Yousef est le troisième court métrage de Mohamed Hossameldin. Après Sotto Terra et Il Passo, le réalisateur et scénariste italo-égyptien renoue avec la question de l’identité. Sélectionné en compétition internationale au festival de Clermont-Ferrand, Yousef est un court-métrage d’une vingtaine de minutes qui donne le premier rôle à Jean-Christophe Folly. Cet acteur de théâtre, reconnu sur la scène contemporaine française et que l’on a pu voir dans Jeune Femme de Léonor Serraille, nous propose un jeu peu bavard et très expressif avec un potentiel émotionnel très fort.
Le comédien interprète un migrant d’Afrique Centrale qui vit en Italie. Il intervient pendant un viol et se sauve dès les premières lueurs des sirènes de police.
Il s’appelle Yousef, il est fils de parents migrants, on lui retire son titre de séjour dès l’ouverture. Un début abrupt, une image 4/3 qui l’enferme dans son impuissance, les couleurs crues et vives rappellent sa précarité constante. Citadin en Italie, il cuisine pour un restaurant gastronomique, c’est un chef reconnu. La nourriture travaillée et brute filmée en plongée verticale sur un fond blanc amène vers du rouge saignant, du jaune criard, des couteaux saillants. Un cadre qui ne respire pas, qui épouse la situation de Yousef s’affirmant en tant qu’italien tout en vivant dans une peur permanente, alimentant une colère qui gronde sans pour autant exploser.
Une vie construite sur des ruptures soulignées par un montage “cut “, où rien ne peut durer pour ce citoyen du monde qui n’est pas italien mais qui le parle, qui le cuisine, qui l’enrichit. Le montage du film offre une nouvelle logique qui rend le public actif. Rien n’est dit, pas de répétition, pas de redondance mais une narration pensée, une histoire à la temporalité linéaire qui nous paraît pourtant éclatée. Des coupes qui nous rapprochent de l’angoisse du personnage.
Dans Yousef, l’interprétation forte et subtile de Jean-Christophe Folly ne tombe pas dans un sentimentalisme dramatique. On est dans le dur, dans le raide mais aussi dans l’empathie sans pour autant se laisser engluer dans nos sièges confortables de spectateurs.