Les jeux sont faits
Nicolas Provost est un peu une rock star. Pas seulement parce il en a le physique longiligne et les boucles blondes. Comme elles, il est en pleine tournée estivale des festivals. Après Vila do Conde où il a présenté en juillet le kaléidoscopique et aérien « Storyteller » (2010) il rejoindra ces jours-ci les plages du Lido pour la projection de « Stardust » à la Mostra.
« Stardust » est annoncé comme le deuxième volet d’une trilogie commencée avec « Plot Point » (2007) où Provost filmait un New York post 11 septembre parano et quadrillé par les flics. Il reprend ici le même principe de déconstruction des codes hollywoodiens pour l’appliquer à une autre ville hautement cinématographique, Las Vegas, lieu de tous les fantasmes y compris ceux du cinéaste qui se paye le luxe de réunir Jon Voight, Dennis Hopper et Jack Nicholson dans un court métrage. Rien que ça. Tout le monde est pourtant à la même enseigne au générique sous la dénomination « visiteurs et habitants de Las Vegas » car Provost filme avec autant d’intérêt les touristes américains en shorts et en tongs que le visage émacié de Dennis Hopper ou l’éternelle cool attitude de Nicholson.
Comme dans « Plot Point », la ville est sous tension, elle grouille de types louches, de bruits de couloirs, de conversations secrètes. Mais comme Vegas, tout est factice dans « Stardust ». Nicolas Provost joue avec les codes du doublage et fait parler ses « acteurs » en leur octroyant des dialogues récupérés dans des films hollywoodiens. Ils incarnent dès lors des personnages qui les dépassent, dont ils n’ont pas idée. Des flics, des mafieux, des truands. Des doubles doublés. Provost détourne leurs actions pour les rendre cinématographiques et scénarisées.
La technique, déjà testée à New York, se révèle terriblement efficace dans le piège lumineux du désert du Nevada. D’abord parce que le mirage que représente Vegas fait écho à celui d’Hollywood (on pense bien sûr à « Mulholland Drive » de Lynch quand Provost – un grand fan – filme les limousines noires d’où filtrent des conversations étranges), ensuite parce que Vegas attend ses proies dociles et consentantes dans une débauche d’effets spéciaux et racoleurs comme seul le cinéma hollywoodien sait le faire. Provost, toujours à distance, semble filmer sans être vu. Le cinéaste belge sait en effet se faire discret. Pas de preneur de son, une caméra légère, il se fond aisément dans la masse humaine des touristes guidés par le clinquant et le bruit des jetons. Vegas semble être son terrain de jeu, partout où il tourne la tête il se passe quelque chose.
Scénariste, réalisateur, monteur, producteur, Provost semble maîtriser parfaitement tous les aspects de ses projets. On attend avec impatience le troisième volet des ses aventures hollywoodiennes.
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Article associé : l’interview de Nicolas Provost
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