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M comme Monsieur l’Abbé

Fiche technique

Synopsis : Des hommes et des femmes dans les années trente et quarante s’adressent à l’abbé Viollet pour lui poser des questions sur la sexualité et la morale religieuse.

Genre : Fiction

Durée : 35’

Pays : France

Année : 2010

Réalisation : Blandine Lenoir

Scénario : Blandine Lenoir

Image : Pénélope Pourriat

Interprétation : Margot Abascal, Marc Citti, Anaïs Demoustier, Nanou Garcia, Florence Loiret-Caille, Julien Bouanich, Jeanne Ferron…

Montage : Stéphanie Araud

Son : Domitri Haulet, Hubert Teissedre

Production : Local Films

Articles associés : la critique du film, l’interview de Blandine Lenoir

Monsieur l’Abbé de Blandine Lenoir

« Ceci est notre héritage »

Mercredi, le plus parisien des Festivals de courts métrages affichait Monsieur l’Abbé, le dernier né de Blandine Lenoir. Bien différent de ses précédents courts, celui-ci s’impose par sa mise en scène et son sujet peu catholique.

Le cinéma de Blandine Lenoir est avant tout un cinéma féminin. La femme dans la société contemporaine est un des thèmes récurrents des courts métrages de la cinéaste française. Avec Monsieur l’Abbé, la femme est toujours bien présente, mais elle est inscrite dans la hiérarchie du couple, elle-même dessinée par l’institution de Dieu. Inspiré du livre de Martine Sevegrand, l’Amour en toutes lettres, questions à l’abbé Viollet sur la sexualité (1924-1943), le film explore les pratiques et les connaissances d’hier en matière de sexe, et force est de constater qu’aujourd’hui, dans une société qui revendique la tolérance et la liberté sexuelles, le message de l’Eglise est obsolète. C’est dire que les contraintes des Catholiques n’ont quasi pas changé depuis des décennies.

C’est de façon très classique que la réalisatrice donne à voir les nombreux témoignages d’hommes et de femmes empreints au doute, à la peur, à la culpabilité. Les faces caméra renforcent la notion de dévoilement et de mise à nu de l’âme. Ces témoignages écrits initialement, prennent souvent la forme d’une confession à laquelle l’abbé Viollet se devait de répondre le plus chrétiennement possible, du moins, on l’imagine puisque seul les questions sont mises en scène. À l’austérité des plans fixes, répond la volupté d’un corps de femme, nu, filmé de très près. Une audace dans laquelle on reconnaît aisément la signature Lenoir mais celle qui aime grossir avec humour les travers absurdes de la société se montre ici tout à coup plus mordante et plus sérieuse aussi. Sans doute est-ce une manière de dénoncer l’hypocrisie planant autour des bonnes consciences qui ont construit le monde d’aujourd’hui à coup de « c’est bien » et « ce n’est pas bien ».

Avec ce film, la réalisatrice va encore plus loin dans son questionnement de la féminité, elle explore l’héritage de sa sexualité. Un héritage intimement lié à l’Eglise et à sa Morale bien rigide!

Marie Bergeret

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Article associé : l’interview de Blandine Lenoir

E comme Elefantenhaut

Fiche technique

elefantenhaut

Synopsis : Elfi, la quarantaine, habite à la campagne avec sa mère, une vieille femme invalide et étouffante. Son travail à l’usine ne la réjouit pas davantage. Mais lorsqu’elle rencontre Ricardo, un chanteur, elle décide de prendre sa vie en main…

Genre : Fiction

Pays : Autriche

Année : 2009

Durée : 34′

Réalisation : Ulrike Putzer, Severin Fiala

Scénario : Ulrike Putzer, Severin Fiala

Image : Harald Trainl

Montage : Ulrike Putzer, Severin Fiala

Son : Nikolaus Eckhard, Jakob Pretterhofer

Interprétation : Elfriede Schatz, Waltraute Bartel, Michael Thomas, Natalija Baranova, Oliver Rosskopf

Production : UFMDK

Article associé : la critique du film

Elefantenhaut (Peau d’éléphant) de Ulrike Putzer et Severin Fiala

Film de fin d’études du jeune duo de scénaristes autrichiens, Ulrike Putzer et Severin Fiala, « Elefantenhaut » est d’une maturité étonnante. Portrait captivant de la mélancolie banlieusarde, de la pudeur et du cynisme de la quarantaine ratée et des sentiments effleurés, ce court métrage touche par sa simplicité.

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Elfi travaille dans une imprimerie assourdissante et vit dans une HLM avec sa mère invalide, inexorable et possessive. Aussi réservée qu’elle soit, elle se laisse tenter par une proposition de sortie de ses jeunes collègues, pour se retrouver plaquée au lieu du rendez-vous. Les avances d’un crooner paumé la mettent face à un dilemme : vivre dans le moment ou vivre par ses principes.

Basant leur film sur un scénario soigneusement construit, Putzer et Fiala arrivent à une structure bien classique, avec une exposition, un développement et une fin bien définis. Le résultat est pourtant fluide, naturel et très crédible, grâce surement à l’économie et à la sobriété dont les réalisateurs font preuve. Les scènes d’exposition, par exemple, proches du documentaire social, laissent apercevoir sans commentaire explicite, des moments parlants de la vie quotidienne d’Elfi, et présentent ainsi son lieu de travail et ses relations avec les autres personnages, notamment sa mère et la jeune fille qui s’en occupe. L’image délibérément anti-glamour tournée en super 16 plonge le spectateur dans l’univers d’Elfi et sa banlieue viennoise, qui est en même temps universelle.

Le rythme de ce court est un autre élément important qui marque l’esthétique du film. Rythme de la vie, de l’ennui et des sentiments. La narration est portée par un jeu d’acteur soutenu, notamment de la part de Elfriede Schatz, qui interprète le rôle principal. Ses regards cyniques, ses gestes parfois gauches, les silences gênants, les gros plans de son visage et l’abondance de plans de dos transmettent la charge émotionnelle de son existence avec une pudeur très humaine. Sans jamais tomber dans la lourdeur ni le tragique, Putzer et Fiala réussissent à susciter l’empathie totale avec leur protagoniste à fleur de peau.

Adi Chesson

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Aimeriez-vous vous retrouver dans un film de Bill Plympton ?

Aimeriez-vous vous retrouver dans un film de Bill Plympton ?

Dès à présent, saisissez votre chance à travers cette expérience audacieuse encore jamais tentée. Le « Roi de l’Animation Indépendante » invite les animateurs des quatre coins du monde à recréer un plan de « Guard Dog », un court métrage nominé aux Oscars.

À partir de 1er septembre, vous pouvez proposer un remake de l’un des 70 plans du célèbre court métrage qui sera renommé pour l’occasion « Guard Dog Global Jam ». Saisissez donc l’opportunité de devenir une rock star du dessin animé et faites partie des toutes nouvelles frontières de l’animation !

Téléchargez le règlement ici.

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How would you like to be in a Bill Plympton film?

Now’s your chance—in a bold, never-before-attempted experiment, the « King of Indie Animation » is inviting animators from around the world to re-create one shot each from Bill’s Oscar-nominated short, « Guard Dog ».

Starting September 1st, at noon EST, you can claim one of the 70 shots in a total remake of the famous film. The composite, made by artists from all over the world, will be called « Guard Dog Global Jam ».

DOWNLOAD A FULL LIST OF RULES AND REGULATIONS HERE

Festival du court métrage de Lille, les candidats retenus

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Compétition fiction

Paris/Sexy/Ruth Paxton / Écosse / 2010 / 24 min.

Ezra Rishona (First aid)/Yarden Karmin / Israël / 2010 / 15 min. 15

Betty B. and the The’s/Felix Stienz / Allemagne / 2009 / 13 min.

Les Causses/Aurélien Pallier-Colinot / France / 2009 / 6 min.

Een Kleine Duw (A Gentle Push)/Philippe Verkinderen / Belgique / 2009 / 15 min. 07

Wanna be/Christina Ebelt / Allemagne / 2009 / 32 min.

Driver/Stephen Fingleton / Royaume-Uni / 2009 / 9 min.

May/Wai Ha Ng / Singapour / 2010 / 13 min. 25

Aprilis Suskhi (The April Chill)/Tornike Bziava / Georgie / 2010 / 15 min.

Jour sans joie (Sad Day)/Nicolas Roy / Canada / 2009 / 14 min. 30

Kai Ego Gia Mena (N’me for myself / Et moi pour ma pomme)/Georgis Grigorakis / Grèce / 2009 / 20 min.

La Fracture (Fracture)/Nicolas Sarkissian / France / 2010 / 27 min.

Mehmani zit aab (Banquet Under the Water)/Babak Amini / Iran, France / 2010 / 15 min.

Di me que yo (Say me)/Mateo Gil / Espagne / 2008 / 15 min.

TABU/Vincent Coen, Jean-Julien Collette / Belgique / 2010 / 23 min.

Daughters/Chloé Zhao / Chine, États-Unis / 2009 / 9 min. 43

Compétition animation

Begnini (Begnini)/Jasmiini Ottelin, Elli Vuorinen, Pinja Partanen / Finlande / 2009 / 7 min. 49

The Sick Boy and the Tree/Paul Jaeger / France / 2009 / 3 min. 52

Fard/David Alapont et Luis Briceno / France / 2009 / 12 min. 55

Les bessones del carrer de ponent (The twin girls of the sunset street)/Marc Riba et Anna Solanas / Espagne / 2010 / 13 min.

Sauna Tango/Vera Lalyko / Allemagne / 2010 / 4 min.

Rytual (The Ritual)/Zbigniew Czapla / Pologne / 2010 / 5 min.30

You’re out/Max Liebich / Autriche / 2010 / 5 min. 50

Le Concile lunatique (The Whimsical council)/Arnaud Demuynck / France / 2010 / 12 min.

Vasco/Sébastien Laudenbach / France / 2010 / 11 min.

La Femme à cordes (Ropes)/Vladimir Mavounia-Kouka / France / 2010 / 15 min.

The Origin of Creatures/Floris Kaayk / Pays-Bas / 2010 / 11 min. 45

Orsolya/Bella Szederkènyi / Hongrie / 2009 / 7 min. 45

Simon vagyok (I’m Simon)/Tünde Molnàr / Hongrie / 2009 / 11 min. 16

Bob/Jacob Frey, Harry Fast / Allemagne / 2009 / 3 min.15

V masshtabe (In scale)/Marina Moshkova / Russie / 2009 / 7 min. 14

Rubika/Claire Baudean, Ludovic Habas, Mickaël Krebs, Julien Legay, Chao Ma, Florent Rousseau, Caroline Roux, Margaux Vaxelairre / France / 2010 / 3 min. 58

Muzorama/Elsa Brehin, Raphaël Calamote, Mauro Carraro, Maxime Cazaux, Emilien Davaud, Laurent Monneron, Axel Tillement / France / 2009 / 3 min. 15

Artificial Paradise Inc./Jean-Paul Frenay / Belgique / 2009 / 3 min. 25

Pixels/Patrick Jean / France / 2010 / 2 min. 35

Civilisation/Claude Duty / France / 2010 / 4 min. 30

Dochki-materi (Like Mother, Like Daughter)/Alexandra Lukina / Russie / 2008 / 7 min.

Jean-François/Tom Haugomat, Bruno Mangyoku / France / 2010 / 5 min. 45

A Lost and Found Box of Human Sensation/Martin Wallner, Stefan Leuchtenberg / Allemagne / 2010 / 15 min.

Red-end and the Seemingly Symbiotic Society/Robin Noorda, Bethany de Forest / Pays-Bas / 2009 / 15 min.

Madagascar, carnet de voyage/Bastien Dubois / France / 2009 / 11 min. 30

Memee/Evelyn Verschoore / Belgique / 2010 / 10 min.

The cow who wanted to be a hamburger/Bill Plympton / États-Unis / 2010 / 5 min. 10

Cul de bouteille/Jean-Claude Rozec / France / 2010 / 9 min. 15

Samsa – Hommage an Franz Kafka (Samsa – Homage to Franz Kafka)/René Lange / Allemagne / 2008 / 4 min.

Compétition expérimental

Abstract ?/Alexei Dmitriev / Russie / 2009 / 3 min. 30

Sonar/Renaud Hallée / Canada / 2009 / 2 min. 40

Mrdchain/Ondrej Svadlena / République Tchèque, France / 2010 / 9 min. 40

L’Art délicat de la matraque (The Delicate art of the Bludgeon)/Jean-Gabriel Périot / France / 2009 / 3 min. 57

Drift/Christina von Greve / Allemagne / 2010 / 7 min. 30

Wound footage/Thorsten Fleisch / Allemagne / 2009 / 6 min.

Catafalque/Christoph Rainer / Autriche / 2010 / 12 min.

Legenden (Legends)/Angélique Dubois / Allemagne / 2009 / 28 min. 40

Round/Kirk Hendry / Royaume-Uni / 2008 / 5 min. 30

Red Road/Jéro Yun / France / 2010 / 8 min. 30

Contra (Against)/Vincent Gisbert / Espagne / 2009 / 3 min. 43

Stimme der Lücke/Sunjha Kim and Sion Jeong / Allemagne / 2009 / 6 min. 06

L’Homme et le train (The Man and the Train)/Parissa Mohit / Canada / 2010 / 6 min.

Hybris/Florian Schnell / Allemagne / 2009 / 3 min.

Balloons/Javier Devitt / Argentine / 2010 / 2 min.

52 Takes of the Same Thing, then Boobs (52 takes of the same thing, then boobs)/T. Arthur Cottam / États-Unis / 2010 / 3 min. 53

Parallax/Inger Lise Hansen / Autriche / 2009 / 5 min.

M/Félix Dufour – Laperrière / Canada / 2009 / 7 min.

TELÉMACO (TELEMACO)/Jorge M. Rodrigo / Espagne / 2009 / 4 min.

Avaca/Gustavo Rosa de Moura / Brésil / 2009 / 12 min.

Cees/Viola Groenhart / France / 2010 / 10 min.

In Transit/Reinhold Bidner / Autriche / 2009 / 5 min.

Compétition Vidéoclip

Splitting the atom/Musique : Massive Attack/Edouard Salier / France / 2010 / 5 min. 10

I own you/Musique : Wax Tailor/Romain Chassaing / France / 2010 / 3 min. 28

Blackhole/Musique : ArjanM/Arjan van Meerten / Pays-Bas / 2009 / 2 min. 15

Second Lives/Musique : Vitalic/Julien Henry / Belgique / 2010 / 3 min. 07

We Got Time/Musique : Moray McLaren/David Wilson / Royaume-Uni / 2009 / 3 min. 55

Scissor/Musique : Liars/Andrew Bruntel / États-Unis / 2010 / 7 min. 44

Slick/Musique : Chew Lips/Gregory de Maria / Etats-Unis / 2010 / 5 min.

White Swan/Musique : Lolly Jane Blue/Sil van der Woerd / Pays-Bas / 2009 / 6 min. 13

Ida walked away/Musique : AU/Takafumi Tsuchiya / Japon / 2010 / 5 min. 41

Born Free/Musique : Mia/Romain Gavras / France / 2010 / 8 min. 53

Spacious Thoughts/Musique : NASA feat Kool Keith, Tom Waits/Fluorescent Hill / Canada / 4 min. 32

Two minutes/Musique : F.an/Maxime Bruneel / France / 2010 / 2 min. 39

Swim/Musique : Oh No Ono/Adam Hashemi / Danemark / 2010 / 4 min. 32

Bastard/Musique : Metal on Metal/Matt Devine / Australie / 2009 / 3 min. 34

On the Water/The Walkmen/Nir Ben Jacob / Israël / 2009 / 3 min. 09

Shoes/Musique : Tiga/Alex, Liane / Allemagne / 2009 / 3 min. 58

Très courts

Round/Kirk Hendry / Royaume-Uni / 2008 / 5 min. 30

Balloons/Javier Devitt / Argentine / 2010 / 2 min.

Sour ’Hibi no Neiro’ (Tone of Everyday)/Masashi Kawamura, Hal Kirkland, Magico Nakamura, Masayoshi Nakamura / Etats-Unis, Japon / 2009 / 3 min. 50

Pixels/Patrick Jean / France / 2010 / 2 min. 35

Gravité (Gravity)/Renaud Hallée / Canada / 2009 / 2 min.

Demi-Paire (Half-Pair)/Yannick Pecherand-Molliex / France / 2010 / 2 min. 48

The Walkmen « On the Water »/Nir Ben Jacob / Israël / 2009 / 3 min. 09

Sonar/Renaud Hallée / Canada / 2009 / 2 min. 40

Massive Attack (Splitting the Atom)/Édouard Salier / France / 2010 / 5 min. 10

Bob/Jacob Frey, Harry Fast / Allemagne / 2009 / 3 min. 15

Le site du festival : www.festivalducourt-lille.com

T comme This is Alaska

Fiche technique

Synopsis : Un groupe d’individus s’installent en Alaska, en quête d’une plus grande liberté.

Genre : Fiction, Expérimental

Pays : Suède

Année : 2009

Durée : 11′

Réalisation : Mårten Nilsson, Gunilla Heilborn

Scénario : Gunilla Heilborn

Image : Mårten Nilsson

Montage : Mårten Nilsson

Musique : Kim Hiorthøy

Interprétation : Kim Hiorthøy, Kristiina Viiala, Louise Peterhoff, Henrik Vikman, Lisa Östberg

Production : Gnufilm

Article associé : la critique du film

This is Alaska de Mårten Nilsson et Gunilla Heilborn

À nos idéaux perdus

« This is Alaska » est un court métrage suédois au titre très suédois (sic). Expérimental pour les uns, faussement documentaire pour les autres, le film de Mårten Nilsson et Gunilla Heilborn explore du côté de l’utopie, de l’individualisme à l’extrême et de la contradiction.

Alaska. Mythe en soi, plaine immaculée, état le plus vaste des États-Unis, logo à la mode sur les t-shirts. Loin de la jungle moderne, Louise, Tim et les autres sont de purs individualistes idéalistes. Ayant élu l’Alaska comme lieu de vie, ils témoignent face caméra de leur choix, de leur retour aux racines et de leur liberté absolue. Même si leur pays d’adoption est froid, enneigé et désert, ils parlent tous de bonheur, sauf que leurs visages trahissent leur pensée et que leurs intervieweurs contredisent en off leurs idéaux.

Vu à Rotterdam, à Clermont-Ferrand et à Silhouette, le film s’intéresse au retour aux racines, à la quête désespérée de l’utopie et à la notion de bonheur. Il remet aussi en question cette tendance actuelle à vouloir revenir aux vraies valeurs, à ce besoin d’osmose avec la nature, et met en lumière le fossé entre le monde des hommes et le monde sans les hommes.

Devant cet individualisme exacerbé, les réalisateurs font preuve de sens critique et d’humour en commentant leurs images (“Gardez à l’esprit que les gens qui auraient réussi ailleurs ne seraient pas là.”) et en interrogeant leurs cinq témoins sur leurs motivations et sur la réussite de leur expérience alaskienne. Lorsqu’un couple gelé au milieu de nulle part répète à la caméra « I’m so happy! » avec un sourire peu crédible ou qu’une femme se mord la lèvre en réalisant qu’il n’y a pas d’hommes en Alaska et demande à son intervieweuse le nom du grand amour de sa vie, le contrepoint se fait tout naturellement. Ces gens-là, filmés dans des décors absurdes (un extérieur poudreux, un atelier d’individualisme, une salle pleine d’oiseaux empaillés), refusant d’admettre leur ennui et leur désœuvrement, n’ont pas l’air très heureux de leur nouvelle vie. Mais tout n’est pas perdu. Il leur reste des exercices de gymnastique et des mécanismes de survie…

Les autres films de Mårten Nilsson et Gunilla Heilborn cultivent des points communs avec « This is Alaska » : une intrigue décalée, une base de témoignage, des sujets pluriels, un lien avec la danse (Gunilla Heilborn est chorégraphe), un rapprochement avec la nature, et une épice ironique. Nous, on aime. Tout simplement. Sans désillusion et sans contradiction.

Katia Bayer

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Le festival Anima fête ses 30 ans. Envoyez vos films !

anima-2011

La compétition d’Anima 2011

1. Courts métrages d’animation terminés après le 30/06/2009, sans distinction d’origine géographique, à l’exception de la Belgique.
2. Films d’école ou de fin d’études : courts métrages d’animation terminés après le 30/06/2009, sans distinction d’origine géographique.
3. Clips vidéo ou publicités courts métrages d’animation terminés après le 30/06/2009, sans distinction d’origine géographique.
4. Longs métrages : longs métrages d’animation terminés après le 30/06/2009, sans distinction d’origine géographique.
5. Longs métrages pour jeune public : longs métrages d’animation terminés après le 30/06/2009, sans distinction d’origine géographique.
6. Courts métrages belges : courts métrages d’animation belges terminés après le 30/06/2009.

Parmi ces six sections, les films serlnt soit soumis à la compétition internationale, soit à la compétition nationale, avec des prix en cash allant de 1.000 à 2.500€ et d’autre en nature. Le Festival paiera les allers retours des copies sélectionnées.

Délais

Soumission des films : 15 octobre 2010
Envoi des copies : 11 février 2011

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¿ Dónde está Kim Basinger ? de Édouard Deluc

« À coup sûr, ça c’est un film mexicain ». « Je ne sais pas où est Kim Basinger mais ce qui est sûr, c’est qu’elle ne vit pas à Ringis, ça, je le saurais ! ». « Il est sous-titré, ce film ? » Et oui, chers spectateurs, face à un tel titre, toutes les suppositions, intellos ou non, sont bonnes à prendre.

Marcus et son frère Antoine débarquent à Buenos Aires pour le mariage de leur cousin. Trois jours avant le départ, Antoine s’est fait plaquer par sa copine Coralie et n’a pas retrouvé le moral depuis. Marcus est bien décidé à dérider son frère en l’initiant aux plaisirs féminins de la capitale.

Grand Prix national et Prix Canal + à Clermont-Ferrand, « ¿ Dónde está Kim Basinger ? » est une comédie en noir et blanc ultra présente et récompensée sur la scène festivalière. Pendant sept ans, Édouard Deluc, auteur d’un film oubliable « Je n’ai jamais tué personne », a nourri un désir-petit pois d’aller filmer l’Argentine, un pays de « cinéma, de paysages et de psychanalyse ». Le petit pois a poussé et a donné « ¿ Dónde está Kim Basinger ? », un film ambitieux par sa durée (30’) malgré son manque de moyens et son nombre restreint de jours de tournage.

Le court a ses mérites. Il repose sur un scénario chic-choc, peut être qualifié de drôle à l’inverse de bon nombre de comédies surfaites à la française, bénéficie d’une très belle photo signée par l’Argentin Leandro Filloy gratifiant le film d’une atmosphère très fifties, et est porté par une bande-son très engageante, résonnant dans l’oreille tant dans les scènes ludiques de karaoké (ah, Marvin…) que dans celles plus classiques de road-movie.

Le casting du film vaut à lui seul un paragraphe. Une pensée particulière accompagne Philippe Rebbot et Yvon Martin, aussi opposés que peuvent l’être deux frères : l’un est tout en longueur, débraillé et jovial comme un hamster alors que l’autre est plus dans la petitesse, le smoking et la déprime du pingouin. Une galerie de seconds rôles aussi truculents les uns que les autres font écho à leur talent de comédiens, que ce soit le gardien de l’hôtel, le racoleur urbain, la prostituée aimant le champagne ou le patron de la maison close censée abriter K.B.

Vu le succès du film, une suite à « ¿ Dónde está Kim Basinger ? » est d’ores et déjà prévue (suggestions au réalisateur : « No sé, estúpido ! », « Ella estaba allí tres minutos, creo que está al baño !* »). Espérons que le traitement de la débauche et le regard malicieux porté sur Buenos Aires y seront tout aussi pertinents que dans cette première ébauche.

Katia Bayer

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Article associé : l’interview d’Édouard Deluc

* « Je ne sais pas, espèce d’idiot ! », « Elle était là il y a trois minutes, je crois qu’elle est aux toilettes ! »

Der Da Vinci Timecode de Gil Alkabetz

Motus christique

Avec « Der Da Vinci Timecode », présenté cette semaine à Silhouette, le réalisateur Gil Alkabetz effectue une animation complexe et inventive de La Cène de Da Vinci.

Sur fond d’une musique impétueusement néo-baroque (la partition d’Alexander Zlamal a été récompensée à Stuttgart), le réalisateur israélien installé en Allemagne opère un double travail de déconstruction et de reconstruction du tableau le mieux connu du maître florentin après La Joconde. Alkabetz en relève des curieux détails qu’il refaçonne librement et tisse ainsi dans une iconographie établie dans tout l’imaginaire occidental, de nouvelles bribes narratives : un jeu de gestes et de regards accusateurs et de mouvements chaotiques menant progressivement vers la figure centrale du Christ qui, avec un doigt relevé, fait taire la cohue, avant que la caméra ne passe au plan large du tableau tel qu’on le connaît.

Certes, Alkabetz joue sur l’aspect surmédiatisé et mystifié de Da Vinci, dont l’œuvre s’est vu dernièrement attribuer d’innombrables facettes codées. Le synopsis du film parle par ailleurs de « découvrir des mouvements secrets » dans le tableau. Mais il va plus loin. Tout d’abord, il profite de la perspective en un point de fuite qui donne à l’œuvre un côté frontal voire théâtral, pour interpeller le spectateur-voyeur et doter aussitôt le sujet d’une dimension cinématographique. À l’aide du montage, l’auteur introduit ensuite à l’intérieur du cadre pictural délimitant et statique, une cyclicité de mouvements presque perpétuels. Il rend frénétique la placidité du sujet figé à travers une chorégraphie de gestuelles successivement directionnelles et arbitraires. Bref, ce tableau – qui a également servi d’inspiration à Peter Greenaway en 2008 pour son installation ‘Nine Classical Paintings Revisited’ dans laquelle il « anime » la toile avec un jeu de lumière – se trouve mué et doté de vie sous le regard morcelé du réalisateur, où l’éclatement du sujet démultiplie les pistes de perception et d’interprétation.

Tout comme L.H.O.O.Q. de Duchamp, « Der Da Vinci Timecode » remet en question la lecture conventionnelle de l’art classique. Mais au contraire des considérations anticonformistes du Dadaïsme, Alkabetz s’inscrit dans une démarche plus postmoderne qui vise à regarder une œuvre autrement pour en dégager de nouvelles significations. Le « message » le plus plausible ici pourrait être : « Mais arrêtez donc ce cinéma autour du Florentin, savourez son art pour ce qu’il est. Amen. »

Adi Chesson

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D comme Der Da Vinci Timecode

Fiche technique

Synopsis : Une image est isolée afin de créer une animation basée sur ses détails. Divers fragments de cette image, avec pour points communs des formes similaires, nous permettent de découvrir des mouvements secrets.

Réalisation : Gil Alkabetz

Genre : Animation

Année : 2009

Durée : 3’

Pays : Allemagne

Animation : Gil Alkabetz

Musique : Alexander Zlamal

Interprétation : Jésus Christ, 12 apôtres, du pain, du vin,…

Production : Sweet Home Studio

Article associé : la critique du film

L’Etrange festival, les programmes de courts

Programme 1

– Chair Amie – Pierre Adrien – 2009 – France – Animation

– Love and Theft – Andreas Hykade – 2009 – Allemagne – Animation

– My new best friend – Jonny Ensall et Giles Ripley – 2009 – Royaume-Uni – Fiction

– Letratone leader – Ian Helliwell – 2009 – Royaume-Uni – Expérimental

– The origin of creatures – Floris Kaayk – 2009 – Pays-Bas – Animation

– The long night – Richard Williamson – 2008 – Australie – Fiction

– A family portrait – Joseph Pierce – 2009 – Royaume-Uni – Animation

– All flowers in time – Jonathan Caouette – 2010 – Etats-Unis – Expérimental

– Arnos Tonlabor – Christoph Janetzko – 2009 – Allemagne – Expérimental

– ZWOLL BOX KÄMPFER JAGEN VICTOR QUER ÜBER DEN GROßEN SYLTER DEICH 140 9 – Johannes Hammel – 2009 – Autriche – Expérimental

– Fun with Benny – Shawn Larkin – 2009 – Canada – Fiction

– Long live to the new flesh – Nicolas Provost – 2010 – Belgique – Expérimental

Programme 2

– Imaginary battles – Doug Bayne – 2009 – Australie – Animation

– Red–end & the seemingly symbiotic society – Bethany De Forest et Robin Noorda – 2009 – Pays-Bas – Animation

– Let’s Pollute – Geefwee Boedoe – 2009 – Etats-Unis – Animation

– Ce disque est le même que l’autre – Jean-Jacques Palix – 2009 – France – Expérimental

– Sun-A – Vincent Richard – 2010 – France – Animation

– Darluz – Leandro Goddinho – 2009 – Brésil – Expérimental

– Baader-Meinhof komplett – Jon Frickey et Till Penzek – 2008 – Allemagne – Animation

– 50 años en la Luna – Mariano Santilli – 2009 – Argentine – Fiction

– Boxer – Michael Latham – 2009 – Australie – Fiction

– Fur – Sophie Boord – 2009 – Australie – Fiction

Programme 3

– Stroboscopic noise – Manuel Knapp – 2009 – Autriche – Expérimental

– Clemency – Joseph Albanese – 2009 – Etats-Unis – Fiction

– Don’t Bogart that joint –  Harald Schleicher – 2009 – Allemagne – Expérimental

– One night – Alexandra Schepisi – 2009 – Australie – Fiction

– Oranus – Jelena Girlin et Mari-Liis Bassovskaja – 2009 – Estonie – Animation

– The terrible thing of Alpha-9! – Jacob Armstrong – 2009 – Etats-Unis – Animation

– Percorso #0008-0209 – Igor Imhoff – 2009 – Italie – Animation

– Zigurate – Carlos Eduardo Nogueira – 2009 – Brésil – Fiction

Programme 4

– Backwards – Aaron Hugues – 2009 – Etats-Unis – Animation

– Töten – Tobias Dörr – 2009 – Autriche – Fiction

– Brukerstotte – André Ovredal – 2009 – Norvège – Fiction

– Jalkeilla Taas – Maarit Suomi – 2009 – Finlande – Expérimental

– Twist of fate – Karen Aqua – 2009 – Etats-Unis – Animation

– Precut Girl – Eric Dinkian – 2009 – France – Fiction

– Clonk – Bertrand Lenclos – 2010 – France – Fiction

– The cake – Joe Grazulis – 2009 – Etats-Unis – Fiction

– Maska – Stephen et Timothy Quay – 2010 – Pologne – Royaume-Uni – Animation

Les séances de la compétition de courts métrages sont interdites aux personnes âgées de moins de 16 ans.

Le site du festival:www.etrangefestival.com

D comme The Den

Fiche technique

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Synopsis : Dans la tanière habitent des animaux velus. Mais ces animaux sont des hommes. Et ils nous racontent des histoires d’animaux.

Réalisation : Alain della Negra, Kaori Kinoshita

Scénario : Alain della Negra, Kaori Kinoshita

Genre : Documentaire

Durée : 29′

Pays : France

Année : 2008

Production : Capricci Films

Article associé : la critique du film

The Den d’Alain Della Negra et Kaori Kinoshita

« The Den » (La Tanière) fait suite au travail d’exploration du monde virtuel de Second Life et de ses joueurs commencé avec les courts « Neighborhood » (2006) et « Newborns » (2007). Alain Della Negra et Kaori Kinoshita se penchent cette fois-ci sur la communauté des furries, drôles d’humains à poils partis à la chasse de leur animal intérieur.

Sous le soleil californien, Matthew, jeune vendeur en magasin, se prépare à participer à sa première soirée furry. Faussement ingénu, il a les yeux qui pétillent, de ceux qui s’apprêtent à transgresser. 
La garden party est prévue le soir même. Il s’y rendra seul, poussé par la curiosité envers ces gens d’une drôle d’espèce rencontrés sur Second Life et rassemblés par leur fantasme animal. Même s’il précise à sa collègue qu’il n’est pas attiré par le fait de coucher avec des animaux, il est beaucoup moins catégorique sur celui de coucher avec des gens déguisés en animaux.

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Lors de la soirée, la faune locale est variée, composée en grande majorité de geeks accrocs à Second Life qui se sont rencontrés sur le site. Dans le jardin, un renne harnaché doté d’une mitraillette en plastique côtoie un homme portant une queue factice de chat et des oreilles assorties façon souvenir made in Disneyland. Les plus discrets arborent juste un t-shirt illustré de leur animal favori ou un imprimé léopard pas toujours très heureux.
 Les convives se mélangent dans la bonne humeur en s’échangeant des mangas furries plutôt salés clairement pornographiques autour d’une télé où passe un dessin animé furry évocateur.

Matthew s’initie au vocabulaire furry en compagnie du fameux homme-chat. Est-il furry, fur-curieux, fur-friendly, quel est son fursonnage? Les initiés sont là pour l’aider à y voir clair.
C’est d’ailleurs l’interview d’un des furries les plus actifs, un mâle alpha belette qui constitue le fil rouge du documentaire et qui contient les moments les plus intéressants du film. Après un débat sur quel fursonnage choisir, renard, loutre, dragon, belette, loutre, lion, blaireau (le spectre est large), on apprend que les furries peuvent avoir jusqu’à plusieurs partenaires sexuels de différentes espèces. Il précise même que « nous ne sommes pas des pauvres types incapables de choper des rencards ». En effet, « ce fantasme, cette hallucination partagée » permet à cette communauté souvent moquée d’avoir une vie sexuelle active voire débridée. Bisexualité, partenaires multiples, le discours est décomplexé. Reste que le déguisement est moins anecdotique qu’il n’y parait, cette marginalité assumée en groupe nécessite un certain courage. Matthew ne trouvera pas chaussure à son pied, pas vraiment excité par sa rencontre avec ce « vieux type avec des sandales de touriste et une moustache », les furries n’étant finalement pas son truc. On sent qu’il aurait aimé un peu plus de folklore, des plumes, des poils et des griffes.

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Le film se termine d’ailleurs sur une réflexion de notre guide belette qui fait écho à la déception non dissimulée de notre novice : « être furry, ce n’est pas enfiler un masque ou un costume, c’est ce qui reste quand on ôte son masque humain, c’est ce qu’il y a à l’intérieur ».
 Kaori Kinoshita et Alain Della Negra se sont eux-mêmes créé des avatars sur Second Life pour contacter des joueurs et les rencontrer « dans la vrai vie » comme ces derniers disent souvent. On sent à la fois leur fascination pour ces furries et la distance avec laquelle ils les filment, sans jugement de valeur pour autant. La somme de leur travail sur ce monde pas si virtuel a fait naître un long métrage très réussi, « The Cat, the Reverend and the Slave », qui sortira dans les salles françaises le 15 septembre prochain. On y croise les furries bien sûr mais aussi un prêtre, des échangistes et un tas d’autres addicts du clavier.

Au-delà du phénomène de société, le couple de réalisateurs franco-japonais parle des pertes de repères entre le vrai et le faux, du rapport à soi, de sa mise en scène et du besoin si profond du regard de l’autre sans lequel on n’existe pas. Des thèmes pas si marginaux au final.

Amaury Augé

Consulter la fiche technique du film

Silhouette 2010

Retrouvez dans ce Focus :

Le palmarès du festival
L’interview de Quimu Casalprim i Suárez, réalisateur de « Zeitriss » (Allemagne)
La critique de « Dounouia, la vie » d’Olivier Broudeur et Anthony Quéré (France)
La critique de « The Cow Who Wanted to Be a Hamburger » de Bill Plympton (États-Unis)
La critique de « Monsieur l’Abbé » de Blandine Lenoir (France)
La critique de « Elefantenhaut » (Peau d’éléphant) de Ulrike Putzer et Severin Fiala (Autriche)
La critique de This is Alaska de Mårten Nilsson et Gunilla Heilborn (Suède)
La critique de « ¿ Dónde está Kim Basinger ? » d’Édouard Deluc (France)
La critique de « Der Da Vinci Timecode » de Gil Alkabetz (Allemagne)
La critique de « The Den » d’Alain Della Negra et Kaori Kinoshita (France)
Les films en compétition
Les autres programmes

 

Et nos anciens articles, en lien avec le Festival Silhouette :

La critique de « Zeitriss » de Quimu Casalprim i Suárez (Allemagne)
La critique de « Echo »de Magnus Von Horn (Pologne)
La critique de « Petit Tailleur » de Louis Garrel (France)
La critique de « Madagascar, carnet de voyage » de Bastien Dubois (France)
L’interview de Bastien Dubois
La critique d’« A Familiy Portrait » de Joseph Pierce (Royaume-Uni)
L’interview de Joseph Pierce
La critique de « Chienne d’histoire » de de Serge Avédikian (France)
L’interview de Serge Avédikian
La critique de « In een Vergeten Moment » de Meno Otten (Pays-Bas)
La critique de « Homeland » de Juan de Dios Marfil Atienza (République tchèque)
L’interview d’Édouard Deluc

M comme Mes années bavaroises

Fiche technique

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Cliquer sur l'image pour voir le film

Synopsis : 1982. J’ai 14 ans ; c’est mon premier voyage en Allemagne, deux semaines chez des correspondants.

Réalisation : Yves Jeuland

Scénario : Yves Jeuland

Genre : Documentaire

Durée : 6’7’’

Pays : France

Année : 2009

Production : ARTE France, Forum des images, Trois Fois Plus, ARTE France Développement

Article associé : la critique du film

O comme O’Moro

Fiche technique

Synopsis : Naples, fin des années cinquante. Un carabinier, colosse taciturne que son chef surnomme O’Moro, “Le Maure”, a pour mission d’arrêter la racaille de la ville. Un matin, sur le port, la rencontre d’une gitane va changer le cours de sa vie.

Réalisation : Christophe Calissoni et Eva Offredo

Genre : Animation

Durée : 11’50’’

Pays : France

Année : 2009

Son : Denis Vautrin

Montage : Christophe Calissoni

Musique : Mathias Duplessy

Interprétation : Jean-François Morel, Eva Huebra

Production : Je Suis Bien Content Production

Article associé : la critique du film

F comme Les fruits de mer

Fiche technique

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Synopsis : Catherine et Brigitte ont un point commun, l’amour des fruits de mer…

Réalisation : Brigitte Sy

Genre : Documentaire

Année : 2009

Durée : 3’52’’

Pays : France

Synopsis : Catherine et Brigitte ont un point commun, l’amour des fruits de mer…

Interprétation : Brigitte Sy, Catherine Kapusta-Palmeret

Image : Frédéric Serve

Son : Yves-Marie Omnes

Montage : Marie-Pierre Frappier

Production : Chaz productions

Distribution : Chaz productions

Article associé : la critique du film

Arte. Culture court

Après s’être baladé il y a un mois du côté de 6nema.com, le virtuel s’est pris au goût des films en ligne. Du côté de chez Arte, la chaîne culturelle européenne, quelques courts restent visibles au-delà de leur date de diffusion, que ce soit dans le magazine « Court-circuit », dans la collection « Caméra de poche » ou dans la série « 10 courts contre le sida ».

À ARTE, le court métrage s’active dans une case hebdomadaire définie en soirée (le mercredi, à 0h25). Regards originaux, œuvres internationales et vidéos de jeunesse : l’émission « Court-circuit » s’est offert de l’éclectique à souhait pendant treize ans. Depuis plus de trois ans, la chaîne va plus loin : « Court-circuit OFF » occupe le Net en guise de complémentarité à l’antenne et d’interactivité avec le téléspectateur. Quelques uns de ces points de vue particuliers, personnels et originaux, d’auteurs français comme étrangers, restent même en ligne, accessibles librement à la consultation de ceux qui auraient raté leurs passages télévisés. L’info est de taille quand on connaît la difficulté de trouver des bons films courts en accès libre et en bonne qualité. Plus besoin donc de veiller tard pour voir ses titres favoris.

El Empleo de Santiago Grasso

Lauréat du Prix Fipresci en 2009, « El Empleo », de Santiago Grasso, est le tout premier film argentin primé à Annecy, depuis la création du Festival. Révélation de cette édition, il mêle subtilement passivité du quotidien, individus-objets, et sobriété du dessin.

Tic, tac, tic, tac. 7h15. L’homme à la tête en forme d’index se réveille, se gratte, et sort de son lit. Il se rase, avale un biscuit et un café, renoue sa cravate, hèle un taxi pour rejoindre le bureau. Une fois arrivé, il attrape de justesse l’ascenseur, et dépose ses affaires dans son casier, avant de se mettre au travail. Une nouvelle journée commence.

Dépourvu de tout dialogue, « El Empleo » est un film éloquent, à plus d’un titre. Le décalage surgit devant la représentation d’un univers incongru dans lequel les individus sont relégués au rang et à l’usage d’objets. Dans ce monde, chacun travaille, quelque soit la fonction à accomplir et l’effacement de soi à accepter. Sans distinction, hommes et femmes sont au service les uns des autres, faisant office de meubles, de porte-manteaux, de porte-clés, de feux de signalisation, de transports, ou même de contre-poids d’ascenseurs.

Le film interpelle par sa problématique universelle. Entre critique sociétale et humour raffiné, « El Empleo » livre un regard différent et original sur les notions de travail, de monde en crise, et d’exploitation de l’homme par l’homme. Pour servir sa mécanique domestiquée, Santiago Grasso fait appel à un humour fin et absurde, proche de Ionesco, et à un dessin simple et dépouillé, incrusté de regards vides, sans âme ni espoir.

L’intelligence d’« El Empleo » tient aussi et surtout à sa chute touchante. “M. Index” s’installe à son poste, celui d’homme-paillasson, sous les ordres et les pieds de son patron. À la différence de ses congénères, il sort de son silence et de sa passivité, en poussant un soupir à peine audible. L’humanité s’exprime. Malgré tout.

Les fruits de mer de Brigitte Sy

Titre : Silence=mortes. Sous-titre : 10 films pour les 20 ans d’Act Up. Présenté cette année au festival de Pantin et multi-diffusé sur Arte, « Les fruits de mer » est l’un des dix films articulés autour de témoignages de femmes confrontées au virus du sida.

« Tu parles en ton nom, je parle en mon nom. L’important, c’est que ce soit une histoire personnelle ». À gauche, Catherine, ancienne travailleuse dans la mode, aujourd’hui militante d’Act Up. À droite, Brigitte, actrice, réalisatrice de courts et de longs métrages.

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À mille lieux d’un témoignage télévisé obscène/racoleur sur le sida, ce documentaire criant de vérité, tourné au restaurant autour d’un plateau de fruits de mer, met en scène deux femmes que tout pourrait opposer mais qui sont reliées par le hasard d’un virus commun. Comme deux copines, elles parlent en mangeant, enchaînent les verres (« je ne peux pas parler de ça au monde entier sans picoler » dit Brigitte) et osent avancer les mots là où le tabou et la honte encerclent encore le sujet. Parler, rire, dénoncer la lâcheté des hommes les ayant infectées, ironiser sur le nom des médicaments, attraper un bout de pain, gober une huitre, cela se fait comme si la caméra n’existait pas. Et pourtant, Brigitte Sy réalise avec « Les fruits de mer » un documentaire des plus touchants et – forcément – des plus personnels. Pour la première fois, elle évoque ce qui fait partie d’elle et parle du film comme une délivrance. Pour le spectateur, c’est une décharge, une émotion, un apprentissage. On peut rire du sida.

O’Moro d’Eva Offrédo et Christophe Calissoni

On peut aimer un film pour un caleçon envahi de Ti Amo, pour la bêtise d’un carabinier en chef, pour une musique gaie et envoûtante, pour un univers coloré ou pour un désir de liberté. À Lille comme à Angers, « O’Moro » nous a tapé dans l’œil, il rejoint enfin les autres films référencés sur le site.

Partagé entre son devoir et ses racines, un carabinier maure entame sa journée quotidienne à Naples aux côtés de son supérieur dans le but de traquer les brigands du coin lorsqu’il est contraint d’arrêter une gitane accusée de vol. La belle s’étant envolée comme par miracle, O’Moro subit les foudres de son collègue et se retrouve rétrogradé à la fonction de simple agent de la circulation. Suite à cette rencontre fortuite, O’Moro commence à redéfinir ses priorités et à relativiser son existence.

Réalisé en duo, « O’Moro » se laisse apprécier comme un théâtre de pantins gesticulants, où un air de fête nous invite à entrer et où les vieux rêves enfouis nous récupèrent à la sortie. Bravo à Eva Offrédo et Christophe Calissoni : leur film est lumineux.

Mes années bavaroises de Yves Jeuland

L’une des cinq vidéos tournées sur téléphone portable autour du thème « Les années 80 » se nomme « Mes années bavaroises ». Yves Jeuland, son auteur, raconte sous la forme d’un journal intime ses souvenirs de jeunesse d’il y a trente ans. Muni de son téléphone, il filme les retrouvailles de ses correspondants allemands et français en 2008.

Les années 80. En y réfléchissant, les autres réalisateurs de cette série fictionnalisent des événements ayant fait parler d’eux (la catastrophe de Tchernobyl, la disparition du général Pinochet, l’abolition de la peine de mort en France ou encore le succès planant de Plastic Bertrand). À l’inverse, Yves Jeuland prend comme point de départ une histoire n’ayant pas fait les gros titres des journaux car c’est la sienne. « Mes années bavaroises » est une réflexion sur le temps qui passe, un bilan sur le moment présent, et un questionnement sur la vieillesse, la valeur de l’amitié et du passé. Des années bavaroises ? Peut-être. Une interrogation à haute voix sur une certaine époque, captée dans la mémoire de toute une génération et d’un outil de communication, à coup sûr.

Katia Bayer

Consulter les fiches techniques d’ « El Empleo », « Les fruits de mer », « O’Moro », « Mes années bavaroises »