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Girl’s Night Out (Sortie entre filles) de Joanna Quinn

Dans le milieu de l’animation, l’univers mordant, décalé et très « féminin » de Joanna Quinn  fait mouche. Véritable artisan du cinéma dessiné, la cinéaste galloise croque sans pudeur, depuis plus de 20 ans, les rondeurs sympathiques de personnages singuliers à l’humour « so british ».

Qu’elles traitent de l’impérialisme britannique (« Britannia » – 1993) ou des ambitions d’une apprentie cinéaste inspirée par l’avant-garde russe (« Dreams and desires – family ties » – 2006), les animations un brin subversives de Joanna Quinn remportent un franc succès où qu’elles passent.

Présenté à Anima dans le cadre de la rétrospective consacrée à Chanel 4, « Girl’s Night Out » (1987) est le premier film de la réalisatrice financé grâce à la chaîne anglaise. Dans un style simple, enlevé et très libre, Joanna Quinn explore, par la technique du crayon coloré, les contours, ô combien complexes, d’une féminité, qui, loin de correspondre aux canons de la beauté, s’évadent du quotidien en se gavant de lectures mièvres et de comédies romantiques.

Du romantisme ? C’est un peu ce qui manque à la pauvre Beryl, la quarantaine rondouillarde, docile en apparence mais légèrement effrontée. Cloisonnée dans un trois pièces, entre un mari indifférent, obnubilé par le petit écran et un chat pas plus affectueux, Beryl décide de célébrer son anniversaire entre copines dans un club de striptease masculin. Les clichés s’inversent : les femmes matent sans vergogne l’homme-objet (et l’objet de l’homme) faisant ainsi naître les fantasmes enfouis depuis trop longtemps. Réalisé durant les années Thatcher, le film, au-delà d’une caricature amusante, est également un pamphlet féministe remettant en question les rôles de l’homme et de la femme dans la société occidentale.

Par un sens du mouvement (gros plans suggestifs) et un travail du son fort intéressant (sons d’ambiance, jacasseries continuelles de Beryl et ses amies remplissant tout l’espace sonore, musique entraînante du striptease), « Girl’s Night Out » déborde de situations cocasses qui s’enchaînent à un rythme effréné. Le tour de force de Joanna Quinn est de dresser le portrait d’un personnage populaire au visage expressif et à l’accent gallois savoureux sans jamais le dénigrer ou tomber dans la vulgarité. Un film particulier, délicieusement insolent.

Marie Bergeret

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Article associé : l’interview de Clare Kitson, ex-responsable du Département Animation à Channel 4

Soirée printanière de Cinergie.be‏

Quand on aime, on ne compte pas. Cinergie.be invite, pour sa soirée printanière, à une série de projection de sept courts métrages qui vont de l’animation au clip musical, en passant par l’expérimental et le drame. Sept films, qui témoignent de la santé éclectique du cinéma belge des deux côtés de la frontière linguistique, de sept réalisateurs, présents à la projection, qui font ou feront bientôt l’actualité des salles.

E pericoloso sporgersi de Jaco Van Dormael

Dérision douce et Orwold de Jean-Noël Gobron

To Speak de Erik Lamens

Pic Pic André Shoow – The first de Stéphane Aubier et Vincent Patar

Le Voyageur s’exclame alors de Johan Pollefoort

Home Sweet Gnome de Marie-Laure Guisset.

Infos : vendredi 3 avril, à partir de 20h au Studio 5 de Flagey, en collaboration avec Cinematek et Flagey.
Réservations : 02 641 10 20 – www.flagey.be

D comme Dji vou veu volti

Fiche technique

Synopsis : Sous le balcon de sa belle, un troubadour vient chanter sa romance en wallon. Soudain, le sous-titre du film, excédé par les paroles niaises de la chanson, se rebelle contre autant de guimauve. Jusqu’à ce qu’il tombe, lui aussi, sous le charme de la belle.

Genre : Animation

Durée : 12’48”

Année : 2007

Pays : Belgique

Réalisation : Benoît Féroumont

Scénario : Benoît Féroumont

Graphisme : Benoît Féroumont

Storyboard : Benoît Féroumont

Layout : Benoît Féroumont

Son : Fred Piet

Musique : Johan de Smet

Mixage : Manu de Boissieu

Production : La Parti production, Walking the Dog BVBA

Article associé : la critique du Best of Anima 5

V comme Le Voyageur (s’exclame alors)

Fiche technique

Synopsis : Le voyageur s’exclame alors : « Malheur à ceux qui se contentent de peu ».

Genre : Animation

Durée : 06’20”

Année : 2007

Pays : Belgique

Réalisation : Johan Pollefoort

Scénario : Johan Pollefoort

Adaptation de : « Le Voyage », Charles Baudelaire

Graphisme : Johan Pollefoort

Storyboard : Johan Pollefoort

Layout : Johan Pollefoort

Décor : Johan Pollefoort

Animation : Johan Pollefoort

Caméra : Johan Pollefoort

Musique : Falter Bramnk

Son : Johan Pollefoort

Compositing : Johan Pollefoort

Production : ADIFAC (Atelier de Production de la Cambre)

Article associé : la critique du Best of Anima 5

P comme The Pearce Sisters

Fiche technique

Synopsis : Lol et Edna Pearce vivent sur la côte, dans un endroit austère et isolé. Lorsque la mer leur offre un bel homme à moitié noyé, elles s’efforcent de le ranimer.

Genre : Animation

Durée : 09’10 »

Année : 2007

Pays : Royaume-Uni

Réalisation : Luis Cook

Scénario : Luis Cook, adaptation d’une nouvelle de Mick Jackson

Animation : Dan Lane, Les Orton, Theresa Whatley, Nigel Davies, Mårten Jonmark, Emma Greenwood, Eve Coy, Adam Cootes

Son : Will Norie

Montage : Dan Williamson

Interprétation : Dan Williamson, Len Gray

Production : Aardman Animations

Article associé : la critique du Best of Anima 5

Best of Anima 5

À l’occasion du festival Anima 2009, Folioscope et Cinéart ont sorti conjointement le cinquième volume du « Best of Anima » en DVD. La compilation comprend des films primés, des coups de cœur, et des bonus. Revue globale du disque suivi d’un regard plus détaillé sur trois titres.

Le « Best of » de cette année, orné d’une couverture orange surmontée d’un oeil mécanique (illustration : Teresa Sdralevich), comprend douze films. Nombre d’entre eux semblent être reliés par une dimension littéraire et poétique. Au moins deux ont un rapport direct avec l’art du vers. Le premier, « BlauwBlauw » de Sandy Claes et Daan Wampers (Belgique), illustré par un poème, met en scène une femme soupçonnée d’infidélité. Le deuxième, « The Tale of How » du Blackheart Gang (Afrique du Sud), dépeint, sous la forme d’une comptine, une ménagerie aquatique au sein de l’océan Indien, avec un côté fantastique proche des « Histoires comme ça » de Kipling.

Un autre thème repéré dans la collection est celui de la solitude. Deux films de science-fiction illustrent cette tendance : « Le jour de gloire » (France) mêle militarisme, matière première, argile et acier, alors que « Arka » (Pologne) combine délire, maladie, vieillesse et tragédie shakespearienne. Dans la même veine, mais dans des genres tout à fait différents, se situent « Le Pont » (Belgique, France), l’histoire d’un père et de son fils isolés sur une « île » surélevée et utopique, et « L’Évasion » (France, Belgique), une réflexion sur la condition d’un détenu, comparable au Lieutenant Fontaine bressonnien.

Sur un DVD, comme dans un festival, certains films marquent plus que d’autres. Nous en avons extrait trois de ce « Best of », pour leur originalité et la qualité de leur animation.

« The Pearce Sisters » de Luis Cook

Récompensé du Prix du Jury d’Anima, ce court métrage britannique a remporté pas moins de 16 prix mondiaux. Adapté d’un conte de Mick Jackson, le film de Luis Cook raconte l’histoire de deux soeurs extrêmement disgracieuses vivant seules sur une plage désertique, dans un environnement sordide et repoussant. Leur vie quotidienne consiste à pêcher, à nettoyer et à traiter des poissons. Ces activités s’exercent derrière un nuage de fumée de cigarettes et sur un fond de pluie incessante, jusqu’au jour où un événement dramatique, l’arrivée d’un naufragé, bouscule la banalité de leur existence.

« The Pearce Sisters » est un film marqué par un humour lugubre, un réalisme brut, et une esthétique grotesque. Même si ils sont physiquement monstrueux, les personnages sont fort réalistes. La grande sœur est désenchantée et désexualisée, tandis que la petite est odieusement rusée et dévouée à sa sœur. Lorsqu’une présence masculine vient perturber leur routine en s’échouant sur la plage, la portée sexuelle de cette rencontre fortuite est mise à mal par un retournement grossier de la situation. Champ : les deux filles admirent leur hôte dévêtu. Contrechamp : celui-ci, en se réveillant, régurgite à leur vue. Le ménage n’aura pas lieu à trois : l’homme termine vidé et fumé tel un poisson.

Sur le plan stylistique, le réalisme émane d’un travail d’image soigneux et sobre, avec des jeux de perspectives, des plongées et des contreplongées, ainsi qu’un graphisme composé de dessins traditionnels et sur ordinateur. À ceci s’ajoutent un récit quasiment sans dialogue, très peu de musique, et une synesthésie riche. Quand les sœurs Pearce vident le trésor de leur pêche, les bruits, les couleurs et les formes évoquent sans équivoque les textures et les odeurs des poissons.

Comme le mentionne Luis Cook sur le site du film, « The Pearce Sisters » se démarque des autres productions des studios Aardman favorisant l’animation en volume et en plasticine et un ton plus léger et gai, à la « Wallace and Gromit ».

« Le Voyageur (s’exclame alors) » de Johan Pollefoort

Lauréat du prix SACD de la compétition nationale à Anima, et d’une mention au festival d’Annecy, cette animation belge sortie de La Cambre propose une interprétation libre du « Voyage », un poème de Charles Baudelaire. Le réalisateur expose, en quelques six minutes non dialoguées, les péripéties d’une jeune Africaine ayant quitté son village, son pays et son continent pour se confronter à de nouveaux horizons. Elle passe de main à main, tel un jouet, avant de se rendre compte que sa situation ne la mène nulle part.

Le récit se déploie à la manière d’un kaléidoscope audiovisuel, mis en mouvement à la fois par une musique africaine rythmée et par des dessins dynamiques. L’arrivée de la jeune femme en Europe s’ensuit d’une série d’images fantasmagoriques : un taxi devient un tapis volant, la ville et ses habitants se transforment en une colonie de fourmis, et la protagoniste elle-même se métamorphose en papillon, symbolisant, entre autres, sa fragilité. Les couleurs, vives, voire fluorescentes, marient bien l’art tribal africain avec l’expressionnisme européen à la Munch, conformément à la thématique de la rencontre entre les cultures et les continents.

Derrière ce thème transparent de l’interculturel, se cache un autre, plus sombre et plus original, celui de la femme déplacée, à la merci des circonstances et des hommes. La façon dont cette problématique est traitée n’est pas sans rappeler les œuvres d’auteurs diasporiques et post-colonialistes, notamment Jean Rhys. Dans « Le Voyageur », la situation cynique vécue par le personnage féminin atteint son apogée lorsque celui-ci entame une danse macabre et frénétique, le tout s’articulant dans un registre très poétique, sur fond de musique de jazz.

« Dji vou veu volti » de Benoît Feroumont

« Dji vou veu volti » de Benoît Feroumont est un des films les plus légers de ce « Best of ». Cette animation dont titre signifie en wallon « Je vous aime » réinterprète le célèbre « Roméo et Juliette » de Shakespeare, sous un ton mêlant le dramatique et l’humoristique. Roméo, luth à la main et sérénade aux lèvres, vient courtiser la belle Juliette sous son balcon. Las des déclamation répétitive du chant (qui n’est rien d’autre que le titre répété ad nauseam), les sous-titres assument leur autonomie (!) et se mettent à se rebeller contre le protagoniste. L’animation est totale, puisque le sous-titrage devient un personnage à part entière, agissant tantôt comme obstacle, tantôt comme complice dans l’intrigue amoureuse. L’effet humoristique provient précisément de la confrontation entre le récit et un élément purement technique (l’affichage des sous-titres). Un procédé original mais pourtant très familier, qui rappelle les courts métrages des années 40 des Warner Brothers, dans lesquels le dessin animé et les images live-action se rencontraient pour créer un choc entre deux médiums jusque là complètement dissociés.

Conformément au côté mélodramatique du film, au sens originel du terme « drame musical », la musique joue un rôle primordial dans la mesure où elle remplace presque entièrement le dialogue. La partition, signée Johan de Smet, principalement opératique, à la manière du bel canto italien et du drame wagnérien, s’achève sur des accents comiques, à l’instar des chansons de variété.

Adi Chesson

Best of Anima 5 : DVD de 12 courts métrages accompagnés de bonus (la bande-annonce du festival et les autoportraits des réalisateurs). Coproduction : Folioscope et Cinéart

Consulter les fiches techniques de « The Pearce Sisters », « Le Voyageur (s’exclame alors) », et «Dji vou veu volti »

Les Lutins du court métrage

les-lutins

Les Lutins du court métrage (France) œuvrent depuis 1998 pour la promotion et la diffusion du court métrage auprès du grand public. Les Lutins ont ainsi participé à l’émergence de réalisateurs et comédiens tels que François Ozon, Jérémie Rénier, Ludivine Sagnier, Sylvie Testud, Elodie Bouchez, Gabriel Le Bomin, Jean-Marc Moutout, et bien d’autres. Chaque année, la Nuit des Lutins récompense, en juin, les professionnels du court métrage. Pour cette 12è édition, 28 courts métrages ont été sélectionnés. Pour la première fois, Les Lutins invitent le public à participer au vote, aux côtés des professionnels.

Si vous souhaitez adhérer et participer au vote professionnel ou public vous pouvez vous inscrire directement en ligne. (Attention : nombre de votants limité à 2000) :

- Adhésion Lutins 2009 – Vote public

- Adhésion Lutins 2009 – Vote professionnel

Les adhérents recevront le coffret DVD et les documents leur permettant de participer au vote, dans le courant du mois de mai.

Liste des films nominés aux Lutins 2009 :

664 Km de Arnaud Bigeard – Les Films Velvet – fiction

Andante mezzo forte de Annarita Zambrano – Sensito Films – fiction

Le Baiser de Yann Coridian – Tabo Tabo Films – fiction

Berni’s Doll de Yann Jouette – Dummy Productions – animation

Boulevard l’océan de Céline Novel – Petrouchka Films / Need Productions – fiction

Ca ne rime à rien de Claude Duty – Autour de Minuit – animation

C’est dimanche ! de Samir Guesmi Kaléo Films – fiction

Le Cœur d’Amos Klein de Uri Kranot et Michal Kranot – Les Films de L’Arlequin – animation

La Copie de Coralie de Nicolas Engel – Crescendo Films – fiction

Corpus/corpus de Christophe Loizillon – les Films du Rat – fiction

La Difunta Correa de Nicolas Cambois – Ailleurs Productions – fiction

Erémia, Erèmia de Olivier Broudeur Anthony Quéré – Aber Images – fiction

Et alors de Christophe Le Masne – Tobina Film Cyanea – fiction

Le Feu, le sang, les étoiles de Caroline Deruas – Les Films au Long Cours – fiction

Le Jour de gloire de Bruno Collet – Vivement Lundi ! – animation

Lisa de Lorenzo Recio – Local Films – fiction

Les Miettes de Pierre Pinaud – Sli Production – fiction

Mirages de Olivier Dury – Les Productions de l’Oeil Sauvage – documentaire

Monstre 2 de Antoine Barraud – Château Rouge Production – fiction

La Neige au village de Martin Rit – Blue Monday Productions – fiction

Nous de Olivier Hems Mille et Une Films / Paris-Brest Productions – fiction

Les Paradis perdus de Hélier Cisterne – Les Films du Bélier – fiction

La Peau dure de Jean-Bernard Marlin et Benoît Rambourg- Why Not Productions – fiction

Skhizein de Jérémy Clapin – Dark Prince – animation

Taxi Wala de Lola Frederich – Château-Rouge Production – fiction

Tony Zoreil de Valentin Potier – Sacre Productions / La Maison – fiction

Une leçon particulière de Raphaël Chevènement – Les Films du Requin – fiction

La Vie lointaine de Sébastien Betbeder – Les Films du Worso – fiction

Pour plus d’informations : www.leslutins.com/du_court_metrage

Short Escape, le 20 avril

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Lundi 20/4, à Cook & Book, Short Escape projettera, à 20.30, neuf courts belges, français, espagnols, argentins, anglais, et allemands.

Bxl-Paris-Bxl, Stefan Liberski – 25′ – Belgique

Equipajes, Toni Bestard – 10′ – Espagne

Jurons et charculterie, Sylvestre Chateney – 3’30 – France

Une leçon particulière, Raphaël Cheveènement – 10′ – France

The Call, T. Delauney –

Mosca, Juan Arata – 1′ – Argentine

Tea, Barney Cokeliss – 2′ – Royaume-Uni

Ketchup, Manu Coeman & Ivan Goldschmidt – 11′ – Belgique

Damenwhal, Sarah Grohnert – 3′ – Allemagne

Cook & Book : 251, av. Paul Hymans – 1200 Bruxelles

Pour plus d’informations : www.shortescape.com

Anima 2009

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Du 20 au 28 février 2009, se tenait la 28ème édition d’Anima, le Festival international du film d’animation de Bruxelles. Pendant 9 jours, de nombreux rendez-vous ont émaillé la programmation de cet événement fort dynamique dans la vie culturelle belge : près de deux cents films en compétition internationale (courts et longs métrages, publicités, vidéos musicales) ou en panorama, une compétition et un focus belges, des expositions (“De la case à l’écran”, “Panique au Village’ et “Kinky & Kosy”), des avant-premières (notamment « Ponyo sur la falaise » de Hayao Miyazaki,), une Nuit animée, un concours “Cosplay”, un hommage à Ralph Bakshi (réalisateur de « Fritz The Cat »), une rencontre avec l’animateur Bill Plympton,  un atelier d’une journée animé par Kyle Balda (ex Pixar), des ateliers pour enfants, des journées professionnelles Futuranima, des séances consacrées au Computer animation Festival SIGGRAPH 2008, au Cartoon d’Or, aux studios de Zagreb, à Channel 4, et à la National Film and Television School (NFTS).

Retrouvez dans ce Focus :

A fantastic journey in Plympton’s world

À 63 ans, l’animateur et dessinateur Bill Plympton n’a rien perdu de sa superbe et de son humour subversif. Sélectionné pour les Oscars et récompensé par le Prix du Jury à Cannes en 1991 pour le court métrage « Push Comes to Shoves », sa réputation n’est plus à faire, et le nombre de ses productions ne semble pas se tarir, qu’il s’agisse de longs ou de courts métrages qu’il enchaîne à un rythme effréné. Sexe, violence, dessins au bistouri, humour caustique, cet Américain, adepte du politiquement incorrect, s’est toujours tenu à l’écart des grosses sociétés de production et continue son bonhomme de chemin sur la dure pente de l’indépendance à tout prix. En février, Mister Bill nous a fait l’honneur de sa visite lors du Festival Anima, à Bruxelles, accompagné de surprises en tout genre et… dans son genre. Rencontre exceptionnelle organisée par l’ASA, l’association des scénaristes de l’audiovisuel.

© Renaud Fang

Le producteur, réalisateur, et scénariste belge Laurent Denis a accueilli l’animateur américain Bill Plympton au cours de la 28ème édition d’Anima pour une conférence intitulée Écrire l’image par image. Ce n’est pas la première fois que Plympton promène son grand corps et son visage poupin dans ce festival. La Belgique, c’est un peu comme là d’où il vient, l’Oregon, un pays pluvieux qui encourage les vocations précoces : « quand on est enfant et qu’il est impossible de jouer dehors, il faut s’occuper. Le dessin est une bonne occupation d’intérieur ». Il aura donc fallu attendre la vision particulière de cet artiste hors normes pour nous révéler la raison du nombre impressionnant de dessinateurs qui sévissent dans le plat pays : le temps, tout simplement !

C’est la quatrième fois que Plympton rend visite au festival. Il le dit lui même, le Festival International du Film d’Animation de Bruxelles est son festival préféré. Et Anima le lui rend bien puisque cette année, deux de ses films ont été sélectionnés : « Idiots and Angels » dans la catégorie long métrage, et « Hot dog » pour les courts en compétition.

Pourtant, Plympton est reparti sans  trophée sous le bras, ne recevant qu’une mention spéciale pour son chien sapeur-pompier et gaffeur de vocation. Espérons seulement que l’animateur n’en tiendra pas rigueur à Bruxelles pour les prochaines éditions car, s’il a un talent fou, Plympton n’est pas ce que l’on pourrait qualifier de modeste. Pour preuve, les titres choisis pour ses séries, comic-strips hebdomadaires, et autres DVD : Plympton, Plymptoons, Mondo Plympton, Plympmania… Un choix  marketing pour imposer une image forte ? Certes, et avouons-le, ça marche.

Ajoutons que pour rester indépendant et ne pas être englouti par la masse, le réalisateur doit user de stratégies pour être reconnu. De toute façon, le talent ne fait pas bon ménage avec la modestie, et c’est tant mieux. Généreux, ouvert, le réalisateur sait se rendre disponible pour son public, n’hésitant pas à brancher une webcamera au-dessus de sa table à dessin pour permettre aux « plympmaniaques » de suivre son travail en direct de New York City.

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Les spectateurs privilégiés bruxellois qui ont pu assister à la conférence, eux, ont eu le plaisir de le voir exécuter des dessins en deux temps trois mouvements sur le rétroprojecteur du Studio 5 du Flagey… Une dextérité impressionnante : ses longues années de caricaturiste pour divers magazines et journaux lui ont appris à travailler vite et bien. Généreux disions-nous, Bill Plympton n’est pas seulement venu armé de son crayon et de ses feuilles blanches, mais aussi de jolies surprises filmées et non filmées. Devant nos yeux, l’animateur a feuilleté le storyboard de son dernier long métrage, (« Idiots and Angels ») une série de dessins à la fois précis et agités. L’histoire ? Un  véritable « trou du cul » (dixit Plympton) s’aperçoit un matin que deux étranges ailes poussent sur ses omoplates. Contrairement à ce que l’on voit habituellement, ce héros « angélisé », se voit contraint à faire le bien, malgré sa volonté de nuire.

Du côté des films, nous avons eu le plaisir de voir un extrait de ce dernier long,  mais aussi les 5’50 de « Hot dog » ainsi que  le court métrage « Santa : The Fascist Years » dans lequel un Père Noël fasciste impose sa loi et se retrouve en guerre contre la dinde de Thanksgiving, les lapins de Pâques et autres épouvantails d’Halloween, ne trouvant pour seul allié qu’Adolph Hitler himself à qui il serre la main… Voilà une petite chose en noir et blanc qui ne sera pas du goût de tous.

Avec humour et dérision, Bill Plympton s’est prêté au jeu de l’entretien, pimentant le tout de petites anecdotes, notamment sur Disney : « À quatorze ans, j’ai envoyé des dessins chez Disney pour qu’il m’engagent. Ils ne m’ont jamais répondu. Je n’ai pas été déçu parce qu’ils ne m’ont pas renvoyé mes dessins. Je me suis dit, s’ils les gardent, c’est qu’ils les aiment ! » Ironie de l’histoire, quelque trente années plus tard, les studios Disney demandent à Plympton de travailler sur Aladin. Il refuse. Rancunier Bill Plympton ? Non, libre tout simplement !

Sarah Pialeprat

Article associé : la critique de « Hot dog »

H comme Hot dog

Fiche technique

Synopsis : Notre héros courageux rejoint les pompiers pour sauver le monde des incendies et gagner l’affection qu’il mérite tant.

Genre : Animation

Durée : 5’20”

Année : 2008

Pays : États-Unis

Réalisation : Bill Plympton

Scénario : Bill Plympton

Graphisme : Bill Plympton

Storyboard : Bill Plympton

Layout : Bill Plympton

Décor : Bill Plympton

Animation : Bill Plympton

Caméra : Kerri Allegretta

Musique : Corey A. Jackson

Son : Greg Sextro

Montage : Biljana Labovic

Compositing : Kerri Allegretta

Production : Plympton Studio

Distributeur : SND FILMS

Articles associés : la critique du film, et le compte rendu de la rencontre avec Bill Plympton, à Anima

Hot dog de Bill Plympton

De l’huile sur du feu

Quand un brave cabot, mascotte de caserne, est prêt à tout pour figurer en bonne place sur la photo des héros modernes que sont les pompiers, les choses ne se passent pas toujours comme il l’avait rêvé. Après « Guide dog » (un bull-dog qui postule pour devenir chien d’aveugle), et « Guard dog » (qui explique enfin pourquoi les chiens aboient), voici « Hot dog »… Chaud, très chaud !

Disney a sa souris, Plympton a son chien. Les habitués du célèbre dessinateur américain, dès la première image, reconnaîtront avec plaisir son irrésistible personnage canin aux yeux ronds un peu abrutis, à la langue pendante, et à son corps lourdaud péniblement soutenu par ses minuscules pattes. Ceux qui le découvrent pour la toute première fois ne s’étonneront pas des catastrophes qui ne manqueront pas de se produire tout au long des cinq minutes de ce court métrage. En effet, le « dog » de Plympton ne brille pas par son intelligence et, dès la première scène, preuve nous est donnée que ce néanmoins sympathique clébard est un gaffeur de la première heure. C’est avec une petite appréhension, mais le sourire aux lèvres, que nous entendons donc retentir l’alarme de la caserne pour une alerte au feu. C’est parti ! Les gags s’enchaînent à une allure effrénée et sans aucun temps morts. Le voyage en camion se transforme en Odyssée dans laquelle notre canidé se retrouve seul au volant, le sauvetage de la belle hystérique perchée sur le toit redonne une bouffée d’espoir jusqu’à ce que l’arbre, situé près de la maison, se mette lui aussi à brûler et patatras… Avec la maison, ce sont les rêves de notre malheureuse petite bête qui se retrouvent réduits en cendres.

hot-dog

Dans la plus pure tradition plymptoonienne, « Hot dog » est un délire visuel où la spontanéité et la vitalité sautent aux yeux et envoûtent totalement. L’irrégularité des traits et les coups de crayons dynamiques sont la patte caractéristique de cet animateur qui semble dessiner plus vite qu’il ne pense. Joyeux, débordant d’énergie, « Hot dog » est une brillante illustration du proverbe : «  le mieux est l’ennemi du bien ». Une leçon que Bill Plympton semble, à tous les niveaux, avoir bien assimilée. On attend le quatrième volet « Horn dog » avec impatience…

Sarah Pialeprat

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Article associé : le compte rendu de la rencontre avec Bill Plympton, à Anima

P comme Paradise

Fiche technique

Synopsis : Les rêves de John Small semblent être entièrement prédestinés. Dépourvu de libre arbitre, il rêve d’un avenir meilleur, sans toutefois s’épanouir dans sa banlieue dystopique.

Genre : Animation

Durée : 7’59”

Année : 2007

Pays :  Canada

Réalisation : Jesse Rosensweet

Scénario : Jesse Rosensweet

Technique : Marionnettes

Animation : Robert Crossman, Rachelle Lambden

Musique : David Buchbinder

Montage : Robert Crossman, Robert J. Coleman

Voix : Dave Foley

Production : Copper Heart Entertainment Production

Distributeur : ONF – Office National du Canada

Article associé : la critique du film

Paradise de Jesse Rosensweet

Paradis artificiel

Après avoir remporté le Prix du Jury à Cannes en 2002 pour « Stone of Folly », le Canadien Jesse Rosensweet nous revient enfin avec un nouveau court métrage, « Paradise », tourné avec des automates. Quand le chemin est tracé d’avance, pas sûr qu’il conduise au Paradis.

Sur une musique très « La Croisière s’amuse », le soleil s’est levé sur le petit monde parfait de « Paradise ». John, et son impeccable petite femme d’intérieur, commencent une journée qui ressemblera à celle de demain, d’après demain et du jour d’après. Ont-ils le choix ? Notre petit couple « idéal » est en effet posé sur des supports métalliques qui suivent précisément des rails circonscrits dans (et hors de) la maison. John et son épouse sont des automates, et quoi de mieux, pour illustrer la vacuité de l’existence humaine que des pantins articulés condamnés à la répétition.

Dormir, s’habiller, manger, travailler et recommencer, telle est la vie bien réglée de nos petits jouets mécaniques si dociles. Mais dans ce décorum « so cute » et très années 50, voilà que tout commence à dérailler quand la charmante épouse éprouve et ose enfin exprimer ses propres désirs…. désir d’une autre vie, désir d’ailleurs. Rien ne va plus. La belle se fait la malle, et ne reste alors qu’une petite tige vide qui continue machinalement des allers et retours de l’assiette à la cuisinière, de la cuisinière à la porte d’entrée. Terrible image de l’absence que ce triste clic-clic qui ne soutient plus personne et que John contemple, « désespéré », terrible baiser traditionnel donné à présent, dans le vide. Les gestes, si bien appris et réitérés, ne s’effacent pas si facilement.

Jesse Rosensweet construit avec humour et ingéniosité une métaphore originale d’un sujet pourtant mille fois abordé dans les courts comme dans les longs (cf.le très beau « Les Noces rebelles » de Sam Mendès). En moins de 8 minutes, il parvient à toucher des thèmes aussi vaste que le conformisme, l’ennui, la frustration familiale et professionnelle, l’incommunicabilité et la désagrégation du couple. Par des procédés simples, l’accélération montrant l’implacable répétition, ou les ellipses qui créent une sensation de vide, le réalisateur canadien atteint une réelle intensité dramatique. D’un humour grinçant, un peu sombre peut-être, le propos n’offre aucune échappatoire et nous laisse, même si c’est avec un sourire, sur un triste constat d’impossibilité à sortir d’un quotidien qui emprisonne.

Sarah Pialeprat

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Speed Pitching dans le cadre du Festival du Court Métrage de Bruxelles‏

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Le Festival du Court Métrage de Bruxelles, associé à l’UPFF et la SACD, recherche des candidat(e)s motivé(e)s à l’idée de présenter un projet de scénario de court métrage à des producteurs/scénaristes dans le cadre d’une séance de Speed Pitching organisée le lundi 4 mai.

Le principe : 8 participants sélectionnés (réalisateurs et/ou scénaristes) rencontreront 8 producteurs et/ou scénaristes professionnels. Les participants auront à chaque fois 7 minutes pour « Pitcher » leur projet. L’enjeu est de rencontrer un éventuel producteur, d’apprendre à « Pitcher » et pour le plus convaincant, de remporter 200 euro offerts par la SACD.

Conditions de participation : les participants devront envoyer un traitement de 2 pages d’un scénario déjà écrit, une lettre de motivation, un CV, et une note d’intention de réalisation avant le 17 avril 2009 à julien@courtmetrage.be. Ils devront également avoir réalisé un court métrage dans le passé et être disponible toute la journée le lundi 4 mai. Une leçon de Pitching est également prévue le lundi 04/05 à 10h. Cette leçon est accessible à tous, uniquement sur réservation (julien@courtmetrage.be)

Pour plus d’informations : www.courtmetrage.be

Annecy : la sélection officielle

annecy

Le prochain festival d’Annecy, la référence mondiale de la création animée, aura lieu du 8 au 13 juin. La sélection officielle de cette année est désormais connue, à l’exception des longs métrages dont les résultats ne seront publiés qu’à la fin du mois d’avril. Au total, 80 courts, 60 films de fin d’études, et environ 80 films de commandes / TV, soit près de 220 films, seront projetés lors de cette 33ème édition implantée dans « La Venise des Alpes ».

Séries TV (41)

Spéciaux TV (6)

Films éducatifs, scientifiques ou d’entreprise (5)

Films publicitaires (22)

Vidéoclips (8)

Films de fin d’études (60)

Courts métrages hors compétition (40)

Pour plus d’informations : www.annecy.org

Deux mois…

Apparu quelques jours avant le Festival de Clermont-Ferrand, Format Court a amplement développé, en l’espace de deux mois, son contenu rédactionnel (chroniques, critiques, interviews, focus, fiches techniques) et iconographique (extraits, photographies, et illustrations). En phase avec la vitalité et la diversité du court métrage, nous avons souhaité mettre en lumière des films, des individus, des festivals, des genres, et des pays différents. Le site a ainsi accueilli de la fiction, de l’animation, du documentaire, de l’expérimental, du film mobile ou d’école, et des articles liés à la France, la Belgique, l’Australie, le Royaume-Uni, les États-Unis, le Japon, Israël, les Philippines, l’Allemagne, la Suisse, la Pologne, la Chine, les Pays-Bas, le Sénégal, la Hongrie, et le Mozambique.

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Que s’est-il passé pendant ces deux derniers mois ? Format Court a fait la fête, organisé une projection de courts, bénéficié d’un passage sur France Culture, rejoint le Jury Presse International du Festival de Clermont-Ferrand, créé des pages consacrées aux Actualités et aux DVD, repensé sa périodicité, et s’est fait de nouveaux copains.

Depuis son lancement en janvier, le site  a attiré 3000 visites, dont 600 le jour de sa mise en ligne. Il est consulté en Europe, en Amérique du Nord, en Afrique du Nord, en Australie, en Inde, et au Japon. Vraisemblablement, le court métrage vous séduit, ce qui nous ravit. Nous profitons de cet éditorial pour vous remercier de vos messages de soutien et de vos encouragements. Continuez à nous suivre et à vous intéresser au format court.

Katia Bayer
Rédactrice en chef

La petite collection de Bref : une sélection de courts métrages néerlandais

En 2007, Bref, le magazine français du court métrage, inaugurait “La petite collection”. En partenariat avec l’éditeur Chalet Pointu, il lançait un DVD de films belges francophones en lien avec la rétrospective belge programmée par le festival de Clermont-Ferrand. Deux ans plus tard, après 10 volumes majoritairement associés au contenu de la revue, Bref a établi une sélection de 15 courts métrages néerlandais, faisant écho à la rétrospective consacrée cette année par le festival aux Pays-Bas.

Sur la pochette de ce DVD en hommage à la Hollande, point de tulipes, de fromages, et de sabots. Un cliché, un seul : les vélos. Autour d’eux, le graphisme a conservé au sol, les passants, les voitures, et un grillage, et en hauteur, le ciel, les lignes de trams, et les nuages. Quinze titres variés composent ce volume rouge-blanc-bleu : des courts métrages d’animation (« Les caractères », « Jazzimation », …), de fiction (« La route », « Le visage caché », …), des films expérimentaux (« La Hollande à bicyclette »), des images primées (« Miroir de Hollande », « La Muraille de Chine », …), et des identités connues (Paul Verhoeven, Bert Haanstra, Uri Kranot et Michal Pfeffer-Kranot, …). Parmi ces titres, Format Court en a isolé cinq.

Spiegel van Holland (Miroir de Hollande) de Bert Haanstra

En navigant le long du canal de la Vecht (reliant Utrecht à Amsterdam), le photographe et réalisateur Bert Haanstra tourna  en 1950 un documentaire sur son pays en filmant, en caméra inversée, les reflets dans l’eau. « Spiegel van Holland » (Miroir de Hollande), récompensé du Grand Prix au festival de Cannes en 1951, fut le miroir aquatique de son voyage. La caméra de Haanstra, tenue à l’envers, enregistra les reflets des rencontres : nénuphars, ciel, maisons, ponts, moulins à vent, clochers, écluses, chevaux, hommes, …. Au-delà du poétique, des confusions troublantes surgissent : par moments, le réel se fond avec l’imaginaire, la mer et le ciel ne font plus qu’un, et les ondulations de l’eau affectent l’image (maisons folles, formes étranges, individus déstructurés). Près de 60 ans après sa réalisation, « Spigel van Holland » offre un regard en noir et blanc plus qu’original sur la Hollande, ses canaux, et ses habitants.

Feest ! (La fête !) de Paul Verhoeven

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Bien avant les Etats-Unis, « Total Recall », « Robocop », « Basic Instinct », « Showgirls », et « Starship troopers », Paul Verhoeven tourna aux Pays-Bas des courts et des longs métrages. En 1963, il y eut  « Feest ! » (La fête !), l’histoire de Peter, un adolescent blond et timide, séduit par Anja, une fille de son lycée. Au bal annuel, Anja le délaisse, le trouvant “embêtant”. Dans la tour de l’établissement, ils sont désignés pour jouer à colin-maillard. Elle s’immobilise. Les yeux bandés, il la retrouve, l’embrasse, et se fait gifler devant tout le monde. La fête est terminée. Dans l’intervalle, Verhoeven a filmé, de façon très libre et mobile, la jeunesse hollandaise, les premiers émois, l’isolement au sein du groupe, ainsi que les coins et recoins d’un établissement scolaire.

The Quiet One (Le garçon silencieux) de Danyael Sugawara

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« The Quiet One » (Le garçon silencieux), le film de fin d’études de Danyael Sugawara, ancien élève de l’Académie de cinéma et de télévision d’Amsterdam (NFTA), traite du phénomène Hikikomori. Au Japon, près d’un million de jeunes gens se marginalisent totalement de la société en ne sortant plus de chez eux et en ayant des contacts extrêmement limités avec le monde extérieur. De même, le héros de « The Quiet One », Kiyoshi, un garçon de 18 ans, a élu domicile dans la cuisine de ses parents, et y vit reclus depuis deux ans. La seule personne avec laquelle il continue à communiquer est sa petite soeur, Nozomi. Ses parents, embarrassés par la situation, justifient son absence en prétendant qu’il étudie à l’étranger. Sur Internet, il est en contact avec d’autres adolescents qui ont, comme lui, rejeté la notion de groupe (la société et la famille). « The Quiet One » est un film sobre sur l’auto-exclusion, l’adolescence, la famille, l’isolement, et les barquettes d’oeufs vides. Pratiques pour étouffer les bruits extérieurs et recouvrir les corps, celles-ci sont également liées au générique et au titre original du film de Danyael Sugawara (« Tamago » : oeuf, en japonais).

God on our Side (Dieu est avec nous)  d’Uri Kranot et de Michal Pfeffer Kranot

Avant  « The heart of Amos Klein », le tandem d’animateurs israéliens Michal Pfeffer Kranot et Uri Kranot réalisa « God on Our Side » (Dieu est avec nous), en tant qu’artistes en résidence invités à l’Institut néerlandais du film d’animation (NIAF). Le film, récompensé par le Prix spécial du jury à Annecy en 2007, traite du conflit israélo-palestinien en s’inspirant d’événements vécus pendant la Seconde Intifada et de la toile de Picasso, Guernica (1937). « God on Our Side » est une interprétation libre du tableau de l’Espagnol. Certains éléments se retrouvent dans les deux (un cheval à l’agonie, une femme tenant dans ses bras un enfant mort-né, un homme piétiné, une vache affolée, … ), mais le film conserve toutefois son identité et son lien avec l’actualité (représentations de tanks, d’avions de chasse, de bombes, d’attentat-suicide, de bulldozer, …). Relevée par la musique grave d’Uri Kranot, l’émotion du film tient à son sujet, à la couleur terne de ses images, aux incrustations violentes de rouges, à son absence de mots, et aux traits typiquement cubistes de ses personnages.

Pijn (Souffrance) d’Ivàn López Núñez

Après avoir étudié à Barcelone, Iván López Núñez a poursuivi son cursus à l’Académie  de cinéma et de télévision d’Amsterdam (NFTA). « Pijn » (Souffrance), son film de fin d’études, suit de près un individu qui provoque des anonymes dans la rue afin de se faire délibérément tabasser, sans apposer la moindre résistance. Une fois rentré chez lui, l’homme désinfecte ses blessures avant de se prendre en photo, le visage tuméfié. Sa démarche est double. Personnelle : il tente d’évacuer une blessure psychologique (le départ de sa femme et de son enfant) au profit d’une souffrance physique. Artistique : en tant que photographe, il s’entoure de clichés, miroirs et traces de ses rencontres sanglantes. Survient le hasard, sous les traits d’une jeune touriste asiatique perdue dans les rues d’Amsterdam. Idée originale, dialogues rares, musique inexistante, arrêts sur image, caméra mobile, comédiens pudiques,… : Iván López Núñez a privilégié des partis pris audacieux pour son fin d’études. « Pijn » est un film à la fois sombre, violent, et épuré, relevant d’une beauté étrange et d’une grande maîtrise.

Katia Bayer

La petite collection : une sélection de courts métrages néerlandais (#11).  Bonus : les biofilmos des réalisateurs. Distribution : Chalet Films

L’Arenberg et les Midis du Court

Mardi 31 Mars, à 12h00, un programme de courts articulé autour du thème « Histoires d’amour » sera présenté aucinéma Arenberg (Bruxelles).

Premier amour : de et avec Léonore Frenois et Cédric Delaunoy – 15’ – n/b – 2005 – Video.

Cette adaptation du court roman éponyme de Samuel Beckett a pour lieu principal le parc de la cité administrative à Bruxelles.

La Svedese de Nicolas Liguori – 10’ – 2008 – animation – 35mm

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Un couple se retrouve et s’aime sous la lumière écrasante de l’été. Elle découvre Naples, ses processions religieuses, ses musées silencieux. Il filme les pentes arides du volcan. La Svedese rend un hommage émouvant à Ingrid Bergman et Roberto Rossellini, à la rencontre aussi improbable qu’explosive d’une célèbre actrice d’Hollywood et d’un réalisateur « missionnaire ».

Les Corps silencieux de Luz Diaz – fiction – 2007 – 17’ – 35mm

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Les errances d’une jeune fille solitaire fascinée par une femme mystérieuse… Film de fin d’études sublime d’une cinéaste prometteuse.

En compagnie de la poussière de Jacques Molitor – 20′ – 2008 – fiction – 35mm

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François aime Michel. Michel ne peut donner réponse à ses sentiments. Brisé, François préfère se supprimer plutôt que de vivre sans l’amour de sa vie. Deux ans plus tard, Michel est devenu étudiant en médecine. La compagnie des cadavres trouble son esprit: il hallucine le retour de François. Face à cette présence inquiétante, Michel devra confronter sa culpabilité.

Pour plus d’informations : www.arenberg.be

W comme The Woman who is beating the earth (La Femme qui martèle la Terre)

Fiche technique

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Synopsis : Chiharu travaille à mi-temps dans une boucherie. Les vibrations de la viande que l’on aplatit résonnent dans tout son corps, réveillant en elle un volcan endormi. L’éruption est imminente !

Genre : Fiction

Durée : 21′

Pays : Japon

Année : 2007

Réalisation : Tsuki Inoue

Scénario : Tsuki Inoue

Images : Yousuke Omori

Son : Shingo Ishikawa

Montage : Tsuki Inoue

Musique originale : Grace, Rei Shibakusa

Interprétation : Grace, Rei Shibakusa, Jun Nagami,  Sohkoh Wada, Shinobu Kawai

Production : Tsuki Inoue

Article associé : la critique du film