Lauréat du deuxième prix de la Cinéfondation, cette année à Cannes, « Abigail » est un drame court, une chronique sociale de 17 minutes sur les dernières heures d’une jeune pompiste, cherchant à quitter pour toujours un vendredi, en fin d’après-midi, sa ville natale et sa mère à problèmes.
Sa mère a beau l’appeler et l’appeler , Abigail dénigre ses coups de fil répétitifs. Elle sert un client et, sa journée de travail terminée, s’empare de son sac à dos. Attendant en vain un bus qui ne passe plus à l’arrêt indiqué, elle marche dans les rues avant de se faire arrêter par une connaissance qui lui parle des frasques de sa mère la nuit passée ainsi que les autres nuits. Abigail reprend sa route, se pose dans la nature, manque de s’étouffer lorsqu’une autre personne l’interpelle. La veille, sa mère a été vue en train de commettre un délit de fuite après avoir enfoncé une barrière avec sa voiture. Abigail arrive enfin à la gare, point de départ de sa nouvelle vie. Dans les toilettes, elle ôte ses vêtements, laissant découvrir dans le miroir et devant la caméra des bleus sur son corps. Sur le quai, elle voit arriver le train. Tout s’immobilise autour d’elle. La nuit tombe.
À travers des longs plans, des cadres extrêmement soignés, des situations en apparence banales car quotidiennes et des dialogues minimalistes, l’histoire d’ « Abigail » se déploie à travers les différentes rencontres que le personnage principal fait au cours de sa journée. Abigail cherche en permanence à partir, à fuir, mais le présent, la renvoyant à sa mère, la rattrape en permanence. Par petites touches, Matthew James Reilly, le réalisateur étudiant à l’Université de New York, nous délivre des informations sur Abigail, sur ce qui la pousse à partir et sur ce que sa mère a fait la nuit dernière, le tout en une journée dans un quartier pauvre du New Jersey.
Matthew James Reilly a une façon bien à lui de cadrer, au plus près ses personnages, Abigail, notamment, en proie tour à tour à la désillusion, à l’hésitation, à l’impatience, au renoncement. Que ce soit dans l’embrasure d’une porte, à un arrêt de bus déserté ou sur un quai de gare anonyme, il capte de façon stimulante la solitude d’un être dans une cité industrielle américaine et oppressante.
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Article associé : l’interview de Matthew James Reilly