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Anima, le palmarès 2010

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© François Schuiten / Folioscope

C’est le moyen métrage Divers in the Rain de Olga Parn et Priit Pärn (Estonie) qui a remporté le Grand Prix Anima 2010 du meilleur court métrage dans la catégorie internationale. Cette récompense est offert par la Région de Bruxelles Capitale.

Dans la catégorie films d’étudiants, c’est Orsolya de Bella Szederkenyi (Hongrie) qui a remporté les suffrages du jury. Il s’agit de son film de fin d’études à la Moholy-Nagy University of Art and Design de Budapest.

La compétition belge a vu décerner à Grise Mine de Rémi Vandenitte le Grand Prix de la Communauté française du meilleur court métrage, tandis que Boomkruiper de Dries Bastiaensen recevait le Prix TvPaint du meilleur court métrage étudiant. Le Prix de la SACD est allé au film Au bal des Pendus de Johan Pollefoort et le Prix de la Sabam à Aral de Delphine Renard et Delphine Cousin de l’Atelier Zorobabel.

Autres prix

Compétition internationale

Mentions spéciales : Lost and found de Philip Hunt, Royaume-Uni, Mei Ling par Stéphanie Lansaque et François Leroy, France, Never drive a car when you are dead de Gregor Dashuber, Konrad Wolf, Allemagne, August de Matthias Hoegg, Royaume-Uni, Royal College of Art

Prix du meilleur clip vidéo : Coldplay “Strawberry swing”de Shynola, Royaume-Uni

Mentions spéciales : The dead pirates “Wood” de Simon Landrien, Mcbess, Royaume-Uni, Morgenrot de Jeff Desom, Luxembourg

Prix du meilleur film publicitaire : Audi Q5 “Unboxed de Russell Brooke et Andy Daffy, Royaume-Uni

Mention spéciale : Scrabble ”Sumo” de Clément Dozier et Irina Dakeva, France

Prix coup2pouce/télébruxelles du meilleur court de la nuit animée : Madagascar, carnet de voyage de Bastien Dubois, France

Prix du public du meilleur court métrage : Logorama, par H5, François Alaux, Hervé de Crécy, Ludovic Houplain, France

Prix du public du meilleur court métrage jeune public  : Lost and found de Philip Hunt, Royaume-Uni

Compétition nationale

Prix tvpaint du meilleur court métrage étudiant belge : Boomkruiper de Dries Bastiaensen

Mentions spéciales : Memee de Evelyn Verschoore et Espèce(s) de patate(s) de Yoann Stehr

Prix coup2pouce/Télébruxelles du meilleur court étudiant (diffusion) : Espèce(s) de patate(s) de Yoann Stehr

Prix du public du meilleur court métrage belge : Memee de Evelyn Verschoore

Prix betv : Clicked de Martin Landmeters, Manon Martin, Romain Rihoux

Prix de la RTBF : Sous un coin de ciel bleu de Cécilia Marreiros Marum et Arnaud Demuynck

Prix Cinergie : Grise Mine de Rémi Vandenitte et Ruis de Marike Verbiest

La prochaine édition d’Anima sera la trentième. Elle aura lieu du 4 au 12 mars 2011 à Bruxelles.

L’expérimental à Clermont-Ferrand : le Labo disséqué

Aux côtés des compétitions nationale et internationale du Festival de Clermont-Ferrand, la sélection Labo se présente chaque année comme une plateforme pour des films peu classables, peu lisibles, ou carrément ovnis. Sous l’appellation générique facile de films expérimentaux, le Labo constitue la sélection certainement la plus riche du festival. Aperçu de cinq films représentatifs de la diversité des œuvres candidates.

Gaarud d’Umesh Kulkarni (Inde, 2009)

Après l’enchantement placide et touchant de « Three of Us » et de « Vilay » (en compétition internationale à Clermont-Ferrand respectivement en 2008 et en 2009), le réalisateur indien Umesh Kulkarni présente « Gaarud » (Le charme), un film dans un style tout à fait différent. Probablement le film le plus narratif de la sélection Labo, ce court métrage s’épure de toute fictionnalisation classique pour transmettre son histoire.

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À l’aide d’une caméra perchée sur un dolly, le réalisateur opère un travelling lent à travers une chambre construite en studio et répète ce procédé à plusieurs reprises, filmant ainsi le même espace à divers moments. En effectuant des coupes imperceptibles dans le noir, il évoque l’effet illusoire d’un long plan séquence.

Traversé par l’intransigeance du rythme imposé, ce court métrage se présente d’emblée comme le récit d’un lieu, comme un voyage dans l’espace mais aussi dans le temps, où chaque scène, telle une vignette ténébreuse, a sa durée de représentation. Deux plans statiques encadrent une succession de personnages hybrides reliés par le thème de la valeur de l’être humain, aux sens spirituel et matériel : des marchands de saris, des prostituées, des jeunes consommateurs, des pauvres, des malades, des morts, … D’autres plans de la chambre vide proposent au spectateur un regard sur lui-même tout en lui laissant la possibilité de construire sa propre interprétation.

M – Félix Dufour-Laperrière (Canada, Québec, 2009)

« M » de Félix Dufour-Laperrière est une expérience vidéo, unique par sa grande audace et la subtile complexité dissimulée derrière son apparente opacité.

Ce petit film en noir et blanc met en scène une animation quasi fractale dans laquelle jaillit une panoplie de petits écrans animés, qui font penser de manière subjective à un négatif, à la surface lunaire ou encore à une radiographie. Avec « M », le Québécois semble opérer une explosion du pixel comme unité visuelle à travers sa propre mise en abyme.

À l’instar de cinéastes expérimentaux tels que Godfrey Reggio (« Koyanisqatsi ») et Derek Jarman (« Blue »), Dufour-Laperrière offre une œuvre entièrement formaliste, où un élément – graphique en l’occurrence – prime sur toute narration et toute personnification. Derrière le « montage » organique de ce kaléidoscope achromatique se cache un jeu élaboré de contrastes, aux plans visuel et sonore. En effet, le clair-obscur de l’image tremblotante trouve son écho dans la bande-son qui alterne des accords électro (signés Gabriel Dufour-Laperrière) et des bruitages mécaniques, ponctués par un silence glacial. Le procédé des contrastes s’opère également entre la proximité et la distance, entre la surcharge et le vide. Ce questionnement constant sur les limites de la perception et son infinitude font de ce court métrage un spécimen exemplaire du cinéma non narratif.

Muzorama – Elsa Brehin, Raphaël Calamote, Mauro Carraro, Maxime Cazaux, Emilien Davaux, Laurent Monneron et Axel Tillement (France, 2009)

« Muzorama », film au format très court, représente un travail réalisé par sept élèves de l’école Supinfocom d’Arles. L’animation s’inspire de l’univers graphique surréaliste de l’illustrateur français Jean-Philippe Masson alias Muzo.

Réalisé dans une 3D qui se veut délibérément naïve, ce court métrage français propose une redéfinition du paysage urbain vu sous un angle absurde. Le récit rassemble une série de personnages habitant autour d’une place invraisemblable. Jouant systématiquement sur l’étrange et le familier, le film représente en quelque sorte un univers parallèle où tout est presque normal, à la limite de l’imaginable. Quant aux personnages, ceux-ci reflètent la dimension collective de cet exercice par leur nombre et leur variété : une gigantesque mangeuse d’hommes, un bonhomme au nez inversé, une tête servant de ballon de foot, un cycliste sur un vélo aux roues-escargots…

L’absurde vire vers le grotesque dans ce petit court allègre et rappelle l’univers de Jérôme Bosch vu à travers la palette luisante d’Edward Hopper, tout en représentant l’être dans l’être et dans le multiple.

Origin of the Species – Ben Rivers (Royaume-Uni, 2009)

Film écossais d’une force extraordinaire, « Origin of the Species » de Ben Rivers mène à bien un travail de réflexion existentielle approfondi autour d’une exploration de la nature, dans tous les sens du mot.

Dans un registre documentaire, le film se construit autour des propos d’un certain Monsieur S. qui vit isolé dans la nature. Sa voix lointaine aborde un discours sur la protohistoire, sur la cosmogonie et sur la philosophie du temps. Son discours traite de la vie, de la survie et de la mort en passant par des propos apocalyptiques, des visions panthéistes et des réflexions sur le monde. Un montage parallèle à ses paroles représente la nature minérale, végétale et animale, et dote le film d’un rythme posé.

À travers une image qui jongle habilement entre plans statiques et plans séquences, Ben Rivers met en scène le binôme créateur-création en juxtaposant cosmos et nature, nature et homme, homme et machine, machine et civilisation. « Origin of the Species » abord en même temps l’hypothèse de l’être humain comme spectateur et condition nécessaire pour la compréhension, voire l’existence du monde, en posant un questionnement du type « le monde existe-t-il lors qu’il cesse d’être perçu ? », idée d’autant plus pertinente dans le contexte du septième art lui-même.

Avaca – Gustavo Rosa de Moura (Brésil, 2009)

Je te frapperai sans colère
Et sans haine, comme un boucher,…
– « L’Héautontimorouménos », Charles Baudelaire

Par le biais de la simple technique de l’image inversée, le réalisateur brésilien livre un film gore sur l’abattage d’un bœuf. À l’instar du « Sang des Bêtes », documentaire classique de Franju, « Avaca » oblige le spectateur, sans pitié ni retenue, à confronter son inertie et sa passivité face à ce qu’il décrierait volontiers : la cruauté à l’égard des animaux.

La démonstration froide et rugueuse de la mort, sans la moindre esthétisation ni humanisme, est contrebalancée par le processus du temps reversé, ce qui dote ce court d’une grande qualité artistique et le distingue du film de propagande au premier degré. En même temps, la réalisateur Rosa de Moura fait un clin d’œil audacieux à cette capacité unique du cinéma à remonter dans le temps, à défaire ce qui a déjà été fait, à faire revivre ce qui a déjà cessé d’être.

Adi Chesson

Consulter les fiches techniques de « Gaarud », « Muzorama », « M », « Origin of the Species » et « Avaca »

Tornike Bziava, l’envie d’être honnête

Géorgien de nationalité, ce jeune réalisateur de 29 ans a la culture occidentale pour affinité élective. Venu présenter « Aprilis suskhi » dans la capitale auvergnate, le cinéaste s’en est sorti avec une Mention du Jury International. Un beau début pour ce film politiquement humain. Brève rencontre.

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D’où vient ton intérêt pour le cinéma ?

Plusieurs choses m’ont amené au cinéma. C’est ma mère qui m’a fait connaître les classiques. Je me souviens très bien, étant enfant, vers 13 ans, elle m’avait conseillé de regarder un film qui passait à 1h du matin. Ce film c’était « Andreï Roublev » de Tarkovski. Je l’ai regardé et j’ai adoré. Par la suite, ce fut « Intervista » de Fellini. J’ai trouvé ce film tout simplement génial et je me suis dit que le cinéma était un moyen d’expression parfait qui me permettait de concrétiser des sensations, des sentiments.

C’est donc Fellini qui t’a donné envie de devenir réalisateur ?

Oui, mais pas seulement. Il est évident que le fait d’être issu d’une famille d’acteurs (ma mère, ma sœur) a facilité mes choix même si, au tout début, je dois avouer que je ne voulais pas vraiment devenir réalisateur. C’est pour cela que j’ai étudié les langues et la littérature à l’Université de Tbilisi avant d’entrer à l’école d’art dramatique. Par ailleurs, j’ai fait la connaissance de l’acteur Mel Raido, lors de son passage à Tbilisi. On est devenu amis. Quand il est rentré à Londres, j’avais envie de lui écrire une lettre mais je ne savais pas vraiment comment le faire de façon originale alors j’ai eu l’idée de lui consacrer un film, « Listen to Chopin ». C’était un peu une sorte de lettre cinématographique en hommage à notre amitié. Il a été très ému. Le film a été fort apprécié par la critique et moi j’ai beaucoup aimé l’expérience de passer derrière la caméra. C’est comme cela que ça a commencé.

Tu es venu ici à Clermont pour défendre ton dernier film « Aprilis suskhi ». Peux-tu expliquer la genèse de ce court métrage ?

J’avais 8 ans lorsque j’ai vu les tanks et les soldats russes, pour la première fois. Dans les rues de la ville, ils m’ont apparu comme des sortes de monstres venus d’ailleurs. Je ne comprenais pas très bien ce qui se passait. C’est ma grand-mère qui m’a réveillé vers 4h, le matin du 9 avril 1989 et m’a demandé de me tenir à côté de la fenêtre. J’imagine qu’elle avait peur et qu’elle ne savait pas comment réagir. Tout était calme et inquiétant en même temps. Et puis, j’ai vu un tank passer. C’était complètement surréaliste. Jamais je n’oublierai cette image. Surtout que sur les 22 morts, deux étaient proches de la famille de mon instituteur. C’est dire que l’évènement m’a touché. Du coup, j’ai eu l’idée d’en faire un long-métrage.

Un long-métrage ?

Oui. J’y développais davantage le personnage de Petrovich, le soldat russe du film, lui donnant un passé plus conséquent. Mais après réflexion et discussion avec le producteur, on a décidé de se focaliser sur la rencontre du danseur et du soldat pendant les émeutes.

Penses-tu que la forme courte sert mieux le propos du film?

Certainement. Elle permet d’aller droit au but.

En parlant d’aller droit au but, ton film est assez politique, non ?

Oui et non. Il est vrai qu’en Europe, il est vu comme cela mais je préfère dire que c’est avant tout un film humain.

Oui, mais le fait d’avoir choisi le contexte des émeutes du 9 avril 1989, n’est  pas innocent.

J’ai pris ce contexte pour les raisons évoquées avant. Mais pour ma part, je ne parle que de la vérité. J’aime beaucoup la culture russe mais à côté de cela je pense sincèrement que le fait d’envahir un territoire qui ne vous appartient pas est une injustice. Et c’est aussi cela que j’avais envie de transmettre en faisant ce film. Mais je le répète, pour moi, c’est un film sur une rencontre de deux personnes qui partagent un sentiment semblable. C’est un film optimiste sur la fibre humaniste qui se trouve en chacun de nous.

Est-ce pour cela que tu as opté pour l’esthétisme du noir et blanc ? Pour mettre en valeur le côté humain ?

En fait, l’idée du noir et blanc n’est survenue que vers la fin, au début je pensais vraiment tourner en pellicule couleur. Puis, je me suis dit que le noir et blanc apportait le côté vieillot de l’époque soviétique ce qui me faisait penser à mon enfance. Le quartier où l’on a tourné le film est un des derniers quartiers de Tbilisi ne possédant aucune construction neuve, c’est pour cela que je l’ai choisi. Le noir et blanc convient bien à cette envie de faire revivre le passé.

Ca permet aussi une atténuation de la violence. D’ailleurs, tu ne la montres pas vraiment la violence.

Effectivement,  je ne suis pas le genre de réalisateur qui aime la montrer de façon frontale. Je pense qu’il y a des choses que l’on peut montrer autrement, au cinéma. Rarement les cinéastes arrivent à être justes dans l’exhibition de la violence. Seul un film comme « Bloody Sunday » de Paul Greengrass la montre avec justesse pour des raisons politiques. Mais dans le cas de mon film, comme il s’agit plus d’un instant humain, je ne voulais pas montrer la violence. Elle est de toute façon suggérée et la suggestion est plus forte que la confrontation, je trouve.

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Il y a une scène dans ton film qui est assez marquante. Celle où la grand-mère ouvre la fenêtre et fait face à un jeune homme qui a les bras en croix. Elle lui demande s’il va bien. Et pendant quelques secondes, on ignore complètement que des soldats russes sont en train de le fouiller. Ce moment paraît tellement vrai.

Oui, j’aime beaucoup cette scène. Je pense que j’essayerai tout au long de ma carrière d’être honnête et vrai. Parce que je pense que le plus important est de rester honnête, en art. Les meilleurs réalisateurs sont justement ceux qui ne mentent pas. Prenons l’exemple de Michael Haneke, qui est un grand cinéaste, assez difficile à comprendre, à mon avis. Il faut bien avouer que dans certaines scènes de ses films, il est tellement vrai. Il n’a aucun complexe à dire les choses de façon extrême, comme on n’en a pas l’habitude et j’aime beaucoup cela. Il faut oser dire les choses comme on les sent.

A propos d’art, peux-tu nous éclairer sur ton choix de la danse traditionnelle géorgienne présente dans le film ?

Cette danse, et spécialement le mouvement du jeune danseur et fort apprécié par Petrovich est très symbolique, en Géorgie. Il n’y a pas de geste plus populaire que celui-là. Par ailleurs, j’ai toujours pris l’habitude de terminer mes films par de la danse ou de la musique. J’adore la danse. C’est une des choses les plus belles qui soient, vraiment. Je pense aussi que c’est un très bon moyen d’exprimer l’ironie de la vie. Quand je montre la danse dans mon film, c’est une manière toute personnelle d’être ironique par rapport à un contexte donné.

Mais à travers cette danse, n’y a-t-il pas aussi l’affirmation d’une opposition ?

Evidemment. Cette danse traditionnelle révèle d’une certaine manière la fierté d’un peuple, de sa culture et de ses traditions face à l’envahisseur.

Est-ce facile de réaliser des courts métrages en Géorgie ? Existe-t-il une industrie cinématographique comme en Asie ou en Europe ?

A dire vrai, c’est très difficile de faire des films en Géorgie. Après la guerre, au début des années 90, l’industrie culturelle était à peu près morte. Depuis quelques années, ça commence à se réveiller et à bouger. Mais on peut dire  que le pays sort à peu près 3 ou 4 films non commerciaux par an. En ce qui concerne mon film, j’ai eu de la chance d’avoir été aidé par un producteur motivé même si j’ai dû payer beaucoup de choses de ma poche. On n’avait que sept jours pour tourner le film. Beaucoup de gens ont travaillé bénévolement parce que l’on ne pouvait pas les payer.

As-tu l’intention de réaliser un long-métrage ?

Oui. Je suis en train d’en écrire le scénario. Mais je vais certainement continuer à réaliser des courts métrages, en attendant.

Propos recueillis par Marie Bergeret

Article associé : la critique du film

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Clermont-Ferrand, le Petit Journal

Vendredi. Embarquement pour un Paris-Clermont en voiture. Des sandwichs au thon et un Carambar pas drôle s’installent à l’arrière. Un break sur la route semble compromis : tous les cafés sont fermés. Par chance, Les Trois sœurs et leurs délires sont plus cool. À l’intérieur de ce salon de thé, une petite fille de sept ans papote à l’accueil tout en sortant les cahiers de son cartable. Elle dit : “La lecture, j’adore. Le calcul, j’adore encore plus. Je sais compter jusqu’à 700.” Ni deux ni une, elle le prouve, et la route ne reprend qu’après révision des exercices et de la dictée du lendemain. Tout à l’heure, le festival vivra sa soirée d’ouverture, avec une séance spéciale de films courts. Certains assisteront à la projection tandis que d’autres croqueront des nougats tout en râlant contre la mauvaise connexion wifi de l’hôtel.

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Samedi. Rendez-vous matinal à Vice Versa, un bureau de graphistes mangeuses de pommes qui abrite le temps de la manifestation le Quotidien du Festival. Cette année, une collaboration a été établie avec ce journal dont les locaux provisoires ont du mal à être dénichés sur le plan de la ville. Rapidement, le vif autochtone repère et titille la touriste paumée d’un “Alors, ça marche la chasse au trésor ?“. Dans la journée, une discussion s’improvise à table, toujours avec des Clermontois : “Ah bon, vous écrivez pour le quotidien ? Moi, le journal, je ne le lis qu’aux toilettes. C’est le seul lieu où je suis sûr de ne pas être dérangé !”. Et vlan pour l’ego. Il n’y a pas à dire, la presse écrite, ça impressionne.

Le lundi, à une soirée portugaise, Touriste Paumée (T.P.) se demande où sont donc passés les Portugais et maudit, au moment de rentrer à son hôtel, son pitoyable sens de l’orientation, les plans de la ville inadaptés à son taux d’alcoolémie et tous ces habitants endormis à 4h du matin. Deux jours plus tard, la gloire frappe à sa porte. Une équipe de France 3 débarque dans les bureaux du journal au moment du bouclage. Un sémillant journaliste tend son micro à T.P. en lui demandant si elle a un sac de reporter. En réprimant un sourire, elle lui rétorque qu’elle a plutôt un sac à main. Il reformule sa question : “Est-ce difficile de travailler pour un quotidien de courts métrages ?” Réponse : “Non, ce qui est difficile, c’est de collaborer à un quotidien. Je suis crevée”. Quelques heures plus tard, T.P. apparaît brièvement à la fin du JT local avec une mèche de travers, juste après des apprentis zombies sautant dans tous les sens. On ne le dit pas suffisamment : la télé, c’est formidable.

Le lendemain a lieu la soirée Canal +, la fête IN de Clermont, celle pour laquelle on vend son scénariste pour un carton d’invitation. Les navettes sont toutes parties, mais par chance, un taxi se rend à la fête cryptée. Grégoire Colin, comédien pour l’heure réalisateur (son premier film, « La Baie du renard » est en compétition), monte dans la voiture. À l’entrée, le compte est inégal : deux cartons, trois personnes. Blocage du videur, recours au star system : “Attendez, c’est Grégoire Colin”. Réaction du sbire : “C’est ça, et moi, je suis l’humoriste officiel de la ville”. Le stratagème fonctionne. Comme quoi… Reviens, scénariste !

Vendredi, ultime jour de travail. Pour fêter le bouclage du dernier numéro, ça trinque au champagne, ça mange avec difficultés des biscuits bio au citron, ça remercie, et ça cligne de l’œil (“dis donc, d’où ça sort, Willy la Brocante, dans ton interview ?”). Plus tard, au restaurant Le Tout du Cru, un convive interroge le serveur : “Quatre confits, deux magrets, une salade, et une truffade ? C’est bon ? Vous avez huit personnes ?” Le compte est bon. Willy la Brocante est loin.

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Samedi, dernier jour de festival. Demain, tout le monde rentre chez soi. Autant profiter des dernières heures en se coltinant une séance de films, la remise des prix ou un ultime repas à base de canards. Avant d’aller à la soirée de clôture, on révise ses classiques au café grâce à un réalisateur québécois : “Quel est l’animal emblématique du Québec ?” Réponse : “Le castor. Plus gros ? Ah, le caribou”. Les clichés dans la poche, on est prêt pour le final musical. À l’extérieur, la fanfare de Clermont, déguisée comme à l’accoutumée, joue des valses et des airs Balkans. À l’intérieur, des DJ mixent des airs impossibles. Retour au bercail, quelques heures plus tard, alors que la fanfare émoustille toujours les danseurs.

Dimanche, gueule de caribou au réveil. Midi arrive, l’heure de quitter sa chambre avec une grosse valise rangée à la va-vite. À la gare, le train repart quelques minutes après être arrivé. Le festival est bel et bien fini, Clermont-Ferrand n’est plus qu’un point ferroviaire.

Katia Bayer

Sujet associé : les quelques photos de Clermont-Ferrand

82ème édition des Academy Awards : la sélection des courts aux Oscars

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Fiction

– The Door de Juanita Wilson et James Flynn
Instead of Abracadabra de Patrik Eklund
– Kavi de Gregg Helvey
– Miracle Fish de Luke Doolan et Drew Bailey
– The New Tenants de Joachim Back et Tivi Magnusson

Animation

French Roast de Fabrice O. Joubert
– Granny O’Grimm’s Sleeping Beauty” de Nicky Phelan et Darragh O’Connell
– The Lady and the Reaper (La Dama y la Muerte) de Javier Recio Gracia
Logorama de H5 (François Alaux, Hervé de Crécy, Ludovic Houplain)
A Matter of Loaf and Death de Nick Park

Documentaire

– China’s Unnatural Disaster: The Tears of Sichuan Province de Jon Alpert et Matthew O’Neill
– The Last Campaign of Governor Booth Gardner de Daniel Junge et Henry Ansbacher
– The Last Truck: Closing of a GM Plant” de Steven Bognar et Julia Reichert
– Music by Prudence de Roger Ross Williams et Elinor Burkett
– Rabbit à la Berlin de Bartek Konopka et Anna Wydra

Aprilis Suskhi (Fraîcheur d’avril) de Tornike Bziava

Fraîcheur de vivre

Avec un titre évoquant une fin d’après-midi de printemps, « Aprilis Suskhi » de Tornike Bziava apparaît comme un essai esthétique sur les contradictions d’un envahisseur belliqueux. Montré en compétition internationale à Clermont-Ferrand et lauréat d’une Mention spéciale, le film dénonce l’absurdité de la guerre.

Les manuels d’histoire, c’est bien connu, racontent les événements à leur façon, révélant par là les tabous d’une société ou d’un pays à un moment et en un lieu donnés. Naturellement politique, « Aprilis Suskhi » met en lumière un événement peu connu de l’histoire de Géorgie. Qui se rappelle le jour où les rues de Tbilisi ont vu les troupes soviétiques interrompre violemment une manifestation pacifique entraînant la mort de 22 personnes ?

Tornike Bziava décide de plonger le matin du 9 novembre 1989 dans un noir et blanc brumeux faisant varier de façon ingénieuse les plans d’ensemble des immeubles soviétiques imposants et les plans rapprochés de soldats s’apprêtant à démanteler le rassemblement. Angoisse et banalité parfument les vaporeuses rues de la capitale géorgienne tandis qu’un son inhabituel éveille les soupçons du soldat Petrovich. Non loin de là, un jeune danseur bat les talons sous le rythme effréné d’un tambour de fortune. L’adolescent s’agite dans tous les sens avec une fierté non dissimulée tandis que le Russe est fasciné par le spectacle.

Accordant de l’importance non pas à l’instant décisif mais à l’instant humain, le cinéaste pointe le détail délicat et la sensibilité artistique réconciliant les âmes ennemies. Parce que le cinéma selon Bziava est un moyen efficace de mettre en valeur l’arc-en-ciel d’une réalité orageuse où chaque pas de danse semble exprimer un non adressé à l’envahisseur et la chorégraphie, symbole de culture et de tradition, se révèle aussi révolutionnaire qu’unificatrice.

Marie Bergeret

Article associé : l’interview de Tornike Bziava

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A comme Aprilis Suskhi

Fiche technique

Synopsis : Un jeune appelé de l’armée soviétique, un danseur géorgien… Un film pacifiste qui montre un sursaut d’humanité chez l’envahisseur.

Genre : Fiction

Durée : 15’

Pays : Géorgie

Année : 2009

Réalisation : Tornike Bziava

Scénario : Tornike Bziava

Interprètes : Mirian Garuchava , Rezo Chanishvili , Malkhaz Jorbenadz

Image : Goga Devdariani

Son : Alexander Kuranov

Montage : Alexander Kuranov

Co-production : Zurab Magadlasvili

Articles associés : la critique du film, l’interview de Tornike Bziava

T comme Three of Us

Fiche technique

Synopsis : Un jour ordinaire dans la vie d’une famille pas comme les autres. La mère est à la cuisine, le père livre des journaux. Le fils, lui, lit son journal à l’aide d’une loupe qu’il tient entre ses pieds.

Genre : Documentaire

Durée : 15′

Pays : Inde

Année : 2008

Réalisation : Umesh Kulkarni

Scénario : Umesh Kulkarni

Image : Shariqua Badar Khan

Son : Anmol Bhave

Montage : Abhijeet Deshpande

Production : Film and Television Institute of India

Interprétation : Shobha B. Kulkarni , Usha Thakar, Krishna Thakar, Yogendra Thakar

Article associé : l’interview d’Umesh Kulkarni

Umesh Kulkarni et l’exploration de genres et d’histoires pluriels

Cinéaste de la lenteur et du muet, l’Indien Umesh Kulkarni, doublement présent à Clermont-Ferrand cette année avec « Vilay » en compétition internationale et « Gaarud » en Labo, aborde son travail et la situation du court métrage en Inde avec une placidité en décalage avec la cohue festivalière.

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Quel est ton parcours jusqu’ici en tant que cinéaste ?

Ma première expérience dans le milieu du cinéma a eu lieu quand j’étais à l’université, en expertise comptable. Je travaillais à côté comme assistant réalisateur. Je me suis rendu compte que faire des films représentait un défi beaucoup plus intéressant que ce que je faisais. J’ai donc abandonné mes études juste avant le tout dernier examen pour m’inscrire en réalisation au FTII [Film é Television Institut of India], à Pune. En première année, j’ai eu l’occasion d’aller en France pour faire l’université d’été à la Fémis, où j’ai réalisé mon premier court métrage, « Les chemins très connus sont des chemins inconnus ». Mon film de fin d’études, « The Grinding Machine » (La machine à moudre) a été montré dans plusieurs pays dans le monde, ce qui m’a permis de beaucoup voyager. Juste après l’école, j’ai coréalisé mon premier long métrage « Le Bœuf sauvage » avec Girish Kulkarni, scénariste, acteur, et ami proche. Ce film, dont la première a eu lieu à Rotterdam, a connu un grand succès dans l’état de Maharashtra.

Tu as déjà présenté trois courts métrages à Clermont-Ferrand : « Three of Us » en 2009, « Vilay » et « Gaarud » en 2010. Dans quel cadre ont-ils été réalisés ?

Ils ont tous les trois été faits après l’école mais ce sont tout de même des films d’écoles, car ils ont été réalisés pour des étudiants en montage ou en image du FTII qui étaient à la recherche d’un réalisateur pour leurs films de fin d’études. Les courts métrages sont d’ailleurs très souvent réalisés de cette manière en Inde vu qu’il est quasi impossible de trouver autrement les moyens de les tourner en 35mm.

Dans ces trois films, tu explores trois styles, voire trois genres tout à fait différents. Es-tu toujours à la recherche d’un style qui te définirait ou bien préfères-tu ne pas être associé à un seul genre ?

Je trouve que le court métrage permet beaucoup d’expérimentation avec la forme et le style. Je ne veux pas être dans un moule ‘fiction’, ‘documentaire’ ou autre chose. Pour moi, le choix du style dépend entièrement du contenu, et je suis toujours ouvert à la forme que le sujet peut prendre. Ceci dit, même si on essaie chaque fois des choses très différentes, il est vrai qu’un certain style se dégage dans mes films, étant donné que c’est toujours plus ou moins la même équipe qui travaille ensemble et qui porte un regard particulier sur les choses.

Comment expliques-tu le choix de genre pour chacun des trois films ?

Le documentaire « Three of Us » raconte l’histoire d’un homme gravement handicapé et de ses parents âgés. À 42 ans, il ne peut pas du tout bouger et est confiné à sa maison. Pour le filmer, on a voulu exploiter cet espace en travaillant avec des plans fixes limités à la maison. Le fait de ne pas bouger la caméra permettait aussi un regard plus neutre et distancié, ce qui était très important pour éviter de tomber dans un sentimentalisme excessif. Car malgré ce qu’elle vit, cette famille est très optimiste et même heureuse. C’est aussi pour cette raison que j’ai voulu faire ce film, et le mode documentaire m’a offert une certaine distance par rapport au sujet.

« Vilay », une fiction, narre le rapport d’un jeune étudiant en architecture avec sa grand-mère mourante. Il y a un côté autobiographique dans ce film. J’ai choisi de privilégier l’espace mental et psychologique, aux dépens de la réalité stricto sensu. « Vilay » est plutôt un collage d’expériences et d’émotions vécues par ce jeune homme, sans d’autres personnages que lui et la grand-mère. En même temps, le film symbolise la modernisation de la ville qui est en quelque sorte aussi une mort, une destruction. Avec mon équipe, on a beaucoup travaillé le son pour montrer cette lutte entre l’ancien et le nouveau. Par rapport à « Three of Us », l’image de ce film n’est pas vraiment statique mais est plutôt marquée par des mouvements lyriques.

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« Gaarud », sélectionné en compétition Labo, n’est-il pas nettement plus expérimental ? Comment ce projet est-il né ?

« Gaarud » était un projet de fin d’études pour des étudiants en image, son, et montage. Le film devait être tourné en trois jours dans un décor unique. Depuis quelques années déjà, j’avais en tête l’idée de faire quelque chose dans un lieu transitoire, dans une chambre d’hôtel que les gens ne fréquentent que très brièvement. Je souhaitais faire un portrait de leurs vies à travers des aperçus fugitifs de leurs actions. Je voulais explorer la thématique de la ‘marchandise’ humaine dans la société actuelle. Dans le film, il y a des scènes de suicide, de mort, de prostitution, de solitude, et même des scènes vides dans lesquelles le spectateur peut s’imaginer ou inventer sa propre histoire. Sur le plan technique, je me suis servi du travelling afin de représenter le sentiment d’enfermement et de traiter de la dimension temporelle de façon originale. Le résultat est un film avec un rythme imposé.

Comment ce film a-t-il été reçu à l’école et ailleurs ?

Au FTII, ce film a suscité des réactions contrastées et des interprétations diverses. À l’ école, on a une liberté totale de sujet. Il suffit de convaincre la faculté pour avoir faire approuver le projet. Il n’y a pas de contraintes imposées aux films, à l’exception de l’équipement, du nombre de jours de tournage et du budget accordé.

Combien d’étudiants y a-t-il dans une promotion ?

La situation des écoles de cinéma en Inde est extrêmement difficile. Il y a trop de monde pour trop peu de places. Au FTII, il y a dix étudiants en réalisation, et vingt dans chacune des autres sections. Même dans les autres écoles connues de l’Inde – je pense notamment à la Satyajit Ray Film School à Calcutta, la Chennai Film Industrial School ou l’Université Jamia Millia de Delhi – il n’y a pas beaucoup plus de gens qui sortent chaque année. Ces chiffres ne sont pas très encourageants par rapport au nombre de films produits en Inde, qui tourne autour de mille films par an !

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Selon ton expérience, quel est actuellement le statut du court métrage indépendant en Inde ?

Plus de la moitié des courts sont réalisés dans le cadre des écoles de cinéma ou de média et communication. Depuis l’arrivée de la DV, on fait de plus en plus de courts métrages indépendants, surtout des documentaires. Pourtant le public n’a toujours pas accès à la plupart de ces films. Il existe très peu de festivals en Inde, dont notamment ceux de Chennai [Madras], du Kerala, de Calcutta et de Pune. Il est donc très difficile de programmer des courts même si cela est en train de changer.

Par ailleurs, les écoles ont toujours du budget même s’il est parfois modeste. C’est pour ça que je suis très content de pouvoir faire des courts métrages pour le FTII. Ils mettent du matériel à ta disposition. Tandis que les productions indépendantes sont quasi impossibles à financer, surtout en pellicule. Du coup les gens travaillent en tant que bénévoles sur un court métrage qui peut prendre jusqu’à un an pour se faire. Et ensuite il y a rarement des possibilités de faire des recettes sur ces courts métrages, à moins de pouvoir les vendre à des chaînes étrangères. Là aussi heureusement, il y a du progrès, avec quelques sociétés de promotion de courts métrages installées en Inde.

Où en sont tes projets pour le moment ?

J’alterne toujours entre le court et le long. J’adore le court métrage, je ne voudrais jamais m’en passer. J’essaie d’en faire un par an. Pour l’instant, je travaille sur un long métrage, mais je tourne en même temps un court, toujours pour l’école.

Encore un nouveau style ?

Oui, cette fois-ci, je m’essaie à l’humour ! On verra bien ce que ça donne.

Propos recueillis par Adi Chesson

Consulter les fiche techniques de « Three of Us », « Vilay » et « Gaarud »

Article associé : la critique de « Gaarud »

V vomme Vilay

Fiche technique

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Synopsis : Le monde d’hier. Où les journées étaient à la paresse, et les portes sans verrous. Où on croyait encore à l’espoir et au bonheur. Ce monde se termine. Avec lui disparaît l’ombre de ma grand-mère.

Genre : Fiction

Durée : 13’

Pays : Inde

Année : 2009

Réalisation : Umesh Kulkarni

Scénario : Girish Kulkarni, Umesh Kulkarni

Images : Nitika Bhagat

Son : Chandrashekhar Sagade

Montage : Abhijeet Deshpande

Interprétation : Meenakshi Karlekar , Omkar Govardhan

Production : Film and Television Institute of India

Article associé : l’interview d’Umesh Kulkarni

G comme Gaarud

Fiche technique

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Synopsis : Une pièce dans un pavillon ombragé, situé près de la gare d’une petite ville. Des gens habitent dans la pièce et ne peuvent en sortir. Aperçus d’existences, impressions insignifiantes mais significatives.

Genre : Fiction, Expérimental

Durée : 13’

Pays : Inde

Année : 2009

Réalisation : Umesh Kulkarni

Scénario : Umesh Kulkarni

Images : Deepu Unni

Musique : Lipika Singh

Son : Lipika Singh

Montage : Ujjwala Agawane

Production : Film and Television Institute of India

Article associé : l’interview d’Umesh Kulkarni

Soirée Bref « Spéciale Clermont-Ferrand »

Avant que les copies de films ne rejoignent leurs pays respectifs, le Magazine Bref propose ce mardi 9 février une soirée spéciale sous le signe de Clermont-Ferrand. Sept films sélectionnés au festival seront projetés au MK2 Quai de scène, à Paris, dès 20h30.

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Films présentés :

Lost and Found de Philip Hunt (Royaume-Uni)

La Patrona de Lizzette Argüello (Mexique)

Path Lights de Zachary Sluser (Etats-Unis)

Glenn Owen Dodds de Frazer Bailey (Australie)

Vilay de Umesh Kulkarni (Inde)

Sparni un Airi de Vladimir Leschiov (Lettonie)

The Six Dollar Fifty Man de Louis Sutherland et Mark Albiston (Nouvelle-Zélande)

Programme complet sur : www.brefmagazine.com/pages/soiree_qds.php

Infos : Soirée Bref, 20h30, au  MK2 Quai de scène. 14 quai de la Seine – 75019 Paris

T comme Tel père telle fille

Fiche technique

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Synopsis : Julie rend visite à son père dans le sud de la France. Le père est amputé et vit seul dans une maison au bord de la mer. Père et fille ne savent comment se parler, se cherchent, s’effleurent, quelquefois se reconnaissent. Ils partagent le même désir pour les femmes. Cette complicité ambiguë est tolérable tant qu’elle reste silencieuse.

Genre : Fiction

Durée : 20’

Pays : France

Année : 2007

Réalisation : Sylvie Ballyot

Scénario : Sylvie Ballyot

Image : Claire Mathon

Son : Jean-Baptiste Haehl, Philippe Deschamps

Montage : Charlotte Tourrès

Décors : Benjamin Lavarone

Production : Ostinato Production

Interprétation : Salomé Stévenin, Bernard Blancan, Sophie Cattani

Article associé : l’interview de Bernard Blancan

Bernard Blancan. Profession comédien

Sa filmo alterne aussi bien les courts que les longs, et des films de la Fémis qu’« Indigènes » de Rachid Bouchareb. Bernard Blancan, membre du Jury National, a la spontanéité dans la poche et un regard lucide sur sa profession. Rencontre avec un acteur qui se pointe aux interviews avec des sucettes au citron.

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Il y a beaucoup de métiers associés au cinéma. Qu’est-ce qui t’a intéressé à la base pour devenir comédien ?

Je viens d’une famille éloignée de l’artistique. J’ai commencé très tôt à faire du théâtre, aux Jeunesses Communistes, mais je n’ai jamais envisagé d’en faire mon métier, du moins dans un premier temps. J’ai travaillé, repris des études, puis vers 25 ans, j’ai fait un IUT dans lequel un metteur en scène que j’appréciais beaucoup avait monté un superbe Beckett, En attendant Godot. En réalité, j’ai suivi ces études essentiellement pour rencontrer ce mec. A ce moment-là, j’ai rencontré Yves Caumon, qui était à la Fémis, et j’ai tourné dans ses films. Après, j’ai continué, j’ai bossé, je suis même devenu instituteur. A 30 ans, j’ai décidé d’être comédien de théâtre, et de laisser tomber tous les boulots pour ce choix-là, même si j’ai fait quelques films que ce soit pour Yves Caumon ou pour Hélène Angel qui était à la Fémis en même tant que lui. Ce sont des personnes qui m’ont rappelé des années plus tard et avec qui j’ai continué à faire des courts.

Tu parles de théâtre. Est-ce que tu as appris à jouer autrement au cinéma et à t’habituer à la caméra ?

Ah, complètement. Quand les acteurs de théâtre qui n’ont jamais tourné s’y mettent, ils parlent un peu fort et répètent des mimétismes qu’ils se sont appropriés à la scène, alors que moi, j’ai commencé très tôt avec Caumon et les autres. Pour moi, le court métrage a été une vraie formation. Avec ce format, j’ai vraiment appris mon métier d’acteur.

Comment prend-on en considération le travail de comédien sur un court ? Qu’est-ce que tu as appris avec la caméra d’Yves Caumon ou Hélène Angel ?

Ce n’est pas tant se former à la technique (parler moins fort, moins bouger le visage, être moins expressif) qu’apprendre en voyant le rendu du travail à l’image. La première fois, tu vois que tu en as fait des tonnes, la fois d’après, tu feras attention à gérer ton image et à travailler de sorte que ça se passe bien. En même temps, le cinéma t’apprend à travailler entouré d’une équipe, à être dans le présent avec des personnages ou dans une situation en zappant tout le reste, et à apprivoiser la caméra, à en faire abstraction tout en sachant qu’elle est là.

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Tel père telle fille

Dans ta filmographie, à un moment, il y a «Indigènes », et puis, on te retrouve dans un court métrage. Tu passes facilement d’un format, d’une structure, et d’une équipe plus grande à quelque chose de plus réduit, de plus artisanal ?

Oui, c’est tellement important que le lendemain de la sortie d’« Indigènes », je partais sur le tournage de « Tel père telle fille » de Sylvie Ballyot. Je logeais au camping alors la veille, je fréquentais le Martinez. Cela ne m’a pas posé de problème. Alterner les expériences est même une nécessité. Il ne faut pas se perdre, il faut garder les pieds sur terre, et l’énergie du court me plaît, avec sa petite économie et cette envie qu’ont les gens de faire les choses sans un rond.

Comment les autres personnes d’« Indigènes » ont-elles perçu le fait que tu enchaînais avec un court le lendemain ?

Dans ce paysage du cinéma français, j’ai commencé tardivement. Je suis seulement monté à Paris en 2000, il y a dix ans. Mon chemin est un peu bizarre, je fais office de vilain petit canard, donc les gens ne sont pas étonnés que je fasse un court et que j’enchaîne après avec Louis la brocante. Normalement, un type qui sort avec un prix d’interprétation à Cannes, si il n’a pas les pieds sur terre, il se met à rêver et croit qu’il doit juste que les grands et beaux scénarios lui parviennent. Moi, j’ai une grande lucidité de cette profession et de la façon dont elle fonctionne.

On t’en propose beaucoup, en tant que comédien, des rôles dans le court métrage ?

Oui, et j’en refuse certains, parce que je ne gagne pas ma vie en faisant du court. Je fais des courts métrages quand j’en ai le temps. Quand je lis quelque chose qui ne me plaît pas, je ne le fais pas, même si j’ai le temps. Après, quand le projet m’intéresse, on essaye de le caler dans un moment où je peux le faire. Là, normalement, je devais faire un court, mais il avait lieu pendant le festival. C’est dommage, je le trouvais bien, mais les dates ne pouvaient pas bouger. J’ai orienté le réalisateur vers Serge Riaboukine.

Quand tu parles d’image de vilain petit canard, c’est lié à quoi ?

Il y a d’abord quelque chose de très personnel. C’est dû à mon comportement et à mes choix bizarres qui font qu’on a du mal à me classer. Je suis un touche à tout, je veux réaliser, jouer, faire de la musique, … De plus, je ne m’exprime pas comme on a l’habitude d’entendre un comédien parler. Un comédien, ça pose, ça fait trois blagues à la con, moi, je peux le faire aussi, mais à ce moment-là, je joue, et je n’ai pas envie de jouer. Médiatiquement, je suis très lucide sur la manière dont les choses fonctionnent. Même si j’ai une palme refilée par un jury international qui s’en fout de la notoriété et qui juge en fonction du travail accompli, je ne vaux que dalle pour les Français, sauf pour les cinéphiles. Si la presse ne parle pas de toi, tu n’existes pas.

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En faisant beaucoup de courts, est-ce qu’à un moment donné, il y a un risque d’être catalogué “comédien de courts” ?

Quoi qu’on fasse, on est étiqueté. Je suis étiqueté ”court” par les mecs qui font du court. Pour les mecs qui font de la télé, je suis un “comédien France 2”, et dans le cinéma, vu que je bosse avec des gens assez radicaux comme Yves Caumon et Philippe Fernandez, je suis catalogué “cinéma d’auteur”. Après, quand je fais « Indigènes », les mecs sont un peu perdus ! Pour moi, ce qui compte en fait, c’est de faire mon boulot avec plaisir et d’être intéressé par des choses suffisamment variées et ouvertes.

Depuis le temps, est-ce que tu as senti une évolution dans le court ?

En vieillissant, tu commences à avoir de l’expérience et à reconnaitre certaines choses. Certains courts sont des grosses machines surfinancées qui ne sont pas amusantes à tourner parce qu’on se retrouve à faire un petit long métrage. Ici, en étant juré, je trouve qu’il y a vachement de tenue dans le court, qu’il y a un nivellement vers le haut qui, d’après moi, est dû au financement des films. Dans les génériques, je sens beaucoup la présence du CNC, des télés, des régions, et je trouve que les films répondent aux critères attendus par les commissions qui leur ont refilé du pognon. Du coup, ça assagit les films, et je ne me suis ni époustouflé ni surpris en séances.

Quand tu regardes ces films, tu les vois en tant que spectateur ou comédien ?

J’avoue que je ne suis pas très objectif. Je suis d’abord comédien, donc forcément, les films dans lesquels les acteurs m’étonnent à chaque plan me plaisent. Ils peuvent complètement m’emporter dans un film, même si il y a des imperfections à côté, je n’en ai rien à foutre. Si je suis embarqué par des personnages qui me racontent une histoire, cela me suffit.

Est-ce que tu es quelqu’un qui a besoin d’être beaucoup dirigé ?

Quand on veut trop me diriger, en général, je me raidis, et je retourne dans ma voiture ! Non, ce n’est pas vrai, je suis un mec assez docile. En général, les mecs qui t’en disent trop, ce sont ceux qui n’y connaissent rien. Si on m’a choisi, c’est pour donner même ce que je ne veux pas donner. Les meilleures directions d’acteurs que j’ai eues, c’est Hélène Angel qui me dit juste : “Fronce pas les sourcils. C’est une indication qui m’a vachement aidé, qui peut paraître complètement débile et formelle, mais qui dit tout. Et c’est Bouchareb dans « Indigènes » qui dit : “Tiens-toi droit”. Ça, c’est de la vraie direction d’acteurs. Moi, je suis un acteur instinctif. J’adore les réalisateurs qui le sont aussi. Pour moi, un bon réalisateur, c’est un mec qui regarde. Ce n’est pas un mec qui projette, c’est un mec qui regarde.

Propos recueillis par Katia Bayer

Consulter la fiche technique de « Tel père telle fille »

Article paru dans le Quotidien du Festival

D comme Deux cents dirhams

Fiche technique

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Synopsis : Ali, un jeune berger, vit dans la campagne marocaine. Un jour, alors qu’il promène ses moutons près de la nouvelle route qui borde son village, il trouve comme par miracle un billet de 200 dirhams…

Genre : Fiction

Durée : 14’18 »

Pays : France, Maroc

Année : 2002

Réalisation : Laïla Marrakchi

Scénario : Laïla Marrakchi

Images : Béatrice Mizrahi

Musique : Fawzy Al-Aiedy

Son : Pierre  André

Montage : Sarah Anderson

Décors : Naïma Bouanani

Production : Agora Films, Lazennec Tout Court

Interprétation : Abdelfatah Sail, Jamal Lahouissi, Omar Chanbod

Article associé : l’interview de Laïla Marrakchi

H comme L’Horizon perdu

Fiche technique

horizon perdu

Synopsis : Abdeslam est un homme rompu ; ses rêves se sont envolés. Considérant que son avenir n’est plus au Maroc, il décide de partir de l’autre côté de la Méditerranée, en Espagne. La nuit, à bord du zodiaque clandestin, il se souvient de Rhimou, celle qu’il a aimée, de son pays, de leur séparation.

Genre : Fiction

Durée : 12’

Pays : France, Maroc

Année : 2000

Réalisation : Laïla Marrakchi

Scénario : Laïla Marrakchi

Images : Béatrice Mizrahi

Musique : Raï Na Raï

Son : Pierre André , Jean-Paul Hurier

Montage : Pascale Fenouillet

Production : Gloria Films Production

Interprétation : Zakariya Gouram , Smahane La Housine

Article associé : l’interview de Laïla Marrakchi

Laïla Marrakchi. Le Cinéma, les Traditions et les Super Nanas

Cinéaste marocaine vivant en France, Laïla Marrakchi est l’auteur de trois courts métrages, « L’horizon perdu », « Deux cents dirhams », « Momo Mambo », et d’un long métrage, « Marock », considéré comme subversif dans son pays d’origine, à sa sortie en 2005. Sept ans après son dernier passage à Clermont-Ferrand, elle est à nouveau dans le coin, en tant que membre du Jury National.

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Vous êtes née à Casablanca, mais vous avez étudié à Paris. Pourquoi êtes-vous partie ?

D’abord, il n’y a pas tellement d’écoles de cinéma au Maroc. Au départ, je voulais aller aux États-Unis, mais comme toute ma scolarité avait eu lieu au lycée français de Casablanca, après le bac, la suite logique a été de partir en France. Beaucoup de gens partent à ce moment-là à l’étranger, pour se forger une expérience de vie et découvrir le monde, avant de revenir quelques année plus tard au Maroc.

L’idée n’est pas de partir pour ne pas revenir ?

Non. Pour la plupart, il y a un retour. Mes amis sont revenus après cinq-dix ans passés à l’étranger. Ils ont travaillé dans un autre pays, y ont passé une partie de leur vie, puis sont revenus au Maroc, car leurs attaches familiales et culturelles étaient très fortes. Après, tout le monde ne part pas. C’est très compliqué de le faire, il faut un visa et appartenir à une certaine classe sociale.

Qu’est-ce qui vous a orienté vers des études de cinéma ?

Le cinéma m’intéressait et je n’avais pas envie de faire une école de commerce comme tout le monde. J’avais envie d’apprendre un métier artistique. J’étais très cinéphile et je voulais être différente, du coup, je me suis retrouvée à l’ESRA. À l’école, on pouvait se frotter à la réalité pour fabriquer un court métrage, ce qui était très agréable. Puis, il y a eu les stages et les rencontres qui ont un peu plus défini les choses. J’ai été assistante et scripte sur des courts, mais aussi stagiaire sur des castings de longs. On a beau parler d’un film, mais assister à sa fabrication et le faire à plusieurs reprises est essentiel pour définir ce qu’on a envie de faire par la suite.

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Comment devient-on réalisatrice quand on a cette envie ?

Je pense que j’ai eu de la chance d’être marocaine ! J’ai fait des courts métrages qui ne sont pas extrêmement personnels, mais qui correspondaient un peu à ce qu’on attendait d’une réalisatrice marocaine. Mon long métrage a été vraiment plus personnel. Avec les courts, je me suis essayée à raconter une histoire, à gérer une équipe, à diriger des acteurs, à placer une caméra, à travailler le son, la musique, …. J’ai écrit « L’Horizon perdu » et « Deux cents dirhams » avec une certaine distance, en les concevant comme des expériences, mais je ne les ai pas portés comme j’ai pu porter mon long.

Comment au Maroc, percevait-on vos courts métrages ?

Positivement. Le cas du Maroc est intéressant : il y a une vraie demande en termes de cinéma parce que la société a besoin de se voir à travers les films.

« L’horizon perdu» date de 2001. À cette époque-là, on ne parlait pas beaucoup d’immigration clandestine. Pourquoi vous y êtes-vous intéressée ? À cause d’un fait divers ou pour exploiter vos origines ?

Il y a de ça, mais je suis aussi très intéressée par la thématique du départ, la possibilité de s’extraire d’un clan pour exister et de revenir dans son lieu d’origine. Je pense qu’on est obligé de quitter son clan pour devenir un individu et pour se construire. Cette thématique, ce fantasme de l’ailleurs et de l’autre m’intéresse avant tout. L’immigration est le fond, mais c’est un prétexte pour parler de choses qui m’interpellent et me touchent.

Êtes-vous retournée vivre au Maroc ?

Non, j’y vais souvent, mais je n’y vis pas.

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Vos films sont coproduits par la France et le Maroc. Est-ce compliqué de financer des projets avec 100% de fonds marocains ?

C’est très difficile pour les longs en général. « Marock » est un film entièrement français. Le CCM, le Centre Cinématographique Marocain, aide beaucoup les courts métrages, mais ces ressources sont insuffisantes pour les longs métrages. Quand on a des exigences techniques, il faut chercher ailleurs d’autres sources de financement.

Les films marocains sont souvent orientés autour de la culture, des traditions, et des racines. Qu’est-ce qu’une jeune marocaine peut réussir à exprimer sur son pays ?

Honnêtement, les femmes sont très combattives au Maroc. Ce sont des sacrées nanas ! Je ne parle pas de moi, mais il y a des femmes incroyables qui se battent, à tous les niveaux, social, économique, etc. Ce qui est intéressant, je l’ai surtout vu avec « Marock », c’est de créer un débat de société. Je ne pense pas qu’un film puisse changer les mentalités, mais il participe à créer un débat et à opposer les opinions.

En tant que femme, qu’est-ce que je peux exprimer ? C’est toujours difficile de se positionner en tant que telle, mais c’est vrai que les femmes doivent se battre. Même si il y a eu une réforme sur le statut de la femme, dans les mentalités, les femmes ne sont pas égales aux hommes, et n’ont pas le même pouvoir et les mêmes acquis qu’eux. Mais cela n’est pas propre au Maroc, la parité est compliquée partout.

Ce qui est intéressant, c’est de donner à une autre génération la possibilité d’y croire. C’est ce qui m’est arrivé en voyant Farida Belyazid, une réalisatrice plus âgée, appartenant à une autre génération, faire des films. Personnellement, j’ai eu la chance d’avoir une famille assez ouverte, je n’ai pas dû me battre pour faire ce que j’avais envie, pour m’imposer, et pour partir. On m’a beaucoup soutenue, mais je sais que pour la plupart des filles qui veulent être comédiennes ou qui désirent travailler dans un milieu artistique, elles doivent se battre car leurs parents et leur la famille ne voient pas ces professions d’un très bon oeil.

Les débats suscités par « Marock » étaient-ils différents selon le pays où vous le présentiez ?

En France, c’était très soft, il n’y avait rien de subversif. Dans les pays arabes, par contre, le film a posé problème. Il a été considéré comme ultra subversif car il touchait à la religion, à la judéité, et à la liberté des moeurs. Voir des jeunes gens fumer et boire ne passait pas très bien. En général, dans les films marocains, ces actions sont souvent montrées de manière maladroite, du coup, on n’y croit pas du tout. Dans ce film-ci, comme la plupart des comédiens étaient non professionnels, il y avait quelque chose de très réel et de très vrai. Voir une fille en mini short se foutre de la gueule de son frère qui est en train de faire la prière, on peut le faire en aparté mais pas de façon publique. Il y a des tabous auxquels on ne touche pas. Je le savais, mais je n’avais pas envie d’être consensuelle. Actuellement, la mode, c’est faire du cinéma qui provoque. Quand j’ai fait mon film, on m’a dit que je faisais de la provocation, alors que j’étais dans la réalité.

Sur quoi travaillez-vous depuis « Marock » ?

J’ai fait un enfant ! Cela m’a pris du temps. La vie est revenue, c’est important, c’est comme ça qu’on se nourrit aussi. Là, je suis en pleine écriture et j’espère tourner en septembre une histoire vraie que j’adapte un peu à ma sauce.

Pensez-vous revenir un jour au court métrage ou avez-vous définitivement tourné la page ?

Je me sens mieux dans le format du long, car j’ai plus d’espace pour raconter ce que je veux. Mais peut-être qu’un jour, je retournerai au court pour essayer quelque chose de formel.

Cela faisait longtemps que vous n’étiez pas revenue à Clermont-Ferrand (« Momo Mambo », 2003). Comment voyez-vous, en tant que jurée, les films que vous regardez ?

Je les regarde plutôt en tant que spectatrice. J’aime être surprise en voyant comment les histoires sont racontées et ce qui ressort de la nouvelle génération. Pour le moment, je suis un peu sur ma faim. Je retrouve les mêmes formes, histoires et traitements, comme il y a sept ans. Mais il me reste encore quelques séances à voir, et j’ai de l’espoir !

Propos recueillis par Katia Bayer

Consulter les fiches techniques  « Deux cents dirhams » et « L’Horizon perdu »

Article paru dans le Quotidien du Festival

Clermont, le Palmarès 2010

Compétition Internationale

Grand Prix :Blue sofade Lara Fremder, Giuseppe Baresi, Pippo Delbono (Italie)

Prix Spécial du Jury : Ella de Hanne Larsen (Norvège)

Prix du Public : Sinna man (L’homme en colère) de Anita Killi (Norvège)

Prix du Meilleur Film d’Animation : Sinna man (L’homme en colère) de Anita Killi (Norvège)

Prix de la Jeunesse : Efecto domino (Effet domino) de Gabriel Gauchet (Cuba, Allemagne)

Prix Canal+ : Glenn Owen Dodds de Frazer Bailey (Australie)

Prix des Médiathèques : I love Luci (J’aime Luci) de Colin Kennedy (Royaume-Uni, Danemark)

Prix de la Presse International SFR : On the run with Abdul (En cavale avec Abdul) de David Lalé, James Newton et Kristian Hove (Royaume-Uni)

 

Compétition Labo

Grand Prix : Petite anatomie de l’image de Olivier Smolders (Belgique)

Prix Spécial du Jury : Marker (Les terres) de Susanna Wallin (Royaume-Uni)

Prix du Public: Photograph of Jesus (Une photo de Jésus) de Laurie Hill (Royaume-Uni)

Prix Audi labo : A family portrait (Un portrait de famille) de Joseph Pierce (Royaume-Uni)

Prix Canal+ : Mrdrchain de Ondrej Svadlena (République Tchèque)

Prix de la Presse Télérama : A family portrait (Un portrait de famille) de Joseph Pierce (Royaume-Uni)


Compétition française

Grand Prix : Dónde está Kim Basinger ? (Où est Kim Basinger ?) de Edouard Deluc (France, Argentine)

Prix Spécial du Jury : Annie de Francia de Christophe Le Masne

Prix du Public : Comme le temps passe de Cathy Verney

Prix Audi National : Logorama de H5 (François Alaux, Hervé de Crécy, Ludovic Houplain)

Prix de l’ACSE (Agence Nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances) : Dounouia de Olivier Broudeur et Anthony Quéré

Prix de la meilleure musique originale (SACEM) : Je criais contre la vie. Ou pour elle de Vergine Keaton. Musique : Vale Poher

Prix de la Meilleure Première Œuvre de Fiction (S.A.C.D.) : Le frère de Julien Darras

Prix ADAMI d’interprétation – Meilleure comédienne : Mathilde Bisson dans Sur mon coma bizarre glissent des ventres de cygnes de Vincent Cardona

Prix ADAMI d’interprétation – Meilleur comédien – Guillaume Briat dans Dans le décor de Olivier Volcovici

Prix du Meilleur Film d’Animation francophone (S.A.C.D.) : Fard de David Alapont et Luis Briceno

Prix de la Jeunesse : Wakefield de Laurent Bébin et François Valla

Prix Canal + : Dónde está Kim Basinger ? (Où est Kim Basinger ?) de Edouard Deluc (France, Argentine)

Prix « Attention Talent » Fnac : Logorama de H5 (François Alaux, Hervé de Crécy, Ludovic Houplain)

Prix du Rire « Fernand Raynaud » : Comme le temps passe de Cathy Verney

Prix de la Presse National SFR : Une vie de Emmanuel Bellegarde

Prix Procirep du producteur de court métrage : Sacrebleu Productions, Ron Dyens

 

Mentions spéciales du Jury International

Mention d’Alanis Obomsawin : Trolls de Brianne Nord-Stewart / Canada

Mention d’Ada Solomon: Viikko ennen vappua (Par-dessus le grillage) de Hamy Ramezan / Finlande

Mention de Gérard Manset: Aprilis Suskhi (Fraîcheur d’avril) de Tornike Bziava / Géorgie

Mention de Nacho Vigalondo : Jenny and the worm (Jenny et le ver) de Ian Clark / Royaume-Uni

Mention de Paul Driessen : Betty B and the The’s de Felix Stienz / Allemagne

Mention spéciale du Jury Labo

Videogioco (Loop Experiment) (Jeu vidéo) de Milkyeyes (Italie)

Mention spéciale du Jury National

C’est gratuit pour les filles de Marie Amachoukeli et Claire Burger

Mention spéciale du Jury Jeunes National

Dónde está Kim Basinger ? (Où est Kim Basinger ?) de Edouard Deluc / France, Argentine

Mention duo d’interprétation du Jury ADAMI

Philippe Rebbot et Yvon Martin dans Dónde está Kim Basinger ? (Où est Kim Basinger ?) de Edouard Deluc

Mention spéciale du Jury Presse Labo

A film from my parish – 6 farms (Un film de ma paroisse – 6 fermes) de Tony Donoghue / Irlande

 

Prochain festival, prochaines dates : du 4 au 12 février 2011.