplement. On peut noter pour ce faire l’absence de musique. « Faire simple » comme l’expliquera le réalisateur devient sa marque de fabrique. Dans une époque où certains films font appel parfois à un montage saccadé et un grand renfort de musique, ici la façon de raconter est justement de laisser faire : laisser le temps aux situations de s’installer, au silence d’être là, au temps d’être pris, l’espace se voulant plutôt occupé par les mots et les silences des personnages. Une atmosphère qui permet de nouer une relation intime avec le spectateur.

Ce premier long-métrage laisse entrevoir de belle perspective pour cet auteur au parcours atypique inspiré par Rossellini, Bresson, Pialat ou encore Melville. Son producteur Pascal Caucheteux (Why Not Productions) lui a d’ailleurs conseillé de ne pas attendre pour écrire son film suivant. Ce que nous avons hâte de suivre et de découvrir.

Damien Carlet

De bas étage de Yassine Qnia. Distribution : Le Pacte. DVD et bonus : entretien avec le réalisateur, « De bas étage, du tournage au Festival de Cannes » + 3 courts de Yassine Qnia : Fais croquerMoliiF.430

Oscars 2022, les courts nommés

Sur base des 45 courts présélectionnés aux Oscars 2022 en animation, fiction et documentaire, voici les 15 films retenus dans ces 3 catégories. Bonne news :  Bestia de Hugo Covarrubias (Chili), programmé à notre festival, reste dans la course.

Meilleur court métrage de fiction

Ala Kachuu – Take and Run de Maria Brendle (Suisse, Kyrgyzstan)
The Dress de Tadeusz Łysiak (Pologne)
The Long Goodbye de Aneil Karia (Royaume-Uni,Pays-Bas)
On My Mind de Martin Strange-Hansen (Danemark)
Please Hold de KD Davila (USA)

Meilleur court métrage documentaire

Audible de Matthew Ogens (USA)
Lead Me Home de Pedro Kos, Jon Shenk (USA)
The Queen of Basketball de Ben Proudfoot (USA)
Three Songs for Benazir de Elizabeth Mirzaei, Gulistan Mirzaei (Afghanistan)
When We Were Bullies de Jay Rosenblatt (USA, Allemagne)

Meilleur court métrage d’animation

L’art dans le sang, de Joanna Quinn et et Les Mills (Canada)
Bestia de Hugo Covarrubias (Chili)
Boxballet de Anton Dyakov (Russie)
Robin Robin de Dan Ojari, Mikey Please (Royaume-Uni)
The Windshield Wiper de Alberto Mielgo (USA, Espagne)

Clermont-Ferrand 2022, le palmarès

Le festival de Clermont est fini. Après les prix remis par les partenaires, voici le détail des films primés par les 3 jurys, les étudiants et le public

Compétition internationale

77 films, représentant 55 pays, ont été soumis à un jury qui réunissait Borja Cobeaga, réalisateur, scénariste, producteur (Espagne), Bogdan Mureșanu, réalisateur, scénariste (Roumanie), Joanna Quinn, réalisatrice (Pays de Galles) et Beth Sá Freire, programmatrice, réalisatrice (Brésil).

* Grand prix : Mate (Mon pote) de George-Alex Nagle (Australie)

* Prix spécial du jury : Sarira de Mingyang Li (Chine)

* Mentions spéciales du jury international : Birds (Oiseaux) de Katherine Propper (États-Unis), Fall of the Ibis King (La Chute du roi Ibis) de Mikai Geronimo, Josh O’Caoimh (Irlande), Steakhouse de Špela Čadež (Slovénie, France, Allemagne), On the Surface de Fan Sissoko (Islande, États-Unis, Mali)

* Prix du public : Three Songs for Benazir (Trois chansons pour Benazir) de Elizabeth Mirzaei (Afghanistan)

* Prix étudiant : Bolo Raz Jedno More… (Autrefois, il y avait une mer) de Joanną Kożuch (Slovaquie, Pologne)

* Mention spéciale du jury étudiant international : Ensom Cowgirl (Cow-girl solitaire) de Gina Kippenbroeck (Danemark)

* Prix du meilleur film d’animation : Bestia de Hugo Covarrubias (Chili)

* Prix du meilleur film européen et Candidature aux European Film Awards : The Bayview (Hôtel Bayview) de Daniel Cook, Royaume-Uni

Compétition nationale

Le jury de la compétition nationale devait départager 50 films, dont 8 co-productions internationales. Il était composé d’Olivier Broche, comédien, réalisateur, producteur et programmateur (France), de Vincent Maël Cardona, réalisateur, scénariste et comédien (France), de Regina Pessoa, réalisatrice, scénariste et illustratrice (Portugal) et de Yassine Qnia, réalisateur et scénariste (France).

* Grand prix : Le Roi David de Lila Pinell (France)

* Prix spécial du jury : Astel de Ramata-Toulaye Sy (France, Sénégal)

* Mentions spéciales du jury national : Churchill, Polar Bear Town (Churchill, la ville des ours polaires) de Annabelle Amoros (France)  et À l’ombre l’après-midi de Marin Gérard (France)

* Prix du public : Partir un jour de Amélie Bonnin (France)

* Prix étudiant : Le Roi David de Lila Pinell (France)

* Mention spéciale du jury étudiant national : Trois grains de gros sel de Ingrid Chikhaoui (France)

* Prix de la meilleure musique originale (SACEM) : Thomas Krameyer pour Partir un jour de Amélie Bonnin (France)

Compétition labo

Alberto García-Alix, photographe, créateur audiovisuel, écrivain et éditeur (Espagne), Para One, DJ, compositeur, producteur et réalisateur (France) et Bárbara Wagner, réalisatrice et scénariste (Brésil) ont découvert ensemble 27 courts métrages internationaux (17 pays représentés).

* Grand prix : Le Boug Doug de Théo Jollet (France)

* Prix spécial du jury : Swallow the Universe (Engloutir l’univers, chier une fourmi) de Nieto (France)

* Mention spéciale du jury labo : L’Huile et le fer de Pierre Schlesser (Suisse)

* Prix du public : Arbete Åt Alla ! (Du travail pour tous !) de Axel Danielson, Maximilien Van Aertryck (Suède)

* Prix étudiant : Man or Tree (Homme ou Arbre) de Tom Hancock, Varun Raman (Royaume-Uni)

Clermont-Ferrand 2022, les prix spéciaux

Le Festival de Clermont révèle son palmarès ce samedi 5 février à 18h. Voici déjà les prix attribués par les partenaires. Plusieurs films ont déjà été repérés par Format Court.

Bourse des festivals Auvergne-Rhône-Alpes : Pleure pas Gabriel (Mathilde Chavanne – Apaches Films)

Prix YouTube du court métrage de fiction : Case Dep’ (Alexandre Marinelli – France)

Prix Canal+ / Ciné+ : Calving (Louis Bhose – Irlande)

Prix Canal+ : Sideral (Carlos Segundo – France / Brésil)

Prix PROCIREP du•de la producteur•rice de court métrage 2021-2022 : Apaches Films (Marthe Lamy, Jeanne Ezvan)

Prix de la presse Télérama : Son altesse protocole (Aurélie Reinhorn – France / Belgique)

Prix ADAMI d’interprétation : Alban Guyon (dans Ce n’est rien, de Marion Harlez Citti – France) et Dominique Valadié (dans L’homme à la Mercedes pourpre, de Marine Levéel – France)

Prix du meilleur Queer métrage : Un corps brûlant (Lauriane Lagarde – France)

Prix des effets spéciaux par Adobe : Les larmes de la Seine (Yanis Belaid, Eliott Benard, Alice Letailleur, Nicolas Mayeur, Etienne Moulin, Hadrien Pinot, Philippine Singer, Lisa Vincente – France)

Prix SACD du meilleur film d’animation francophone : Noir-Soleil (Marie Larrivé – France)

Prix SACD de la meilleure première œuvre de fiction : Astel (Ramata Toulaye Sy – France / Sénégal)

Prix du meilleur film documentaire : In Flow of Words (Eliane Esther Bots – Pays-Bas)

Mention : L’huile et le fer (Pierre Schlesser – Suisse)

Prix du rire « Fernand-Raynaud » : Little Berlin (Kate McMullen – France), visible sur le site de Court-Circuit

Prix Festivals Connexion : Love, Dad (Diana Cam Van Nguyen – République tchèque / Slovaquie)

Onoda, 10 000 nuits dans la jungle de Arthur Harari

On n’arrête pas d’en entendre parler, de ce soldat japonais qui a continué la lutte pendant presque trente ans au fin fond de la jungle d’une petite île des Philippines. Onoda, 10 000 nuits dans la jungle, depuis sa sortie en salles en juillet 2021, ne rencontre que du succès. Le film d’ouverture au Festival de Cannes de la sélection Un certain regard vient de remporter le Prix Louis Delluc 2022. Il est aujourd’hui nommé dans quatre catégories au César (Meilleur réalisateur, Meilleur scénario original, Meilleure photographie et Meilleur film). Format Court vous offre d’ailleurs la possibilité de remporter un coffret DVD du film édité par le Pacte.

C’est une très belle réussite pour le deuxième long-métrage d’Arthur Harari, après Diamant noir. Le jeune réalisateur français s’est lancé un grand défi en commençant cette aventure avec le lieutenant Onoda. On comprend son attirance pour ce personnage historique, tout autant troublant que attachant. En 1945, au lieu de rendre les armes, ce soldat japonais continue, comme il lui a été appris, à se battre. Commence alors de longues décennies d’occupation de terres ennemies. Onoda, 10 000 nuits dans la jungle est une réussite visuelle et narrative : comment raconter ce destin si extraordinaire fait de 29 années d’attente, de survie, de lutte ? Le film étonne, et nous accroche ! On y contemple avec un certain malaise la vacuité de la mission que le lieutenant Onoda s’impose et pourtant on ressent toute la force de son dévouement et toute la détresse de l’abandon qu’il reçoit comme seule réponse. Pourra-t-il se libérer de cette dévotion, quitter son île, abandonner la guerre, se rendre ? Les yeux rivés sur l’écran, on guette les réponses. Avec eux, on passe de longues minutes à épier les Philippins, la pluie, les arbres, le ciel : des minutes qui sont des heures qui deviennent des années. Onoda, 10 000 nuits dans la jungle nous embarque dans un espace-temps hors-norme où l’attente se fait seule loi. Non, il y a aussi la loi de la jungle : terrible et cruelle jungle que ces quelques soldats japonais tentent d’habiter. Les images lui donnent une forte charge symbolique – les secrets de tournage dans les compléments du DVD nous en apprennent plus sur l’envie du réalisateur de traiter son décor et les moyens alors déployés.

Arthur Harari signe un film d’aventure qui ne se prive pas de scènes contemplatives. Le regard s’attarde sur cette forêt dense, grand huis clos de l’action. Une conversation avec Tom Harari, le directeur de la photographie sur le film – aussi frère et souvent collègue d’Arthur – dévoile les revers de la création, sur ce DVD. C’est amusant de comprendre d’où vient la puissance visuelle du film : par exemple, le traitement de la lumière, parfois crue, souvent blanche ; parfois onirique, dans des tons bleus, verts. Ce film, qui provoque une vraie sensation visuelle, se double d’une profondeur narrative rare. Le retour documentaire sur la création du film dans les compléments du DVD avec différents membres de l’équipe, scénariste, équipe images ou son…, est très pertinent pour découvrir l’ingénierie d’un film aussi bien maîtrisé, les envies du réalisateur, les idées de son équipe. On y apprend par exemple l’obsession du réalisateur pour le réel, pour les détails qui font vrai, ceux qui sont concrets. Pourtant, Onoda, 10 000 nuits dans la jungle n’est pas un film historique, ce n’est pas un film de costumes. Il substitue au temps du passé un temps au présent dans une narration qui semble fictive. Cela tient à la volonté du réalisateur de mettre à distance l’aspect historique du récit : on apprend et on comprend cette envie en lisant la documentation écrite qui accompagne le DVD, une interview du réalisateur et un papier universitaire sur le soldat Onoda et ses résonances au Japon. Malgré toute la complexité qu’implique cette célébrité historique (politiquement et symboliquement), le film se tient résolument du côté de son personnage. Tout en gardant du recul sur ces actes et ses convictions, le film ne quitte pas son point de vue et construit ainsi un personnage tout en dualité ! On retrouve parmi les questions posées au réalisateur dans les compléments du DVD la fameuse “Onoda est-il un héros ?” L’esprit militaire endurci dicte sa vie et sa conduite; pourtant le lieutenant Onoda se montre plein de tendresse et de fragilité. On découvre dans les flash-backs un garçon dévoué à son supérieur hiérarchique, un commandant intense et marginal qui prend les traits d’une figure paternelle. Cette dualité du lieutenant Onoda si touchante se complète par un tour de force technique, le personnage étant joué par deux acteurs différents. Yuya Endo et Kanji Tsuda se partagent le personnage au gré des flash-backs et du temps narratif (l’histoire commence en 1945 pour se finir en 1974 !) Une conversation entre les deux comédiens qui jouent Onoda et Arthur Harari s’avère être passionnante : Onoda étant un personnage de l’Histoire du Japon, son traitement par un réalisateur français s’avère être un sujet épineux que les comédiens et Arthur Harari aborde en grande intelligence.

Vous pouvez découvrir dans le DVD les moyens-métrages La main sur la gueule (produit par Les Films du Dimanche et sorti en 2007) et Peine perdue (produit par Bathysphère Productions et sorti en 2013), tous deux réalisés par Arthur Harari avec le travail de Tom Harari à l’image. En 2014, Peine perdue gagnait le prix Format Court au Festival de Brive. Le webzine sortait à cette occasion deux critiques sur les films d’Arthur Harari dans le cadre d’un focus consacré au réalisateur.

On y retrouve ce style (comme celui d’un western introspectif) des personnages en errance mais intègres à eux-mêmes. L’écriture du réalisateur se construit sur une apparente sobriété où les émotions, jamais surfaites, deviennent explosives quand elles apparaissent à la surface. Dans Peine perdue, Arthur Harari filme les corps comme s’ils étaient les plus précieux indices de l’âme humaine. Les mains baladeuses en disent bien plus que de longs discours… Ces personnages, dans Peine perdue comme dans La main sur la gueule, ne semblent pas pudiques au premier abord. Pourtant, ils se cachent et les émotions contenues font des films d’Arthur Harari de véritables champs de mines. Bien heureusement ses films nous laissent indemnes, ils nous donnent même de l’espoir en l’humain et, avec ça, l’envie d’en découvrir d’autres !

Agathe Arnaud

DVD Onoda, 10 000 nuits dans la jungle. Edition : Le Pacte. Compléments : Retour sur la création de Onoda : l’image, le scénario, la musique, conversation avec les comédiens, 2 courts-métrages du réalisateur : La Main sur la gueule, Peine perdue, galerie de projets d’affiches, bande-annonce

Clermont-Ferrand 2022

Le festival de Clermont-Ferrand a démarré le 28.1. Il aura lieu jusqu’au 5.2 prochain. Format Court vous propose quelques sujets en lien avec cette édition 2022, de retour en salles (et visible aussi en ligne).

Nos nouveaux sujets

– La critique de Bestia de Hugo Covarrubias, Prix du meilleur film d’animation

– La critique de Partir un jour de Amélie Bonnin, Prix du public national

– La critique de Le Roi David de Lila Pinell, Prix étudiant et Grand Prix national

– La critique de A coeur perdu de Sarah Saidan (compétition nationale)

Clermont-Ferrand 2022, le palmarès

Clermont-Ferrand 2022, les prix spéciaux

Nos sujets déjà publiés :

– La critique de Noir-Soleil et l’interview de sa réalisatrice, Marie Larrivé  (compétition nationale)

– La critique de A family portrait et l’interview de son réalisateur, Joseph Pierce (Royaume-Uni, 20 ans de Labo)

– La critique de A story of the Modlin et l’interview de son réalisateur, Sergio Oksman (Espagne, 20 ans de Labo)

– La critique de Hopptornet de Axel Danielson et Maximilien Van Aertryck (Suède, 20 ans de Labo)

– La critique de Decorado et l’interview de son réalisateur, Alberto Vazquez (Espagne, Polar)

– La critique de El ataque de los robots de nebulosa-5 et l’interview de son réalisateur, Chema García Ibarra (Espagne, Programme Espagne)

– La critique de Cólera de Aritz Moreno (Espagne, Programme Espagne)

– La critique de Les Indes galantes et l’interview de son réalisateur, Clément Cogitore (France, Programme Danse)

– La critique de Le sens du toucher et l’interview de son réalisateur, Jean-Charles Mbotti Malolo (France, Programme Danse)

– La critique de Kali, le petit vampire de Regina Pessoa (France, Portugal, Canada, Suisse, Programme Audiodescription)

A coeur perdu de Sarah Saidan

On avait découvert Sarah Saidan avec Beach Flags réalisé en 2014. Le film racontait l’histoire de Vida, une jeune fille désireuse de participer à une compétition de natation en Australie, mais renvoyée à sa condition de fille en Iran et confrontée à un choix difficile au sujet de l’une de ses co-équipières, Sareh. Le film nous avait bien plu à l’époque par son style visuel, la simplicité de sa narration, son sujet politique et le dessin de ses personnages.

Quelques année plus tard, on est ravi de retrouver la réalisatrice avec son nouveau court, A coeur perdu, programmé en compétition nationale à Clermont, qui mixe à nouveau persan, couleurs, dessins et émotions. A coeur perdu raconte l’histoire d’Omid, un père de famille iranien immigré à Paris et travaillant dans un hypermarché à pomme rouge. Confronté au racisme ordinaire, à la méfiance, à l’impatience des parisiens, il répond par son sourire, sa bonne humeur et ses fautes de français. Un soir, il se fait poignarder par des malfrats en bas de chez lui. Miraculeusement, il ne succombe pas à l’attaque car il n’a plus de coeur selon les médecins. Ni une ni deux, il prend l’avion pour rentrer chez lui, en Iran, afin de retrouver son coeur égaré, là où il envisage l’avoir laissé derrière lui. Sur place, différentes émotions l’interpellent : l’inconfort de celui qui revient chez lui et qui a laissé derrière lui ses proches, la joie de retrouver les saveurs et les couleurs de son pays d’origine, la surprise de retrouver la pollution et les bruits d’antan. Quant à son coeur, Omid le voit partout mais ne le trouve nulle part.

Avec ce film bien personnel, Sarah Saidan signe un très beau retour en festival. A première vue, le film pourrait ne parler que de cette histoire d’organe mais il évoque aussi avec poésie et humour les difficultés propres à l’immigration à savoir la maîtrise du français – langue ô combien compliquée – mais aussi le déracinement et le choc des cultures à l’image de ce plan génial où Omid entre dans le métro avec sa fille et dit tout simplement bonjour à tout le monde, avec son accent à lui. Les passagers s’en étonnent, grommellent, s’imaginent tout de suite que le père et sa fille sont là pour leur demander l’argent alors qu’ils ne font que preuve de politesse. On en arrive à se dire qu’Omid a raison et qu’il faudrait se saluer systématiquement dans les transports dits en commun.

Katia Bayer

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A comme A coeur perdu

Fiche technique

Synopsis : Omid est un immigré iranien, venu s’installer en France avec sa famille. Un soir, dans la rue, il se fait agresser et poignarder en plein cœur. Mais Omid se relève ! À l’hôpital, le diagnostic des médecins est formel : il n’a pas de cœur. Serait-il resté en Iran ?

Genre : Animation

Durée : 14’46″

Pays : France

Année : 2022

Réalisation : Sarah Saidan

Scénario : Sarah Saidan, Simon Serna

Voix : Saeed Mirzaei, Taha Moghani, Shahriar Sadr, Alice Lendrevie, Cécile Arnaud, Pierre-Alexis Touzeau

Son : Xavier Thibault

Montage : Manon Dubois

Musique : Pierre Oberkampf

Animation : Adèle Hamain, Xavi Siria, Milena Mardos, Francesca Marinelli

Production : Caïmans Productions

Article associé : la critique du film

Niki Lindroth von Bahr : « On apprend beaucoup sur la narration en travaillant sur des courts »

Invitée en décembre au Forum des images (Paris) dans le cadre du Carrefour du cinéma d’animation, l’animatrice et réalisatrice suédoise Niki Lindroth von Bahr est à l’origine de plusieurs courts-métrages remarqués et primés dont Something to remember programmé en novembre lors de la séance suédoise de notre festival. Alors que The House, co-réalisé avec Emma de Swaef, Marc Roels et Paloma Baeza, est diffusé depuis quelques jours sur Netflix, l’animatrice nous parle avec humour et lucidité de son métier, de ses difficultés et de cette case courte qui lui va si bien.

Format Court : À quoi ressemblent vos scénarios ?

Niki Lindroth von Bahr : Je n’écris que rarement, sinon jamais, le scénario en premier. Généralement, je commence à travailler avec des storyboards dès le début. Ce ne sont que des images. Tous mes films ont commencé avec un endroit, plutôt qu’avec des personnages ou des histoires. Je choisis un endroit, une atmosphère, une situation, et je commence à réfléchir à l’histoire à partir de là.

La dernière édition du festival Format Court proposait un focus sur la Suède, qui incluait votre film mais aussi Las Palmas de Johannes Nyholm…

NLVB : Je suis son amie et collègue depuis longtemps. Je dirais qu’il est l’un des artistes les plus intéressants en Suède. J’ai d’ailleurs participé à la production de Las Palmas, et il a fait la voix d’un des personnages d’un de mes cours précédents, Bath House, un des méchants. Je lui ai proposé mon aide pour son film Puppetboy, et j’ai fait partie de l’équipe de production pour Las Palmas. Nous nous soutenons mutuellement depuis longtemps.

Diriez-vous que le monde de l’animation est petit en Suède ?

NLVB : Le monde de l’animation y est si petit qu’il est presque inexistant. Je suis en contact avec des professionnels de l’animation à Stockholm, et je dirais que c’est une communauté très restreinte et dispersée. Il y a quelques groupes, mais pour être parfaitement honnête, je fais de l’animation moi-même, mais je ne suis pas très impliquée dans cette communauté en général. Je ne regarde pas tant d’animation que ça dans mon temps libre. Je regarde beaucoup de films, et je connais beaucoup de personnes qui travaillent dans la prise de vue réelle, mais je pense que ce genre de films m’intéresse plus que la technique même de l’animation en tant que forme artistique. C’est aussi parce que le monde de l’animation est petit, mais celui de l’animation image par image l’est encore plus. Je crois qu’en quelque sorte, il n’y a que moi qui la pratique. Même si j’apprécie communiquer sur mon expérience sur le financement de l’animation, le savoir technique en lui-même est très peu partagé.

Comment l’expliquez-vous ?

NLVB : L’animation image par image est très difficile, chronophage et onéreuse. Il faut souvent avoir beaucoup d’argent, ce qui n’est généralement pas le cas, et puis il faut pouvoir gérer tout un tas d’éléments tout au long du processus, liés à la structuration, la réalisation, l’écriture, le montage… C’est un travail difficile et je comprends tout à fait que, dans un monde où tout s’accélère (même si c’est un peu un lieu commun), presque tous les aspects techniques et liés à la connaissance vont de plus en plus vite. Dans l’animation image par image, il faut savoir travailler très vite pour chaque image du film… Sans doute ce n’est pas une pratique très moderne.

En voyant vos films, on se rend compte que les lèvres de vos personnages ne bougent presque pas, et vous travaillez beaucoup avec la voix off. C’est très intéressant et en rupture. Avez-vous déjà été tentée d’animer aussi les bouches de vos personnages ?

NLVB : Dans l’un de mes futurs projets, réalisé avec Netflix, on aura des bouches animées. Mais c’est une option technique qui ne m’était pas possible financièrement jusque-là, parce que quand vous fabriquez vous-mêmes les marionnettes, c’est difficile d’y ajouter du mouvement. Ça devient un peu brouillon si vous ne faites pas appel à des professionnels, alors j’ai préféré utiliser les mouvements du corps plutôt que de la bouche. Dans The Burden, certains des personnages avaient une bouche animée, mais ça dépend vraiment du type de production. Avant la production avec Netflix, mon budget était le plus souvent dérisoire. L’enjeu en animation, c’est d’essayer de faire de la magie à partir de rien. Parfois, il faut savoir prioriser.

Recevez-vous de l’aide de l’État désormais ?

NLVB : Oui, j’ai reçu de l’argent du Swedish Film Institute, et c’est super, ils sont très généreux envers moi. Je suis très reconnaissante de cela. Et en même temps, l’animation image par image est tellement onéreuse. Il n’y a pas de raccourcis possibles dans la production. De temps en temps, je peux me permettre d’engager un(e) assistant(e), mais je ne pourrais pas vraiment me salarier moi-même. Je dois faire certains choix. En ayant des enfants, et plus le temps passe, plus ça devient compliqué. Des fois, je dois passer des semaines entières au sous-sol pour travailler (rires), et chaque heure est consacrée à mes projets en cours.

Vous parlez de votre sous-sol, travaillez-vous chez vous ?

NLVB : Non, non, c’est un autre sous-sol (rires). Je connais beaucoup de gens qui travaillent chez eux pour des questions d’argent ou de confort, mais j’en mourrais (rires). J’ai vraiment besoin de garder une séparation entre le travail et le temps libre. Même si j’ai très peu de temps libre, c’est très important pour moi.

Vos films me font penser à l’esprit des contes de notre enfance. Vous disiez que l’animation est pour vous une méthode, mais que vous en regardiez assez peu, au contraire des prises de vue réelles. Avez-vous déjà été tentée par le genre frictionnel ?

NLVB : D’une certaine manière, je n’y suis pas opposée du tout, je serais clairement intéressée par cette idée. Mais en même temps, être une réalisatrice en situation de prise de vue réelle revient à être en charge d’un grand groupe de personnes, dans un espace-temps limité. C’est une vraie responsabilité. Je ne suis pas sûre d’avoir ça en moi. C’est plus facile d’être agréable quand on a plus de temps pour tourner, quand on fait plus de choses soi-même. Même si j’adore les films en prise de vue réelle, je pense que, puisque j’ai été artiste-sculptrice et que j’ai exposé dans des galeries, je pense que si je devais sortir de l’animation, je me tournerais plutôt vers une carrière d’artiste. Je me sens très tactile et j’aime créer des choses avec mes mains. Cet intérêt est plus fort chez moi que celui de la réalisation, vous voyez ?

« Something to remember »

Format Court est un site dédié aux courts-métrages. Que vous apprend ce format et notamment sa création en auto-production avec un budget limité ?

NLVB : Travailler avec un format court est très intéressant. On réalise de fait qu’en faisant des courts-métrages, mais aussi en participant à des jury de festivals de courts-métrages (que ce soit des films animés ou en prise de vues réelles) le court-métrage est un format assez compliqué. On veut raconter quelque chose, et en même temps, on ne peut pas trop en faire. Il y a beaucoup de pièges dans la manière de raconter une histoire. Beaucoup de gens essaient de raconter l’histoire d’un long-métrage dans le format d’un court-métrage. La difficulté réside dans le fait d’arriver à gérer cette durée limitée du court-métrage. Quand on arrive à trouver une histoire qui rentre parfaitement dans le format, ça peut être encore plus puissant qu’un long métrage, et c’est très satisfaisant. On peut en dire tellement en seulement quelques minutes. Les images et les sons peuvent être très forts. On se rend compte de la valeur de chaque seconde et de chaque plan. Puisque rien n’est gratuit, il faut être très exigeant sur ce qu’on montre dans un temps aussi limité. On apprend beaucoup sur la narration en travaillant sur des courts-métrages, plus encore que sur les longs-métrages.

Est-ce la raison pour laquelle vous avez préféré réaliser des courts-métrages ?

NLVB : Il y a aussi l’aspect financier évident !

Bien sûr ! Mais dans l’animation en particulier, il faut bien en commencer par là !

NLVB : Exactement. Ce que j’aime, c’est que dans l’animation, il est considéré acceptable de continuer à travailler sur des courts-métrages pendant toute sa carrière. Le court-métrage est l’attraction principale. Au contraire, dans les grands festivals centrés sur les films en prise de vues réelles, on a l’impression d’être à la table des enfants ! C’est comme si on vous demandait si vous allez enfin faire quelque chose de sérieux la prochaine fois ! On vous rappelle toujours que ce n’est que le début.

Dans mes premiers films, il y avait aussi du dialogue, mais c’est vrai que dans les deux derniers, en choisissant de faire des personnages chantants, ça permettait de troubler l’identification entre soi et le personnage. On ne sait pas si c’est un homme ou une femme. Avec les animaux, on entre dans l’universel : ça peut être n’importe qui.

Et pourtant, ils ont des pieds et des mains humains ?

NLVB : Au début, c’est vrai, j’ai commencé à les faire ressembler à des humains. Bien sûr, leurs histoires, elles-mêmes, sont des histoires humaines. En parlant d’histoires sombres d’une manière un peu décalée et avec des animaux, je voulais créer un filtre un peu absurde. Des fois, c’est un peu triste, mais c’est aussi légèrement humoristique. Je crois que j’ai voulu appâter le public vers des histoires plus sombres avec mes animaux mignons et bébêtes. Mais en même temps, je suis passée d’une représentation très humaine des corps de mes animaux vers quelque chose de plus zoomorphe. J’ai essayé de faire rentrer ces corps animaux dans des vêtements humains, comme les jeans, ce qui devenait encore plus absurde. Mettre une cravate et un costume sur un escargot ou un scarabée, je crois que ça ajoute quelque chose. On ressent tous et toutes à un moment donné que toute cette civilisation nous est un peu imposée, qu’elle est un ajout, alors que nous sommes des animaux à l’intérieur, en tant qu’humains.

Dessiniez-vous ces animaux directement habillés ou est-ce que c’est venu avec le temps ? Pensez-vous que ça ajoute un côté amusant ou bizarre ?

NLVB : Je ne sais pas si c’était délibéré, mais j’ai été de plus en plus intéressée à utiliser des animaux qui ressemblent de plus en plus à des animaux, mais aussi à utiliser des animaux qu’on attend moins (comme des escargots ou des larves) par rapport à des animaux plus habituels (comme les lapins, par exemple) pour représenter les humains dans les cultures enfantines.

Si on considère cette culture, on voit aussi que votre animation a évolué. Les cheveux ne bougeaient pas, les personnages ressemblaient plus à des poupées, et en dix ans, votre animation s’est transformée…

NLVB : Oui, elle s’est améliorée, et c’est une question d’apprentissage de la technique. Dans Tord and Tord, c’était la toute première fois que je faisais de l’animation, je n’avais jamais essayé avant. C’était très statique, et de manière délibérée, parce que je ne savais pas comment m’y prendre. Au début, j’ai beaucoup pratiqué l’animation moi-même, mais en même temps, la fabrication des marionnettes, la réalisation et l’écriture, tout ça est très épuisant. Quand le moment de l’animation, de la véritable performance arrive, on est tellement fatigué·e (rires), que c’est plus agréable de mettre son argent dans le travail d’un bon animateur, clairement.

Connaissiez-vous déjà le travail d’Emma de Swaef et Marc James Roels avec qui vous avez collaboré sur The House ?

NLVB : Oui, Ce Magnifique gâteau est un des meilleurs films que j’ai vus, c’est vraiment incroyable, j’étais déjà une grande fan de leur travail. Le travail de Paloma Baeza aussi est super. J’étais très heureuse de travailler avec eux, c’était un honneur. Ce projet est assez unique, c’est un des premiers projets en image par image de cette ampleur sur Netflix, avec des réalisateurs de plusieurs nationalités. Je suis très, très heureuse d’y avoir participé !

Interview : Katia Bayer

Retransciption : Eliott Witterkerth

Remerciements : Diana-Odile Lestage (Forum des images)

César 2022 : quels sont les courts nommés ?

Voici les 13 titres courts retenus au premier tour de vote par les membres de l’Académie des arts et techniques du cinéma, dévoilés ce mercredi 26 février. Pour information, le second tour de vote débutera le 1er février et s’achèvera le 25 février quelques heures avant le début de la 47e Cérémonie des César.  Deuxième bonne info : toutes les équipes retenues ont participé à nos 3 After Short spécial César organisés en décembre et janvier !

Sont nommés pour le César du meilleur film de court-métrage de fiction :

L’âge tendre de Julien Gaspar-Oliveri

Le départ de Saïd Hamich

Des gens bien de Maxime Roy

Les mauvais garçons de Elie Girard

Soldat noir de Jimmy Laporal-Trésor

Sont nommés pour le César du meilleur film de court-métrage d’animation :

Empty places de Geoffroy de Crécy

Folie douce, folie dure de Marine Laclotte

Le Monde en soi de Sandrine Stoïanov et Jean-Charles Finck

Précieux de Paul Mas

Sont nommés pour le César du meilleur film de court-métrage documentaire :

America de Giacomo Abbruzzese

Les Antilopes de Maxime Martinot

La fin des rois de Rémi Brachet

Maalbeek de Ismaël J. Chantoudis

Focus sur 5 courts de fiction présélectionnés aux César 2022

En attendant que la prochaine cérémonie des César 2022 récompense le meilleur court métrage de fiction le 25 février 2022, Format Court vous propose de revenir plus en détail sur 5 courts métrages, parmi les 24 en lice côté fiction. Cette présélection très prometteuse atteste en elle-même de la diversité et de la vitalité flamboyante de la forme courte.

Sous les nuages inquiets, sur la plage de Casablanca, une mère prie en tenant fermement la main de son enfant. Bientôt, ces deux âmes, dont le lien est indestructible, vont devoir subir une douloureuse épreuve de séparation, et ces jours passés ensemble à la fin de l’été 2004 se transformeront en souvenirs.

Récompensé à la dernière édition du Festival Format Court (Prix d’interprétation décerné à Ayam Rachdane, pour le rôle de l’enfant et Mention spéciale à l’ensemble des acteurs du film), Le Départ de Saïd Hamich raconte l’histoire d’Adil, 11 ans, qui s’apprête à vivre un grand changement avec l’arrivée de son père et de son frère, revenus de France au Maroc natal. Grâce à sa voix-off, le récit prend une dimension rétrospective, comme si Adil portait un regard déjà adulte sur lui-même.

Dès la première séquence, le spectateur est plongé dans une atmosphère de mélancolie douce-amère, avant même d’en découvrir les raisons. Le garçon passe ses journées dehors, entouré de ses copains. Le vaste chantier de construction dans une banlieue casablancaise s’ouvre, pour cette bande attachante, à une infinité de jeux. Le temps semble être étiré. Avec sa caméra contemplative, le réalisateur Saïd Hamich parvient à saisir les petits riens charmants qui forment l’univers enfantin et à révéler la poésie dans la banalité : les batailles d’eau, le pinball, un petit chiot, meilleur ami à quatre pattes, la télé jusque tard la nuit pour voir le coureur Hicham El Gueroujj remporter la médaille d’Or aux Jeux Olympiques.

Les captations de cette célèbre victoire viennent s’ajouter à la narration en la plaçant dans son contexte historique général. Celles-ci se présentent par ailleurs, comme une métaphore d’un instant de réel vécu intensément, d’un bonheur partagé, mais servent aussi à illustrer la tempête émotionnelle d’Adil. Tout comme son idole sportive, il entame une course (vers l’inconnu, loin de sa mère et des copains), avec une immense volonté de réussite. C’est précisément la dissonance extradiégétique entre les cris enthousiastes des commentateurs et la musique triste, qui rend palpable ses sentiments mitigés. Le temps n’est plus simplement ajusté à la durée nécessaire pour accomplir une action quelconque, mais il devient une matière malléable et autonome.

Avec Le Départ, Saïd Hamich reconstitue soigneusement un éventail d’images marquantes et personnelles qui forment le souvenir d’un émigré, tout en inscrivant celles-ci dans une forme d’universalisme. D’une émouvante sensibilité, le film s’adresse à tous les spectateurs, qu’ils soient séparés des contrées qui les ont vu grandir ou non, pour explorer le mécanisme même de la mémoire.

Avec L’Effort commercial, la réalisatrice Sarah Arnold tire la sonnette d’alarme et dénonce les conditions de travail des salariés de la grande distribution.

Issu d’un appel à projet lancé par l’association Femme et Cinéma sur le thème « Femme au travail », ce court-métrage vibrant de 15 minutes est inspiré d’un fait réel : en novembre 2016, une employée d’Auchan de la ville de Tourcoing, enceinte de trois mois, faisait une fausse couche sur son siège de caisse. Son responsable, bien au courant de ses maux de tête et de ventre, avait refusé ses nombreuses demandes de prendre une pause.

Dans L’Effort commercial, c’est Léa, jeune étudiante au sourire innocent, qui vient seulement de commencer son contrat saisonnier, qui devient témoin de ce drame. En défiant l’habitude du spectateur vis-à-vis de la chronique sociale, Sarah Arnold fait le choix d’un décor explicitement artificiel et abstrait afin de faire résonner davantage l’ampleur de la pression insoutenable que subissent quotidiennement ces travailleuses. La réalisatrice remplace le vrai supermarché par un lieu d’une blancheur stérile, tel un bloc opératoire avec des caisses à la place des lits : son esthétique, l’absence de clients, aussi bien que de marchandises, permettent de mettre en lumière combien ces femmes sont réduites à leur seule force du travail. Manipulant incessamment les produits invisibles, elles n’ont pas le droit à la moindre erreur, placées sous la stricte surveillance du manager, chargé de s’assurer de la bonne application des règles marketing à limite de l’absurdité. Le film fournit des illustrations choquantes de la violence sur le lieu de travail (psychologique, comme physique) et rend bel et bien un hommage poignant à l’une de ses victimes.

Thriller avec une petite note d’humour noir, Les Criminels de Serhat Karaaslan, traite de l’union libre, frappée du sceau de l’interdit par la société islamo-conservatrice en Turquie. Dans les rues obscures d’une ville de l’Anatolie, un jeune couple recherche un hôtel pour passer la nuit ensemble. N’étant pas mariés, l’homme et la femme reçoivent un ferme refus partout où ils se rendent jusqu’à devoir inventer un stratagème pour pouvoir se retrouver dans la même chambre.

Entre la fraîcheur du premier amour et l’ambiance sinistre de l’hôtel sordide ressemblant à celui de Barton Fink dans un film éponyme (Frères Coen, 1991) le contraste est fort. Celui-ci est mis au service de la mise en scène : le cadrage serré témoigne de l’inhospitalité du lieu, annonce la future menace (qui survient toujours du hors champ), mais ouvre aussi la voie vers un espace intime (bien que très précaire et éphémère) des amoureux.

Le spectateur découvre, à travers le jeu du formidable duo d’acteurs formé par Lorin Merhart et Deniz Altan, ce que c’est qu’être jeune et vivre dans un monde où aimer, signifie contre tout bon sens, la prise de risques. Le film condamne la rhétorique qui défie la raison et ne laisse à l’individu aucun droit à la vie privée : pourquoi ces innocents doivent-ils se confronter à la violence démesurée de ceux qui cachent, sous le masque des gardiens de la morale, des visages de monstres pervers ?

Sous la forme d’un ciné-journal,The Nightwalk d’Adriano Valerio, ce concentré de beauté mystérieuse et anxiogène, relate le quotidien d’un jeune homme étranger, confiné dans sa chambre d’étudiant à Shanghai à plus de 9000 kilomètres de sa famille, suite aux annonces gouvernementales de l’état d’urgence sanitaire en Chine.

L’isolement, le sentiment d’insécurité et la solitude pèsent lourd sur sa santé morale : les notions du temps et d’espace commencent rapidement à se diluer, les nuits d’insomnie se suivent aux jours de somnolence. De multiples bribes d’images composent son témoignage en voix-off : se mêlent alors dans un cocktail fiévreux des extraits de films variés (de Buster Keaton à la comédie italienne des années 80) et d’archives personnelles, ainsi que des photos prises au moment de sa claustration, avec du grain apparent, faisant penser à la poussière stagnante dans une pièce non aérée.

Difficile de trouver un meilleur dispositif pour exprimer cet état d’aliénation d’un esprit pris au piège par le temps en arrêt, et, par conséquent, par ses propres souvenirs et affects. Ce temps, le réalisateur Adriano Valerio le mesure selon toute logique en images fixes, faisant ainsi du banal l’objet d’une attention artistique particulière. Des nouilles instantanées, une bouteille de vodka en guise de vase à fleur, une cuillère sur le lit à côté d’une chaussette dépareillée : le héros est hanté par nombreuses natures mortes « imparfaites », dont il est lui-même auteur. Il ne retrouvera sa sérénité qu’après avoir enfin bravé ses ténèbres intérieures. Franchir le pas dehors, un si humble besoin, lui paraîtra alors soudainement réalisable. The Nightwalk est un film à la fois pensif et émotif, mais aussi torturé, dont la longue introspection du personnage ne nous laisse pas insensibles.

Avec L’Inspection, les réalisateurs Caroline Brami et Frédéric Bas touchent à la difficulté de trouver un juste équilibre entre rationalité, morale et émotion, lorsqu’il s’agit de l’enseignement de l’histoire de la Shoah.

Une professeure d’histoire reçoit dans sa salle de classe un inspecteur de l’Education Nationale. Impossible pour eux de trouver un accord commun. Esthétiquement très sobre, le film met en scène leur dialogue d’une grande densité émotionnelle et accorde le même temps de parole à deux points de vue divergents. Aucune micro expression faciale, aucun geste n’échappe à la caméra attentive qui filme tout leur échange, dont la tonalité devient de plus en plus aigüe, en champ contre-champ.

Très sincèrement étonné par l’approche pédagogique développée par l’enseignante, l’inspecteur essaye vainement de comprendre : pourquoi passer plus de temps que prévu dans le programme à étudier l’histoire de la Shoah ? Pourquoi montrer des images qui peuvent potentiellement nuire à la psyché des élèves réceptifs ? Se retrouvant face à une personne qui considère dangereuse non pas les images, mais la neutralité dont il est adepte, le fonctionnaire est désarmé : il ne lui reste rien d’autre que d’abandonner la salle.
Le film révèle une faille du système qui veut rendre lisse ce qui ne peut pas l’être par définition et nous incite à nous interroger sur ce que nous voulons transmettre à nos futures générations, et surtout, avec quelle tonalité.

Polina Khachaturova

Les Prix Louis-Delluc remis à Arthur Harari et Aurélien Vernhes-Lermusiaux

Le Prix Louis-Delluc est une récompense cinématographique française décernée depuis 1936 et nommée en hommage à l’écrivain et réalisateur Louis Delluc. En 1999, a été créé le prix Louis-Delluc du premier film. Ces derniers jours, deux réalisateurs proches du format court et de Format Court ont reçu ces 2 distinctions honorifiques. Un bon encouragement avant les Lumière et les César.

Arthur Harari a remporté le prix Louis-Delluc pour son film Onoda, 10.000 nuits dans la jungle, présenté à Cannes dernier en ouverture de la section Un certain regard. Il succède ainsi à Sébastien Lifshitz, récompensé l’an dernier. Pour info, Arthur Harari avec remporté le Prix Format Court au Festival de Brive 2014 pour son moyen-métrage Peine perdue.

Composé d’une vingtaine de critiques et personnalités, sous la présidence de Gilles Jacob, l’ancien président du Festival de Cannes, le jury a également récompensé, dans la catégorie Premier film, Vers la Bataille, d’Aurélien Vernhes-Lermusiaux. Pour info aussi, le réalisateur faisait partie du jury professionnel de notre dernier Festival.

Nouvel After Short spécial documentaire, mardi 18.1 !

Après avoir consacré en décembre deux soirées autour des courts de fiction présélectionnés aux César 2022 (en présence de 20 équipes au total) et une consacrée au cinéma d’animation le 11 janvier (en présence de 11 équipes), Format Court vous invite mardi 18.1 à 19h à l’ESRA à son prochain After Short dédié aux courts-métrages documentaires en lice aux prochains César. 10 équipes seront présentes à cet événement.

Bon à savoir : l’After Short documentaire est notre tout premier événement consacré au genre, il précède le tout nouveau César du court-métrage documentaire qui sera remis lors de la prochaine cérémonie des César le 25 février 2022.

Pour info et rappel, il n’y a pas de projection des films présélectionnés pendant les After Short. Le rendez-vous est fixé au mardi 18.1 prochain à 19h à l’ESRA (amphithéâtre Jean Renoir, 37 quai de Grenelle 75015 Paris).

Gratuits pour les étudiants et les anciens de l’ESRA, les After Short demeurent accessibles et payants (5€) aux autres personnes intéressées, dans la limite des places disponibles, sur réservation.

Mardi 18 janvier 2022 : After Short : Spécial documentaire !

Voici la liste de nos invités présents lors de cette soirée, à retrouver sur notre compte Instagram :

– Margaux Pierrefiche, responsable du court aux César

– Marion Bonneau, programmatrice à la Cinémathèque du documentaire à la Bpi, membre du comité court-métrage documentaire

– Quentin Brayer, producteur (Don Quichotte Films) de Les Antilopes de Maxime Martinot

– Alessandra Celesia et Kévin Rousseau, réalisatrice et producteur (Local Films) de Come il bianco

– Louise Mootz et Judith Nora, réalisatrice et productrice (Silex Films) de Jungle

– Rémi Brachet et Antoine Salomé, réalisateur et producteur (Mabel Films) de La fin des rois

– Ismaël J. Chantoudis et Jules Reinartz, réalisateur et producteur (Films Grand Huit) de Maalbeek

– Ethan Selcer, producteur (Quartett Production) de Pyrale de Roxanne Gaucherand

– David Hurst, producteur (Dublin Films) de Silent Voice de Reka Valerik

– Clara Marquardt, chargée de développement de My Quarantine Bear de Weijia Ma (Les Valseurs)

– Isabel Pagliai et Martin Bertier, réalisatrice et producteur (5 à 7 Films) de Tendre

– Sébastien Hussenot, producteur (La Luna Productions ) de America de Giacomo Abbruzzese

After Short César Animation, mardi 11.1 sur Zoom !

Alors que les votes pour les César 2022 ont commencé ce 3 janvier, Format Court vous invite mardi 11.1 à 19h sur Zoom à son nouvel After Short consacré aux courts-métrages d’animation présélectionnés aux prochains César. Cet événement est organisé en collaboration avec l’ESRA. 11 équipes sur 12 ont répondu favorablemement à notre invitation !

Bon à savoir : un prochain After Short, consacré aux courts documentaires en lice aux César, aura lieu le mardi 18.11.

Pour info et rappel, il n’y aura pas de projection des films présélectionnés pendant les After Short.

Gratuits pour les étudiants et les anciens de l’ESRA, les After Short demeurent accessibles et payants (5€) aux autres personnes intéressées, sur réservation.

Voici la liste, susceptible de changements, de nos invités présents lors de cette soirée :

– Margaux Pierrefiche, responsable du court aux César

– Agnès Patron, réalisatrice de L’Heure de l’Ours, César du meilleur court d’animation 2021

– Nathalie Lebel, membre du comité Animation et responsable des ventes et acquisitions à l’Agence du court-métrage

– Sophie Racine et Yves Bouveret, réalisatrice et producteur (Am Stram Gram) de Rivages

– François Leroy et Stéphanie Lansaque, réalisateurs de Le Réveil des insectes

– Mathilde Parquet et Christophe Camoirano, réalisatrice et producteur (Girelle Production) de Trona pinnacles

– Paul Mas, réalisateur de Précieux

– Marine Laclotte et Christian Pfohl, réalisatrice et producteur (Lardux Films) de Folie douce, folie dure

– Bastien Dubois et Amiel Tenenbaum, réalisateur et producteur (Blast Production) de Souvenir, souvenir

– Sandrine Stoïanov, Jean-Charles Finck et Jérôme Barthélemy, réalisateurs et producteur (Caïmans Productions) de Le Monde en soi

– Geoffroy de Crécy, réalisateur de Empty places

– Sandra Desmazières et Fariza Daguelou, réalisatrice et productrice (Les Films de l’Arlequin) de Comme un fleuve

– Uri Kranot et Avi Amar, réalisateur et producteur (Floreal Films) de The Hangman at Home

– Marine Blin, réalisatrice de Ce qui résonne dans le silence

Vos films préférés en 2021 !

Ce mois-ci, Format Court fête son 13ème anniversaire (bouchon !). Après avoir publié il y a quelques jours notre propre Top 5 des meilleurs courts-métrages de l’année, voici les résultats de votre propre Top, suite à notre appel publié récemment sur notre site internet. 4 films, vus en 2021, ont remporté le plus de suffrages. Voici lesquels.

L’homme silencieux de Nyima Cartier, France

T’es morte Hélène de Michiel Blanchart, Belgique, France

L’inspection de Caroline Brami et Frédéric Bas, France

Le Monde en soi de Sandrine Stoïanov et Jean-Charles Finck, France