« Hjonabandssela », en sélection ces jours-ci à Brest, prend place dans un décor paradisiaque. Les deux personnages principaux apparaissent dans le plan d’ouverture, filmés au dessus des hanches en plan moyen, comme deux anges nus et potelés, devant un fond de nuages blancs. Le deuxième plan du film, plan d’ensemble, révèle en fait deux sexagénaires faisant leur sport du matin en maillot de bain au bord d’une merveilleuse piscine en plein air, située dans la campagne islandaise, devant lacs et montagnes.
Ces deux hommes, célibataires, sont deux amis de longue date qui travaillent et passent leurs loisirs ensemble, entre promenades, sport, parties d’échecs et goûters. Inséparables, ils le sont jusqu’au jour où une femme de leur âge fait irruption dans cette piscine et leur vie. En très peu de temps, leurs habitudes vont changer et leur lien va se briser brutalement quand l’un des deux aura la mauvaise idée d’inviter l’intruse à la fête d’anniversaire de son ami.
Après avoir eu un moment d’attendrissement pour ces deux hommes maladroits et timides face à cette femme convoitée qu’ils ne savent pas comment aborder, le spectateur est pris d’empathie pour l’être délaissé, abandonné par son ami. À soixante-sept ans, cet homme va devoir se réinventer un rythme de vie, seul.
Au-delà de cette empathie ressentie, le calme des longs plans fixes sur cette région reculée d’Islande apaise. Avec sa lumière grise et ses couleurs pâles et froides, le pouvoir lénifiant de l’île s’empare du film. Ce rythme lent s’accorde avec la vie de ces hommes en proie au vieillissement et à l’ennui.
La séduction et la nudité des hommes d’âge mûr, bel et bien réelles, sont rarement montrées au cinéma. Jörundur Ragnarsson, jeune réalisateur, s’intéresse à la vieillesse pour la magnifier et lui rendre l’intérêt qui lui est dû. Acteur de profession, il réalise un premier film réussi, abordant avec justesse et originalité des thèmes aussi universels que la jalousie et l’amour en les transposant sur un petit groupe de personnes âgées.