Composée de 20 premiers courts d’animation européens, la programmation des Plans Animés 2015 a brillé par son éclectisme rappelant que l’animation fait souvent preuve de plus de liberté et d’expérimentation que la fiction. Si le Jury Format Court a unanimement salué la poésie et la maîtrise de « Kijé » de la Française Joanna Lorho en lui consacrant un Prix Format Court (nous y reviendrons prochainement dans un focus spécial sur le site), d’autres courts de cette sélection valaient également le coup d’œil.
À commencer par « Entre chiens et loups » de Reza Amirriahi réalisateur iranien étudiant à La Poudrière, célèbre école de cinéma d’animation située à Valence par où sont passés notamment Paul Cabon (« Tempête sur Anorak ») et Benjamin Renner (« La Queue de la souris », « Ernest et Célestine ») pour ne citer qu’eux. Peinture animée dans un camaïeu de bruns « Entre chiens et loups », film de fin d’études, est le portrait de Sohab, jeune homme vivant à Téhéran qui, effectuant son service militaire, est contraint de réprimer violemment des manifestants. Extrêmement court, le film est sombre, faisant même appel aux figures picturales de Munch lorsque le cinéaste met en scène des manifestants aux visages déformés par leurs cris. Évidemment politique, le film critique un régime militaire et totalitaire dans une veine très différente de « Persepolis » de Marjane Satrapi. On suivra avec attention le parcours de cet auteur doté d’une belle maitrise.
On a également été marqué par « Port Nasty » de Rob Zywietz et « Oripeaux » de Sonia Gerbeaud et Mathias de Panafieu, deux films où il est notamment question de chasse, à la baleine pour l’un et aux coyotes pour l’autre. Si l’héroïne d’ « Oripeaux » évoque inévitablement la figure japonaise de Princesse Mononoké avec sa peau de bête sur le dos et son caractère guerrier quand elle défend une meute de coyotes contre des hommes qui cherchent à les abattre, le héros de « Port Nasty » (Prix Arte à Angers) est quant à lui plus clairement une victime, tentant maladroitement de se faire accepter par une bande de pêcheurs bourrus qui l’initie à la pêche à la baleine, dans une ambiance de fin du monde. Si l’une sauve ses protégés à quatre pattes, l’autre devra tuer pour ne pas être encore plus ostracisé.
Si les animaux restent une valeur sûre en animation (on passera sur « Chaud lapin » et « Imposteur » qui tout deux, mettent en scène des créatures animales hybrides à la manière des créatifs de chez Orangina, concept toujours un peu malaisant comme on dit au Québec), d’autres réalisateurs prennent le parti d’un univers plus proche de l’abstraction, ce qui est le cas de « Hunger » de Petra Zlonoga qui part du végétal (la graine) pour en venir à l’animal (l’œuf) et enfin à l’humain (la rencontre). Joli film avec un travail réussi sur le son, « Hunger » offre quelques moments de poésie bien pensés et loin de toute facilité.
On notera tout de même que peu après la clôture de la 27e édition du Festival d’Angers, nous apprenions la disparition du Festival de Vendôme qui venait en décembre dernier de fêter sa 24e année, un autre festival cher à la rédaction de Format Court et dont nous étions également partenaires.
Vendôme, tout comme Angers, a toujours privilégié la découverte de nouveaux auteurs et plus particulièrement à travers des programmes de courts. Si le succès chaque année plus important du Festival de Clermont-Ferrand vient rappeler l’importance de ce format, la suppression d’un festival reconnu et respecté comme Vendôme est clairement un mauvais signal pour la suite. Quel avenir pour Pantin, Brive, Belfort, Brest et les autres ? Les festivals, premiers lieux de diffusion du court métrage seront-ils sacrifiés par mesure d’économie et de rentabilité ? Restons vigilants, sur la durée.