Fer de lance de la Science-Fiction française, Marc Caro a accepté de répondre à nos questions à l’occasion de sa venue à l’Etrange Festival pour rejouer en live la bande sonore du « Bunker de la Dernière Rafale ». Rencontre avec un artiste intègre, polyvalent et passionné, pour qui la Science-Fiction est un sujet de prédilection.
On l’apprend à Paris au détour d’un buffet anglo-saxon de la bouche d’un de ses représentants, Antoine Lopez. Il vous est encore possible d’inscrire vos films au Festival et au Marché du Court Métrage de Clermont-Ferrand 2012 (27 janvier – 4 février) via le site www.shortfilmdepot.com.
COMPÉTITION INTERNATIONALE
– pour les films terminés en 2010 (après le 1er juillet 2010) :
Date limite d’inscription des films : 15 juillet 2011
Préférez le téléchargement d’un fichier vidéo à l’envoi de DVD
(Si envoi d’un DVD de visionnement, date limite de réception : 22 juillet 2011)
– pour les films terminés en 2011 (après le 1er janvier 2011) :
Date limite d’inscription des films :14 octobre 2011
Préférez le téléchargement d’un fichier vidéo à l’envoi de DVD
(Si envoi d’un DVD de visionnement, date limite de réception : 21 octobre 2011)
Frais d’inscription : gratuit
Conditions :
1) Film terminé après le : 1er juillet 2010
2) Durée maximale : 40 minutes
3) Origine : Tous pays sauf France
4) Support de projection au festival : 35 mm, Beta SP Pal ou Digital Betacam Pal
Date limite d’inscription et réception des films : 28 octobre 2011
Préférez le téléchargement d’un fichier vidéo à l’envoi de DVD
Frais d’inscription : gratuit
Conditions :
1) Film terminé après le : 1er novembre 2010
2) Durée maximale : 59 minutes
3) Origine : France comme pays de production principal
4) Support de projection au festival : 35 mm, Beta SP Pal ou Digital Betacam Pal
Le CNC organise le le 21 décembre prochain, jour du solstice d’hiver, le Jour le plus Court, une grande fête nationale consacrée au film court parrainée par Michel Gondry, Mélanie Laurent, Jeanne Moreau et Jacques Perrin. Toute personne qui le souhaite aura la possibilité de diffuser des courts métrages, sur les écrans et sur les murs, que ce soit en se référant à un catalogue de 300 films mis à disposition gratuitement par l’Agence du court métrage, en proposant son propre programme de films courts (dans le respect des droits des films), en organisant une Nuit du court, en prévoyant des débats et des rencontres professionnelles, etc.
Cette fête est participative et ouverte à tous les cinéastes professionnels, amateurs, à tous les particuliers, entreprises, associations, collectivités publiques… tout le monde est appelé à se mobiliser pour diffuser des films sur tous les écrans : salles de cinéma, chaînes de télévision, services de vidéo à la demande, sites internet, écrans mobiles… Il est aussi proposé de « libérer » l’image des écrans, pour investir de nouveaux espaces, murs des villes, lieux de création, salles de spectacles, musées, médiathèques, lieux « alternatifs », entreprises, bar-restaurants, friches, trains…
Pour vous inscrire en tant que participant à la fête, commander vos films, être référencé dans le programme… rendez-vous sur le site www.lejourlepluscourt.com à partir du 10 octobre 2011.
L’Étrange Festival a envahi une nouvelle fois le Forum des Images de Paris du 2 au 11 septembre dernier avec une sélection pleine de bruit et de fureur. Année après année, Frédéric Temps, le délégué général, et son équipe continuent de présenter à un public toujours plus nombreux une programmation hétéroclite et internationale en marge du cinéma dit « grand public ». Comme l’affirme l’édito de l’édition 2011 « ce parti pris (car c’en est un) a probablement longtemps expliqué « l’irrespectabilité » de la manifestation auprès d’une certaine presse, d’un certain pouvoir ou de certaines institutions. »
Le film de genre made in France a très rarement bonne presse dans l’Hexagone. Pourtant, au début du cinéma, avec Méliès, puis Feuillade et plus tard Tourneur, ce type de films rencontrait bel et bien les faveurs d’un large public. Depuis, le film de genre a progressivement cessé de compter au pays de la langue de Molière, relégué au rang de cinéma de seconde zone.
Pourtant, près de vingt ans après sa création, l’Étrange Festival est devenu un événement incontournable, le miroir d’un cinéma impertinent, qui dynamite les cloisons poreuses entre les genres, mettant au grand jour, dans les salles obscures, une sélection de films qui ne tiennent pas en place.
Sur les 71 programmes présentés, nous avons choisi de mettre l’accent sur quatre d’entre eux. Honneur au court métrage, un format plutôt apprécié au sein de ce festival, trois prix étant décernés à chaque édition, dont deux pour les courts.
LA GRAN CARRERA (Kote Camacho – Espagne – 2010 – 6’24 – Fiction – Noir & Blanc)– Prix du Public de l’Étrange Festival 2011
1914, Hippodrome de Lasarte – les parieurs s’affairent dans les tribunes, une course de chevaux un peu spéciale s’apprête à commencer…
Kote Camacho, le réalisateur de La Gran carrera installe habilement une atmosphère en jouant avec les images d’archives et les prises de vues réelles, et en utilisant avec parcimonie les effets spéciaux. Amplifié par l’enthousiasme des turfistes, il parvient à faire basculer son récit dans une inquiétante étrangeté, et à faire planer l’ombre de Luis Buñuel sur cet atypique hippodrome. Hasard ou coïncidence diabolique, l’hérétique et médusant moyen métrage Simon du Désert de Buñuel s’était également glissé dans la programmation de l’Étrange cette année.
ANA TEMNEI (Koen Mortier – Belgique – 1995 – 9’ – Fiction – Couleurs), A HARD DAY’S WORK (Koen Mortier – Belgique – 1997 – 10’ – Fiction – Couleurs)
Cette nouvelle édition a porté une attention toute particulière aux films de Koen Mortier. Venu présenter son dernier long métrage 22nd of May, il a répondu à nos questions, notamment à propos de ses deux premiers courts métrages, Ana Temnei et A Hard Day’s Work, ainsi que de son passage au long métrage.
Premier film très personnel, Ana Temnei trouve son origine dans un souvenir de son réalisateur, alors étudiant en anatomie. Un jour, un de ses professeurs a emmené un bébé mort pour le découper, dans le cadre d’une recherche, et s’est écrié à la classe : « Le premier qui le touche, je le tue ! »
Film expérimental parfois obscur, Ana Temnei dépeint un univers déshumanisé fait d’images désordonnées. Le réalisateur a cherché, souvent brutalement, à amener son public là où il le souhaitait c’est-à-dire là où ça fait mal. Résultat, on sort de ce film avec un petit goût amer dans la bouche….
Le deuxième court métrage de Mortier, A hard day’s work, est volontairement aux antipodes du premier. Le choix a été fait de laisser plus de place à la narration tout en gardant un ton dur et cynique non sans un traitement humoristique.
Dans une atmosphère proche de Trainspotting de Danny Boyle, un jeune homme de bonne famille entreprend de devenir une petite frappe sans jamais y parvenir. Le film suit les mésaventures de ce pauvre bougre désireux de prendre le contre-pied de l’éducation de ses parents et qui se casse les dents dans son entreprise, mais c’est avant tout un film sur la relation père/fils et sur les désaccords qui peuvent en résulter. Le film se clôt brutalement dans une pièce vide, laissant le spectateur face à ses interrogations. Encore une fois, Mortier surprend.
LE BUNKER DE LA DERNIERE RAFALE (Marc Caro, Jean-Pierre Jeunet – France – 1981 – 26’ – Fiction – Noir et Blanc)
L’Étrange Musique. Ainsi sont joliment labellisés les ciné-concerts organisés durant le festival. L’un d’eux présentait, cette année, le moyen métrage de Marc Caro et de Jean-Pierre Jeunet répondant au doux titre du Bunker de la dernière rafale accompagné d’une nouvelle et inédite version sonore interprétée en live par Mister Caro himself.
Prenant le contre-pied d’une tendance actuelle friande de bidouillages informatiques, il choisit d’utiliser sur scène uniquement une petite table de mixage analogique et différents boîtiers – sans l’aide d’aucun ordinateur. Ce projet original, Marc Caro l’a évoqué dans l’interview qu’il nous a accordés, dans lequel il est également revenu sur son rapport au court métrage.
Pour celles et ceux qui ne le connaîtraient pas, Le Bunker de la dernière rafale s’intéresse à une petite communauté de militaires, enfermés dans un bunker, dont le destin va basculer après la découverte d’un compteur défilant à rebours. Affolé, le groupe va peu à peu sombrer dans la folie…
Trente ans après sa sortie, le film n’a pas pris la moindre ride, la même impression de folie contagieuse confinée dans un lieu clos produit toujours son effet. La nouvelle approche sonore de Marc Caro décuple même cette impression, notamment par l’utilisation quasi exclusive de sons stridents et de basses fréquences, sans pratiquement l’écho de la moindre note de musique. Les options prises par la direction artistique (déco, maquillage, etc…), les thématiques abordées ainsi que l’absence de dialogues assurent au film une authenticité qui le fait échapper au cloisonnement d’une époque ou à un style donné. Le Bunker… est décidément un film bien à part dans le cinéma français.
COLD FISH – Tsumetai nettaigyo (Sono Shion – Japon – 2010 – 2h24 – Fiction – Couleurs)
Last but not least, nous avons choisi de vous parler d’un long métrage qui ne sortira probablement pas en salles (mais dont une sortie DVD est prévue chez Wild Side) pour clore cet aperçu de la foisonnante sélection 2011 de l’Étrange Festival.
Chaque famille a son vilain petit canard. Le label « Sushi Typhoon » n’échappe à la règle. Rendus célèbres auprès des cinéphiles du monde entier avec des films sexy-trash japonais au budget limité comme Machine Girl et Tokyo Gore Police (extrait ci-dessous), les films « Sushi Typhoon » viennent de faire l’objet d’une nuit spéciale à la 17ème édition de l’Étrange Festival.
Contrairement à ses petits camarades de l’écurie « Sushi Typhoon », Sono Shion a choisi d’installer son récit dans un environnement plus réaliste avec son film, Cold Fish.
Shamoto, propriétaire d’un petit magasin de poissons tropicaux souffre en silence. Sa femme ne le désire plus et sa fille le déteste. Celle-ci va être prise en flagrant délit de vol mais au lieu d’appeler la police, le patron propose à Shamoto d’embaucher sa fille…
Rarement, on aura vu un cinéaste japonais déconstruire avec tant d’ardeur la société japonaise et ses dysfonctionnements. Comme chez Miike et Wakamatsu (dont l’excellent Piscine sans eau était également présenté), la transgression des interdits sociaux – et surtout moraux – est au centre du film. Le personnage de Shamoto est notamment poussé dans ses derniers retranchements jusqu’à finalement afficher ses véritables motivations.
Un mot sur le casting et la direction d’acteur, particulièrement remarquables. Denden (qui joue le patron peu scrupuleux) y est pour beaucoup. Déjà vu dans Cure de Kiyoshi Kurosawa et Eureka de Shinji Aoyama, il catalyse par sa seule présence, toute la frustration de Shamoto.
Synopsis : Un équipage militaire, cloîtré dans un bunker à une époque indéterminée, vit dans une ambiance de tension perpétuelle et de démence, aux aguets d’un ennemi supposé et invisible.
Genre : Fiction
Durée : 26’
Pays : France
Année : 1981
Réalisation : Marc Caro, Jean-Pierre Jeunet
Scénario : Gilles Adrien, Marc Caro, Jean-Pierre Jeunet
Son : Marc Caro
Image : Marc Caro, Jean-Pierre Jeunet, Spot
Montage : Marc Caro, Jean-Pierre Jeunet
Interprétation : Jean-Marie De Busscher, Marc Caro, Patrice Succi, Gilles Adrien, Spot, Vincent Ferniot, Thierry Fournier, Zorin, Eric Caro, Jean-Pierre Jeunet, Bruno Richard, Hervé Di Rosa
Début septembre, le Forum des Images accueillait à nouveau l’Etrange Festival pour une dix-septième édition d’œuvres marginales et de mauvaise réputation. Format Court, toujours friand de dénicher de nouvelles perles de haute tenue, a couvert la manifestation pour votre plus grand plaisir.
Pendant une semaine, du 30 septembre au 7 octobre, la capitale de la Wallonie accueillera de nombreux films venant des quatre coins de la Francophonie. Comme chaque année, le court métrage s’y trouve son pied, avec des compétitions nationale et internationale (sous le regard d’un jury chapeauté par Émilie Simon), ainsi que deux sélections hors compétition : « Regards du Présent » et un focus sur le cinéma flamand. Découvrez la programmation !
La 9ème édition du festival « Bobines sociales » aura lieu du 23 au 29 janvier 2012. Le festival Bobines sociales a lieu à Paris et ses environs tous les ans, la dernière semaine du mois de janvier. Cette manifestation est non compétitive, la sélection ne donne lieu à aucune récompense.
Les films (fictions, documentaires, de court ou de long métrage) sont sélectionnés par le collectif du festival notamment pour leur capacité à amorcer un débat sur les questions sociales ou politiques pour être partagées avec le public (luttes et révolutions en cours, travail et écologie politique, énergie nucléaire, etc…)
Il est possible d’envoyer des films jusqu’au 25 octobre 2011 (dernière limite) en envoyant un DVD à l’adresse suivante :
Projetée en compétition au festival Off-Courts de Trouville, Lilith, la réalisation d’Isabelle Noguera parle de ces héritages où la mort caresse l’enfance.
Vous aviez déjà fait d’autres court-métrages avant celui-ci ?
En fait, c’est mon premier court-métrage où il y a eu un tout petit peu de sous. Je dis bien un tout petit peu parce qu’on n’a pas du tout eu les subventions que l’on aurait souhaitées, on l’a fait avec quasiment rien, donc, oui, c’est mon premier court-métrage. Le reste, c’étaient surtout des clips vidéo.
Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de réaliser Lilith ?
Je l’ai écrit à une période de ma vie où j’ai rencontré des personnes qui ressemblent terriblement à Rachel, qui est l’actrice principale, l’héroïne du film. Lilith est vraiment issu d’une histoire réelle. Des personnages m’entouraient à ce moment-là et Lilith est le nom de mon chat qui est aussi le chat du film ! En fait, je n’ai fait que prendre des éléments qui gravitaient autour de moi et j’ai construit une histoire.
J’avais tous ces éléments autour de moi et l’envie d’écrire un scénario mais pendant tout l’été rien ne m’est venu. La page blanche, vraiment. Et puis, un matin, je me suis levée et en quinze jours, j’ai écrit l’histoire de Lilith et me dire : « Ça y est ! J’ai le film ».
Dans la première partie du film, vous optez pour une photographie très travaillée…
Oui, elle a été travaillée, pour que ça donne un grain un petit peu spécial. On a voulu se situer quinze ans plus tôt, dans les années quatre-vingt. On a cherché à travailler le grain, la colorimétrie, c’est pour ça que cette partie-là est vraiment à part. Elle n’a même pas été tournée avec la même caméra. L’image est donc complètement différente.
Quelles indications de jeu avez-vous donné à Ophélia Kolb qui joue Rachel et à Claire Philippe qui joue Lucile ?
Il y a vraiment deux façons de travailler complètement différentes pour l’une et l’autre. Avec Claire, ça a été un peu particulier. On a eu un problème de comédienne cinq jours avant le début du tournage, celle qui devait jouer Lucile nous a quittés. On a dû retrouver quelqu’un en urgence, du coup, on a dû travailler très rapidement parce que le tournage approchait. J’essayais de lui dire de se laisser emporter dans l’histoire en se laissant presque être elle-même. C’est quelqu’un de très doux, de très calme, du coup, je voulais qu’elle garde ça, parce qu’elle allait se retrouver face à quelqu’un qui allait être pratiquement son opposé.
Par contre, pour Ophélia, ça a été un petit peu plus compliqué : j’allais chercher un personnage qui, finalement, n’existe pas, qui n’est pas forcément très naturel, du coup, je lui ai demandé de travailler sur les personnes qui vivent des drames, qui sont psychologiquement très fragiles. Je lui ai vraiment demandé de chercher en elle la fracture qu’il y aurait pu y avoir si elle avait vécu le drame que vit l’héroïne.
Ophélia a vraiment un talent incroyable. Je lui donnais une indication, le coup d’après l’indication était intégrée. On a opéré par petites manettes, ça a été très intéressant de travailler avec elle.
On voit bien les gradations de son jeu, notamment dans la scène du repas où son visage change d’attitude à plusieurs reprises…
Oui. On a fait un gros travail pour cette scène. Je lui ai demandé de prendre le texte et de le découper en séquences pour camper des personnages différents. Dans ce travail, il y a au moins six ou sept femmes différentes : un jeune enfant, un autre âgé de sept ans, une femme cartésienne, une autre complètement déjantée, etc. Toutes les trois-quatre tirades, ça bascule. On la voit prendre des mimiques d’enfant et quelques instant plus tard, elle devient quelqu’un de très carré.
Pour illustrer l’accident de voiture de la mère de Rachel, j’ai beaucoup aimé votre façon de suggérer les choses avec une feuille qui tombe et qui se détache….
Ca, j’en ai bien bavé pour y arriver. J’ai embêté tout le monde. On l’a refait à trois reprises. On l’a fait avec une vraie feuille qui tombe, et ça été très compliqué. Ce n’est pas de l’infographie, hein ! J’aurais bien voulu utiliser l’infographie mais quand on n’a pas les moyens….
Et comment avez-vous eue cette idée de la feuille ?
J’avais envie de marquer l’accident, mais je n’avais pas envie d’en montrer un, je trouvais ça sans intérêt. J’avais envie aussi d’une respiration pour le moment où il y aurait cet accident. Pour essayer de m’approcher de cette mort, j’avais besoin de quelque chose d’à la fois léger et d’esthétique. J’ai mêlé l’idée à l’image, et la voix également puisqu’à ce moment-là, il y a une chanson qui parle réellement de la mort. Elle dit : « Pourquoi le ciel est bleu, et moi, je m’en vais déjà, je n’entends plus mon cœur qui bat… ». L’idée, c’était vraiment de plonger le spectateur dans une réflexion sur le rapprochement avec la mort. Et,maintenant, qu’est-ce qu’on va en faire ?
Depuis Paris, le sifflement de deux heures de train suffit. À la gare de Trouville-Deauville, prendre à droite pour la 12ème édition du festival Off-Courts ( du 2 au 10 septembre 2011). À gauche, à peu près aux mêmes dates, on entre dans la 37ème édition du festival du cinéma américain de Deauville.
À droite, dix minutes à pied suffisent. Dans l’atelier provisoire des mareyeurs, à l’intérieur d’un ancien restaurant, au Salon des Gouverneurs du casino, au Marché international du film court de Trouville s’ouvre un éventail de créations et d’animations. 1100 films reçus, plus de 140 exposés durant le festival, des concerts, une programmation réservée à un public scolaire, des courts québécois et français en compétition, des projections extérieures, des courts réalisés et montés en 48h, donnent un aperçu de la vitalité du festival Off-courts de Trouville établi près des commissures de la mer.
Face à pareille condensation cinématographique, sortir l’appareil à dilution et inviter quelques spécimens.
Land of the heroes (Belgique/Irak) de Sahim Omar Kalifa. Dans la catégorie International PCC (Prends ça court !)
Cela se passe comme ça dans une région désertique de l’Irak : la mort est un jeu à emporter. Aucune obligation à la consommer sur place. Pendant que des images du « Raïs » Saddam Hussein piratent l’antenne du téléviseur et le temps de diffusion des dessins animés, chacun s’affaire. Deux mères astiquent grenades, AK-47 et d’autres armes comme elles feraient la lessive : normal, en l’absence d’eau et d’hommes, il faut bien se rendre utile en exécutant à sec une ou deux tâches ménagères. Un frère et une soeur, eux, faute de dessins animés à la télé, « s’amusent ». On les croit innocents alors qu’ils ont arrêté de l’être. C’est donc qu’ils restent des indicateurs d’un certain optimisme. Par on ne sait quelle stratégie de la redoute ou de Fed Ex, un costume de Spiderman est arrivé là. Mais ses vertus sont paradoxales : celui qui le porte s’empêtre dans la toile d’un de ses cousins. La cohabitation est brutale et humiliante. Presque plus violente que la guerre irako-iranienne (1980-1988) qui favorise redistribution des boites crâniennes et fuite des cerveaux.
Les hommes ont une vie bien remplie. Lorsqu’ils sont à la télé, ils assistent ou prennent part à une parodie de victoire en présence du Raïs; ils participent alors à une victoire du passé : les images que l’on nous en montre appartiennent à cette époque où Saddam Hussein – exécuté en 2006 à Bagdad pour crimes contre l’Humanité- dirigeait l’Irak; autrement, lorsqu’ils sont sur le terrain, les hommes gardent des forts et des lieux aussi stratégiques que leur propre absence.
Plus que l’attitude des enfants, l’ambiguïté des deux femmes attribue une composante menaçante à Land of the heroes. Car leurs gestes sont calmes et appliqués. Elles font des ustensiles de la mort des objets banals, sortes d’aiguilles à tricoter dont on dispose en discutant de choses et d’autres. Il semblerait que, plus que celle des enfants, la violence des femmes effraie davantage Sahim Omar Kalifa car il nous la donne assez peu à voir. Et, lorsqu’il le fait….
O Inferno (Portugal) de Carlos Conceiçao. Dans la catégorie International PCC.
Dans Land of the heroes, même vulnérable, il existe une assez belle complicité entre un frère et sa sœur. L’alliance avec quelqu’un de son âge reste possible. Dans O Inferno, un enfant se retrouve seul, auprès d’adultes qui, un moment, l’excluent. Ce qui aura quelques conséquences.
« Le ciel et l’enfer coexistent dans la même maison où un gars a la fonction de garder la piscine propre, mais finit par s’impliquer dans des activités qui le compromettent ».
Un homme, deux femmes, une piscine dans une villa et un enfant d’à peine douze ans. Le paradis affiché. Une piscine immaculée. Rafa – dont le prépuce exclut formellement toute parenté avec celui d’un fervent adepte de la terre battue bien connu des souffles coupés et de certains services liftés – fait l’amour avec les deux femmes. L’enfant, lui, imagine ce que ces trois adultes font ensemble à huis clos. Tout le monde est beau dans cette constellation.
Rafa, le jeune homme viril latin, sûr de lui, qui donnerait envie de se jeter au fond de la piscine pour des langueurs câlines est donc beau. Les deux femmes, aussi, sont désirables, lèvres, corps et regards modulables. La femme de Rafa d’abord, laquelle est une branche qui se plie à ce raccordement à trois. Ah ! La voir se mettre sur la pointe des pieds quand elle l’embrasse… Et puis, il y a l’autre compagne visiblement mieux disposée. Il y a aussi le Portugais, langue bien plus érotique qu’une mangue au tartre…
Rafa procède à une levée des corps qui réduit ou intensifie notre capacité de connivence avec lui. Mais il y a l’enfant. Celui-ci veut plonger tête la première, du moins voir, ce que ces trois là se mettent. Alors, il appelle Rafa. Peut-être qu’habituellement, Rafa s’amuse avec lui. Comme un garçon plus âgé sert parfois de modèle à un plus jeune. Enfin, il y a le père, le mari, fourbu, cocu, dont on découvrira véritablement ce qu’il est peu à peu.
Dans O Inferno, tout est surface et notre œil nous trompe. C’est lui qui nous tient et nous interdit d’être. Quant à l’enfant, que fait-il payer à Rafa ? De l’avoir seul ? Ou d’avoir été exclu de sa propre initiation à une certaine virilité ? Ou de l’avoir laissé seul ?
Il Capo (Italie) de Yuri Ancarani. Dans la catégorie International PCC.
Paysage d’hommes stricto sensu, ce documentaire se trace dans une carrière à Monte Bettogli Carrara, où le chef « Il Capo » orchestre la découpe du marbre.
Pour quiconque aime voir les films sans rien en savoir au préalable, il faut un peu de temps avant de comprendre Il Capo. Surtout que tout se passe en silence. Si l’on évacue les bruits de la manœuvre. On assiste là à une libération de l’horizon, peut-être de l’inconscient. L’horizon est de marbre. Il ne bouge pas, ne parle pas, immense, permanence du sacré. L’homme, lui, est plus petit et tout aussi muet. Et il est actif : il a besoin de défaire le marbre.
À mains nues, l’homme ne peut rien contre la roche. Mais avec des machines, réincarnation fabriquée, dopée, de certains animaux préhistoriques, il peut s’y attaquer, le capturer. D’autant que le marbre se laisse faire. C’est dans sa nature. Mais le fendre est un métier dangereux. Cela s’oublie dans Il Capo où le marbre se rend fréquentable, hypnotique. Peut-être parce qu’il compte sur ce documentaire pour faire carrière. Ou parce qu’il se souvient que, malgré tout, c’est nous qui finirons en chantier contre lui.
Sudd (Suède) de Erik Rosenlund. Dans la catégorie International PCC.
La fiction se réinjecte dans les fissures du réel grâce à Sudd. Ce film d’animation bénéficie d’une photographie qui a l’aura ou la violence du cocktail Molotov. La solitude et l’intolérance sont une menace pour notre héroïne. Dans une ville déserte et sans enfants, aux alentours des années 60, celle-ci contracte une maladie par le toucher dans un monde où l’on ne se touche pas ou ne se touche plus. Bien sûr, il est ici question de contact social et non d’un nouveau recensement à titre gracieux des infanteries de l’onanisme, car l’on ne se parle pas non plus dans le film d’Erik Rosenlund. Le salut, s’il en est un, est aléatoire et Sudd nous demande ce qui, dans notre monde, justifie encore qu’on le sauve.
L’accordeur (France) d’Olivier Treiner. 13 mn. Dans la catégorie Projection extérieure.
Plutôt que de sauver le monde, le protagoniste principal de L’accordeur, lui, a envisagé de se sauver. Un jeune pianiste voit sa carrière prometteuse disparaître après un concours. Il réapparaît en accordeur réputé mais aveugle.
Ce court métrage remarqué parle d’ambition et de destin. De cette façon que nous avons de masquer les preuves de nos propres faiblesses. Jusqu’à nous berner et aveugler les autres aussi peut-être. L’accordeur aurait pu être une comédie ou une aventure sensuelle. Le réalisateur a choisi d’en faire un film noir.
L’identité factice que s’est créée l’accordeur (l’acteur Grégoire Leprince-Ringuet) est très séduisante. Elle fournit la paix, le succès et l’espoir qu’une autre vie, meilleure, est possible avec un peu de mise en scène.
L’agent (l’acteur Grégory Gadebois qui peut rappeler Chris Penn dans Nos Funérailles de Ferrara) de l’accordeur, lui, s’apparente à une conscience quelque peu bourrine- jalouse aussi- qui pourrait le ramener à plus de modestie.
Après nous avoir endormis et manipulés (rendus complices et voyeurs de la malice de l’accordeur), Olivier Treiner nous réveille. De la même manière que nous n’avions pas vu la chute initiale de l’accordeur – lorsque pianiste prodige celui ci échoue à son concours- il nous empêche de vérifier sa chute finale. Quand le film s’achève, notre imaginaire, enfermé dans l’impuissance du héros, est dressé à l’espoir et l’angoisse. La gloire et le succès sont pour celles et ceux qui continuent de jouer même lorsque la mort est leur unique spectateur.
Lilith d’Isabelle Noguera. Film en compétition.
Rachel, elle, n’a pas demandé à se trouver au chevet de sa destinée. Contrairement à l’accordeur, à l’origine, elle n’avait pas l’ambition d’avoir du pouvoir sur les autres malgré un certain héritage familial.
Rachel et Lucile sont deux copines d’enfance. En désobéissant, elles provoquent la mort de la mère de Rachel dans un accident de la route. Les deux jeunes filles se perdent de vue. Quinze ans plus tard, Rachel reçoit Lucile dans la maison familiale.
Taillé à la pointe du silex, Lilith est un prénom biblique fait pour l’équarrissage. C’est aussi le titre du court-métrage d’Isabelle Noguera. Si le jeu des comédiens et la bande sonore sont empruntés et trop appuyés à certains endroits, Lilith retient pourtant le regard et peut atteindre l’au-delà de l’écran. Grâce à l’histoire d’une innocence et d’une amitié encornées dans le toril de la douleur. Grâce à une poésie obstinée. Ou peut-être aussi parce que Lilith raconte la terrible punition qui suit certaines désobéissances. Lilith est un court métrage surmoïque. Mais aussi un film de femmes plus que d’hommes.
Lilith expose d’abord l’insouciance de Rachel, la présence sécurisante de sa mère, l’attachement aux chats comme à une certaine liberté- certains parleraient d’indépendance- un don intergénérationnel pour la cartomancie, le sens de l’hospitalité. Puis, la meilleure partie de Lilith entre en lice, lorsque 15 ans après l’accident mortel, Rachel – interprétée adulte par Ophélia Kolb- réinvite sa copine d’enfance Lucile- l’actrice Claire Philippe- à la maison.
Ophélia Kolb/Rachel donne du grain à ce court-métrage ainsi qu’à ces duos ou ces trios qu’elle transforme avec ses partenaires. Elle torréfie en elle toutes les forces menaçantes et insolites de l’histoire. Lucile est « jolie de bonheur », plutôt lumineuse et légère. Rachel est le pendule dont les ressorts agissent sur nous tout en nous maintenant dans l’ignorance de l’échéance qui nous échoit. Ses gestes sont préréglés par une civilité aussi mortuaire qu’irréprochable. Depuis la mort de sa mère, Rachel n’a cessé d’obéir. A quoi ? On croit entrevoir plusieurs fois le montant exact du loyer de ses pensées : elle pourrait être une vampire ou une meurtrière mais ses actes évitent le chaos avec la peau et le sang. Elle pourrait choisir le poison mais on sort de table vivant.
Les deux hommes de l’histoire (le copain de Lucile et l « ami » de Rachel) sont des figurants. Le premier, artiste de rue, semble un idéal masculin voué principalement à susciter l’envie ou le désir de Rachel. Le second est à la fois le témoin d’un passé dans un service psychiatrique mais aussi le spectateur d’un présent où Rachel aspire à certaines apparences de bonheur et de normalité. Même si une certaine démence la dénonce, Rachel s’accroche à la vie. Telle une enfant qui a perdu sa mère.
Avant que l’heure refroidisse au passage de l’automne, Trouville nous couve sous le climat de sa 12 ème édition Off-courts faite d’images en provenance de la France, du Québec et d’autres mondes. Il faut des toux pour faire un monde.
Pour ceux qui se sont endormis devant la télé ou qui ont raté l’info, voici le sujet ayant trait à Format Court, réalisé par Court-Circuit et diffusé vendredi dernier sur ARTE.
La 4ème édition du Festival met en avant des réalisatrices confirmées ou débutantes qui livrent des créations exceptionnelles venues des 4 coins du mondes. La programmation est marquée cette année par un focus sur les Pays-Bas et Taïwan.
Liste des courts métrages programmés:
1. 14-40, de Chu Meichun, (Chine)
2. 16th book of Metamorphoses de Sanghee Song, (NL/Corée du Sud)
3. Attention Féministes ! de Rozenn Potin (Québec)
Le Festival poindoc prolonge son appel à films documentaires d’auteur au 29 octobre 2011. Il vous reste donc un peu plus d’un mois pour nous envoyer vos créations selon les deux catégories proposées :
@ Films jamais diffusés (quelle que soit son année de réalisation)
@ Premières créations (réalisées à partir du 1er janvier 2009).
Comme l’année précédente, le Festival pointdoc s’attachera à sélectionner des regards particuliers sur le monde portés par des auteurs qui s’engagent aussi bien sur le fond que sur la forme.
Pour ceux qui ne le connaissent pas, Festival pointdoc est un festival en ligne de films documentaires créé pour ouvrir le cinéma documentaire au plus grand nombre. Il se déroule sur internet pendant 15 jours. 20 films documentaires d’auteurs sont en accès gratuit, visibles à n’importe quelle heure et partout dans le monde.
Cette année, la deuxième édition de Festival pointdoc aura lieu du 15 janvier au 29 janvier 2012.
Pas de prix… mais des coups de cœur, sont attribués à la fois par le public et par un jury de professionnels reconnus du documentaire, composé de réalisateurs, de producteurs et de techniciens.
Les films « coups de cœur » auront la chance d’être diffusés sur grand écran lors de la soirée de clôture, car nous n’oublions pas que la meilleure façon d’apprécier un film est la salle de cinéma !
Chaque semaine, « Court-circuit – Le magazine » présente sur ARTE les tout derniers courts métrages du monde entier et jette un œil en coulisse au travers de portraits, d’interviews, de carnets de tournage, et d’informations sur l’actualité des festivals et des films.
Ce soir, l’émission consacre un sujet à Format Court, dans le cadre de sa série consacrée aux films courts sur le web. Rendez-vous dès 00:30 pour l’accès aux images…
Court-circuit, ARTE
vendredi, 23 septembre 2011 à 00:30 – Pas de rediffusion
(France, 2011, 45mn)
Jan Czarlewski est le grand vainqueur des Léopards de demain : il a reçu le Pardino d’or pour son court documentaire « L’Ambassadeur & moi ». Filmant son père, ambassadeur de Pologne, durant plusieurs jours dans les hauts lieux de la diplomatie, il revient sur les rapports houleux qu’il a entretenus avec lui et le besoin qu’il a éprouvé de se rapprocher de l’homme intime à travers le prisme du cinéma. Rencontre.
Synopsis : Son excellence, l’Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République de Pologne auprès du Royaume de Belgique a consacré toute sa vie à son pays. En contrepartie, il n’a jamais vraiment eu de temps pour moi, son fils. A Bruxelles, je viens passer quelques jours avec lui afin d’essayer de rattraper le temps perdu.
Carmen Jaquier a reçu le Pardino d’argent au dernier festival de Locarno. Jeune réalisatrice suisse, elle nous raconte les destinées de deux sœurs dans « Le tombeau des filles ». Partageant la même chambre, elles découvrent, à leur rythme, ce que recouvre le terme de féminité. A partir de quel moment peut-on s’affirmer femme ? Agnès Varda, à travers des témoignages de la gent féminine, y apportait déjà quelques réponses en 1977…dans un court-métrage, « Réponse de femmes ».
Synopsis : Sissi et Victoria sont soeurs. Tandis que la plus jeune sort doucement du monde de l’enfance, l’autre essaie en vain d’être grande. Dans la chambre qu’elles partagent, Sissi se prépare pour son concours de gymnastique et Victoria fait défiler les garçons.
Genre : Fiction
Durée : 17′
Pays : Suisse
Année : 2011
Réalisation : Carmen Jaquier
Scénario : Carmen Jaquier
Interprétation : Sharon Oberson, Anissa Cadelli
Photographie : Thomas Szczepanski
Musique : Vincent Weber
Son : Björn Cornellius
Montage : Julie Borvon
Production : Écal – École cantonale d’art de Lausanne
Lors du dernier festival de Locarno, nous avons rencontré Alessandro Marcionni. Responsable des Pardi di domani -un programme qui s’intéresse à la découverte de nouveaux talents-, il a choisi de nous parler du court métrage, de sa place au sein du festival, ainsi que du public, toujours plus curieux et avide de découvertes visuelles. Explications.