En 3 minutes et 4 « chouettes », Katia Bayer, la Rédactrice en chef de Format Court, vous présente notre campagne sur Ulule, « Cours, Format, Cours ! » et vous invite à participer à la soirée de soutien au projet, ce lundi 4 novembre, dès 19h30, à Paris, dans le 11ème arrondissement.
Pour rappel, notre appel à participations se clôture le 15 novembre 2013. Actuellement, nous nous rapprochons de notre objectif (908 € sur les 2.000 € prévus) mais nous avons encore et toujours besoin de votre générosité pour la réussite de cette collecte. Désireux de nous aider à mener à bien cette campagne, à la fois utile et artistique, de renforcer notre lien au court et de remporter plein de contreparties formidables ? Soutenez-nous, encore et toujours !
Participez, vous aussi, à notre campagne « Cours, Format, Cours ! » Envoyez-nous votre photo/vidéo de soutien en lien avec Format Court & le court métrage ! Les photos reçues seront publiées sur le site, la page Ulule consacrée à notre projet et les réseaux sociaux.
ÉVÉNEMENT A NE PAS MANQUER. À mi-parcours de notre campagne, nous organisons une soirée de soutien ce lundi 4 novembre, à partir de 19h30, au bar Les Pieds sous la Table, 130 rue Saint-Maur, 75011 Paris (métros proches : Goncourt, Couronnes, Parmentier). Venez nous rencontrer autour d’un verre (happy hour jusqu’à 21h), vous restaurer sur place, papoter avec des professionnels présents (réalisateurs, producteurs, comédiens, organisateurs de festivals …) et nous aider à participer au renouveau de Format Court.
Les interviews de programmateurs et de responsables de festivals se font rare sur notre site. Délaissant un temps les réalisateurs, nous avons rencontré au Festival de Namur l’un des responsables du Jury court. Co-directeur d’IndieLisboa, l’un des festivals phares du Portugal, Miguel Valverde est passé par la programmation avant d’avoir eu envie il y a 11 ans de montrer d’autres films, en prenant en considération quatre mots-clés : l’émotion, la différence, la pureté et la nouveauté. Entretien autour du cinéma portugais et français, de la programmation et de l’importance de la rencontre en salle.
Tu as monté un festival important à Lisbonne, IndieLisboa. Quelle place y occupe le court métrage ?
Mon festival est spécialisé dans le cinéma indépendant. Nous avons une compétition de longs et une autre de courts, tous genres mélangés : documentaire, fiction, cinéma expérimental. Nous avons décidé de faire les choses en miroir : tout ce qui va pour le long va pour le court. Le même nombre de jurés juge les films de chaque format, en court, la sélection de 42 films représente la même durée que celle des neufs longs en compétition. Nous essayons également de faire venir tous les réalisateurs de courts. On fait ça car on croit que le court métrage n’est pas une espèce de passage au long mais que c’est un monde à part entière. Un réalisateur de courts va chercher à faire des choses pures, généralement avec peu de moyens et une équipe réduite. Si on sent qu’un film est libre de contraintes mais en même temps très abouti, c’est ce qu’on aime appeler un excellent court métrage. À Indie, on aime proposer un panorama mondial et montrer des courts métrages de tous les continents, que ce soit l’Amérique, l’Europe et les pays francophones dont nous nous sentons d’ailleurs très proches au Portugal.
De quelle façon êtes-vous proche de la francophonie ?
Jusqu’aux années 1980, on apprenait le français à l’école, avant l’anglais. Puis, on a beaucoup migré en France, en Suisse, au Luxembourg. Je pense que la langue et les mots forment une espèce de coalition, qu’on ne sent pas avec les Espagnols par exemple. Si l’on compare notre cinéma avec le leur d’ailleurs, nous allons le trouver commercial et nous sentir plus proches du cinéma français. Notre maître, Manoel de Oliveira, est surtout reconnu en France et cela a beaucoup aidé à le faire reconnaitre au Portugal. C’est le cas pour d’autres réalisateurs aussi.
Est-ce qu’artistiquement, le cinéma français et le cinéma portugais peuvent se retrouver ? Est-ce qu’il y a un intérêt ou un traitement d’idées qui te semble similaire ?
Ma vision personnelle est que le cinéma français est très ouvert, avec beaucoup de films différents. Je me sens plus proche du film d’auteur, comme celui de Claire Denis. Il me semble que la proximité avec la littérature que l’on peut ressentir a beaucoup à voir avec le cinéma portugais. Je le vois aussi dans la façon qu’ont certains comédiens et comédiennes de jouer, de dire les mots. En 1996, j’habitais à Paris et Manoel de Oliveira présentait à la Cinémathèque française une nouvelle version de son premier film. A cette époque, le directeur de la Cinémathèque trouvait notre cinéma très mystérieux et pensait que cette sagesse allait produire dans le futur des exemples très aboutis chez nos jeunes cinéastes, avec un certain succès en France. Finalement, une nouvelle génération se réalise grâce aux auteurs et à la reconnaissance entre ces deux pays.
Tu penses que les récompenses au Portugal ont moins d’impact que celles venues de l’étranger ?
Oui. Pour te donner un exemple, le court métrage « Arena » de Joao Salaviza qui a gagné la Palme d’or du court métrage à Cannes en 2009 avait aussi remporté deux semaines avant, à IndieLisboa, le Grand prix de la compétition nationale. La première mondiale du film y avait eu lieu. Quand le film a remporté ce prix au Portugal, la nouvelle a fait l’objet de cinq lignes dans le journal national Público. Lorsqu’il a remporté la Palme d’or, il en a fait la couverture ! Bien évidemment, la répercussion internationale avec un festival comme Cannes, Berlin ou Venise, c’est quelque chose de complètement différent. C’est une autre catégorie de festival.
Comment est-on amené à penser un festival comme IndieLisboa et à le créer ? Y avait-il un désir personnel, une envie de se faire plaisir ou de montrer d’autres choses que dans les festivals déjà existants ?
Il y a eu deux raisons. En premier lieu, j’ai travaillé dans un festival de courts métrages, le Fica, où on a essayé de faire beaucoup d’expériences avec le court mais où finalement la tonalité, le genre des films, le tout était très maîtrisé. En tant que programmateur, cela ne me satisfaisait pas du tout. Avec des amis, en 2003, nous avons pensé qu’il n’y avait finalement pas grand-chose pour le cinéma que nous aimions. Tout était trop spécialisé, malgré un développement des festivals. À Lisbonne, c’était le désert artistique, les propositions de films étaient très maigres. Grâce à notre travail, je pense qu’Indie à permis aux festivals de jouer plus le jeu, à s’ouvrir davantage car lorsque nous avons commencé, 12.000 spectateurs sont venus à notre manifestation. Nous avons montré qu’il y avait un public à Lisbonne qui avait la capacité d’aller au cinéma, ce qui a fait que les autres ont suivi.
Le problème des festivals aujourd’hui est qu’il y en a énormément, qu’ils se concurrencent un peu tous. Comment arriver à se distinguer, à l’international et dans son propre pays ?
Avant IndieLisboa, il n’y avait pas de festival portugais où l’on pouvait faire de premières mondiales de nos films. Nous sommes là pour montrer qu’il y a une cinématographie portugaise qui doit être reconnue au niveau national et mondial.
Que cherchez-vous comme films et comme regards ?
Nous cherchons le cinéma le plus personnel possible, le plus libre également. Nous pensons que pour qu’un film soit abouti, il doit faire passer une émotion, et que le spectateur doit réagir. Lorsqu’on programme des films en festival, il faut penser à ce spectateur et pas seulement à soi. Nous voulons partager une certaine expérience avec le public. C’est aussi pour cela que nous invitons les réalisateurs, en fin de séance, à venir discuter de leurs films en salle, face aux spectateurs. Tout le monde peut poser des questions et ce qui est beau à voir, c’est que finalement, on n’y parle pas que d’un film en particulier mais du cinéma en général.
Est-ce que la rencontre est aussi importante que le film en soi ?
Oui. Si un film part d’une idée d’un réalisateur, d’une façon d’exposer sa vision, par image et par son, cela ne correspond pas forcement exactement à ce qu’il est. Je pense qu’il est important pour les spectateurs de savoir qui est la personne en face d’eux, qu’ils la jugent par rapport à un film mais aussi en face-à-face. Cela créé un lien et fidélise. Un spectateur sera content de retrouver un même réalisateur une, voire plusieurs années plus tard.
Est-ce que tu trouves, en onze ans de sélection, qu’il est plus difficile d’arriver à dénicher des films qui se distinguent ?
C’est une bonne question. C’est plus difficile en ce moment car depuis une dizaine d’années, nous voyons trop de films, alors que nous ne sommes plus surpris comme on pouvait l’être auparavant. Lorsque nous avons commencé à voir des courts pour le festival, il y en avait environ 250 et c’était nouveau. Nous connaissions des réalisateurs, mais on découvrait leurs films. Aujourd’hui, on voit 3.000 courts par an, et on préfère prendre des films qui nous surprennent mais qui ne sont pas totalement aboutis plutôt que du déjà-vu. Nous favorisons la différence.
À quel moment se dit-on que tel ou tel film doit figurer dans son festival ?
On essaie de choisir les films les plus récents possibles, pour que le réalisateur ne soit pas fatigué de son propre film. On essaie du coup de lancer certains films. Par exemple, « Da Vinci », de Yuri Ancarani (réalisateur de « Il Capo »), qui a remporté le Grand prix cette année, a débuté à Rotterdam en compétition et nous avons été le deuxième festival à le montrer. C’est un film assez dur où on assiste à une opération du poumon, filmée avec une micro caméra à l’intérieur. C’est une expérience terrible mais c’est complètement différent de ce qu’on peut voir en court et il s’en dégage une grande force émotionnelle. Après l’avoir vu, j’ai immédiatement appelé mes collègues pour les prévenir que je sélectionnais ce film sans leur avis car après Rotterdam, tout le monde allait le connaître et il aurait été plus difficile de l’avoir.
As-tu l’impression qu’il y a une sorte de radicalité dans le cinéma portugais, tant dans la forme et le fond ?
Après quelques années d’expérience, je pense que cette radicalité existe, mais moins. Il y a des réalisateurs très intéressants qui poussent la radicalité dans la forme mais pas dans le discours, le scénario. Avant, nos films étaient sélectionnés dans des festivals mais ne gagnaient jamais. Aujourd’hui il y a une nouvelle génération qui commence à remporter des prix grâce à un côté narratif et émotionnel qui touche davantage les spectateurs et les jurés.
Il y a quelques jours, plusieurs membres de l’équipe assistaient au Festival Court Métrange, à Rennes, pour faire le plein d’interviews, présenter notre toute première carte blanche en festival et remettre un nouveau Prix Format Court (à « Fuga » de Juan Antonio Espigares). Avant de parcourir notre focus consacré à cette édition anniversaire (10 ans, une coupe ?), nous vous en proposons un petit reportage photo. L’occasion de découvrir cette manifestation de l’intérieur, d’associer des visages à nos signatures, et de voir quelques festivaliers de sortie, au contact d’objets improbables dans une boutique locale.
Editions précédentes ? Affichez-vous.
L’équipe de Format Court (Katia Bayer, Xavier Gourdet, Julien Savès, Agathe Demanneville, Julien Beaunay)
Unissez-vous (pour le pire et le meilleur)
Katia Bayer et Julien Savès testant les produits locaux
Mathieu Berthon (réalisateur mystérieux)
Julien Savès, prêt à démarrer une belle collection
Julien Beaunay, souriant mais aussi de profil
Jokin Urruticoechea García, réalisateur ayant besoin d’un assistant
Benjamin Leroy (responsable du site web Make it Short) présente un classique à côté de « Chat Bulles, la juste dose pour laver le linge »
William Dott (responsable déco) ravi, entouré de boîtes
Jérémy Nicot (déco, aménagement, régie) aimant la fourrure et voulant que ça se sache
Mathieu Berthon, raffolant des couleurs vives, et Katia Bayer tenant le cintre comme personne
The diplôme ! Le Prix Format Court remis à « Fuga » de de Juan Antonio Espigares
Ce vendredi 1/11, les Apéros Projos, proposés une fois par mois par l’association Collectif Prod, reviennent au Café de Paris, avec différents courts au programme, pour une séance spéciale consacrée à Halloween.
Programmation
1ère partie – HALLOWEEN PARTIE 1 : (63’15)
RAQUETTE SMASH de Loïc Geraci (BA parodique – 5min18 – 2013 – Mes Couilles dans ton Slip et Freaks Productions)
Le président de la FFT (fédération Française de tennis) confie une mission suicide à Raquette : protéger les plus grands terrains de tennis du monde d’une redoutable menace qui plane sur eux…
L’HERITAGE de Michaël Terraz (conte fantastique – 22min49 – 2013 – Black Rabbit Film / L’Octopode) :
Augustin, peintre veuf, et ses deux filles, héritent d’une mystérieuse demeure, habitée par une étrange gardienne. Forcés de passer la nuit dans la vieille demeure, Augustin et ses filles doivent affronter les murs recouverts de fresques fantasmagoriques…
TERMINUS de Nikodem Rautszko Panz (thriller horrifique – 4min04 – 2012 – Video Graphic)
Un jeune homme rentre dans un wagon de métro, et s’assoit face à une jeune femme plongée dans sa lecture. Au moment où le train va démarrer, un étrange personnage rentre dans le wagon.
MANDRAGORE de Fabrice Blin (conte fantastique – 17min – 2012 – Metaluna Productions)
Marie vit seule avec son fils Alex dans une maison isolée en forêt. Elle recueille David, un homme en fuite, blessé et amnésique. Marie nourrit et soigne David dont l’état de santé s’améliore miraculeusement en quelques jours…
INVAZION de Maxime Vayer (zombie movie – 14min03 – 2012)
Al et Julien sont persuadés qu’un zombie les attend au 5ème, manque de chance, ils habitent au 8ème et l’ascenseur est en panne…
2ème partie – HALLOWEEN PARTIE 2 : (63’38)
RED IS DEAD de Loïc Geraci (BA mash-up parodique – 3min – 2013 – Mes Couilles dans ton Slip et Freaks Productions)
Une bande de jeune bourgeois se rendent dans une cabane isolée dans les bois. Sur place, la découverte d’un mystérieux Livre « Le manifeste du parti communiste » va les faire sombrer dans l’horreur…
L’ŒIL DU HIBOU de Tanneguy O’Meara (giallo – 29min50 – 2013 – ELMA Productions)
C’est la nuit. Reclus dans son appartement avec pour seul compagnon un mystérieux hibou borgne, Philippe guette de sa fenêtre les habitants du lieu, jusqu’à l’apparition d’une jeune femme suivie par un homme cagoulé. Philippe assiste au meurtre de la jeune femme et poursuit le meurtrier à travers les dédales de l’immeuble. Le matin est là. Un meurtre a bien été commis, mais la victime n’est pas la personne attendue…
HERO?? de Manu Lanzi (action – 16min38 – 2013 – A.P.E.L Prod)
Marco, 32 ans, un mec normal menant une vie banale assiste un jour à une violente agression dans la rue, le tout étant filmé par le téléphone portable d’un des témoins. Le lendemain son meilleur ami Alex, ayant vu les images au journal du soir et voyant que Marco n’a pas agi, le blâme et lui reproche son manque de courage. Etant hanté par cette scène vécue et après mure réflexion, Marco décide de changer tout ça en allant écumer les rues pour faire justice. En sera t’il capable ? Deviendra-t-il un « HERO » ?
SILENCE de Pierre-Gil Lecouvey (suspens – 14min10 – 2013 – Spook & Gloom Films)
Octave et Mélodie, deux étudiants dissipés, décident par défi de se laisser enfermer dans la bibliothèque. Mais ils ignorent encore que le silence se respecte, même la nuit…
Infos pratiques
Vendredi 01/11/2013 : projection dès 21h
Café de Paris : 158 rue Oberkampf – 75011 Paris – Métro : Ménilmontant (L2)
Possibilité de se restaurer sur place. Entrée libre.
Président du Jury officiel des courts au dernier Festival International du Film Francophone de Namur, Grégoire Colin, comédien devenu réalisateur, nous parle de ses deux films (« La Baie du renard » et « Lisières », tout juste présélectionné aux César), de l’incarnation du rôle et du travail autour de la sensation.
Je sais que vous êtes en train de travailler sur un nouveau projet de court. Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser à la forme courte, au-delà de l’envie de faire vos propres films ?
J’ai toujours eu envie d’écrire, je me suis formé sur le tas mais sans techniques, connaissances, structures de récit, sans avoir l’idée des différentes manières de construire un long métrage. Du coup, pour le premier film que j’ai écrit, j’étais dans l’expérimentation. Ça a été le cas pour le deuxième aussi. Après coup, j’ai retrouvé la structure du récit de « La Baie du Renard » dans des nouvelles, par exemple dans Histoire de la cité de Dieu de Pasolini, la structure était la même. Je me suis donc rendu compte rétrospectivement que j’avais écrit une chronique. Ça tombait bien puisque j’aime beaucoup le travail de Pasolini, en tant qu’artiste. Mon apprentissage s’est fait comme ça. D’abord par un geste primitif de création puis en observant, pour commencer à avoir des repères.
Vous dites ne pas avoir eu de notions en écriture. Le fait d’avoir joué, lu les histoires des autres n’a pas pu représenter un repère d’écriture ?
Non, je pense que construire des films, les déconstruire, appréhender des rôles, tout ça n’a rien à voir.
« La Baie du Renard » et « Lisières » sont séparés de trois ans, ils sont très similaires et en même temps très distincts. Le premier film est plus dans l’observation, dans la chronique, dans l’autre vous racontez une histoire et vous la contextualisez. Dans les deux, vous travaillez avec le même comédien. Qu’est-ce que le premier film vous a permis d’expérimenter ?
J’ai appris l’expérience du tournage : on n’emmène pas une équipe en haut d’une falaise comme je l’ai fait pour « La Baie du Renard » par exemple. Avec l’expérience, on intègre les temps de tournage, la difficulté de certains décors, les aspects financiers aussi.
Au niveau du récit, je voulais faire de « La Baie du Renard » quelque chose de vraiment minimaliste pour travailler avec les outils du cinéma et non avec ceux de la dramaturgie. J’avais simplement en tête une chronique qui se raconte avec l’image et le son. Là, je vais tourner un court métrage cet hiver, et le récit est encore un petit peu plus étoffé.
Qu’est-ce ce qui vous a intéressé chez ce jeune comédien (Michel Pubill Goma) avec qui vous avez collaboré sur les deux films ?
C’est quelqu’un avec qui j’espère retravailler, c’est même prévu. Si quelque chose fonctionne dans une collaboration, que ce soit avec le chef opérateur ou le monteur, je n’ai pas de raison d’arrêter. Je n’ai pas envie d’aller chercher quelqu’un d’autre que Michel, même si je crée un personnage qui vient d’un tout autre univers, sauf si il y a un souci au niveau de l’âge évidemment. C’est à l’acteur de composer son rôle, de le travailler. Ce qui m’intéresse, c’est qu’il l’incarne véritablement.
J’ai appris que vous aviez eu envie de faire de la musique avant de vous orienter vers le cinéma….
Oui, je suis autodidacte. Vers 20 ans, cela faisait longtemps que je faisais de la musique, j’écrivais aussi mais je sentais que c’était le moment pour moi de trouver une voie. J’ai hésité pendant très longtemps, entre la musique et l’écriture pour le cinéma, avec l’idée après de la mise en scène. Et voilà, j’ai choisi cette deuxième option. Ce qui a été déterminant, ça a été de me dire qu’avec le métier de réalisateur, je pourrais continuer de collaborer avec des musiciens. Je me suis complètement investi là-dedans et j’ai dû arrêter la musique, notamment parce que je suis très minutieux et que je fais les choses lentement.
Est-ce que vous prenez du temps pour l’écriture ?
Je prends du temps à mettre en œuvre quelque chose, à l’accomplir, parce que je veux le faire bien. Cependant aujourd’hui, je vais beaucoup plus vite sur l’écriture de court métrage. Je vois plus rapidement ce que je veux et là où je veux aller. L’expérience cumulée à une autre aide, c’est sûr, mais ça reste laborieux.
Comment percevez-vous les courts aujourd’hui, en voyez-vous beaucoup ? Est-ce que depuis que vous êtes passé à la réalisation, vous les percevez autrement ?
Quand on accumule de l’expérience, ça change forcément le regard. Néanmoins j’essaie toujours de ne rien attendre, de me laisser surprendre par ce que je regarde. Essayer de voir, comprendre, avoir des sensations. Quand on juge, c’est différent. Ici, au festival de Namur, on regarde la mise en scène, l’écriture, le jeu des acteurs, tous ces paramètres qui font un film. On essaie d’en voir la cohérence qui en ressort et c’est ça qu’on récompense.
Le travail autour de la sensation m’intéresse beaucoup, comme dans les films de Lynch. Ce que j’aime en tant que spectateur, c’est d’éprouver des sensations avec des personnages, de pouvoir faire une expérience à travers le cinéma.
Est-ce qu’en jouant pour les différents réalisateurs avec qui vous avez pu travailler, vous avez été amené à aborder cette question des sensations ?
J’aime communiquer. Comme acteur, c’est ça qui m’intéresse, donner des sensations. Je le vis par exemple avec Claire Denis parce qu’elle demande dans son écriture qu’on amène des sensations. C’est ce lien invisible avec le spectateur qui m’intéresse, que j’essaie de créer mais qui est hyper mystérieux parce qu’il est non palpable.
Est-ce que la réalisation vous amène à construire autrement votre métier de comédien ?
Oui, mais sur des aspects très pratiques, comme davantage respecter le metteur en scène, son plateau, moins foutre le bordel ! D’une certaine manière, j’ai appris à plus être au service du film, à être plus discipliné que je n’ai pu l’être à une période, ce qui devait être bien fatiguant pour l’équipe et le réalisateur !
Comme vous le savez peut-être, nous avons mis en place une campagne intitulée « Cours, Format, Court ! » pour financer la refonte de notre site internet dédié au court métrage en prévision de ses 5 ans, en janvier. Nous souhaitons encore mieux promouvoir le travail des professionnels du court, développer de nouvelles rubriques (concours, films en ligne, recherches thématiques, …) et optimiser la navigation de Format Court pour votre plus grand confort. Pour cela, nous avons besoin d’experts en la matière.
Plus de deux semaines après le lancement de notre campagne, nous avons déjà récolté plus d’un tiers de la somme espérée (2.000 €), soit 675 €. Il nous manque encore 1.325 € pour toucher à notre but avant le 15 novembre 2013, date à laquelle Format Court ne pourra pas bénéficier d’un nouveau site si le montant restant n’est pas atteint. Si au contraire, il est dépassé, nous pourrons développer d’autres activités qui nous tiennent à coeur depuis longtemps (doter nos nombreux Prix Format Court, créer un festival Format Court).
Participez. Recevez. Quelque soit le montant de votre don (de 5 € à 500 €), vous avez la possibilité de remporter des contreparties intéressantes : la valorisation de votre nom (sur notre site internet, à nos projections), des cadeaux inouïs (prodigieuses parties de ping-pong avec la Rédactrice en chef du site, photos dédicacées des contributeurs, blagues Carambar, très beaux badges, DVD de courts métrages), des invitations sympathiques (aux séances Format Court, à la fête organisée pour les 5 ans du site, aux soirées d’ouverture/de clôture de festivals partenaires) mais aussi des participations originales (au contenu éditorial du site, à la programmation de nos soirées) et enfin, notre formidable et éternelle reconnaissance.
De nombreux supporters nous ont déjà rejoints dans cette campagne. Merci à eux.
Notre appel à dons est loin d’être terminé. Nous avons encore et toujours besoin de vos soutiens.
Alors, à vous de jouer pour nous aider à aller au bout de cette campagne !
Notre nouvelle séance de courts aura lieu le 14 novembre prochain au Studio des Ursulines, à Paris. Il s’agira d’une séance spéciale consacrée au Festival de Vendôme dont nous sommes partenaires depuis trois ans. Avant d’y assister, nous vous invitons à retrouver une sélection de photos de Julien Ti-i-Taming prises lors de notre projection Format Court du 10 octobre. Pour rappel, les membres de « En équipe » et de « La Lampe au beurre de Yak » présentaient leurs films ce soir-là.
Avec Vincent Maury, Steve Achiepo, Bastien Bourhis et Sékou Baradji-Diarra (co-scénariste, réalisateur et comédiens de « En équipe »)
Avec Jean Legrand, Hu Wei, Julien Féret (chef opérateur, réalisateur et producteur de « La Lampe au beurre de Yak »)
Le Festival International du Film Francophone s’est déroulé du 27 septembre au 4 octobre à Namur. Présenté en compétition internationale, le court-métrage franco-algérien « Les Jours d’avant » de Karim Moussaoui a reçu le prix du Jury et celui de Format Court et fera prochainement l’objet d’un focus. Autres pays à l’honneur cette année : la Roumanie, le Québec, la Belgique, la France, la Bulgarie, le Maroc, la Suisse… Parmi cette sélection, trois films ont retenu notre attention et mettent en lumière, selon des éclairages différents, une appréhension de l’isolement et de la difficulté à être en lien avec les autres.
La Tête en bas de Maxime Giroux (Québec)
Trois personnages féminins en marge, retranchés dans leurs appartements-cocons, se confrontent à l’extérieur (le masculin) de façon plus ou moins conflictuelle. Leurs existences ne semblent pas reliées mais leurs quotidiens s’entrecroisent, cousus entre eux par le montage.
Ces femmes naviguent entre les hommes (un ex, un voisin, des inconnus), ces derniers apparaissent tour à tour ridicules ou dangereux (l’altérité masculine est vue comme inéluctablement dissociée, et la femme vient la titiller). Elles jouent et se jouent des hommes, de différentes manières : avec un hélicoptère télécommandé qui vient perturber l’attention, avec un récit morbide et cru de l’une d’elles racontant à un inconnu son traumatisme digne d’un fait divers ou encore avec un jeu de colin-maillard réinventé où l’homme est malmené lors d’un rendez-vous anonyme.
Sortir de l’appartement est devenu chose impossible tout comme accepter ce que l’on doit intégrer mais qui nous fait vivre. Ainsi la nourriture dans ce qu’elle a de plus écœurant (de la viande crue malaxée) est refusée puis jetée par la fenêtre. Le corps, réceptacle et émetteur de l’intériorité, s’exprime dans ces plans rapprochés de visages, où les respirations, les souffles, les cris stridents et étouffés deviennent denses et palpables. Ils se mêlent à une musique organique, où le corps semble sourdre dans chaque note. Les sons nouent les plans entre eux, entre les jeunes femmes, on ne sait plus qui souffle, crie…
« La Tête en bas » se construit en miroir et le corps est meurtri dans les dernières scènes qui font écho aux premières. L’arbre d’une des jeunes femmes s’effondre en symétrie et répond à la chute du début. Un jouet, mini-robot électrique volant, dernier vestige infantile d’un ancien compagnon, s’écroule sur la deuxième, et la blesse au visage. La troisième clôture le film la tête à l’envers, recouverte d’une marmite, la tambourinant avec des cuillères. L’enfermement et l’assourdissement du rythme percuté contiennent l’énergie vitale de ses trois solitudes marginales qui semblent n’en faire qu’une seule. Si les corps s’abîment, ils naviguent toujours sur les eaux d’une poésie de l’absurde. Dans le film de Maxime Giroux, le corps est sorti de sa fonctionnalité chez ces femmes en roue libre qui le renversent constamment (au sens propre du terme). On note l’abstraction d’un gros plan sur ces mains formant un duo végétal dans une danse aérienne, ou l’onirisme du funambule marchant dans le vide et sur l’horizon.
Promenade de Mihaela Popescu (Roumanie)
Une histoire basée sur la linéarité du fil d’une promenade : départ, cheminement, arrivée, retour. La force du récit de Mihaela Popescu réside dans sa structure où tout mène à l’accomplissement d’un désir. Telle une progression nécessaire, il ne pourrait en être autrement. Le quotidien s’ancre dans ce tic tac de la pendule qui rythme les plans du début. L’aléatoire se profile lors du cheminement tranquille et sûr de la vieille dame montrée à l’écran : elle croise de jeunes couples ou des enfants, et va à la rencontre d’une ondée fugace qui vient juste à propos. Tous ces éléments semblent n’être là que pour arriver au dénouement : la femme monnaye avec l’épicier du quartier une étreinte qui sera brusque et rapide.
La narration épurée s’impose comme une évidence, une marche simple et solide comme la volonté d’une femme. L’évolution de la lumière accompagne ce parcours. Un intérieur aux couleurs chaudes ouvre le film sur la solitude de la femme ; une lumière bleutée enveloppe la marche au milieu du brouhaha de la ville ; l’atmosphère s’assombrit dans l ‘épicerie pour une proposition tout juste murmurée ; la rue éblouie après la pluie, sur le retour. La caméra suit la femme en gros plan, avec quelque chose de digne et fier sur son visage. Le spectateur peut projeter tant l’amertume que la plénitude, la satisfaction du désir assouvi.
Mihaela Popescu développe dans son film des nervures cinesthésiques : les sons esquissent l’ambiance qui précède une averse, la lourdeur de l’air est perceptible. Tous les sens sont convoqués dans un frissonnement pendant ce rapport presque brutal qui fait quelque peu froid dans le dos. L’odeur de la ville après la pluie nous parvient, et nous amène à voir cette promenade comme une traversée sensorielle et lumineuse, aux ombres bien dessinées.
Pride de Pavel G. Vesnakov (Bulgarie/Allemagne)
Dans son film, Pavel G. Vesnakov raconte une journée particulière pour un homme aux idées conservatrices qui voit la réalité de ses proches faire valser ses lois morales archaïques. La tranquillité de la pêche matinale ne dure qu’un temps. Très vite, Manol est témoin de l’homosexualité de son petit-fils qu’il élève. Une chape de plomb s’abat sur lui.
Le rythme hétérogène du film alterne les instants dilatés d’un isolement apaisé avec ceux condensés des nœuds dramatiques où les enjeux familiaux débordent. Le calme s’oppose aux scènes de conflit, où Manol accroche, éclate, se braque, pour s’écarter à nouveau. Dans une confrontation hostile avec son petit-fils, il hurle, menace. Tout en lui transpire la colère : sa respiration, ses bruits de mastication, ses élans de violence. Les jump cuts sur ses successions d’états soulignent la vacuité de son agitation face au mutisme du jeune homme, à la résistance du silence et du regard.
Lorsque sa fille lui annonce par la suite son divorce, l’incompréhension de Manol est pathétique. Il idéalise un gendre qu’il n’a pas vu depuis longtemps, il ne peut plus saisir ce monde qui l’entoure et qui s’affaisse. Il tient bon, reste droit dans ses valeurs qui n’ont de sens que pour lui. L’incommunication et le fossé intergénérationnel sont complets.
Le spectateur étouffe sous cette torpeur, à travers ces échanges qui n’en sont pas. Comme Manol et les siens, il suffoque dans la maison, dans la voiture dont il faut sortir en cours de route. Les dialogues sont des lignes brisées, des parallèles, rien ne circule. Le générique tombe net comme un couperet, sur le silence qui suit la conclusion : pour la fille comme pour le père, l’important est de garder tout cela caché. Finalement ces deux-là se ressemblent…
Au final, les personnages de ces trois films se cognent aux murs de leurs solitudes et cherchent à tâtons à avancer, tant bien que mal. Avec « Les Jours d’avant », Djaber et Yamina semblent leur répondre dans un diptyque mettant en scène une rencontre impossible au cœur d’une Algérie brassée par la violence. Focus à venir…
Démythifié, revendiqué, vulgarisé à souhait, le sexe demeure un mystère qui, à l’instar de certaines voies, peut sembler impénétrable…
Pour sa 31ème séance, Short Screens a décidé de célébrer la fête d’Halloween en mettant démons et sorcières au placard pour vous parler d’Eros. Du franc parler d’une jeunesse libanaise en effervescence aux ébats d’une Cécile de France débutante, découvrez 7 courts métrages qui posent un regard à la fois tendre et provocateur sur la sexualité, déjouant les codes sociaux et défiant les interdits moraux. Public averti !
Programmation
« C’est gratuit pour les filles » de Marie Amachoukeli et Claire Burger, Fiction, France, 2009, 23′
Dans quelques jours, Laetitia obtiendra son brevet professionnel de coiffure. Elle et sa meilleure amie Yeliz pourront concrétiser leur rêve : ouvrir un salon ensemble. Mais avant de passer son examen, Laetitia veut aller à une fête.
« Maintenant il faut grandir » de Bruno Tondeur, Animation, Belgique, 2012, 8′
Ours a peur du monde extérieur. retranché dans son appartement, qu’il ne quitte que pour se nourrir, il passe son temps sur son ordinateur. Entre les jeux en ligne et les sites pornos il rencontre Cutieflower sur un réseau social. Il en tombe directement amoureux.
« La nuit du 6 au 7 » de Patrice Bauduinet, Fiction, Belgique, 2003, 6′
Au soir du sixième jour, et bien qu’il n’eut envie que de se reposer, Dieu, notre ami à tous, eut un ultime orgasme: il créa et nomma la BINTJE.
« Les Salopes » d’Alexandre Triaca, France, Fiction, 2013, 3’50 »
Quand deux jeunes femmes et deux mamies respectables ont une approche radicalement différente de la sexualité et des relations avec leurs partenaires… Deux paires d’amies complices séparées par un fossé : leur choix de vie. A chaque âge ses délires !
En présence du réalisateur.
« Zucht und Ordnung » de Jan Soldat, Documentaire, Allemagne, 2012, 9′
Deux hommes nus âgées dans un cadre élégant qui parlent de leur relation, des bons vieux jours, et de discuter d’une manière émouvante de sincérité de leurs fétichismes, prédilections sadomasochistes et de la servitude.
« The Blindness of the Woods » de Javier Lourenço et Martin Jalfen, Animation, Argentine, 2008, 11′
Dans la froideur des bois de Kiruna, en Suède, une femme aveugle et un bûcheron nouent une relation érotique entre passion et trahison. C’est un ours qui finira par découvrir la trahison…
« This Smell of Sex » de Danielle Arbid, Expérimental, Liban, 2008, 26′
« Mes amis de Beyrouth me racontent librement, et dans les détails, leurs expériences sexuelles les plus secrètes, les plus ardentes, les plus obsessionnelles » confie Danielle Arbid, réalisatrice ayant déjà remporté de nombreux prix à Locarno. Des images d’archives très pudiques de jeunes filles alternent avec des plans noirs où hommes et femmes parlent de leurs fantasmes et de leurs expériences marquantes. Les mots et les représentations visuelles créent une tension érotique d’une grande poésie.
Partenaire du festival Court Métrange depuis trois éditions, Format Court vient d’attribuer un nouveau Métrange du Format Court à l’issue de la dernière édition (17-20 octobre). Le Jury Format Court, composé de Julien Beaunay, Xavier Gourdet et Julien Savès, a choisi de primer « Fuga » de Juan Antonio Espigares comme meilleur film de la compétition internationale pour ses qualités graphiques et la diversité de ses techniques d’animation, toutes au service de la narration.
Un dossier spécial consacré à Juan Antonio Espigares sera publié sur notre site. « Fuga » sera également projeté jeudi 13 février 2014 au Studio des Ursulines (Paris, 5ème) dans le cadre de laséance spéciale Format Court dédiée au festival Court Métrange.
Fuga de Juan Antonio Espigares – 15’00 – 2012 – Espagne
Synopis : Sara vient d’arriver au conservatoire de Ste Cécile et découvre qu’il y a plusieurs façons d’interpréter le prisme à travers lequel elle perçoit sa réalité et son talent.
À l’issue de la carte blanche Format Court présentée en ouverture du 10ème Festival Court Métrange, ce jeudi 17 octobre 2013, le public rennais a eu l’opportunité de récompenser un film de notre sélection. Le film « Oh Willy »… de Emma de Swaef et Marc Roels (Belgique, France) a ainsi remporté le « Métrange du Public – Format Court » parmi les six films programmés. En l’absence des réalisateurs, Mathieu Courtois, l’un des co-producteurs du film (Vivement lundi !) a reçu le prix des mains de Katia Bayer, la Rédactrice en chef du site.
Le Festival Court Métrange s’est terminé ce weekend. En voici le palmarès.
Prix du Jury (Tchéky Karyo, Anna dʼAnnunzio, Loîc Valceschini, Jean-Michel Roux, Nicolas Boulaire, Bertrand Nail, Christophe Taudière et Corinne Bernard)
Grand Prix Court Métrange : Misterio de Chema Garcia Ibarra (Espagne / 2013 / 11′)
Méliès d’Argent : Cebu de Pablo Pelaubre (France / Cuba / 2012 / 12’00 »)
24 courts métrages concouraient dans la compétition nationale du festival namurois. Une sélection qui, à nouveau, laissait transparaître les questionnements des réalisateurs d’aujourd’hui. De la difficulté de s’affirmer pour exister à la solitude et la recherche du désir perdu en passant par le spleen brumeux de héros décalés… Une programmation soucieuse de montrer la diversité cinématographique du plat pays. Topo de ce qui a tapé dans l’œil.
S’affirmer pour exister
« Zinneke » est un terme hybride désignant, en bruxellois, un (chien) bâtard. Pour son film d’études, Rémi Allier, issu de l’IAD (Louvain-la-Neuve), a voulu filmer les pérégrinations de Thomas, qui du haut de ses 9 ans, cherche à se faire accepter de Bruno et Pascal, deux brocanteurs du marché aux puces de la place du Jeu de balle à Bruxelles. Bien ancré dans la lignée fictionnelle des gamins bruxellois goguenards tels que les Manneken pis et autres Quick et Flupke, n’ayant pas leur langue dans leur poche, Thomas a cet âge trouble où l’innocence rencontre l’audacieux bagou. Attiré par les allées et venues du tandem de brocanteurs flamands, le petit trublion fait des pieds et des mains pour les accompagner dans leur camionnette remplie de « brol ». Ainsi embarqué avec les « grands », il a la satisfaction de faire partie de la bande, même si le rite initiatique consiste à voler des objets de valeur chez les bourgeois du coin. Une mise en scène dynamique laisse entrevoir un style proche du documentaire où l’on pressent toute l’importance des points de suspension.
Et si Thomas avait grandi, c’est sans doute sous les traits d’Alex qu’on le retrouverait. Le héros de La Part sauvage de Guérin Van de Vorst a 20 ans et une envie folle de tout faire péter. Entouré de sa bande de potes avec qui il fait les quatre cents coups, il sait tout au fond de lui qu’il est temps de se ranger et de s’investir sérieusement dans la formation de soudeur qu’il a décidé d’entreprendre. Une caméra mobile, à l’image de nos 20 ans remplis d’espoir et de désillusions naissants, montre la difficulté de grandir. Jérémie Ségard, découvert dans le film L’Enfant des frères Dardenne campe un Alex tout en nuances, partagé entre le besoin d’exprimer sa colère par la destruction et la nécessité de rentrer dans les rangs de l’âge adulte. Avec La Part sauvage , Guérin Van de Vorst nous offre un joli portrait d’adulescent.
Elisabet Lladó, quant à elle, dépeint le milieu des banquiers et des agriculteurs dans un film à la réalisation maîtrisée. Le Conseiller, c’est Christophe, un banquier dont l’ambition n’a d’égale que celle d’Arthur, un agriculteur qui reprend la ferme familiale. Quand le premier doit faire du chiffre pour gravir les échelons de la société, le second se voit obliger de s’agrandir et contracter emprunt sur emprunt pour rester compétitif. L’absurdité d’un système économique est ainsi admirablement dénoncée dans une fiction irréprochable. Elisabet Lladó opte pour une mise en scène sobre et froide reflétant l’avarice dévorante du banquier. Les personnages en face-à-face s’affrontent plus qu’ils ne se rencontrent. Les étendues verdoyantes apparaissent dès lors comme un paradis perdu et déshumanisé où tout espoir a disparu.
Ô Féminin
Alors que les trois films précédents traitaient de la nécessité masculine de s’affirmer, deux films de la sélection attirent l’attention par leur façon toute personnelle d’aborder le féminin.
L’Inconnu est une histoire simple, en somme. Une veuve apprend a posteriori que son mari la trompait. Banal, oserait-on dire. De cette banalité de pitch, Anne Leclercq tend à émouvoir et à titiller les sens, grâce à un savoir-faire dont elle avait déjà fait preuve dans Dissonance (Prix du Jury au FIFF en 2010) mais qu’elle approfondit davantage. En ayant appris la vérité, la vieille dame qui s’était montrée aimable et vive quelques minutes avant, plonge dans une douce folie, et le monde qui l’entoure se révèle alors aussi étrange qu’hostile. Elle laisse là ses petits-enfants et s’enfuit. À mesure qu’elle s’éloigne de sa maison (lieu de repères solides et durables) pour se réfugier quelque part dans la forêt, l’héroïne s’écarte de la réalité. La nature, filmée en de grands plans-séquences et en contre-plongée, rend compte du vertige de l’héroïne qui s’y abandonne complètement. Dotée d’une réalisation psychologique, L’Inconnu reste une très belle exploration de l’intime et du féminin.
Le second court métrage est la première réalisation de la comédienne Salomé Richard qu’on a pu voir dans Pour toi, je ferai bataille et Les Navets blancs empêchent de dormir de Rachel Lang, notamment. Septembre est une longue (dé)monstration d’une jeune fille en quête de désir, elle qui n’est plus désirée par sa douce moitié. Salomé Richard nous parle du couple avec maladresse et ennui car, elle l’a bien compris, c’est dans les failles que la vérité apparaît dans sa plus noble nature. Le film traite du désir féminin, le montre sans détours et sans faux semblants.
Spleen sentimental
C’est un autre acteur que nous retrouvons derrière la caméra de Houle sentimentale. Tom Boccara, étudiant à l’IAD, a joué dans plusieurs courts métrages dont l’excellent Thermes de Banu Akseki. Pour son film de fin d’études, Boccara offre un univers à l’humour décalé et loufoque. Le Belge serait-il influencé par un certain Kaurismäki ? Peu importe pourvu qu’on en ait l’ivresse. Dans cette houle des sentiments, une jeune femme, (se) fête son anniversaire, toute seule, confinée dans une roulotte à la décoration originale. On ne sait pas s’il faut rire ou pleurer. Sans aucun dialogue, l’émotion naît de la rencontre des contraires. Le film de Boccara est un plaisir pour les yeux et les oreilles dans la lignée des cinéastes absurdes.
Dans une veine plus animiste, Simon Gillard réalise l’un des trop rares documentaires de la sélection. Etudiant à l’INSAS, quand il découvre le Burkina-Faso, il sait qu’il doit y retourner avec sa caméra pour filmer les gens qu’il a côtoyés, les paysages qu’il a vus. Ce sera Anima, un documentaire envoûtant, où les images d’une beauté saisissante construisent la narration. Esthétisée, la réalité offre une autre perspective, loin (très loin) des clichés habituels. Un regard transcendé qui sublime la terre, le travail, les gestes et les hommes de cette partie reculée du monde pour lui rendre hommage tout simplement.
En lice pour le César de l’animation avec son Betty’s Blues, Rémi Vandenitte peut avoir le cœur léger et le sourire aux lèvres. C’est que l’auteur de Grise Mine a su séduire les membres du Comité Animation de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma grâce à la maîtrise de techniques variées (marionnettes en stop motion, animation en 2D) au service d’une histoire émouvante, celle de Blind Boogie Jones, dans la Nouvelle–Orléans des années 20. Chantée sur des accords de guitare, la légende du jeune noir américain se laisse découvrir et apprécier facilement. Sur fond de racisme, de violence et de Ku Klux Klan, Betty’s Blues est une animation qui transpire la tristesse de la souffrance et l’extase de la vengeance.
Synopsis : Une vieille dame apprend que son mari défunt la trompait. Lors d’un week-end dans la maison de campagne, elle se retrouve seule avec ses petits-enfants, ceux-ci en profitent et disparaissent toute la journée. Vouée à elle-même, la vieille dame part à leur rencontre dans la nature, attirée par des souvenirs inconnus…
Pour la 8ème année, le Festival du film francophone offre une fenêtre spéciale à nos compatriotes septentrionaux en programmant des films flamands inédits en Région wallonne. Une initiative louable non seulement par son intérêt diplomatique dans une période de séparatisme menaçant, mais surtout parce qu’elle permet de découvrir un cinéma peu connu dans le sud du plat pays. Présenté dans cette sélection, « Do You Know What Love Is ? » de Leni Huyghe est une délectable série de vignettes mettant en scène quatre personnes à la recherche d’un amour qui leur échappe continuellement. Film d’école réalisé sous la guidance de la cinéaste flamande Fien Troch à la Sint Lukas Hogeschool, ce court abouti se vante d’une grande maturité et d’une belle simplicité.
Les vies de Thomas, Fuller, Romy et Susanna, tous en quête de l’oiseau rebelle, se croisent constamment. Thomas et Romy, en pleine séparation, trouvent du réconfort chez leur ami(e) respectif(ve) : Thomas coache Fuller dans ses entraînements de danse et Romy gave Susanna avec ses confidences parfois non sollicitées. Un certain humour noir souligne ce conte psychologique aux consonances parfois surréalistes, humour que la réalisatrice a bien su peaufiner. Elle dédramatise le récit et lui donne une forme décousue et épurée. Le rythme posé, dû à un montage qui favorise des plans séquences larges et fixes, rend bien le sentiment d’attente chez les personnages sans jamais provoquer d’ennui chez le spectateur.
Quant au surréalisme, celui-ci est davantage relevé par la sur-présence du virtuel dans le récit. Le personnage de Susanne en particulier cherche constamment de la compagnie au-delà d’un écran, et semble même avoir une relation sensuelle entièrement virtuelle avec un inconnu. De même, Fuller vit à travers son avatar de danseur, enfile un masque et imite les pas de Pina Bausch et de Michael Jackson. Ailleurs, à la télé, sur des vlogs, etc., les voix de sagesse populaire à l’américaine crachent des conseils pour les langoureux souffrants. La question qui préoccupe est de savoir ce qu’est l’amour dans une société dominée par un éclatement d’informations comme la nôtre. L’interprétation très amateur du chant « Ich liebe dich » (Je t’aime) de Beethoven sur Youtube, qui clôt le film, symbolise parfaitement ce mélange d’espoir naïf et de désenchantement que Huyghe transmet si bien dans ce court métrage, à la fois fort et serein, et captivant par son côté universel.
Synopsis : Nous avons des téléphones mobiles et des ordinateurs. Nous sommes addicts à youtube, partageons une vie sociale sur Facebook et sommes noyés par l’information. Nous sommes pourtant incapables de répondre à cette question « Qu’est-ce que l’amour ? »…
Pays : Belgique
Année : 2012
Genre : Fiction
Durée : 19′
Réalisation : Leni Huyghe
Scénario : Leni Huyghe
Image : David Williamson
Interprétation : Roel Swanenberg, Hélène Devos, Karel Tuytschaever, An Charlotte Bisoux
Ce 4 octobre, s’est achevée la 28ème édition du Festival International du Film Francophone de Namur (FIFF). Pendant une semaine, différents programmes ont proposé une palette variée de courts : les compétitions internationale et nationale (belge), les clips, les « regards du présent » ainsi qu’un focus sur le cinéma flamand. Avant de découvrir notre focus spécial sur « Les Jours d’avant » de Karim Moussaoui, lauréat du Prix Format Court (meilleur film international) au FIFF 2013, nous vous proposons de revenir sur cette dernière édition.
Ce lundi, le Comité Court Métrage de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma s’est réuni pour sélectionner les 12 films qui vont concourir au César 2014 du Meilleur Film de Court Métrage 2014. Les cinq finalistes seront révélés lors de la conférence de presse des César, le 31 janvier 2014. En attendant, voici les 12 titres présélectionnés pour le prochain César du court.