Wilfried Méance a 29 ans et déjà huit films au compteur en tant que réalisateur (« Deal », « Après toi »,« Pintame », …). Lors de cette 14e édition du Festival Off-Courts à Trouville, il présente son dernier film, « Suzanne » en compétition dans la sélection française. Le court-métrage aborde, avec nostalgie et humour noir, l’égoïsme d’une famille aveugle devant l’état de leur aïeule. Même si ce film est légèrement plus grave que ses films précédents, il s’inscrit dans une lignée de comédies grand public totalement assumée pour Wilfried Méance puisque selon lui, le but premier d’un metteur en scène est de divertir les gens. Nous avons rencontré ce jeune homme au capital sympathie énorme, qui est à Trouville cette année, pour la troisième fois.
Peux-tu nous parler de ton parcours et de ce qui t’a amené à faire du cinéma ?
Depuis que je suis adolescent, j’ai toujours voulu faire du cinéma. Lorsque j’étais plus jeune, j’ai fait du théâtre. C’est là où j’ai pris conscience de ce qu’était le métier de metteur en scène et que je me suis rendu compte que j’étais plus apte à faire de la mise en scène que de jouer. Par conséquent, depuis que j’ai 11-12 ans, je souhaite faire ça. Si bien que juste après le bac, j’ai intégré l’ESEC (Ecole Superieure Libre d’Etudes Cinematographiques) avant de faire une école de communication. À l’ESEC, j’ai rencontré une grande partie de mon équipe avec qui je travaille aujourd’hui. D’ailleurs, c’est là tout l’intérêt de suivre une école de cinéma : les rencontres qu’on y fait sont plus importantes que l’enseignement qu’on y reçoit.
Contrairement à de nombreux courts-métrages, tu es amené à faire tes films finalement assez grand public, avec une tendance comique.
En tant que metteur en scène, je préfère réaliser des comédies. C’est le domaine dans lequel je me sens le plus à l’aise et le plus impliqué. C’est très grisant de faire rire les gens, ça donne envie de continuer dans cette voie. Lorsque je passerai au long, je ferai de la comédie aussi.
Tes films sont assez légers et pour autant, les thèmes que tu traites (les crises familiales, la mort, le suicide, les rencontres amoureuses, …) ne sont pas forcément légers. À ce propos, Jacques Demy disait qu’un film léger parlant de choses graves vaut mieux qu’un film grave parlant de choses légères. Qu’en penses-tu ?
C’est exactement ça. D’ailleurs, je crois fortement au cinéma de divertissement, sachant que selon moi, le talent d’un metteur en scène est de faire tenir 300 spectateurs pendant 1h30. Avec mes courts, j’ai pu tenter des choses un peu moins drôles ou des thèmes un peu plus noirs, histoire de me frotter à toutes les palettes de la comédie : romantique, burlesque ou douce- amère.
Es-tu conscient que dans le milieu du court-métrage, généralement, les comédies ne sont pas très fréquentes et peu aidées par les différentes institutions ? Aucun de tes films n’a bénéficié d’une aide. Comment le vis-tu ?
En effet, aucun de mes films n’a reçu d’aides. Mais finalement, c’est juste un frein à la durée des films que je peux faire, c’est-à-dire que je suis un peu obligé de faire des courts dont le budget oscille entre 5.000 et 6.000€ (jusqu’à 12.000€ pour celui qui a coûté le plus cher). Je ne peux pas faire beaucoup mieux, avec des temps de tournage qui sont très courts. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles je veux passer au long-métrage. L’économie est à deux vitesses : en court-métrage, on subventionne plus volontiers des films dramatiques, sauf qu’en long-métrage, c’est plutôt le contraire. On financera plus facilement une comédie car c’est finalement ce que la grande majorité des gens a envie de voir.
On remarque que tes films sont souvent sélectionnés d’une année à l’autre dans les mêmes festivals qui sont ouverts aux comédies grand public, comme l’Alpe d’Huez, Meudon ou justement Off-Courts à Trouville.
Oui, c’est la troisième fois que je me retrouve à Off-Courts et je suis d’autant plus heureux cette année car je reviens en compétition alors que l’an passé, j’étais en hors-compétition. C’est toujours sympa d’être en compétition ! Après, je trouve que Trouville est un festival vraiment sympa, en particulier pour toute cette partie Labo Kino qui permet à des tas de gens d’essayer des tas de choses. Qui plus est, le festival est bien organisé. Après, pour moi, il n’y a pas de petits ou de grands festivals, car c’est un bonheur à chaque sélection.
Peut-on aussi avancer qu’il n’y a pas de petits et de grands films mais des films tout court ? Dans tes films qui ne sont pas financés (ou presque pas), on retrouve bon nombre de comédiens connus et reconnus qui acceptent d’y jouer. Comment l’expliques-tu ?
En fait, ça se joue au coup de cœur. Qui plus est, comme je te disais, on tourne sur des laps de temps très courts, si bien qu’en gros, ils me donnent trois jours de leur vie. C’est beaucoup pour ces comédiens, mais quelques uns préfèrent tourner plutôt que d’attendre un nouveau projet de long. Certains ont envie d’accompagner des jeunes réalisateurs qui après, feront peut-être du long, et avec qui ils retravailleront peut-être.
Considères-tu le court-métrage comme un moyen de s’essayer au cinéma mais aussi de tenter de travailler avec une équipe en vue de faire un long-métrage ?
En fait, il y a plusieurs avantages à réaliser des courts-métrages. D’abord, c’est une école pour tester des choses au niveau de la mise en scène avant de passer au long, pour aborder le travail avec les comédiens et avec les techniciens. Ensuite, c’est surtout une super carte de visite pour aller démarcher les producteurs de longs-métrages, pour leur montrer ce qu’on est capable de faire et pour les rassurer, d’autant plus que les budgets sont assez conséquents, notamment en comédie.
Ton dernier court-métrage « Suzanne » n’est pas vraiment une comédie, tu es dans autre chose que dans tes films précédents…
En effet, ce n’est pas vraiment une comédie. C’est plus volontiers un film noir et triste. Le ton n’est pas le même que dans mes films précédents, bien qu’en salle, j’ai entendu des gens rire. Comme la situation est un peu trash, seul, on a du mal à en rire car on se sent un peu coupable de rire, alors qu’en salle, lorsqu’on entend des gens rire, on se dit qu’on en a le droit.
En plus d’être auteur-réalisateur, tu possèdes aussi la casquette de producteur au sein de Hilldale Productions. Pourquoi vouloir tout faire ?
Tous mes courts-métrages ont été coproduits entre Hilldale, ma boîte, et FastProd, une société qui est gérée par Jean-François Moussié, depuis que j’ai fait « Le grand moment de solitude ». On a mis chacun la moitié du budget de ce film et comme on a réussi à vendre le film aux chaînes, on a réussi à récupérer notre investissements voire plus, ce qui nous a permis faire les films suivants. En fait, on a réussi à faire cinq films avec l’argent d’un seul film puisqu’on n’a jamais remis d’argent depuis. A la base, j’avais créé Hilldale pour la production de mon premier long-métrage qui était plutôt dans une veine indépendante. Après, avec Hilldale, j’ai voulu me diversifier. On fait aussi de la publicité, ce qui permet à la boîte d’avoir des revenus autres que par la fiction et aussi de pouvoir se payer, tout simplement. Il faut bien vivre (rires) !
Peux-tu nous parler brièvement de ton long-métrage en préparation ?
C’est une comédie qui s’appelle « Amsterdam », il traite de la crise des trentenaires à qui on a promis un boulot s’ils faisaient des études alors que c’est tout l’inverse. Et ceci de manière humoristique. J’espère bien sûr travailler avec la même équipe que sur mes courts-métrages, mais comme je travaille désormais avec des producteurs de longs-métrages, ce ne sera pas le premier film pour tout le monde. Ceci dit, je souhaite que chacun de mes comédiens fétiches aient un rôle, même secondaire et je tâcherai au mieux d’intégrer tout le monde.
Le mot de la fin ?
Mot de la fin (rires) ! Plus sérieusement, j’ajouterais qu’on peut vraiment faire rire avec des sujets graves. Prendre des sujets qui semblent durs et les détourner avec de l’humour permet aussi de faire passer un message. C’est l’autodérision qui peut encore nous sauver.
Propos recueillis par Camille Monin
TRES BON WILL COMME D’HABITUDE . UN FUTUR GRAND REALISATEUR !!!!!!!!!
A QUAND LA PREMIERE DU GRAND LONG METRAGE…
Bonjour,
Je suis maire adjoint à la culture à Cormeilles en Parisis. J’ai eu donc le plaisir de voir votre film « Suzanne » lors de la soirée « côté courts » le 8 février.
J’ai beaucoup aimé.
Je voudrais savoir s’il est possible d’en avoir une copie et si, dans ce cas, vous m’autoriseriez à la projeter dans le cadre de séances d’analyse de la pratique que j’organise (je suis ancien directeur d’établissement pour adultes autistes) auprès des personnels de maisons de retraite. Nous travaillons notamment la relation avec l’usager et avec sa famille.
Toutes mes félicitations.
Merci de votre réponse.
Bien cordialement.
Bernard RIVY
Bonjour Bernard,
Je vous remercie de vos gentils commentaires concernant le travail de Wilfried Méance, mais je vous conseille de lui écrire personnellement à cette adresse: wilfried.meance@gmail.com car il ne reçoit pas les remarques faites sur nos articles.
Bien à vous.
Camille Monin (rédactrice de cette interview)
j’adore l’oeil de ce réalisateur et sa manière d’aborder toutes sortes de sujets qu’ils évoquent dans ces courts métrages. J’attends avec impatience le premier long métrage, je suis persuadée que ce sera le début de nombreux …je crois vraiment à son succès , il a quelque chose en plus …