Killing the Chickens to Scare the Monkeys de Jens Assur

Un titre génial, un visuel de folie, une chronologie inversée, un destin individuel broyé par un régime intolérant en place. « Killing the Chickens to Scare the Monkeys » de Jens Assur, cadeau filmique repéré et offert ces jours-ci par la Quinzaine des Réalisateurs, illustre sans concessions une Chine impitoyable et mécanique et ses conséquences sur la vie d’une jeune enseignante anonyme. Le tout en neuf fragments non linéaires.

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“Dépêchez-vous, nous n’avons pas beaucoup de temps.” Ainsi s’ouvre le scénario fictionnel de Jens Assur, photographe-cinéaste suédois. Si des individus se pressent effectivement devant la caméra, c’est pour assister à un spectacle inédit : une mise à mort programmée d’ennemis d’Etat, accusés de complot contre le pouvoir. Pour ce faire, les amateurs de sensations glauques, dont c’est la première fois pour certains, ont revêtu leurs plus beaux costumes et embarqué leurs appareils photo pour la séquence souvenir.

Cette première scène, extrêmement troublante, dure plus de dix minutes. Le film pourrait s’arrêter là et ferait déjà un très bon court métrage. Seulement, Jens Assur va plus loin : il propose huit autres tableaux dans lesquels un personnage féminin, dont on découvre le passé d’enseignante, se précise au fur et à mesure. Le film est construit à l’envers, permettant ainsi de retracer la vie de cette femme, victime d’un système qui a décidé d’avance de son sort.

“Tuer les poules pour effrayer les singes“ se réfère à la politique du gouvernement chinois de semer la terreur en exécutant les dissidents pour intimider le reste de la population. La création de Jens Assur est à cet égard fascinante tant elle renseigne sur le voyeurisme appuyé et incite le spectateur à sortir de sa torpeur conditionnée et à combler les trous volontairement laissés par l’auteur.

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Précédemment, en 2007, Assur avait signé « The Last Dog in Rwanda » qui avait remporté le Grand Prix de la compétition internationale à Clermont-Ferrand. Il y racontait l’histoire d’un photographe de guerre confronté à la mort, à la politique, aux flashbacks et à l’éthique. « Killing the Chickens to Scare the Monkeys » est encore plus intéressant. La Quinzaine a bien fait de le mettre au-dessus de la pile : le film offre par ses images et sa narration éclatée une contribution politique et émotionnelle importante à un combat cher aux défenseurs des droits de l’homme.

Katia Bayer

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