L’exercice de la comédie est délicat et souvent trop rare dans le milieu du court métrage. Peut-être parce qu’il est difficile de faire s’esclaffer le spectateur en 15 minutes de temps ou bien tout simplement parce que les organismes de financements des films courts ne sont guère très généreux envers ce genre plus léger. On notera pourtant que si peu de comédies remportent des grands prix lors de festivals, ils gagnent souvent le cœur du grand public et permettent généralement de reprendre son souffle entre deux films plus graves.
Dans le cas présent, deux frères, Just et Vital Philippot, se sont associés pour écrire ensemble le scénario, certes un peu cliché, mais tellement jouissif du film Tennis Elbow, présenté à Paris Courts Devant, où il est question d’un père de famille qui veut se prouver qu’il est encore capable de battre son fils aîné au tennis.
Nous nous retrouvons alors dans un décor digne des Bronzés font du ski, mais en demi-saison, entre le chalet familial de vacances et le fameux court de tennis qui servira de lieu de combat. Tous les éléments s’accordent avec le décor, pour donner un aspect « kitsch » et complètement « vintage » au film : image au grain très seventies, tenue du père, Philippe, se référant plus à John Mc Enroe qu’à André Agassi, accentuant son côté vieillot et ridicule, etc.
Philippe décide donc d’emmener ses deux fils, Yannick et Henri, faire un match de tennis sur le court du patelin. Seulement voilà : il a terriblement envie de « foutre une raclée » au grand de 15 ans qui n’en a rien à faire, tandis que le plus jeune ne rêve que de jouer avec son père qui ne le voit malheureusement pas.
Le match commence entre le père et le fils, et Henri sert d’arbitre sur sa chaise haute. De manière assez prévisible, Yannick bat aisément son père. Mauvais joueur, celui-ci commence à s’emporter et ne supporte pas que son fils se laisse distraire par des filles, à travers le grillage du court. L’ado, se prenant une réflexion assez embarrassante de sa part, se transforme alors en réelle machine à anéantir son paternel.
Le travail sur le son du film prend alors toute son ampleur, en accentuant largement les coups de raquette qui frappent, les balles qui fusent tels des missiles, le grillage qui claque, les soupirs d’essoufflement ou les cris de hargne. Père et fils entrent dans un réel défi l’un envers l’autre et aucun des deux n’est prêt à se faire battre, offrant une durée interminable à leur match.
La nuit est tombée et les deux joueurs poursuivent toujours le match, cette fois devant les habitants du village comme spectateurs, tel un combat de boxe. En effet, seul le court de tennis est éclairé grâce à des lampadaires lui donnant une allure de ring ou de scène de duel d’un film, devant des individus attentifs applaudissant à chaque point remporté. C’est à ce moment du film que vient se greffer la musique de Pablo Pico (« Dripped »), offrant une dimension héroïque supplémentaire au combat.
Philippe finit par subir une défaite face à son fils, à tous les habitants du village, ainsi qu’à sa femme Catherine, venue sur les lieux, inquiète de ne pas voir rentrer sa famille et découvrant que son fils a réussi à « tuer » son époux. Ce thème assez freudien traité avec légèreté et humour par Vital Philippot se termine tout de même par un happy end grâce au personnage de Catherine qui représente le pilier et le bon sens de cette famille. Celle-ci accompagne ses fils à grandir et à quitter le cocon, et soutient au même titre son mari ayant du mal à se voir vieillir.
Un mot sur l’interprétation des comédiens s’impose. Très justement incarnés par Philippe Rebbot (« ¿ Dónde está Kim Basinger ? »), Marc Chaulet (« Agalée »), Martin de Myttenaere et Catherine Vinatier, ils composent avec une terrible justesse et drôlerie une famille particulière, qui nous rappellerait presque notre propre famille.
J’ai vu ce court au festival de Clermont-Fd (+ grand festiva de court-métrage au monde) et effectivement c’est un des rares courts comiques. Il est très réussi et…bien vu sur les comportements(je joue au tennis..) !