Tous les articles par Katia Bayer

Du court au coup de pouce : Format Court a besoin de vous !

Depuis la création de Format Court en 2009, notre petite équipe de bénévoles passionnés se consacre à la critique et la promotion du court métrage. Depuis mars 2012, elle oeuvre à la diffusion des courts français et étrangers via les séances Format Court organisées au Studio des Ursulines (Paris, 5ème), en présence des équipes.

Pour ses cinq ans, nous désirons offrir un joyeux lifting à notre site et à ses 2.700 articles (critiques, interviews, …). Pour toujours mieux promouvoir le travail des professionnels du court métrage, développer de nouvelles rubriques (concours, films en ligne, recherches thématiques, …) et optimiser la navigation de Format Court, nous devons aujourd’hui faire appel à des experts en la matière.

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Depuis quelques jours, nous avons lancé une campagne de financement participatif sur Ulule. Nous avons besoin de 2.000 € pour refaire notre site internet. Si nous n’atteignons pas ce montant à la date du 15 novembre 2013, nous ne recevrons rien. Si nous le dépassons, nous pourrons développer d’autres activités qui nous tiennent à coeur depuis longtemps (doter nos nombreux Prix Format Court, créer un festival Format Court).

Le projet intitulé « Cours, Format, Cours ! » s’adresse à tous, ami(e)s, fans de courts métrages, mécènes d’un jour ou gentils anonymes. Pour chaque montant (à partir de 5 €), nous avons imaginé de très nombreuses et chouettes contreparties que nous vous invitons à découvrir sur Ulule.

Si vous souhaitez nous soutenir et faire partie de l’aventure, connectez-vous à la page Ulule consacrée à notre projet et cliquez sur le don de votre choix. N’hésitez pas à diffuser l’information auprès de toute personne susceptible d’être intéressée par notre campagne.

À votre bon coeur, M’ sieurs dames !

Un grand merci par avance. L’équipe de Format Court

Festival d’Angers 2014, inscrivez vos films !

Il ne vous reste donc plus que quelques jours pour envoyer vos films au Festival Premiers Plans dont la 26e édition se déroulera du 17 au 26 janvier 2013. La sélection est ouverte aux premiers et seconds longs métrages, aux premiers courts métrages et aux films d’écoles produits en Europe en 2012 ou 2013.

Vous pouvez soumettre votre film dans l’une des sections suivantes : premiers et seconds longs métrages, premiers courts métrages, films d’écoles, films d’animation.
 La fiction, l’animation, le documentaire sont acceptés dans ces différentes sections. Les films expérimentaux forment des panoramas hors compétition.

La date limite des inscriptions est fixée au mercredi 16 octobre 2013.

 Pour inscrire un film :

– remplissez le formulaire d’inscription
– et envoyez un DVD à : Festival Premiers Plans d’Angers – c/o C.S.T. – 22-24, avenue de Saint-Ouen – 75018 Paris

Attention : les envois en recommandé ne sont pas acceptés.

Pour toute question, merci d’envoyer un mail à paris@premiersplans.org

Consulter le règlement (pdf), l’inscription en ligne ou le formulaire d’inscription (pdf)

Le site du festival : www.premiersplans.org

Festival Cinébanlieue 2013, la sélection

Le Festival Cinébanlieue vivra sa 8ème édition, du 13 au 23 novembre prochain. Neuf films participent à la compétition.

– Rechute de Jérôme Nunes
– Kliptown Spring de Nicolas boone
– Ouaga Yungo de Uriel Jouen Zréhen
– L’esprit de la zone de Nina Almberg et Pierre Commault
– Calamity Jane, lettre à sa fille de Vincent Richard
– Le maillot de bain de Mathilde Bayle
– Le Chemin de traverse de Ahllem Bendroh
– Marseille la nuit de Marie Monge
– La virée à Paname de Carine May et Hakim Zouhani

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Un jury de professionnels (Nabil Ben Yadir, réalisateur, président du jury, Nathalie Leperlier, productrice Le Cercle, Christophe Taudiere, responsable du pôle court métrage à France Télévisions, Delphine Mantoulet, compositrice et productrice à Princes production, Katia Bayer, rédactrice en chef du webzine Format Court, Steve Achiepo, réalisateur et lauréat Cinébanlieue 2012 pour son film « En équipe ») récompensera deux jeunes réalisateurs à l’issue du festival. La meilleure réalisation soutenue par Le Cercle et le CNC remportera le prix Cinébanlieue (d’une valeur de 15 000 €) et le prix France télévision permettra au film lauréat d’être acheté et diffusé sur France télévision. Résultat des courses le 23 novembre.

Le site de Cinébanlieue : http://cinebanlieue.blogspot.fr/

César 2014, les 10 courts d’animation en lice

Hier matin, le Comité Animation de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma s’est réuni pour sélectionner les 10 films de court métrage qui, avec l’ensemble des films de long métrage d’animation de production française et européenne sortis en salle durant l’année 2013, vont concourir au César 2014 du Meilleur Film d’Animation. Le premier tour de vote désignera les films nommés pour le César du Meilleur Film d’Animation, choisis parmi les courts métrages ci-­dessus (deux seulement s’y retrouveront) et l’ensemble des longs métrages d’animation de production française et européenne sortis en salle durant l’année 2013. Les nominations seront révélées lors de la conférence de presse des César d’annonce des nominations qui aura lieu le vendredi 31 janvier 2014.

Voici donc les 10 courts métrages préselectionnés pour le César du Meilleur Film d’Animation 2014.

– Le Banquet de la concubine de Hefang Wei (Production : Folimage Studio)

– Betty’s Blues de Rémi Vandenitte (Production : Les Films du Nord)

– Braise de Hugo Frassetto (Production : Les Films du Nord)

– La grosse bête de Pierre‐Luc Granjon (Production : Les Décadrés Production)

– Lettres de femmes de Augusto Zanovello (Production : Pictor Media Animation)

– Mademoiselle Kiki et les Montparnos d’Amélie Harrault (Production : Les 3 Ours)

– Palmipedarium de Jérémy Clapin (Papy3D Productions)

Peau de chien de Nicolas Jacquet (Production : Joseph Productions)

– The Great Rabbit d’Atsushi Wada (Production : Sacrebleu Productions)

– Tram de Michaela Pavlátová, (Production : Sacrebleu Productions)

Rappel. Séance Format Court, ce jeudi 10/10, au Studio des Ursulines !

Ce jeudi 10 octobre 2013, à 20h30, Format Court vous propose d’assister à sa nouvelle soirée de courts métrages, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Pour ce deuxième rendez-vous de l’année, nous avons souhaité mettre en avant la jeune génération montante d’ici et d’ailleurs (Hu Wei, Steve Achiepo, Magnus Von Horn, Roman Klochkov) ainsi qu’un maître de l’animation, Gil Alkabetz. La séance sera suivie d’une rencontre avec nos invités : Hu Wei, Julien Féret et Jean Legrand (réalisateur, producteur et chef opérateur de « La Lampe au beurre de Yak ») et Steve Achiepo, Vincent Maury, Bastien Bourhis et Sékou Baradji-Diarra (réalisateur, co-scénariste et comédiens de « En équipe ».

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En pratique

► Date, horaire : jeudi 10 octobre 2013, à 20h30

► Durée du programme : 88’10’’

► Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris

► Accès : RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée), BUS 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon). Métro le plus proche : Ligne 7, arrêt Censier Daubenton (mais apprêtez-vous à marcher un peu…)

► Entrée : 6,50 €

► Réservations vivement recommandées : soireesformatcourt@gmail.com

Etrange Festival, flashback sur le programme 5

Ultime programme de courts métrages de cette 19ème édition de l’Etrange Festival, la sélection n°5 cultive, comme celles qui l’ont précédé, un imperturbable éclectisme, sans perdre de vue les exigences de sa ligne éditoriale.

Film très attendu récompensé du Prix Canal + et du Prix du Public à l’Etrange Festival, « The Voice Thief », réalisé par Adan Jodorowsky (aka Adanowsky), organisait sa première à l’occasion de cette projection. Adapté de la nouvelle El Ladrón de Voces de son père Alejandro Jodorowsky (« El Topo », « La Montagne Sacrée »,…), il dépeint un monde qui est familier à celui des films du réalisateur de « Santa Sangre ». On notera également l’influence importante des derniers films de Luis Buñuel (comme « Cet obscur objet du désir » ou « Le charme discret de la bourgeoisie »), notamment dans son goût pour la transgression, son rapport ambivalent à la religion chrétienne et à la culpabilité. Respectueux de cet univers et prompt à jouer avec ses codes, il développe un conte baroque aux couleurs chatoyantes dont nous vous proposons de découvrir un extrait.

Des étals des marchés à la poêle à frire, le destin pathétique d’un poisson prend des airs de tragi-comédie dans « Una Furtiva Lagrima » de Carlo Vogele. La voix magnifique d’Enrico Caruso accompagne le dernier voyage de ce poisson transformant avec beaucoup d’humour ce célèbre air d’opéra en une complainte hilarante.

« Duck Became Swan » de Stefanie Sixt ressemble à s’y méprendre à une vidéo de Vjing, accompagnant la musique instrumentale très cinématographique de Markus Mehr. Mêlant variations de lignes et textures numériques accidentées, ce film expérimental allemand n’est pas inintéressant, et même parfois assez hypnotique – on en vient, par exemple, à imaginer des visages et des corps se formant parmi les lignes -, mais il est extrêmement abscons et ennuyeux sur la longueur.

Dans le film d’animation italien « Topo Glassato Al Cioccolato » de Donato Sansone (aka Milkyeyes), des gribouillis, faits dans la marge d’un cahier d’école ou d’un carnet quelconque, prennent vie et commencent à tournoyer dans les airs pour créer plusieurs visions de cauchemar surréalistes et violentes, alliant les corps, mélangeant les chairs humaines et animales, le tout évoluant dans une sorte d’enfer noir et blanc, raturé au crayon et au stylo-bille. Bénéficiant d’une animation trés fluide, rappelant au détour d’une scène le cube d’Hellraiser, ce petit film fascinant semble nous plonger dans la tête d’un écolier, en pleine construction personnelle, et qui serait à la merci de ses hormones et de son esprit.

Une mystérieuse vieille machine aux multiples leviers permet à celui qui l’empreinte de se transporter dans un autre lieu baigné par une eau trouble. « El Baile de Tres Cochinillas » de Esteban Arrangoiz filme un groupe d’hommes silencieux patientant dans une sorte de salle d’attente aux murs décrépis. Tandis que les touches du piano font se lever ces hommes, les mouvements de la caméra sont comme reliés à ceux des leviers actionnés à partir de la machine, créant un effet de distanciation saisissant. La lumière, l’ambiance et les décors de ce film sont soignés, contribuant ainsi à donner au film une certaine aura, à défaut d’apporter des éléments de réponses sur ces mystérieux mécanismes.

Vidéo-clip réalisé pour le groupe Mississippi Witch, « Bite Horse » de Sam Walker bénéficie d’une très belle mise en images signée Marcus Waterloo. Proche des univers obsessionnels de David Lynch, Chris Cunningham ou encore Tom Waits, le film met en scène un vieil homme handicapé, sous respirateur artificiel, qui se retrouve entouré de créatures lascives affolant sa libido, puis arrachant littéralement un salmigondis noir qui lui fait office de coeur. Malheureusement, le film manque un poil de personnalité, trop écrasé par ses références, et possède une symbolique pas toujours très fine. Reste de belles images léchées et évocatrices.

« Bendito Machine IV » de Jossie Malis Alvarez est un joli film d’animation espagnol s’inspirant des techniques du papier découpé pour décrire le voyage d’un homme parcourant le monde dans lequel il vit, et qui est devenu un gigantesque parc d’attractions technologique, rejetant d’énormes quantités de déchets toxiques. Arrivé au bout de sa course, l’homme se révèle être un astronaute amené à voyager sur une planète inconnue. C’est ce qu’il fera, mais c’était sans compter sur la découverte d’un monde plus vaste et à la nature plus luxuriante. Film de SF, réfléchissant sur les notions d’infiniment grand et infiniment petit, « Bendito Machine IV » s’enrichit d’une réflexion sur l’écologie, agencée avec pas mal de finesse.

Traduit par « Le Paradis des Lapins » dans nos contrées, « Hasenhimmel » d’Olivier Rihs est l’un des films les plus surprenants de toute la sélection, par son concept de départ très « cul-otté » qui consiste à mélanger pornographie et philosophie. Les concepts et idées philosophiques de Kant, Nietzsche, Heidegger, etc., se percutent et se combinent dans un grand débat intellectuel qui se double à l’écran d’ébats corporels triolistes où les chairs aussi s’assemblent et se télescopent. Tout cela dans une ambiance irréelle, cheap à souhait. Le but avoué de vulgarisation ludique est atteint haut la main et fait de cette œuvre un film d’utilité publique en quelque sorte…

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Pour finir, « Human Meat Factory » de Anna Han est un film d’animation australien qui dénonce sans détours les supplices faits aux animaux d’élevages en remplaçant ces derniers par des poupées ou des figurines à l’effigie d’êtres humains et les plaçant au milieu d’élevages intensifs. A défaut d’être subtil, le film est pour le moins efficace.

Julien Savès et Julien Beaunay

Articles associés : Etrange Festival, retour sur les programmes courts 3 et 4, Etrange Festival, programme de courts 1 et 2

Les Jours d’avant de Karim Moussaoui, élu Prix Format Court au Festival International du Film Francophone de Namur (FIFF) !

Le 28ème Festival International du Film Francophone de Namur (FIFF) s’est clôturé ce vendredi 4 octobre. Pour la première fois, Format Court y a attribué le Prix Format Court du Meilleur Court Métrage international. Parmi les douze films en  compétition, le Jury Format Court (composé de Katia Bayer, Marie Bergeret, Juliette Borel, Adi Chesson et Géraldine Pioud) a choisi de récompenser le film « Les Jours d’avant » de Karim Moussaoui pour la maîtrise de sa mise en scène, sa narration à double regard et sa façon très personnelle de filmer l’adolescence.

En guise de prix, Karim Moussaoui bénéficiera d’un dossier spécial sur Format Court. Son film sera également projeté le jeudi 12 décembre 2013 lors de la séance Format Court organisée au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Pour information, le film vient également de remporter le Prix du Jury au FIFF.

Les Jours d’avant de Karim Moussaoui. Fiction, 47′, France, Algérie, 2013, Les Loupiottes, Taj Intaj

Les Jours d’avant-Karim-Moussaoui

Synopsis : Dans une cité du sud d’Alger, au milieu des années quatre-vingt-dix.
 Djaber et Yamina sont voisins, mais ne se connaissent pas.
 Pour l’un comme pour l’autre, il est si difficile de se rencontrer entre filles et garçons, qu’ils ont presque cessé d’en rêver.
 En quelques jours pourtant, ce qui n’était jusque-là qu’une violence sourde et lointaine éclate devant eux, modifiant à jamais leurs destins.

Festival International du Film Francophone de Namur 2013, le palmarès

Ce vendredi 4 octobre, le 28ème Festival International du Film Francophone de Namur s’est clôturé par la cérémonie de remise des Bayards d’Or. Trois films se sont dégagés du palmarès court : « Welkom » de Pablo Munoz Gomez (Belgique), « Mouettes » de Zeno Graton (Belgique) et « Les Jours d’avant » de Karim Moussaoui (Algérie/France).

Prix officiels remis par le Jury (composé de Grégoire Colin, Gerlando Infuso, Erika Sainte, Marie-Elsa Sgualdo, Miguel Valverde)

Compétition internationale

Bayard d’Or du Meilleur Court Métrage : « Mouettes » de Zeno Graton (Belgique)

Prix du Jury : « Les Jours d’avant » de Karim Moussaoui (Algérie/France)

Compétition nationale

Prix du Meilleur Court Métrage : « Welkom » de Pablo Munoz Gomez (Belgique)

Prix du Jury : « Septembre » de Salomé Richard (Belgique/France)

Prix d’interprétation : Judith Williquet dans « Mouettes » de Zeno Graton (Belgique)

Prix de la Meilleure photographie : Juliette Van Dormael pour « Mouettes » de Zeno Graton (Belgique)

Prix du Meilleur clip : « Papaoutai » de Stromae réalisé par Raf Reyntjens (Belgique)

Autres prix

Prix Format Court du Meilleur Court Métrage international : « Les Jours d’avant » de Karim Moussaoui (Algérie/France)

Prix du Public Court Métrage : « Welkom » de Pablo Munoz Gomez (Belgique)

Prix BeTV – Court Métrage belge : « Welkom » de Pablo Munoz Gomez (Belgique)

Etrange Festival, retour sur les programmes courts 3 et 4

La 19ème édition de l’Etrange Festival qui s’est terminée il y a 15 jours est restée résolument fidèle à sa ligne éditoriale, ouverte aux quatre vents, avec une appétence toute particulière pour les films irrévérencieux et inclassables. Les programmes courts 3 et 4 que nous vous proposons de découvrir n’ont pas dérogé à la règle.

Le programme n°3 commençait avec un film d’animation et d’anticipation « Last Breath » réalisé par Ying Ping Mak, qui dépeint une société devenue intolérante, représentée par un lapin faussement naïf. Yeuk Seng, jeune employé de bureau, comprend qu’il est devenu un paria et tente de continuer à vivre dans une ville où il n’a plus sa place. Pour échapper à la surveillance de la police, il ingère un produit qui provoque des effets secondaires indésirables. Dans ce film, le décalage entre la violence de la répression et sa représentation est saisissant : tandis que la fuite en avant du personnage s’intensifie, le monde qui l’entoure se fait de plus en plus oppressant et angoissant. L’utilisation habile de sons et d’un certain type de graphismes inspirés des jeux vidéo des années 80 (8 Bits) participe également à ce jeu en eaux troubles.

On continua avec « Fist of Jesus », biopic espagnol désopilant sur la vie du plus célèbre habitant de Nazareth. Suite à l’un de ses sermons sur la montagne, Jésus – accompagné de son fidèle compagnon Judas – est conduit devant le corps inerte de Lazare. Le miracle a lieu : Lazare se réveille alors d’entre les morts… transformé en zombie ! Avec brio et humour, David Munoz et Adrian Cardona revisitent ici plusieurs épisodes de la vie de Jésus, quelque part entre « La vie de Bryan » des Monty Pythons et les joyeux drilles de « Shaun of the Dead » réalisé par Edgar Wright. On est d’autant plus curieux que le tandem prépare actuellement un long métrage qui répond au doux nom de « Once upon a time in Jerusalem ».

« Lonely Bones » est le nouveau film de Rosto, artiste protéiforme qui s’est d’abord fait connaître avec ses romans graphiques (en particulier « Mind My Gap ») qu’il a ensuite adapté en courts métrages. Avec « Lonely Bones », il signe un deuxième film inspiré du projet « Thee Wreckers » après « No Place Like Home », réalisé en 2008.

Le réalisateur poursuit ici son exploration des mondes sombres et tourmentés : on y voit un homme à la tête trouée s’échapper de sa chambre et errer dans un monde abandonné, où le temps et l’espace se confondent. Comme dans les précédents films de Rosto, les ambiances lugubres et inquiétantes sont particulièrement réussies, laissant le spectateur se perdre dans l’impénétrable univers de cet Hollandais qui ravira les amateurs de “mythologie lovecraftienne”.

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Voir le film en entier en cliquant sur la photo

Phillip Barker continue lui aussi à cultiver ses sujets de prédilections. Avec « Malody », il brouille les pistes et les repères spatio-temporels en livrant un film énigmatique qui joue habilement avec la perception du spectateur et les codes de la fiction. Entre expérimentation et trouvailles visuelles, voici bel et bien un film malade et déconcertant à l’image de son personnage principal, dont nous vous invitons à retrouver la critique sur le site.

Simple et efficace, « Plug & Play », prix Canal + au Festival de Clermont-Ferrand 2013, de Michael Frei est un film d’animation mettant en scène les opposés et ses contraires en noir & blanc avec des prises électriques mâles et femelles qui cherchent à s’emboîter. On pourra y voir ce que l’on veut, mais ce qui est sûr c’est que le charme opère. On poursuit avec « Rauch und Spiegel » de Rick Moore, une jolie digression australienne, symétrique et élégante qui transforme un numéro de trapèze de cirque en volutes poétiques.

Enfin, « Welcome and… our condolences » de Leon Prudovsky, est un faux documentaire teinté d’humour noir racontant les déboires d’une famille russe émigrant en Israël en 1991, au moment de l’éclatement de l’U.R.S.S, qui se retrouve bloqué à l’aéroport avec le corps inerte de leur vieille tante morte avant l’atterrissage de l’avion. Avec un ton enlevé et amusé, le réalisateur choisit de filmer une série de scénettes, adoptant le point de vue de l’enfant apprenti cadreur, témoin candide des tractations et stratagèmes des adultes et des quiproquos et situations cocasses en tout genre. Le film, léger et divertissant, avait remporté le Prix de la Jeunesse au dernier Festival de Clermont-Ferrand.

Le programme n°4 de l’Etrange Festival s’ouvre, lui, sur un film d’animation slovène à l’humour grinçant, « Pandy » de Matúš Vizár, où l’on découvre les nombreuses métamorphoses qui ont amené le panda à devenir ce qu’il est, mais aussi l’être humain à en faire l’attraction vedette d’un zoo. A travers les turpitudes darwiniennes d’un des derniers pandas sur terre et ses problèmes existentiels, on entrevoit avec beaucoup d’ironie une vision pour le moins désenchantée de l’humanité et de la faune terrestre.

On prend de la hauteur avec « Parasite Choi » réalisé par Damien Steckpour, sorte d’introspection d’un homme errant au milieu de montagnes arides et reculées. Au service de ses visions, 15 artistes issus de 10 pays différents ont collaboré avec le réalisateur pour concevoir des effets spéciaux de toute beauté : une mise en image non sans emphase, un film en forme d’objet d’art.

On tombe ensuite sans prévenir au milieu d’un cauchemar halluciné aussi gore qu’hilarant : le très réussi « Perfect Drug » du Flamand Toon Aerts ou comment une banale livraison de drogues sur le parking d’un hôtel se transforme en un véritable exutoire. Exubérant et joyeusement timbré, le réalisateur joue avec les codes du film noir pour prendre la tangente et filmer les hallucinations de ses personnages (qui rappellent celles qu’on avait pu voir dans « Trainspotting » de Danny Boyle). Une direction artistique très soignée (production : Koen Mortier), un casting tout à fait remarquable. On a hâte de voir le prochain film de Toon Aerts !

Tandis que le film s’achève et que les drogues continuent a produire leurs effets, on peut voir « Shift » réalisé par Max Hattler, un film en stop motion de 3 minutes où les objets et les formes se frôlent, s’assemblent pour créer des visages ou des silhouettes familières.

Un véritable bad trip visuel surgit alors de l’écran pour près de 30 minutes avec « Vexed » du collectif Telcosystems. Des lignes instables et magnétiques envahissent la salle, accompagnées de sons répétitifs, faisant varier les couleurs et notre persistance rétinienne. Les motifs visuels et les sons reviennent inlassablement avec, à chaque vague successive, une légère nuance : une véritable expérience sensorielle, de quoi hypnotiser définitivement et durablement les spectateurs.

On sort du tunnel pour finir ce programme avec « Solipsist » de Andrew Thomas Huang qui nous propose un essai visuel riche en couleurs et en interprétations, où trois formes distinctes et complémentaires se rejoignent à la fin du film dans une éclatante et nébuleuse explosion. Dualité, matières et mouvements : le réalisateur capture avec virtuosité ces fulgurances dans ce voyage onirique. Un véritable régal pour les yeux.

Julien Beaunay

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Soirée Bref n° 147, mardi 8 octobre, au MK2 Quai de Seine : « Des âges de l’amour »

Évoquer l’amour à propos de ces trois films ne signifie pas que chacun d’eux tourne autour de cette question. Celle-ci intervient au contraire à chaque fois selon une tonalité particulière, tantôt comme un léger ingrédient, tantôt comme une note dominante, une couleur plus ou moins tendre, plus ou moins passionnelle. On peut tout aussi bien affirmer que chacun déploie, en toute autonomie, son style, ses questionnements, sa sensibilité pour porter un regard nuancé sur un sujet de société, nous perdre et nous faire rire d’un dérèglement sentimental, flirter d’une manière toute personnelle avec le surnaturel. Que ces films s’accordent tout en étant dissemblables n’est-il pas aussi une façon de parler d’amour ? (Jacques Kermabon)

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Programmation

OÙ JE METS MA PUDEUR de Sébastien Bailly, 2013, couleur, 20 mn, DCP. Réalisation et scénario : Sébastien Bailly. Image : Sylvain Verdet. Son : Marie-Clotilde Chéry, Alexandre Hecker et Christophe Leroy. Montage : Cécile Frey. Musique : Laurent Levesque. Interprétation : Hafsia Herzi, Marie Rivière, Bastien Bouillon, Donia Mohamed et Abdallah Moundy. Production : La mer à boire Productions
Syn. : Hafsia, étudiante en histoire de l’art, va devoir enlever son hijab pour passer un oral. Elle se rend au Musée du Louvre pour observer l’œuvre qu’elle va devoir commenter

KINGSTON AVENUE d’Armel Hostiou. 2012, couleur, 43 mn
Réalisation : Armel Hostiou. Scénario : Armel Hostiou et Vincent Macaigne. Image : Mauro Herce. Son : Romain Lebras. Montage : Nicolas Sburlati. Musique : Other Lives “For12”. Interprétation : Vincent Macaigne, Kate Moran, Sofie Rimestad et Murray Bartlet. Production : Independencia Productions.
Syn. : Vincent a suivi la femme qu’il aime à New York. Mais rien ne va plus avec elle. Entêté, il va tout faire pour essayer de la récupérer.

LE TABLEAU de Laurent Achard. 2013, couleur, 30 mn, DCP. Prix du GNCR au festival Côté court de Pantin 2013.
Réalisation et scénario : Laurent Achard. Image : Georges Diane et Rémy Mestre. Son : Emmanuelle Villard et Agnès Szabo. Montage : Nelly Aullivault et Catherine Quésemand. Interprétation : Fred Personne, Thérèse Roussel, Pascal Cervo et Mireille Roussel. Production : Les Films du Worso
Syn. : Au crépuscule de leur vie, Odile et Marcel s’aiment toujours. Atteinte d’une maladie incurable, Odile doit être hospitalisée. Sentant la fin proche, le couple a décidé de se donner la mort pour ne pas être séparé. Le temps d’un dernier dimanche.

Infos

Séance le mardi 8 octobre à 20h30
MK2 Quai de Seine – 14 Quai de la Seine  – 75019 Paris
M° Jaurès ou Stalingrad
Tarif : 7,90 € (cartes illimitées acceptées)

Cartoon d’Or 2013 attribué à « Head Over Heels » de Timothy Reckart

Le Cartoon d’Or est un prix pan-­Européen pour les courts-­métrages d’animation. Il récompense chaque année le « meilleur des meilleurs » courts-­métrages puisque seuls peuvent concourir les films ayant déjà été récompensé dans les plus grands festivals européens. Il a été créé par l’association CARTOON dans le but de promouvoir les talents de l’animation européenne et de créer un lien entre les artistes et l’industrie du dessin animé. De grands noms ont été récompensés par ce prix, tels que Nick Park, Sylvain Chomet, Mark Baker, Michael Dudok de Wit ou encore Jacques-­Rémy Girerd.

Cette année, six films étaient en lice pour le Cartoon d’Or 2013. Le 19 septembre dernier, à Toulouse, lors du Cartoon Forum, la plate-forme de coproduction pour les séries d’animation, le Cartoon d’Or a été attribué à un film d’écoles, « Head Over Heels » de Timothy Reckart et Fodhla Cronin O’Reilly (Royaume-Uni, 10′, Prod : NFTS).

Synopsis : Après de longues années de mariage, Walter et Madge ont pris de la distance : il vit sur le sol et elle, au plafond. Lorsque Walter décide de donner une cure de jouvence à leur vieille romance, leur équilibre précaire s’en trouve bouleversé, et ce couple incapable de s’accorder sur la définition du haut et du bas doit trouver le moyen de sauver son mariage.

Le jury du Cartoon d’Or 2013, composé du producteur Didier Brunner (Les Armateurs -­ France) et des réalisateurs Anca Damian (Roumanie) et Enrique Gato (Espagne), a sélectionné les finalistes parmi près de 30 courts-­métrages primés dans les festivals d’animation européens, partenaires de CARTOON. Les lauréats du Cartoon d’Or 2013 ont remporté une aide financière de 10 000 EUR grâce au soutien du Programme MEDIA de l’Union européenne.

Prochaine soirée Format Court, le jeudi 10 octobre 2013 au Studio des Ursulines !

Après le succès de la reprise des séances Format Court le jeudi 12 septembre dernier, Format Court vous convie à sa nouvelle projection de courts, le jeudi 10 octobre prochain, à 20h30, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Pour ce deuxième rendez-vous de l’année, nous vous proposons une balade cinématographique  inédite en présence des équipes, comme à l’accoutumée : Hu Wei, Julien Féret et Jean Legrand (réalisateur, producteur et chef opérateur de « La Lampe au beurre de Yak ») et Steve Achiepo, Vincent Maury, Bastien Bourhis et Sékou Baradji-Diarra (réalisateur, co-scénariste et comédiens de « En équipe »).

Programmation

En équipe de Steve Achiepo. Fiction, 21’10’’, 2012, France, Shaker Production, ChevalDeuxTrois. Prix UniFrance du court-métrage 2013, 1er prix Talents en court au Festival Cinébanlieue 2012. En présence de l’équipe

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Synopsis : Cergy, banlieue parisienne. Bastien, seize ans, vient de remporter un match décisif avec son équipe. Alors qu’il célèbre la victoire, Sékou, son meilleur ami, lui fait part d’une nouvelle fracassante devant l’ensemble de ses coéquipiers : Lauriane, la jolie fille à l’écharpe rouge, souhaite faire sa connaissance.

Der Da Vinci Timecode de Gil Alkabetz. Animation, 3′, 2009, Allemagne, Sweet Home Studio. Prix de la Meilleure Musique au Festival de Stuttgart 2009, sélectionné au Festival d’Annecy 2009.

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Synopsis : Une image est isolée afin de créer une animation basée sur ses détails. Divers fragments de cette image, avec pour points communs des formes similaires, nous permettent de découvrir des mouvements secrets.

Articles associés : la critique du film, l’interview du réalisateur

Utan Snö (Sans la neige) de Magnus Von Horn. Fiction, 35′, 2011, Suède, Pologne, PWSFTviT, VOST Ang. Grand Prix au Festival du court métrage de Leuven 2013. Sélectionné aux Rencontres Henri Langlois 2012 et au Festival Silhouette 2012.

Synopsis :  Linus a 16 ans et vient de tomber amoureux de la copine de son meilleur ami. Il ne pouvait pas imaginer que cela aurait de telles conséquences.

Article associé : la critique du film

Natasha de Roman Klochkov. Animation, 14′, 2012, Belgique, Cinnamon Entertainment. Meilleur Film d’Animation au Festival Aubagne 2013, Prix de la SACD au Festival Anima 2012.

Synopsis : L’ours russe Nicolaï émigre en Europe pour prouver à l’Amour de sa vie (sa merveilleuse ex-femme Natasha) qu’il n’est pas un looser. Un film sur un ours et l’Amour de sa vie…

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La lampe au beurre de Yak de Hu Wei. Fiction, 15’, 2013, Chine, France, Ama Productions. Sélectionné à la Semaine de la Critique 2013, Prix « European Film Academy » au Festival du court-métrage de Drama 2013. En présence de l’équipe

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Synopsis : Un jeune photographe ambulant et son assistant proposent à des nomades tibétains de les prendre en photo devant différents fonds.

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En pratique

► Date, horaire : jeudi 10 octobre 2013, à 20h30

► Durée du programme : 88’10 »

► Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris

► Accès : RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée), BUS 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon). Métro le plus proche: Ligne 7 – Censier Daubenton (mais apprêtez-vous à marcher un peu…).

Entrée : 6,50 €

Réservations vivement recommandées : soireesformatcourt@gmail.com

Retour en images sur la séance Format Court de septembre

Alors que notre prochaine prochaine séance de courts arrive à grands pas (jeudi 10 octobre), nous vous proposons de découvrir une sélection de photos de Julien Ti-i-Taming prises lors de la projection Format Court de septembre à laquelle vous avez été très nombreux à assister (107 personnes en salle !). Pour rappel, la programmation était sous le signe du Festival du court métrage en plein air de Grenoble, via une reprise parisienne de son dernier palmarès. Trois équipes de films primés étaient présentes à cette séance, de même que le directeur de la Cinémathèque et du Festival de Grenoble.

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Avec Guillaume Poulet, directeur de la Cinémathèque et du Festival de Grenoble

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Avec Xavier Legrand et Alexandre Gavras (réalisateur et producteur de « Avant que de tout perdre »)

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Avec Gilbert Hus, Augusto Zanovello et Arnaud Béchet (producteur, réalisateur, directeur artistique de « Lettres de femmes »)

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Avec Marc Stef, Clément Gonzalez, Baptiste Gondouin et Martin Malzieu (équipe de « As it used to be »)

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Adan Jodorowsky : « Un réalisateur n’est prêt qu’à partir de 30 ans, il faut qu’il vive et voit des choses. Il faut qu’il acquière une expérience, sinon il ne peut pas vraiment parler d’amour, de rapports humains »

À l’occasion du focus consacré à l’édition 2013 de l’Etrange Festival, nous avons rencontré Adan Jodorowsky (plus connu sous son pseudonyme musical, Adanowsky), suite à la première mondiale de son film baroque « The Voice Thief », lauréat du Grand Prix Canal + et du Prix du Public au festival. À travers une discussion centrée autour de ce film, Adan nous parle, avec passion, de son envie de se consacrer dorénavant entièrement à l’art cinématographique.

Adan-Jodorowsky

En présentant le film lors de la séance de l’Etrange, tu as dit que « The Voice Thief » est une idée que tu avais depuis 14 ans. Peux-tu nous en parler plus en détail ?

En fait, j’ai commencé avec une petite caméra vidéo Hi-8 qu’on m’a offerte pour mes 12 ans. Je me suis mis à faire des petits courts métrages avec un ami. Plus tard, un jeune producteur qui était assistant chef-op’ m’a dit : « J’ai de l’argent de côté. Tu ne veux pas faire un court ? ». J’ai dit d’accord et on a fait Echek.

J’avais 19 ans, j’étais vraiment très jeune. J’étais impatient, un vrai chien enragé ! Je ne savais pas du tout comment on faisait un film. Après cette expérience, j’ai compris que je voulais être réalisateur. J’ai commencé à chercher une histoire, et le titre d’un des contes écrits par mon père (ndr. Alejandro Jodorowsky), El Ladrón de Voces, m’a vraiment inspiré. J’ai commencé à écrire un scénario à partir de là.

J’ai rencontré des producteurs, mais j’avais beaucoup de difficultés à trouver un financement. Personne ne voulait de mon projet. Plutôt que de m’entêter à vouloir faire un film dont personne ne voulait, j’ai préféré changer de fusil d’épaule et je me suis mis à faire de la musique. Je me disais qu’en faisant ses preuves, tôt ou tard, on viendrait à moi et que je pourrais faire ce film qui me tenait tellement à cœur. Et c’est un peu ce qui s’est passé : une agence de pub a vu les clips que j’avais réalisé pour mes chansons et m’a contacté pour d’autres projets.

Tu as toujours essayé de faire des petites fictions dans tes clips. Cela t’a-t-il aidé ?

Oui, mais malheureusement je n’ai jamais vraiment eu la liberté de réaliser quelque chose de réellement abouti. Il y a aujourd’hui très peu d’argent pour les clips et souvent on reste à la surface sans pouvoir approfondir, ce qui est assez frustrant.

Pour « The Voice Thief », j’ai mis de ma poche l’argent que j’avais gagné sur ma tournée, des droits d’auteur (environ 20.000€). On a aussi fait un appel à dons (crowdfunding) sur Kickstarter avec lequel on a récolté $16.000. En cherchant un peu d’argent en complément ici et là, on a pu réunir la somme de 80.000€, ce qui est pas mal pour un court. Malgré cela, le film s’est fait très vite, en à peine 12 jours de tournage et 15 jours de préparation, durant lesquels on a dû trouver tous les costumes et les accessoires. C’était un boulot colossal.

Évidemment, il y a des choses que j’aurais aimé améliorer, ce n’est pas exactement le film que j’avais imaginé, mais on a tous fait du mieux que l’on a pu avec l’argent qu’on avait à disposition.

À 19 ans, tu t’es dit qu’il fallait attendre le bon moment pour réaliser ce film. C’est-à-dire ?

Je me disais : « Si ce n’est pas maintenant, ça veut dire que ce n’est pas le moment ». Je ne voulais pas forcer le destin, je voulais laisser les choses se faire naturellement. Les gens ne te font pas confiance quand tu n’as rien fait, et être le fils d’un artiste, cela n’est pas suffisant. On pourrait se dire : « C’est le fils de Jodo, il a fait son court, c’est facile pour lui ». Non, on n’imagine pas toutes les années que j’ai attendues pour réaliser ce film. Pendant tout ce temps, je n’ai pas fait que patienter, je faisais de la musique, mais aussi des mises en scènes de mes spectacles, sous forme de happenings. Grâce à toutes ces recherches artistiques, j’étais en quelque sorte préparé pour la réalisation de ce court.

Pendant toutes ces années, j’ai eu le temps de mûrir le film dans ma tête. C’est comme l’histoire de cet homme qui tire une flèche pendant des années vers la lune. Il tire cette flèche pour chasser la lune, sans jamais y parvenir. Mais en agissant ainsi, même si le but n’a pas été atteint, il est devenu le meilleur archer du monde.

Je pense sérieusement qu’un réalisateur n’est prêt qu’à partir de 30 ans, il faut qu’il vive et voit des choses. Il faut qu’il acquière une expérience sinon il ne peut pas vraiment parler d’amour, de rapports humains. Évidemment, il y a des surdoués, mais je pense qu’il faut être mûr pour faire un film.

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Le fait d’être musicien influe-t-il sur ta manière de réaliser ?

Cela m’apporte un sens du montage, notamment au niveau du rythme. La musique est très importante dans mes films. J’ai demandé à Rob (du groupe Phoenix – BOs des films « Grand Central » de Rebecca Zlotowski, « Maniac » de Franck Khalfoun) de faire la musique de « The Voice Thief », et j’ai calé le montage sur cette musique. J’ai choisi des morceaux instrumentaux qu’il avait déjà composés et que nous avons ensuite retravaillés ensemble.

Peut-être que dans mon prochain film, je ferai la musique moi-même. J’aurais pu le faire pour celui-ci, mais je voulais être plus disponible pour la réalisation, donc j’ai laissé de côté ma folie des grandeurs, et j’ai choisi quelqu’un qui travaille plus confortablement avec des synthétiseurs.

L’histoire de « The Voice Thief » est centrée sur une chanteuse qui perd sa voix. En voyant cela, on ne peut s’empêcher de penser au fait que tu es musicien, et que tout cela a un rapport. Quel a été ton cheminement par rapport à cette histoire ?

Le rapport à la musique est évident, mais je cherche avant tout à aller dans l’exubérance, dans le baroque, à filmer des personnages hors normes. Les films réalistes ne m’intéressent pas, ce sont plutôt des œuvres dans l’esprit de celles de Tod Browning, Fellini, Buñuel ou Dali que je veux faire.

Je voulais surtout faire un film sans concession. Quand on vous donne la possibilité de faire un court ou un moyen-métrage, il y a une question de liberté qui rentre en jeu. J’ai fait ce que je voulais, je n’ai pas eu de contraintes. Au début, on voulait me couper dix minutes du film, j’ai répondu : « Non ! On n’est pas à Hollywood ! ». Je me suis battu pour que le film fasse sa durée actuelle (24 minutes). J’ai fait ce film dans ces conditions pour être totalement libre.

 

Le film est habité par une mystique, il y a beaucoup de symbolisme. Y-a-t-il des clés de lecture ou c’est quelque chose qui est plutôt laissé au hasard ?

J’ai plein de clés de lecture et tous les symboles ont un sens pour moi dans le film. Après chacun est libre de les interpréter. Quand je tournais, j’étais en état de transe, je ne savais pas toujours ce que je faisais.

Par exemple, quand le sang blanc s’échappe des corps, c’est pour témoigner de leur pureté. Dans la scène où les mains du mari brûlent, c’est qu’il se sent consumé par la culpabilité. Enfin, lorsque Asia se transforme en diable, son mari découvre, grâce à cette vision de cauchemar, le monstre qu’elle possède en elle…

Comment s’est passée justement la rencontre avec Asia Argento et le travail qui en a découlé ?

À chaque fois que je sors un disque, je crée un personnage différent que je tue ensuite sur scène. Quelqu’un avait filmé l’une de ces mises à mort pendant un de mes concerts, et j’avais envoyé la vidéo à Asia. Elle avait adoré. Je lui ai demandé ensuite si elle voulait qu’on fasse un projet ensemble, et elle était d’accord.

J’ai tout de suite pensé à elle dans le rôle de la chanteuse. On s’est vus à Paris, on a pris une bonne cuite ensemble, on est allés danser et il y a eu une connexion immédiate. Et puis, on adore tous les deux les films d’horreur, je jouais à l’époque dans « Santa Sangre » qui avait été réalisé par mon père et produit par son oncle, Claudio Argento. Bref, tout cela s’est fait très naturellement.

Comment envisages-tu la suite ?

Ce que je souhaite, c’est de continuer à réaliser des films. J’en arrive même à penser à délaisser la musique pour m’y consacrer à plein temps. Je sais que je ne le ferai jamais complètement, je composerai sûrement des musiques de films, mais ce que j’aime par dessus tout maintenant, c’est le cinéma, et donc j’ai envie d’y mettre toute mon énergie.

J’ai d’ailleurs des projets de longs métrages. J’ai deux scénarios sous le coude, et je suis en train de chercher des producteurs pour m’accompagner sur ces projets. « The Voice Thief » était en quelque sorte une carte de visite, je voulais montrer que je pouvais réaliser, maintenant c’est à moi de concrétiser cette idée !

Propos recueillis par Julien Savès et Julien Beaunay

Etrange Festival, programme de courts 1 et 2

L’Etrange Festival qui s’est terminé il y a 10 jours a proposé cinq programmes de courts métrages. Pour les deux premiers, pas moins de 18 films ont été diffusés, tous très distincts dans leur réalisation et leur écriture. Ils témoignent cependant d’une certaine cohérence de programmation, à savoir donner à des films différents et originaux la chance de trouver leur place auprès du public.

Le programme n°1 fait la part belle à l’expérimental venu d’Allemagne, avec notamment « Hex Suffice Cache Ten » de Thorsten Fleisch, spécialiste du genre et adepte de figures visuelles et sonores agressives et radicales (il est notamment l’auteur du court métrage « Energie ! », source d’inspiration de Gaspar Noé pour « Enter The Void »). Avec ce nouveau film, Thorsten nous invite à un voyage cérébral mêlant corps humain et machine dans un univers cyberpunk et industriel, quelque part entre Shinya Tsukamoto et Marc Caro.

Autre film venu d’Allemagne, « Hollywood Movie » de Volker Schreiner est, quant à lui, un mashup d’extraits de films hollywoodiens dont il se sert, en ne gardant que quelques mots et gestes, pour pervertir le sens original des films en question et transmettre ses propres réflexions ironiques sur le cinéma américain. Un poil trop répétitif à la longue, le film est plutôt habile et efficace.

Flirtant aussi avec l’expérimental, « Set in Motion » de Michael Palm prend la forme d’un dispositif chorégraphique avec plusieurs danseurs contemporains qui interprètent un ballet au milieu de meubles, dans un hangar de stockage. Très ludique, le film se laisse aller à trop de systématisme, vite rébarbatif, mais il est suffisamment original dans son propos, c’est-à-dire la création d’un rapport particulier entre l’être humain et le meuble, pour susciter un intérêt particulier.

« Placeholder » de Doug Bayne, lui, se sert des techniques du Motion Design pour mettre en scène des images cauchemardesques, comme l’apparition d’un chat dément au fond d’une gorge humaine, le tout dans un objet filmique déjanté d’à peine 30 secondes. Œuvre complètement folle et revigorante, Placeholder parvient à remplir son office de transition, sous forme de décharge d’adrénaline.

De son côté, « Flytopia » de Karni Arieli, d’après une histoire de Will Self, est un trip hallucinatoire qui s’inscrit dans une veine fantastique classique. Un homme, peu habitué à la nature environnante de la campagne, notamment à la proximité et au bruit des insectes, sombre peu à peu dans une folie obsessionnelle, après avoir été laissé seul pendant quelques jours par sa compagne. Les insectes commencent à lui parler en formant des mots avec leurs corps, puis remplacent petit à petit sa compagne à tous les niveaux. Il est alors amené à passer un pacte avec eux. Dérangeant et intriguant, le film manque d’un poil de crédibilité, mais bénéficie d’une belle musique composée par Adrian Utley (guitariste de Portishead).

« The Great Rabbit » d’Atsushi Wada est un film d’animation, produit par Sacrebleu, qui sous des dehors d’objet filmique non identifié, prend l’allure d’un conte japonais. Très abscons et austère, ce film laisse plutôt froid quand l’on ne possède pas de clés pour le comprendre, malgré tout le succès et les récompenses qu’il a pu acquérir en festivals.

« The Giant » de David Raboy est un film sur le passage à l’âge adulte, avec tout ce que cela comporte comme sentiments de mort et d’abandon. Sombrant à plusieurs moments dans le cliché et le pathos, le réalisateur fait malgré tout preuve de bon goût au niveau de la bande sonore avec une succession de titres de Mazzy Star, Deerhunter ou TV On The Radio.

Enfin, « Alice in the Sky » de Jonas Meier et Mike Raths est un clip surréaliste réalisé pour le groupe suisse Rusconi (avec une participation de Fred Frith), dans lequel plusieurs animaux et êtres humains se donnent en spectacle dans une suite de tableaux absurdes et poétiques. Un univers très envoûtant et une belle prouesse technique.

Dans le programme n°2 de l’Etrange Festival, le cinéma d’animation se retrouve à l’honneur avec pas moins de trois films animés dans la sélection.

Déjà chroniqué sur le site, « Comme des Lapins » d’Osman Cerfon, produit par Je Suis Bien Content, suite du court métrage « Les Chroniques de la Poisse », voit l’homme à la tête de poisson (le même personnage que dans le premier film) participer à une fête foraine et redoubler de malchance dans tout ce qu’il entreprend. A mesure qu’il trébuche sur des obstacles, des bulles de malheur s’échappent de sa bouche et vont se loger au hasard sur plusieurs individus qui deviennent eux aussi malchanceux. Avec une idée de départ brillante et un humour caustique tout du long, « Comme des Lapins » était un sérieux choix pour le palmarès de cette année. Ce qui n’est pas le cas de « Lady and the Tooth » de Shaun Clark qui, malgré une histoire singulière qui utilise les dents comme bien le plus précieux dans la société, possède une animation particulièrement repoussante et assez éprouvante. Le style est bien entendu en accord avec l’ambiance générale assez malsaine, mais ne permet pas d’accrocher facilement.

« I’m Alone and My Head is on Fire » est, quant à lui, le nouveau délire hystérique de David O’Reilly, réalisateur très estimé, pratiquant un dessin numérique faussement naïf et hautement satirique. Cette animation d’à peine une minute, commandée pour une application iPad, raconte l’histoire d’un personnage avec la tête en feu qui traîne ce problème partout où il va, jusqu’à ce qu’il rencontre l’âme soeur, à l’apparence similaire. Au final, le fruit de leur passion deviendra un véritable jet de feu dévastateur. Même quand il doit composer avec les règles de la commande, l’univers de David O’Reilly reste toujours aussi drôle et irrévérencieux.

Le genre expérimental trouve également une place de choix dans ce programme n°2, avec notamment « Kreis Wr. Neustadt » de Johann Lurf, où dans un élan ludique et saugrenu, le réalisateur nous emmène à la rencontre de plusieurs dizaines de rond-points, vus depuis sa Vespa. « Last Day of Epsilon Eridani B » de Damon Mohl est, quant à lui, un film de SF plutôt alambiqué, qui voit un astronaute et son chien vivre leurs derniers instants sur une planète reculée et inhospitalière. « Trödelseide » de Simon Griesmayr relate l’histoire d’un propriétaire d’un magasin de curiosités, qui après s’être vu lui-même comme une curiosité, trouve un stratagème pour s’emballer de plastique et se mettre dans un coin, comme oeuvre à part entière. Le film est mal rythmé, cependant quelques images restent longtemps à l’esprit. Enfin, « Ahogo-IceCream » de Alisa Goddess, qui raconte la passion torride entre une crème glacée parlante et une fille, est un film musical expérimentant et jouant sur les textures, le rendu des couleurs et une symbolique sexuelle pas toujours de très bon goût.

Pour finir, deux fictions et un documentaire complètent cette sélection. « Elefante » de Pablo Larcuen est une comédie dramatique espagnole dans laquelle Manuel, looser magnifique, est victime d’une maladie pour le moins particulière : il se transforme petit à petit en éléphant. Alors que tout le monde le délaisse, son fils gardera intact son amour pour lui, au fil des années. Une comédie douce-amère, aux maquillages assez réussis, mais dont le propos aurait mérité d’être un peu plus creusé.

« The Voorman Problem » de Mark Gill est une fiction dramatique classieuse construite comme un épisode de la Quatrième Dimension. Le Dr Williams, interprété par Martin Freeman (« Le Hobbit », « Sherlock », « The Office »), doit examiner un prisonnier, M. Voorman, qui se prend pour Dieu. Alors que le septicisme est de mise pour le docteur, Voorman lui donne plusieurs preuves de sa bonne foi, notamment en rayant la Belgique de toute carte (private joke ou problème spécifique du réalisateur ?), et en échangeant sa place avec lui. Efficace et bien filmé, le récit aurait mérité d’être plus poussé, le film n’exploitant que très peu les possibilités de l’idée de départ.

Enfin, « A Story For The Modlins » de Sergio Oskam, évoqué au moment de Clermont-Ferrand (cf. critique), est un film documentaire fascinant qui, d’après une boîte d’archives retrouvées, retrace la vie d’Elmer Modlin et de sa famille, de leur repli sur eux-mêmes pendant des décennies et de l’obsession qu’ils ont nourrie autour de leur progéniture. L’idée brillante du film est de mettre cette histoire en parallèle avec l’information capitale comme quoi Elmer Modlin fut figurant sur « Rosemary’s Baby ». Quand on connait le mystère sulfureux entourant le film de Roman Polanski, notre imagination a vite fait d’associer tout cela au destin des Modlin et de favoriser une ambiance « d’inquiétante étrangeté ».

Julien Savès

Articles associés : Etrange Festival, flashback sur le programme 5, Etrange Festival, retour sur les programmes courts 3 et 4

Nouveau Prix Format Court au Festival International du Film Francophone de Namur (FIFF) !

Ce vendredi 27 septembre, s’ouvre la 28ème édition du Festival International du Film Francophone de Namur (FIFF). Depuis quelques années, nous suivons cette manifestation, présidée par Olivier Gourmet, qui met en avant la diversité de la Francophonie. Cette année, nous accompagnerons le festival autrement en y remettant pour la première fois un Prix Format Court parmi les douze films de la compétition internationale. Le Jury Format Court (composé de Katia Bayer, Marie Bergeret, Juliette Borel, Adi Chesson et Géraldine Pioud) consacrera un focus spécial au film primé. Celui-ci sera également projeté lors d’une séance Format Court au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Le Prix Format Court sera dévoilé lors de la clôture du festival, le 4 octobre prochain.

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Films en compétition internationale

– Mouettes de Zeno Graton (Belgique)

– La Tête en bas de Maxime Giroux (Québec)

– La Cible de Mounir Abbar (Maroc)

– Pride (Fierté) de Pavel G. Vesnakov (Bulgarie/Allemagne)

– Pour faire la guerre de Cosme Castro et Léa Forest (France)

– Claudiu et les poissons (Claudiu si caprii) de Andrei Tanase (Roumanie/Allemagne)

– Là où je suis de Myriam Magassouba (Québec)

– Welkom de Pablo Munoz Gomez (Belgique)

– Les Jours d’avant de Karim Moussaoui (Algérie, France)

– Cargo Cult de Bastien Dubois (France)

– Promenade (Plimbare) de Mihaela Popescu (Roumanie)

– Bonne espérance de Kaspar Schiltknecht (Suisse)

Projection des derniers films d’Affreux, Sales & Méchants Productions, demain au Cinéma Publicis Drugstore

Envie de voir des courts décalés à proximité des Champs-Élysées ? Ce vendredi 20 septembre, Affreux, Sales & Méchants, une maison de production parisienne vous propose de découvrir au Cinéma Publicis Drugstore une sélection de six nouveaux courts métrages produits cette année. Deux projections sont prévues, l’une à 14h, l’autre à 18h. L’accès est libre, il suffit juste de réserver !

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PROJECTION BELLE, PROPRE ET GENTILLE

Ce vendredi 20 septembre 2013, à 14h & 18h
Cinéma Publicis Drugstore, Paris
2 projections, 6 courts-métrages

LES FILMS

ᐅ I’m a Sharpener de Mahdi Lepart avec Jean-Baptiste Maunier, co-prod Full Dawa
ᐅ Sail me to the moon de Julien Gritte et Charles Jaeger
ᐅ Last Call de Camille Delamarre, co-prod Full Dawa
ᐅ La Ville est calme d’ Alexandre Labarussiat
ᐅ Death will be all Right de Wearetresgentil
ᐅ Mecs Meufs de Liam Engle

INFOS PRATIQUES

Vendredi 20 septembre 2013
Cinéma Publicis Drugstore
129 avenue des Champs Elysées
75008 Paris
14h & 18h
M° Champs Elysées / George V

La projection est suivie d’une soirée à Commune Image, 8 rue Godillot, Saint Ouen à partir de 21h.

Merci de confirmer votre présence par mail à : reservationsbpg@asm-prod.com

Etrange Festival : Retour sur les courts de la carte blanche Albert Dupontel

Invité de la 19ème édition de l’Etrange Festival à l’occasion de la sortie de son nouveau film, « 9 Mois Ferme », Albert Dupontel s’est fendu d’une carte blanche pendant le festival, à laquelle se rattachait une séance de courts métrages programmée par le réalisateur. Petit retour sur cette projection qui s’est avérée passionnante et qui a permis de comprendre quelques unes des influences du cinéma d’Albert Dupontel.

En guise d’ouverture, Albert Dupontel a présenté un film qui lui tient à cœur, à savoir « Star Suburb, la banlieue des étoiles » de Stéphane Drouot. Oeuvre culte pour toute une génération de cinéastes (Gaspar Noé et Lucille Hadzillovic en tête), ce court métrage de SF artisanal, réalisé avec très peu de moyens (dans la propre cuisine du réalisateur, dit-on), fait le grand écart entre chronique sociale désabusée, nouvelle de SF anticipative à la Philip K. Dick et imagerie américaine inspirée des films de George Lucas ou de Steven Spielberg.

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Dans un futur proche, « quelque part dans une galaxie lointaine », la population pauvre est amassée dans des immeubles de banlieue suspendus dans l’espace et regroupés par nationalités. Réveillée par d’étranges bruits, Mireille, une jeune fille habitant le building français avec sa famille, se lève en pleine nuit et découvre, à la fenêtre de sa cuisine, un vaisseau appartenant à une station de radio, qui est à la recherche de gens éveillés pour leur faire gagner de l’argent. Mireille y voit une opportunité pour assouvir ses désirs de princesse comme dans les magazines, et va tout faire pour téléphoner à temps au standard de la radio pour récolter l’argent en question.

Critique féroce de la société consumériste moderne, écrasant les masses laborieuses et les rendant avides d’une « vie de magazine », « Star Suburb » étonne par la qualité de son récit qui s’inscrit parfaitement dans l’un des préceptes de la littérature d’anticipation, à savoir brosser le portrait de la société d’aujourd’hui en imaginant ce qu’elle pourrait devenir si tous ses mauvais côtés étaient amplifiés. Le film date de 1983 et reste toujours autant d’actualité.

Non exempt de défauts, dus en partie à un manque de moyens plutôt visible, « Star Suburb » reste ce film, d’une sincérité alarmante, non dénué d’humour, qui a vu la naissance d’un cinéaste qui ne put pas, par la suite, concrétiser ses idées dans d’autres films. Disparu l’année dernière, Stéphane Drouot oeuvrait sans doute dans un cinéma alternatif trop ambitieux pour trouver sa place dans le système étriqué du cinéma français. Gaspar Noé lui aura rendu un dernier hommage avec le film « Intoxication », dans lequel Stéphane se livre, sans fard, face caméra.

Deuxième film proposé dans cette carte blanche, « The Dentist » de Leslie Pearce, est un classique du burlesque (1932), qui met en scène W.C. Fields, star du music-hall de l’époque, dans le rôle d’un dentiste odieux, plus affairé à ses loisirs, comme le golf ou la chasse, qu’à sa supposée vocation.

À travers plusieurs séquences d’anthologie (un arrachage de dents impossible sur une grande patiente qui se tord de douleur dans tous les sens, un soin prodigué à un barbu dont la bouche est introuvable), ce petit film sans prétention dresse le portrait d’un personnage méchant et cynique, faisant preuve de misogynie et obnubilé par la surprotection de sa fille.

Malheureusement, le récit est plutôt ténu et n’est qu’un prétexte à un déchaînement d’humour caustique par l’un des premiers grands comiques trash du cinéma, dont on masquait à l’époque certaines répliques, jugées trop rudes pour les oreilles du grand public.

Pour terminer la séance, Albert Dupontel a choisi de projeter « The Mystery of the Leaping Fish », un film muet subversif et fascinant, réalisé en 1916 au sein des studios hollywoodiens, avec John Emerson à la réalisation, Tod Browning au scénario et D.W. Griffith à la production.

Pastiche irrévérencieux de Sherlock Holmes, ce film met en scène un détective scientifique, Coke Everyday (Coke Ennyday en VO), interprété par un Douglas Fairbanks survolté, qui, pour résoudre les énigmes auxquelles il se retrouve confronté, doit s’injecter et sniffer de la drogue en continu. Alternant situations cocasses et humour surréaliste (comme par exemple une scène de poursuite à dos de poisson gonflable au cours de laquelle Coke Everyday injecte des seringues de coke à « l’animal » pour qu’il soit plus performant), cette comédie, d’une liberté totale, détonne par sa réalisation hystérique et son ton ultra provoquant.

Que les créateurs de ce grand moment de folie aient été conscients ou non de la subversion dont ils ont fait preuve en faisant ce film (en témoigne la séquence d’épilogue, à la fois naïve et maline), il est très plaisant et surprenant de voir ce type de film aujourd’hui et de réaliser qu’ils n’ont pas du tout été inquiétés d’une quelconque censure à l’époque.

Julien Savès

Focus L’Etrange Festival 2013

Pour la troisième année consécutive, Format Court couvrait l’Etrange Festival (5-15 septembre, Forum des Images) et sa traditionnelle compétition de courts métrages. Films différents, alternatifs, curieux, trash, cartes blanches… : le point sur cette 19ème édition.

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Adan Jodorowsky, le grand gagnant du court à l’Etrange Festival !

La 19ème édition de l’Etrange Festival qui s’est tenu du 5 au 15 septembre au Forum des Images à Paris a doublement récompensé « The Voice Thief » d’Adan Jodorowsky, l’un des nombreux courts métrages en compétition cette année. Lauréat du Grand Prix Canal + et du Prix du Public, ce premier film teinté de psychédélisme et surréalisme a quelques accointances avec l’univers du père du réalisateur, Alejandro Jodorowsky. Il y a quelques jours, pendant le festival, Format Court a eu l’opportunité de rencontrer le réalisateur de « The Voice Thief » (entretien à venir). En attendant, voici les premiers éléments de ce film dans lequel on retrouve la troublante Asia Argento, le frère du réalisateur,  Cristobal Jodorowsky, ainsi que la musique rock de Rob, le claviériste du groupe Phoenix.

The Voice Thief d’Adan Jodorowsky – France / Chili / Etats-Unis – 2013 – 24’ – Fiction – Couleurs

Synopsis : Naya, chanteuse d’opéra, se fait étrangler par son mari Noev après une violente dispute et en perd sa voix. Alors que sa raison de vivre a disparu, elle menace de le quitter s’il ne répare pas le mal qu’il lui a causé avant minuit. Se sentant coupable, Noev déambule de nuit, désespéré, à la recherche de la voix parfaite pour se faire pardonner.